ÉPILOGUE

Zihuatenejo, Mexique, six mois plus tard.

— Dépêche-toi !

— Attends, il me manque un truc bleu et un truc emprunté !

J'ai beau fouiller, je ne trouve pas. Rip s'arrête à mes côtés, fait glisser ses doigts le long de ma taille et d'un geste habile, me retire mon haut en dentelle blanc, qu'il balance à l'autre bout de la pièce. Je grogne en portant instinctivement mes mains à la poitrine :

— Je croyais qu'il fallait qu'on se dépêche ?

Il retire son t-shirt et me l'enfile avant de serrer ses bras autour de ma taille et de me presser contre lui.

— Tu me le rendras.

— Tu en auras besoin cette nuit ?

Et c'est dans un rire commun qu'on sort de la maison.

***

Sur la ville côtière de Zihuatenejo, la fête retente comme des coups de canons. La nuit tombe légèrement et l'astre solaire noie ses derniers rayons pourpre dans l'océan. Des senteurs de toute sorte nous frôlent autant les narines que la chaleur du soir, et c'est un putain de bonheur.

Pourquoi Zihuatenejo ?

À mi-chemin entre le Nevada et le Nouveau-Mexique, moi et Rip avions regardé Shawshank Redemption dans un drive-in... C'était tout simplement époustouflant... Et même si dans le film, ils n'avaient pas vraiment filmé la scène finale à Zihuatenejo, la façon dont on en parlait...

On le voulait. On voulait notre sable blanc et nos eaux turquoise. On voulait le paradis, à l'échelle de notre bonheur.

Alors c'est ce qu'on a fait.

On a troqué la chaleur pour encore plus de chaleur. On a sacrifié le calme et une vie paisible, à une mort certaine et dévouée. On a fui alors qu'on pouvait tout faire pour rester.

On a menti, alors qu'on pouvait dire la vérité.

Et nous voilà, aux confins de ce monde, rescapés des histoires qui ont forgé nos passés.

Et ça nous convient. Une vie secrète dénouée de futur ou de passé. Juste l'instant présent qu'on ne cesse de construire... On se délecte des secondes comme si elles étaient les dernières.

Elles le sont peut-être... Qui sait ?

À tout moment, on s'écroule à nouveau.

Je fais quand même une prière aux oracles pour que ça n'arrive pas ce soir... Non. Ce soir, c'est NOTRE soir.

Accrochée à son dos, mes cuisses fermement entourés de sa taille, je pointe le bout de mon nez vers le ciel nocturne. On dévale les escaliers entre les petites maisons typiques, on fraye notre passage parmi les gens en fête...

Je manque d'en perdre ma couronne de fleurs.

— Ralentis, tu vas me tuer ! Tu as encore besoin de moi, non ?

Je complète ma remarque en lui embrassant le cou et il ricane en me reposant.

— Viens, on va être en retard.

Il me prend doucement par la main et m'entraîne dans une ruelle à l'écart. Si le tunnel est obscur... L'ébauche est absolument magnifique.

Une crique juste au-dessus de la mer. Les lumières de la côte Mexicaine en fête illuminent les vagues qui s'écrasent pacifiquement sur les falaises... C'est juste magnifique.

La main de Rip me lâche seulement pour venir la poser dans le creux de mon dos.

— On est fous, non ?

— Totalement.

J'ai à peine le temps de me retourner vers l'arche de fleurs qui se trouve au bout de la crique, que je perçois deux silhouettes peu méconnues. Je m'écrie à en sursauter sur place et Ronda, habillée d'une robe blanche aussi, ouvre en grand les bras pour m'accueillir.

Quand je lui saute dessus, je la sens vibrer contre moi, tellement son rire est immense. La revoir est un bonheur pur. Une personne comme on en rencontre peu dans la vie.

Alors que ses bras généreux me serrent contre elle, Rip et Elvis, dont les cheveux sont proprement collés en arrière, se saluent plus modestement.

— Je n'aurais jamais cru que vous viendrez !

— Bien sûr que si !

— On ne ratera ça pour rien au monde !

