Chapitre 08
- Je m'appelle Wake, fit le garçon.
Après avoir bu toute notre gourde, le jeune garçon c'était lentement remis, il nous raconta qu'il avait voyagé sur une longue durée, tentant d'échapper à des traqueurs et que sous la forte chaleur il s'était écroulé de déshydratation.
Ce garçon avait l'air d'avoir une petite dizaine d'années, il avait les cheveux en batailles et assez long pour un garçon, quelques cicatrices étaient visibles sur son visage rond d'enfant.
- Dis-moi petit, tu as quel âge ? Où sont tes parents ? demandai-je inquiet pour ce pauvre garçon seul.
- J'ai douze ans. Et peu de Miennes ont encore la chance d'avoir des parents, soient ils se sont fait capturés soient ils sont morts soient ils ont disparus.
- C'est pour ça que l'ont évite à tout prix les scientifiques, rajouta Sony comme un reproche caché à mon encontre.
Je vis dans ces yeux tout le mépris et la déception que je ne voulais voir, ce que j'aurais aimé éviter à tous prix. D'un côté je sentais le mépris de Sony et de l'autre la pitié de Neige, je me sentais prisonnier d'émotions qui faisaient craquer lentement mon esprit, je faisais tout pour ne pas me mettre à genoux et supplier cette femme de me pardonner, intérieurement je me mourais d'amour pour elle et elle ne voyait en moi qu'un être abjecte.
- Vous êtes des Miennes aussi ?! s'exclama Wake avec un grand sourire.
- Oui, mais pas ce garçon, lui c'est un humain, il s'appelle Aust, répondit Ashley en s'approchant du loup.
- Quel animal ?
- Louves, nous sommes Ashley et Sony, répondit la grande brune en désignant avec elle sa petite soeur, Et la femme aux cheveux blancs est une souris, Neige.
- Oh c'est vrai ?
Je me tendis, sentant le ton doux qu'avait pris l'enfant, et je vis qu'il s'était imperceptiblement rapproché de l'aînée des Miennes. Dans mes études de sciences j'avais appris que la maturité chez un loup était atteinte à environ dix ans et ce garçon en avait douze.
- Neige ! Il est en train de lui faire du rentre-dedans ! me plaignis-je vers ma seule alliée
Celle-ci se mit à pouffer de rire et je remarquai qu'elle n'était du côté de personne, elle s'amusait juste.
C'est ça les animaux mon beau, ça cherche juste à copuler ! sur cette phrase elle partit rejoindre le groupe autour de l'enfant en me tirant la langue.
Je voyais dans les pupilles de ce gamin qu'il s'amusait énormément et qu'il prenait plaisir à me faire jalouser, car il voyait que je n'étais pas dans mon état normal. Comparé à ces deux louves ce garçonnet était tout à fait habitué au monde humain et connaissait leur moindre émotion.
Sony n'avait pas l'air de remarquer ce jeu, en toute innocence elle était avenante avec son cadet telle une grande soeur protectrice. J'aurais aimé que cette attention soit pour moi, c'était égoïste et je le savais, mais je voulais pouvoir la tenir dans mes bras sans que ça paraisse déplacé ou que je la repousse gêné par ces gestes affectueux. Je ne voulais plus rien lui cacher, même ces regards amoureux que je lui portais je voulais qu'elle en soit consciente, je voulais pouvoir la voir veiller à mes côtés et non pas aux côtés d'un loup attiré par ses pulsions sexuelles. Égoïstement je pensais que j'étais le seul à pouvoir la rendre heureuse et à pouvoir l'aimer comme personne ne l'avait jamais aimée.
Wake nous accompagnait à présent, à mon plus grand dépit. La façon nonchalante par laquelle il se collait aux louves pour ensuite me lancer un sourire mauvais me donnait envie de m'enfuir et de hurler. J'avais toujours aimé les enfants mais lui ne l'était que d'apparence.
Et Sony, elle qui était si méfiante, même à l'égard de Neige elle l'avait été, elle portait sur ce gamin des regards compatissants. Peut-être lui rappelait-elle son enfance lorsqu'elle était seule dans ce monde avec un bébé dans les bras et la lourde peine d'être orpheline.
