Hated Love-TOME 3-Chapitre 8


  Jonas

Bon sang ! J'ai cru que June allait perdre connaissance lorsque j'ai sorti mon flingue. Elle me considère vraiment comme un meurtrier, ce que je suis, à bien y songer. Ses sentiments à mon égard sont évidents : elle me déteste.

Quant à moi, je suis partagé entre deux positions : la curiosité et le ressentiment. Mon côté démoniaque a envie d'asticoter cette fille jusqu'à lui faire traverser une ribambelle d'émotions. Mon côté tendre, lui, veut la connaître. Il la considère comme une distraction qui me sortira de la léthargie dans laquelle je m'étais enfoncé. Je n'aurai alors pas le temps de m'apitoyer sur mon sort. Je devrai être alerte et, surtout, sur mes gardes. Son hostilité à mon égard est manifeste, mais je suis prêt à lui faire front.

Je me demande qui est réellement Blanche-Neige. Est-elle aussi cinglée que le pensent mes potes ou a-t-elle complètement disjoncté en ma présence ? Je sais que j'ai un charme dévastateur, mais je ne pensais pas à ce point.

Plus sérieusement, je n'ai pas oublié le fait qu'elle ait tenté de me supprimer et j'ai bien l'intention de la pousser à bout pour me venger un tout petit peu, ou plutôt, de venger mes chers poissons, qui coulent des jours heureux...dans ma baignoire. Pour l'instant. Je n'ai pas encore eu le temps d'acquérir un nouvel aquarium.

Étrangement, j'en veux plus à June pour ce vandalisme que pour m'avoir donné un coup de boule. Ma lèvre n'est d'ailleurs pas encore tout à fait guérie. Elle est restée enflée pendant deux jours et commence enfin à retrouver une apparence normale.

Nous pénétrons dans mon logement et la demoiselle examine les lieux.

— Tu as ramassé, remarque-t-elle.

— Oui, et si j'avais su que tu viendrais, je t'aurais laissé le faire, lui dis-je sèchement.

Elle semble mal à l'aise et se dandine sur ses jambes.

— Alors ? demanda-t-elle. Vas-tu me détruire ?

Elle fait sans doute référence à mes dernières paroles lors de sa visite précédente,

— Je n'ai pas encore décidé, lui avoué-je honnêtement. Comme tu as déjà visité le salon, je vais te faire faire un tour rapide des lieux, ajouté-je.

Je la conduis vers la cuisine, qui est spacieuse et très lumineuse. Les plans de travail sont en quartz d'un blanc immaculé et les armoires sont toutes constituées de bois massif très clair. L'immense îlot contient l'évier de granite noir et le robinet brillant. Je crois que si j'ai acheté cette maison de ville, c'est parce que j'ai eu un coup de cœur pour cette pièce, bien que je n'aie pas eu le temps de cuisiner depuis mon emménagement puisque je n'ai pas mangé un seul plat consistant. Au club, je ne cuisinais pas beaucoup non plus, mais je m'étais dit que je pourrais faire des essais en habitant seul. Personne ne me reprochera de salir les comptoirs.

— Ici, c'est la cuisine et la salle à manger.

La grande table en bois n'a jamais servi non plus. Je n'ai d'ailleurs pas l'intention de m'y attabler sauf lors de la visite de mes frères. Je préfère m'asseoir au comptoir-lunch pour boire mon café.

Je la conduis ensuite vers l'unique chambre de la maison.

— Ma chambre, lui dis-je en lui désignant la pièce. Malheureusement, il n'y a qu'une seule chambre à coucher à cet étage, alors...

— Je ne partagerai certainement pas le même lit que toi, m'interrompt-elle en croisant ses bras sur sa poitrine.

Je me doutais qu'elle allait me dire cela.

— Ce n'était pas mon intention non plus, rétorqué-je. Je n'ai pas envie que tu tentes à nouveau de me buter, surtout pendant que je dors. J'ai un matelas gonflable quelque part dans un placard. Je vais l'installer à côté de mon lit.

— Je peux dormir sur le divan, suggère-t-elle.

— Non, je ne pourrai pas te surveiller, à moins que tu acceptes que je t'attache pour être sur que tu ne me fausses pas compagnie.

Elle secoue négativement la tête.

— Dans ce cas, je vais préparer le matelas. Tu peux aller te laver en attendant. J'ai une grande douche ou un bain si tu préfères relaxer.

Je ne lui dis pas qu'il est occupé. Elle le découvrira bien en temps et lieux.