Elvis se tourne vers la crique couverte de fleurs, de pétales blanches et roses s'envolant au rythme de la chaude brise marine.

— Je crois qu'on est plus que prêts, n'est-ce pas ?

Je me tourne vers Rip qui me sourit avec tendresse et je hoche la tête.

Oh oui... Je suis plus que prête.

Je n'ai jamais cru au coup de foudre. Chaque fois que mon frère me voyait dégager la nana de la soirée précédente, il me disait que j'avais un problème. Peut-être bien que oui... Tout ça, parce que j'étais persuadé que l'amour, ça n'existait pas. Je ne croyais pas qu'il y avait quelqu'un d'unique pour moi. Vivant à Vegas, j'ai beaucoup assisté à ces personnes qui ressortaient des chapelles en jurant d'avoir la bonne autour du bras. 

On sait tous comment ça finit.

Alors jamais de la vie... Quand j'ai vu Sam la première fois dans ce petit diner sur la route 66... Jamais j'aurais cru qu'aujourd'hui, elle serait en face de moi, le regard pétillant, mon grand t-shirt bleu qui ne laissait paraître que le voile blanc léger dans son dos. 

Il nous aura fallu cinq jours pour savoir qu'on n'allait plus jamais être pareil. 

La route après le motel a été... parsemée d'émotions différentes. On a laissé la peur derrière nous, les secrets, les mensonges... On s'est mis à être honnêtes envers l'autre et de jour en jour, je n'arrêtais pas de la voir plus belle encore.

La moindre seconde à l'écart d'elle me tue. J'ai besoin d'elle pour vivre, pour respirer, pour ne serait-ce que me réveiller. 

Cinq foutus jours. Soit 432000  secondes, 7200 minutes, 120 heures... Il n'aura fallu que de ça pour qu'elle me hante l'esprit, me brise le cœur et me fait savoir que je n'irais pas plus loin sans elle.

S'il fallait que je renaisse des cendres de ma pauvre Chevy, je n'aurais pas choisi une meilleure personne comme Samuela foutue Perkins pour m'aider à le faire.

Elle me fait vivre l'instant présent avec l'adrénaline d'une chasse en avion tout en restant sur Terre. Et c'est tout ce que j'ai toujours voulu.

Alors ouais... J'ai eu mon coup de foudre. L'amour au premier regard. Ni elle, ni moi, l'exceptions... Et pourtant, aujourd'hui, nous voilà à Zihuatenejo, sur cette sublime crique, en la présence de Ronda et Elvis prêts à nous marier.

Personne ne le saura jamais, mais on s'en fout. C'est tout ce dont on a besoin. 

Je prends doucement ses mains entre les miennes et alors que les pétales roses de l'arche de fleurs en dessous duquel nous sommes, viennent voleter autour de nous dans un arôme floral et iodé, Elvis se met en face de nous. 

Cette fois-ci, je peux jurer que sous son épaisse moustache broussailleuse, il sourit.

Nous sommes ici aujourd'hui, afin d'unir cette femme et cet homme dans l'union sacrée du mariage.

Mariage. Putain.

Les doigts de Sam se resserrent autour des miens et son sourire vient étirer ses lèvres pulpeuses sur des dents éclatantes. Putain, ma future femme est juste éblouissante.

Je ne sais de vous littéralement rien de plus à part que vous êtes fous. Mais je crois que je n'ai jamais vu deux personnes aussi attirées l'un par l'autre. Vous vous complétez et l'amour en est presque palpable... Au point où j'ai fait la route jusqu'au foutu Mexique pour venir vous unir.

Merci, Elvis.

Raille Sam, non sans malice. Elvis ricane avant de poursuivre, ses cheveux pourtant proprement coiffés, s'envolant au gré de la brise marine.

Je pense donc que nous sommes tous aptes à dire que personne ne s'oppose à votre union ?

On se retourne tous vers Ronda derrière nous, qui étouffe une larme dans un petit mouchoir blanc avant de nous faire un geste de la main pour qu'on continue.

Oh, mais ne faites pas attention à moi, bien sûr que je ne m'oppose pas !

Dans ce cas... Les bagues.