- Comment t'es-tu fait ces blessures ? demanda la plus jeune des fille interloquée par ces cicatrices.
L'alpha de ma meute m'a attaqué car la femelle qu'il convoitait était proche de moi, nous n'étions que de simples amis mais pour lui je tentais de m'accoupler avec elle... J'ai donc été chassé de ma meute, c'est pour ça que maintenant je voyage seul.
Personne ne répondit, que répondre à ça ? C'était la dure loi de la nature qui se basait simplement sur les rapports de force, elle ne faisait de cadeau à personne.
Nous marchâmes un long moment sous une chaleur torride, nos jambes traînaient plus sur le sol qu'elles ne marchaient. Lorsque nous vîmes la ville nous nous hâtâmes, impatients de pouvoir boire une eau qui nous manquait.
Après s'être sustentés je partis avec mes quatre compagnons acheter des vivres pour le reste du voyage.
- Mais en fait tu payes avec du papier ? demanda une Ashley aux yeux curieux.
Non, en réalité c'est une peu plus compliqué que ça... Tu vois sur ce billet il y a écrit un nombre, et tu le petit truc là ? C'est un hologramme. C'est cette chose alliée avec le nombre qui fait l'argent. S'il n'y avait pas d'hologramme ce serait juste du papier. Et il existe aussi les pièces, celles-ci sont frappés d'un emblème de ta nation et de la somme, là on a le Baron de Mundvill sur la face et sur pile c'est marqué trois tears, expliquai-je en présentant une pièce à la Mienne.
Elle me donna un grand sourire avec un remerciement pour mon explication. Après avoir jeté un rapide coup d'oeil devant la mine triste de Sony nous partîmes vers la gare afin de prendre des billets pour Migty City. Le bruit des trains qui passaient par là les gênaient au point qu'ils se bouchèrent les oreilles. Je haussai les épaules satisfait de voir cette mine déchiré chez le loup mais me reprit en main lorsque je remarquai que c'était le cas pour les filles. Je me dirigeai vers un comptoir où une jeune fille de mon âge arqua ses sourcils surprise de me voir.
- Que puis-je faire pour vous ? me lança-t-elle avec un sourire charmeur.
Je manquai de soupirer en remarquant sa piteuse technique de drague et restai indifférent.
- Des places pour un train en direction de Migty City s'il vous plaît.
- Nous en avons pour ce soir, un train couchette. Êtes-vous seuls ?
- Non, nous sommes quatre.
Elle acquiesça et je lui tendis les tears nécessaires à l'achat de ces places. Une fois les tickets de train en main. Nous sortîmes de la gare et ils sautèrent de joie pour le soulagement de leurs oreilles. Me disant que le train allait être ce soir, je souris en pensant aux frais d'hôtel qui me seront épargnés. Neige rit et prit par les bras Sony et Ashley.
- Bon Aust ! On a envie de se faire une virée entre filles donc on te laisse avec Wake !
- De quoi ?!
- On se rejoint devant la gare à 17 heures puisque le train est une heure après.
Je pris à part le rongeur et baissai la tête pour l'inciter à faire de même.
- Mais qu'est-ce que tu fais bordel ? chuchotai-je.
- Eh bien. . . Je me suis dit que comme Wake en avait après Sony et Ashley vous vous entendriez bien.
- Tu te fous de ma tête ou quoi ?! Je ne m'entendrai jamais avec cette bête sauvage !
Ces yeux me fusillèrent pour me faire comprendre que j'avais dit quelque chose de mal.
- Je te rappelle que Sony aussi est une bête sauvage à la base, éluda Neige avec un triste sourire.
Je baissai la tête, dépité par cette information dont je ne m'étais jamais réellement intéressé.
- Ouais mais elle, ce n'est pas pareil.