— D'accord, me répond-elle. Mais...euh...je n'ai aucun vêtement de rechange.

Je me dirige vers ma commode et pêche un long tee-shirt que je ne mets plus, un caleçon trop petit et une paire de bas blancs.

— Voilà, lui dis-je en lui remettant les vêtements.

— Je ne vais tout de même pas porter ça, s'indigne-t-elle en soulevant mon caleçon noir.

— Il est propre, je t'assure, lui dis-je d'un air narquois. Mais si tu préfères dormir sans rien, c'est à ta guise.

Elle me tourne le dos sans répondre et part s'enfermer dans la salle de bain. Je ne crois pas qu'elle tentera de s'enfuir par la fenêtre puisque celle-ci est au deuxième étage, alors j'entreprends l'installation de sa couche improvisée.

Les minutes passent et j'entends l'eau de la douche s'écouler. Puis, un quart d'heure plus tard, elle s'arrête. J'ai terminé de gonfler le matelas sur lequel je déplie quelques couvertures. J'ai laissé suffisamment d'espace entre mon lit et le sien pour pouvoir facilement circuler. J'ignore combien de temps elle restera, mais je suppose que ça se calculera en semaines. Peut-être même en mois tout dépendant de la vitesse à laquelle se rétablira Dave.

Je retiens un sourire lorsque June apparait dans le cadrage de la porte de la chambre. Elle porte mon long tee-shirt, qui recouvre presqu'entièrement le caleçon qu'elle a enfilé, et les bas blanc qu'elle a chaussés lui arrive aux genoux. Elle est vraiment mignonne accoutrée ainsi, pourtant, je fais mine de ne pas la remarquer.

Ennemie. Ennemie. Ennemie. Attirante. Ennemie. Ennemie.

— Le coup du bain, c'était ingénieux, ronchonne-t-elle en croisant les bras sur sa poitrine.

Je remarque qu'elle n'a pas revêtu de soutien-gorge, sans doute pour être plus à l'aise pour dormir.

— N'est-ce pas ? raillé-je.

— Je suis désolée d'avoir détruit ton aquarium. Je peux te le rembourser, si tu veux.

— Sais-tu combien ça coûte ?

— Euh...non.

— Voilà. Je vais aller prendre ma douche. En passant, s'il te prenais l'envier de sortir, sache que j'ai fait installer un système d'alarme, alors si tu ouvres la porte, il se déclenchera et j'en serai immédiatement averti...ainsi que tout le voisinage

Elle lève les yeux au ciel tandis que je file me doucher. J'en profite pour nourrir mes poissons. Malheureusement, l'un d'eux n'a pas survécu.

June dort lorsque je reviens dans la chambre, ou fait semblant. Je ne sais trop. Elle est allongée sur le matelas déposé au sol et s'est enfouie sous les couvertures. Je ne vois que sa masse de cheveux.

J'éteins les lumières et me couche à mon tour. Cependant, malgré ma fatigue, je suis incapable de fermer l'œil. Trop d'événements se sont passés ces derniers jours. J'ai l'impression que mon cerveau surchauffe.

Je finis toutefois par m'endormir au bout d'un long moment, mais je me réveille en sursaut lorsqu'un courant d'air me fait frissonner. J'avais pourtant fermé la fenêtre avant de me coucher.

Il ne m'en faut pas plus pour comprendre ce qui se passe. J'ouvre un œil et réalise que mon « invitée » n'est plus dans son lit. D'ailleurs, celui-ci est dégarni de tous ses draps. Je me rends compte que mes couvertures ont également disparu. Cette petite sotte n'a pas osé, si ?

Blanche-Neige a créé une liane improvisée avec tous les draps et s'apprête à enjamber la fenêtre. Elle va se rompre le cou si elle se suspend à cette chose. Nous ne sommes pas dans un film !

Je saute hors du lit et elle bondit d'effroi lorsqu'elle réalise que je suis réveillé. Elle se hâte à sortir par la fenêtre, mais je suis plus rapide qu'elle. Je la saisis par le coude tandis qu'elle pousse un hurlement et se débat.

— Qu'est-ce que tu fiches ? lui demandé-je. Tu veux te tuer ?

— Je m'en vais, annonce-t-elle, et tu ne pourras pas m'en empêcher.

— Tu crois ?