La serveuse du diner du Palm Tree Motel se rapproche de nous et dépose dans nos mains nos alliances respectives. Une décharge électrique transperce tous mes organes au moment où je lui enfile la sienne.

Si avant, rien que la simple idée de rester avec une nana plus de vingt-quatre heures, maintenant, c'est complètement différent. J'ai presque envie de couper Elvis dans son speech élogieux pour lui dire de se dépêcher.

J'ai hâte de l'appeler ma femme.

Sam. Acceptes-tu de...

Oui.

Deux secondes, je n'ai même pas pu dire...

Oui aussi.

Elvis souffle, exaspéré et grogne dans sa moustache :

Je suppose qu'on n'a pas le temps pour les vœux non plus ?

Quand Sam se hisse sur la pointe des pieds pour m'embrasser, il se dépêche de finir.

Je vous déclare donc mari et femme, vous pouvez emb... Bon.

Avec une passion plus vivace que l'ouragan Katrina, Sam et moi s'embrassons aux sons des applaudissements de Ronda et les feux d'artifices au loin dans la ville.

Si Shay avait vécu ce moment, je suis sûre qu'elle serait déjà en train de rouspéter à quel point c'est sale. 

Sauf que pour la première fois de ma vie, ce souvenir ne m'attriste pas... Au contraire, même. Plaqué contre les lèvres, je souris. Bordel, comment ne peut-on pas être heureux, après ça ?

Cobalt est derrière moi, ma vie de misère et d'instabilité aussi... Et même si nous n'existons pas aux yeux de la loi, même si nous n'avons littéralement plus que nous deux sur qui compter, tout semble... Parfait.

Je ne choisirais personne d'autre avec qui m'enfuir à l'autre bout de la Terre à part Sam.

Personne d'autre à part ma femme.

***

Bien évidemment, Ronda a rattrapé le bouquet. Et bien évidemment, Elvis a tenté de l'embrasser... Il essayera toujours.

Mais il est l'heure de se dire au-revoir, une bonne fois pour toutes.

Appuyé contre un muret, je regarde Sam poser sa couronne de fleurs sur la tête de Ronda, tandis qu'Elvis est déjà dans son camion. Les bras croisés sur mon torse, je me serre un peu pour ravaler le remord qui me tenaille. J'aimerais pouvoir dire que ça ne me fait rien, mais ce n'est pas le cas.

J'ai perdu les miens, pendant la guerre de Mossoul. J'ai perdu ma famille, j'ai perdu des amis...

J'ai tout fait pour ne plus jamais m'attacher et ne plus devoir supporter l'atroce sentiment des adieux... Mais il faut croire que ça fait juste partie de la vie. Un cercle vicieux commençant par la joie pour se terminer dans l'amertume.

Ronda et Elvis font de grands signes de bras et après quelques minutes, ils disparaissent déjà à l'horizon de la route.

Je mime un adieu du bout des lèvres avant que Sam ne vienne se blottir dans mes bras, posant sa tête sur mon épaule.

C'était incroyable.

Ouais. ça va le devenir encore plus.

Je la prends par la main et la tire à nouveau à la crique où nous nous sommes mariés. Le contact froid que provoque nos deux aliances fait palpiter mon coeur dans ma poitrine tandis que nous quittons les rochers pour rejoindre le sable blanc.

L'eau vient caresser nos chevilles et je redresse mon regard vers la Lune qui prend une majeure place du ciel. C'est tout simplement ravissant. 

Un putain de havre de paix... 

Je comprend mieux Defresne. Il avait raison de vouloir fuir ici.

Je sais que ça n'a rien de facile. Que... Que ça doit être compliqué. D'être loin de ta famille.

Tu es ma famille, maintenant. Non ?

Son sourire me réchauffe et je m'arrête en face d'elle. Je prend son visage entre mes mains et caresse ses joues du bout de mes pouces. Je l'embrasse d'abord tendrement, langoureusement et c'est quand je sens son corps venir se presser contre le miens que je me décroche un peu et lui murmure, mon front sur le sien :

Si je pouvais te redemander en mariage, encore et encore... Je le ferais.