- Bien sûr que si, c'est une mienne, Ashley est une Mienne, Wake est une Mienne et je suis une Mienne. Tu es le seul à être différent Aust, souviens-toi qu'au départ tu es un scientifique, je te fais confiance car j'ai vu que tu n'allais pas faire de mal mais ce n'est pas le cas des autres. Tu es un scientifique, en plus d'être un humain, alors tu n'as pas à te sentir supérieur et tu ne dois pas contester mes choix.
Sa voix était rude, j'acquiesçai comme un cadet obéissant. Elle me rappelait ma soeur Katherine dont il ne fallait répliquer les paroles.
La femme me sourit gentiment avant de continuer d'une voix empreinte d'une profonde tristesse :
- Tu sais, les scientifique sont tous horribles avec les Miennes, plus que tu ne le crois. On pourrait juste croire qu'ils nous séquestrent et font des expériences mais il n'y a pas que cela, certaines fois ils violent, ils battent, ils tuent même, juste par une simple impulsion. Toi tu n'as jamais eu l'impression d'être une souris de laboratoire qui pouvait aussi satisfaire les besoins d'hommes sans moralité.
- Les scientifiques ne sont pas tous comme ça . . . !
- Ce n'est pas parce que c'est le cas pour toi que ça l'est pour les autres ! me coupa-t-elle.
Je me tus, attendant patiemment qu'elle reprenne sa tirade, elle prit de longue inspiration et je vis ses lèvres frémir et ses yeux se clore devant certaines horreurs qu'elle devait se remémorer. Je ne pensais pas que ce qui se passait dans les laboratoires pouvaient être aussi horrible pour les miennes. Pour moi, ils respectaient leurs droits tout comme ils le feraient avec un être humain. Mais lorsque je me considérais leur réaction vis-à-vis des scientifiques, on ne pouvait pas les ignorer.
- Que s'est-il passé Neige ? Ils t'ont battue ? questionnai-je curieux de connaître son histoire.
- Bien sûr, toutes les miennes que j'ai un jour connues ont reçu ce sort. Mais j'ai été violée aussi, dans le but d'une expérience. Ces fous étaient curieux de savoir quel résultat donnerait le mélange des gènes d'une Mienne avec ceux d'un humain.
- Tu es tombée enceinte ?
- Oui, je suis tombée enceinte. Et j'ai accouché, mais jamais je n'ai pu voir ne serait-ce que la tête de mon enfant, ni entendre ses pleurs. Je ne sais pas s'il est toujours vivant, ou s'il l'a été un jour. J'ai réussi à m'enfuir de ces laboratoires peu après. Bien sûr je me préoccupais du sort de cet enfant mais je l'ai cherché et cherché je n'ai pas réussi à le trouver. Peut-être est-il lui aussi dans une cellule, ou peut-être a-t-il été tué, et j'ai un faible espoir qu'il soit né humain et qu'il soit à présent dans une famille qui peut l'aimer. Moi je ne peux pas et je ne pense pas que j'aurais pu être une bonne mère . . .
- C'était il y a combien de temps ? demandai-je triste pour ce sort tragique, celui d'une femme violée qui n'a même pas pu connaître le résultat de cette expérience traumatisante.
- Il y a environ deux ans, j'avais ton âge. Tu comprends maintenant pourquoi nous détestons les scientifiques, certes Sony n'a peut-être pas connu aussi horrible mais vivre dans une peur constante est déjà quelque chose d'horrible en soit.
- Je suis désolé, m'excusai-je comme si cela pouvait pardonner les fautes de mes compères.
Elle m'offrit un sourire éclatant d'où je pouvais à présent voir tous les efforts qu'elle y mettait et toute la tristesse qu'elle tentait de dissimuler. Je sentis une aiguille me transpercer le coeur. Cette douleur qu'elle ressentait je ne pouvais pas la comprendre. Je vis dévaler sur sa joue blanche une larme qu'elle devait retenir depuis longtemps, s'ensuivit un torrent intarissable, par compassion je la pris dans mes bras et lui frottai le dos pour tenter de la consoler.
- Aust, ce ne sont que des... Des..., Ils m'ont volée mon bébé... Mon pauvre bébé..., bredouilla-t-elle en pleurant sur mon épaule.