Elle essaie de me pousser mais elle n'est pas assez forte. Voyant que je ne bronche pas, elle se jette sur moi, me prenant quelque peu par surprise. Cette fille a d'étranges réactions. Résultat : nous tombons tous les deux sur le matelas, moi sur le dos et elle sur moi. Je crois qu'elle est prise au dépourvu car elle reste immobile, la bouche entrouverte. Nous nous fixons directement dans les yeux, nos visages à quelques centimètres l'un de l'autre. Je pourrais l'embrasser si je levais la tête, mais je ne le fais pas pour la simple et bonne raison que je ne peux avoir de rapprochements avec cette fille qui me déteste. Et qui a essayé de me tuer !

— Laisse-moi partir, m'ordonne-t-elle.

— Ta liane constituée de draps ne tiendra pas, lui assuré-je. Ton poids la déchirera et tu tomberas. Je crois que tu as trop regardé de films, Blanche-Neige.

— Arrête de m'appeler ainsi, me répète-t-elle pour la énième fois en roulant sur le côté. Ce n'est pas parce j'ai la peau claire et les cheveux foncés que je lui ressemble.

Je me redresse et lui réponds :

— J'arrêterai de t'appeler ainsi lorsque tu cesseras de me considérer comme un tueur.

— Mais tu en es un.

J'essai de réfréner la rage qui s'empare de moi. J'aimerais lui prouver que j'ai tué son frère sur le coup du moment et uniquement pour sauver mes amis. Néanmoins, elle ne changera pas d'avis.

Mon visage se ferme et je me rends à la fenêtre, ou je jette les draps tout en bas.

— Hé ! Qu'est-ce que tu fais ? s'écrie-t-elle en s'apercevant que son plan vient d'échouer.

— Sache que dans la vie, il faut savoir assumer ses actes.

— Ah ouais ? réplique-t-elle. Et toi, les as-tu assumés ? Es-tu allé voir la police pour te dénoncer après avoir tué mon frère ? Ou es-tu parti sans te retourner ?

— Cette raclure ne méritait pas que quiconque ne verse une larme pour lui, lui dis-je froidement.

Elle s'approche de moi, puis...me crache dessus. Son glaviot atterrit sur ma joue, que je m'empresse d'essuyer.

— Salaud, éructe-t-elle.

— Garce, rétorqué-je.

Nous nous fixons en chiens de faïence. J'ai l'impression que si elle tenait un flingue en ce moment, elle appuierait sur la détente. La haine transparait dans ses yeux pailletés de cobalt. Elle semble prête à attaquer une seconde fois.

— Si tu permets, je vais me coucher, lui annoncé-je.

Je lui tourne le dos et je me rallonge dans mon lit dépourvu de draps. Elle reste debout devant la fenêtre, déstabilisée par mon comportement. Je suis habitué à désamorcer les bombes. C'est souvent moi qui calme le jeu lorsque mes potes se disputent violemment. Je suis réputé pour ne pas m'emporter facilement. Si c'était le cas, June aurait probablement passé par la fenêtre. Bref, la plupart du temps, je suis quelqu'un de posé et qui a une tête sur les épaules. Si j'étais un « Bad boy », par exemple comme Gabin ou Thor, attirerais-je plus la gent féminine ? Je suis l'ami que toutes les femmes veulent avoir dans leur vie. Malheureusement pour moi, elles ne désirent rien d'autre de ma part. Pourtant, je suis tout de même beau gosse. Du moins, d'après ce que disent mes amantes. Dans ce cas, pourquoi les filles ne veulent-elles pas développer une relation sérieuse ? Je suppose que le problème, c'est moi. Devrais-je être moins gentil ? Me comporter en gros ours mal léché ? Non, parce que ce n'est pas moi. Ma mère m'a appris à être courtois et à respecter le sexe opposé. J'ai eu bien des déboires depuis qu'elle est décédée, mais j'ai toujours appliqué à la lettre ses conseils. Je me suis fait des tas d'amies et d'amantes, mais la seule petite amie que j'ai eu a finalement pris le large après trois ans de fréquentations parce qu'elle disait qu'il manquait quelque chose entre nous. Le petit quelque chose qui alimente la flamme, qui fait palpiter le cœur et qui te fait sentir spécial, comme si tu étais l'unique personne sur Terre aux yeux de l'autre. Et elle avait bien raison.

Perdu dans mes pensées, je ne me suis pas rendu compte que June s'est recouché. Elle s'est endormie et je l'observe. Elle semble si douce et innocente lorsqu'elle abandonne ce masque de défense qu'elle s'oblige à porter en ma présence.

Ses cheveux tombent de part et d'autre de son visage, se déversant comme une cascade moirée. Son visage est détendu, ses longs cils sombres la rendent encore plus attirante et ses lèvres rosées sont entrouvertes.