Vas-y. J'ai encore neuf autres doigts. 

Elvis en a déjà eu marre du premier.

Il reviendra pour le second. Ronda l'y obligera.

On rit en choeur et je l'embrasse à nouveau.

Sincèrement... Je n'ai aucun soucis avec cette vie. Tant qu'elle est avec toi... Je m'en fous où je suis.

Sûre ?

Ses doigts viennent presser l'arrière de ma nuque et elle dépose un léger baiser dans le coin de mes lèvres, les effleurant avec tellement de douceur que mon cerveau fait un court circuit.

Sûre. Parce que je t'aime.

Je t'aime encore plus.

Ne commence pas à faire un concours avec moi.

Tu gagneras toujours.

Toujours.

Elle replace l'une de ses mèches blondes derrière l'oreille et nous reprenons notre marche sur la plage privée et dénuée de gens. 

Il n'y a qu'elle, moi, la mer et la Lune.

Et c'est tout ce qu'il nous faut.

Le motel de nos premiers amours et berceau de nos peurs et de nos frustrations est loin derrière nous, à présent... 

Voilà une nouvelle page. Elle est encore vide et dénouée d'encre mais quelque chose me dit qu'avec Blondinette... 

Ça ne tardera pas à arriver.

Je prends une grande inspiration, enroule mon bras autour de ses épaules et la presse du mieux que je peux contre moi. 

J'avais peur des prochaines étapes. Quitte à rester stagné dans les chapitres précédents, sans forcément remarquer que le monde continuait à tourner... Ça m'a coûté cher comme ça a coûté cher aux personnes autour de moi. Et maintenant...

Plus question de refaire les mêmes erreurs.

Jamais plus.

------------------

Hellllllaw !

Voilà, c'est la fin. 😭😭

J'ai trop aimé écrire cette romance qui a été un défi dans plusieurs niveaux pour moi, mais je pense qu'au final, tout s'est bien passé !

J'ai reçu un sublime accueil sur cette histoire, c'est grace a vous, merci vraiment parce que sans ça, j'aurais peut être pas continué...

N'hésitez surtout pas à me dire ce que vous en avez pensé, si vous avez aimé ou pas, y'a pas de soucis 😂

Un autre projet qui me tient à cœur et qui a un peu le même principe de romance que Motel, quoi que le sujet est totalement différent ! Et vu que l'accueil pour cette histoire m'a poussé à continuer et surtout finir l'histoire, j'aimerais que ce soit le cas aussi sur Until Heaven, parce que je suis ultra nerveuse 😳

Alors si ça intéresse quelqu'un, je vous laisse ce petit résumé 🤭💙💙

Le lieutenant Madden Eastley a tué exactement 147 personnes dans sa vie, a couché avec la femme de son meilleur ami, l'a quitté lorsque celui-ci s'est suicidé... en bref : il mérite d'aller en enfer.

Quelque chose qu'il finira très vite par faire, car au retour d'une mission dans la base militaire Orfield, en Alaska, Madden rentre dans un accident de camion, où il perd la vie.

Quand il se réveille, lui, comme tant d'autres, se retrouve dans la longue file d'attente du purgatoire.

Il n'y a rien à faire, il gueule, il hurle, il sait qu'il doit aller en enfer. Mais on ne le laisse pas.

Et puis il rencontre Rhym.

Rhym, elle, s'est suicidée. Elle non plus, n'a pas sa place au paradis. Croyant que la mort allait être son échappatoire, elle se réveille dans le Purgatoire, où elle devra faire face à sa vie qu'elle avait pourtant tant voulu fuir.

Pendant dix jours, Rhym et Mad seront confrontés à toutes leurs erreurs qui font rougir les démons sous eux... Dix jours où ils peuvent encore demander le pardon.

Dix jours où les larmes se versent... Et où leurs cœurs inertes émetteront leurs derniers battements.

En espérant vous y revoir 🤗💙

Et n'hésitez pas à me retrouver sur insta (Eleonora_Stofferis) pour des exclus, des extraits et je previens aussi au cas où je publie une nouvelle histoire !

Un dernier grand merci à tous 💙💙💙

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top