Je ne trouvais rien à répondre à cette peine incommensurable, intérieurement je me promis de retrouver cet enfant avant de me rendre compte que cette résolution était irréalisable, il pouvait se trouver n'importe où dans ce vaste monde, s'il était une Mienne il était certainement dans un laboratoire renommé où des millions de tests étaient effectués, s'il était au contraire né humain il était certainement mort ou dans une famille d'adoption avec un nom inconnu.
- S'il te plait, promets-moi de ne jamais faire ça à Sony, ni à personne d'autre... Promets-moi de ne pas enlever à une mère l'être auquel elle tiens sans même qu'elle l'ait vu !
- Jamais je ne ferais ça ! C'est inhumain ! Neige, tu le sais que je ne ferais pas ça. Ça aurait pu être Katherine ou même n'importe qui...
- S'il te plaît, ne fais pas ça, c'est tout ce que je te demande...
Après être resté l'un dans les bras de l'autre près d'une demi-heure la souris se sépara de moi, je fixai ce visage rouge et gonflé parsemé de larmes asséchée. Égale à elle-même mon aînée m'offrit un sourire et se retourna, faisant face à la sombre forêt bordant la ville.
- Merci pour cette petite discussion ! Bon, je vais aller faire une petite ballade, à plus tard !
Sur ces mots elle se transforma en rongeur et partit entre les arbres inquiétants. Ce ne fut que quelques secondes après son départ que j'entendis un cri strident, je me précipitai vers la forêt avec inquiétude.
Arrivée à l'origine de ce cri je vis avec horreur mon amie étalée au sol avec des trous béant au niveau de son dos qui traversai son corps pour ressortir au niveau de son abdomen. Je me ruai vers Neige en sachant très bien que s'en était finis juste à la vue des blessures.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
- Une chouette..., m'informa-t-elle en me regardant les larmes débordant de ses yeux rouges
Neige se mit à tousser un liquide épais rouge, je la pris dans mes bras comme un dernier soutient avant sa mort. Je m'efforçai de ne pas pleurer, afin de respecter cette femme qui avait souri jusqu'au bout.
Alertés par les bruits, les trois loups arrivèrent paniqués, ils avaient très certainement entendu ce cri grâce à leur ouïe développée. J'entendis derrière moi quelqu'un s'effondrer au sol et la voix de Wake tenter de rassurer cette personne que je devinai être Ashley. Sony s'installa à mes côtés et regarda la Mienne, ses yeux bruns étaient aussi froids que de l'acier mais je pouvais percevoir le choc caché derrière cette façade.
- Elle va s'en sortir, hein ? demanda-t-elle avec une voix qui se voulait sûre d'elle.
Je remuai la tête négativement en commençant à bercer la mourante.
- Ne t'inquiète pas Sony... Ce n'est pas grave, la mort c'est naturel..., dit-elle d'une voix lente et entrecoupée de respiration se faisant de plus en plus difficile.
Plus aucun son ne régnait hormis la voix douce de la jeune femme.
- Dis-moi Aust, tu peux me promettre une chose ?
- Bien sûr, tout ce que tu veux...
- Si un jour tu le trouves, dis-lui que je l'ai aimé même si ce n'était qu'un court instant. Et dis-lui aussi que même s'il ne l'a pas connu et qu'elle non plus, sa maman l'aime, d'accord . . . ? réclama-t-elle en me regardant avec insistance de ses yeux s'éteignant petit à petit.
Pour seule réponse je déposai un léger baiser sur son front et elle me sourit véritablement pour la première fois avant de soupirer. Jamais plus elle ne respirerait, jamais plus elle ne se remémorerait ces cauchemars d'antan, jamais plus elle ne sourirait afin de dissimuler ses peines et ses peurs.
Avec mon aide, Sony creusa un trou à l'aide de ses pattes puissantes de loups, lorsque celui-ci fut assez profond nous y installâmes notre amie. Jamais des scientifiques ne la trouverait dans cette forêt où une mère torturée avait trouvé la mort.
- Je ferais mon possible pour le trouver, je te le promets.
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