Elle est vraiment mignonne perdue ainsi dans le monde des songes. Dommage qu'elle devienne une vraie démone lorsqu'elle se réveille. Je souris à cette pensée. Dans d'autres circonstances, ça m'aurait plu....si elle n'avait pas été un danger pour moi et les miens. Elle aurait fait une parfaite Midnight Demons, à bien y penser. Elle conduit une moto, travaille avec l'alcool (c'est le moins qu'on puisse dire) et a le caractère qui va avec. Hélas, Gabin ne lui pardonnera jamais son affront et se méfiera continuellement d'elle. Après tout, elle est devenue notre ennemie et ne semble pas prête à changer de comportement envers nous.

Je finis par sombrer dans le sommeil et me réveille au petit matin. June dort encore. Elle semblait vraiment au bout du rouleau, hier soir. Il est vrai qu'elle est passée par toute une gamme d'émotions : la surprise, la peur, la rage, le désespoir, bref, elle devait être épuisée.

Je me lève et sors de la chambre après avoir enfilé une paire de jeans et un t-shirt. Mes cheveux sont ébouriffés, mais j'ai depuis longtemps abandonné l'idée de les discipliner. Peu importe la façon dont je les coiffe, mes mèches finissent toujours par partir dans tous les sens. J'ai continuellement l'air d'avoir été me promener à moto, les cheveux dans le vent. Ou d'avoir fait du bungee...

Je me dirige vers la cuisine et entreprends de préparer mon petit déjeuner. Je crois que c'est la première fois depuis mon emménagement que je mange quelque chose de consistant le matin. Je prépare mon café, puis m'assois à l'îlot en feuilletant mon journal. Je me comporte vraiment comme un vieux papi, mais je ne sais pas comment occuper mon temps libre autrement. Mes « vacances » prolongées n'aident pas vraiment mon humeur, mais je préfère rester seul que d'entendre mes potes parler de leur famille ou de leur petite amie. Gabin, Thor, Jérôme, Lewis, Gregory...tout le monde est casé, ou presque. Dave et Austin n'ont pas l'air pressés de se trouver une meuf, mais ils sont plus jeunes que moi. Ils ont à peine vingt-cinq ans tandis que je vais bientôt en avoir trente.

Mon omelette et mon pain grillé sont prêts. Je mange en silence en tendant l'oreille afin de m'assurer que ma colocataire n'est pas en train de préparer un mauvais coup. Elle me rejoint une heure plus tard, encore vêtue de mes vêtements, et semble à peine éveillée.

— Il y a du café, si tu en veux, l'informé-je.

Elle grimace et je comprends que ce n'est pas une amatrice de cette boisson. Malheureusement pour elle, je n'ai rien d'autre.

— As-tu faim ? lui demandé-je.

June hoche la tête d'un air timide en tirant sur le tee-shirt qui recouvre à peine ses cuisses.

— Fais comme chez toi, lui dis-je. Il y a du pain dans le frigo. Malheureusement, je n'ai pas été au supermarché récemment.

Genre depuis deux semaines.

Elle saisit deux tranches de pain et les insère dans le grille-pain.

— Il y a du beurre de cacahuètes ou de la gelée de bleuets si tu veux les tartiner.

— Euh...tu n'aurais pas autre chose de plus salé ? me demande-t-elle, mal à l'aise. Comme du creton ?

— Non.

— D'accord. Ce n'est pas grave. Je vais m'arranger.

Mon invitée sort le beurre et s'applique à tartiner son pain grillé J'en oublie même mon journal lorsque je l'aperçois enduire une épaisse couche de matière grasse dessus.

— Tu n'as pas peur de bloquer tes artères ? lui fais-je remarquer.

— De quoi je me mêle ? réplique-t-elle en enfournant un morceau dans sa bouche.

Effectivement, ça ne me regarde pas.

— Je dois acheter un nouvel aquarium, l'informé-je. Nous irons faire quelques courses en début d'après-midi. Si tu veux en profiter pour te procurer quelques fringues, j'imagine que tu ne travailleras pas ainsi.

Elle effectue une petite moue agacée, mais ne répond rien. Bon...son petit déjeuner a l'air plus intéressant que moi. Je jalouse presque sa tranche de pain, qu'elle se met à lécher comme si c'était une glace au chocolat. Bordel ! Fait-elle exprès pour m'agacer ou mange-t-elle toujours ainsi ?

Je la dévisage pendant qu'elle m'ignore royalement. Cette meuf est définitivement un drôle d'oiseau. 

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