Jonas

La nuit est tombée lorsque notre groupe composé de Gabin, Thor, Austin, Gregory et quelques autres bikers, arrive dans la petite ville indiquée par Judicaëlle. Celle-ci accompagne d'ailleurs Thor. Maisie est restée à la maison pour s'occuper des enfants et Dave est au repos complet. Il a dû se faire opérer aux yeux et ses bras ont subi d'importantes brûlures. Il ne peut pas travailler ou conduire pendant plusieurs semaines.

Étonnamment, l'heure tardive n'empêche pas une certaine effervescence dans les rues. Est-ce parce que c'est un samedi soir ?

— C'est beaucoup moins paisible ici que chez nous, remarque Judicaëlle alors que nous garons nos motos devant un gros immeuble à logements.

En effet, cette ville est plus grosse que la nôtre et semble plus animée.

— Bon, alors le plan, c'est d'aller frapper chez elle et après ? demandé-je à Gabin.

Il n'a pas voulu m'informer de ce qu'il a prévu pour notre petite criminelle. Ce n'est pas dans les habitudes des Midnight Demons de menacer les femmes, mais il faut bien avouer qu'elle est allée trop loin et qu'elle mérite une leçon pour nous avoir ainsi provoqués. Je fais confiance au Président de notre club pour le lui faire comprendre, pourtant, au fond de moi, j'aurais préféré me trouver n'importe où, sauf ici, et ne pas être impliqué dans toute cette histoire. Malheureusement, je ne le suis que trop.

— Tu verras, répond Gabin. Crois-moi, elle ne nous nuira plus.

Nous avons fait des recherches sur cette June Evans et nous avons trouvé où elle habite. Thor, Gabin et moi montons donc au quatrième étage et frappons à sa porte. Nous attendons quelques minutes mais...rien.

— Elle est peut-être sortie, suggère Thor.

— On ne va tout de même pas l'attendre ici comme des putains d'idiots, clame Gabin.

— Nous pourrions demander aux voisins s'ils la connaissent, proposé-je.

— Bonne idée.

Nous frappons donc à la porte voisine et un vieil homme nous ouvre. Il nous détaille avec une certaine crainte, comme si nous étions des gangsters. J'avoue qu'avec nos vestes en cuir, nos multiples tatouages et nos barbes mi-longues, nous sommes des hommes atypiques, du moins, ici.

— Bonjour, le salue poliment Gabin. Nous sommes des amis de votre voisine, June Evans. Elle n'est pas chez elle, alors nous nous demandions si vous saviez où elle se trouve.

— June ? Je pensais qu'elle était partie...Par contre, son amie, Alicia, travaille à l'Auberge de la Rivière. Elle le saura probablement.

Nous le remercions, puis allons rejoindre les autres.

— Elle n'est pas là, leur annonce Gabin.

— Qu'est-ce qu'on fait, alors ? questionne Austin.

— Nous allons interroger sa copine, répond le Président du club.

— Vous croyez qu'elle est lesbienne ? demande Gregory.

J'avoue que cette pensée m'a traversé l'esprit durant une fraction de seconde.

— Ce n'est pas parce que deux filles habitent ensemble qu'elles sont nécessairement homosexuelles, lui dit Judicaëlle.

— Et même si c'était le cas, on s'en fiche, ajoute Thor de sa voix grave. On est ici pour lui faire regretter de nous avoir attaqués, par pour savoir si elle est en couple ou pas.

— Mais si elle a un petit ami, il va peut-être essayer de la protéger, dit Austin.

— De toute façon, il ne peut rien contre nous, argue Gabin en pianotant sur son téléphone. L'Auberge est à cinq minutes d'ici. Allons-y.

Le stationnement est rempli lorsque nous arrivons devant la bâtisse. Cette dernière a tout d'une auberge typique, mais une grande annexe y est jointe. Il s'agit probablement de la salle de réception.

Nous garons nos motos, puis pénétrons dans le bâtiment. Son plafond haut le rend encore plus spacieux malgré le grand nombre d'individus présents. Je remarque une immense piste de danse, envahie par des danseurs en bottes de cowboy. Ils se déhanchent sur un air de Shania Twain.

D'autres personnes portant presque tous des chapeaux de cowboy sont assises à des tables ou bien accoudées à un bar au fond de la salle. C'est justement là que se dirige mon regard. Je reconnais aussitôt la barmaid, bien qu'elle soit totalement différente de mon souvenir. La jeune femme a bouclé ses cheveux et les a attachés de façon à dégager son joli visage. Elle est très maquillée, ce qui la vieillit, mais surtout, lui donne un air de femme fatale. Elle ne sourit pas puisqu'elle parait très concentrée et, pour cause, je l'aperçois lancer les bouteilles d'alcool dans les airs en les faisant tournoyer. Elle les rattrape à l'envers et les vide dans des verres à shooter. Puis, elle remet la boisson aux clients. Parfois, un petit sourire étire sa lèvre durant quelques secondes.

— Qu'est-ce que tu regardes ? me demande Thor.

— C'est elle, dis-je seulement en pointant le bar.

Mes potes se retournent tous et Austin lâche un juron.

— Cette meuf est la folle qui t'a attaqué ? demande-t-il. Elle travaille ici ?

Nous observons June jongler avec les verres. Wow ! C'est épatant !

— C'est vrai qu'elle ressemble à Blanche-Neige, remarque Gregory. En plus...ténébreuse.

— D'habitude, elle ne se maquille pas autant, ajouté-je.

— D'habitude ? fait Gabin en haussant un sourcil. Tu l'as seulement vue une fois.

— Je suis certain qu'elle n'est pas ainsi dans la vie de tous les jours.

— Mec, ne te laisse pas duper par son joli petit minois, m'avertit Thor. Nous sommes ici pour lui donner une leçon. Je te rappelle que cette meuf a essayé de te tuer.

— Je sais...

— Alors, arrête de la regarder ainsi. On dirait que tu n'as jamais vu une gonzesse de ta vie.

Je pince les lèvres, car ce n'est pas le moment de chercher des noises à mon pote. Thor peut se comporter comme en enfoiré lorsqu'il le veut. Habituellement, je désamorce la bombe en sortant une bonne blague, mais je n'ai pas la tête à ça ce soir. Je suis nerveux et j'ignore pourquoi.

« Maintenant, j'inviterais tous les danseur à prendre place sur la piste pour notre danse en ligne « The Git up » fait une voix féminine dans un micro.

Une grande blonde, également derrière le bar, s'approche de June et lui montre la piste de danse. La jeune femme secoue la tête, mais l'autre insiste et elle abdique finalement.

Nous la voyons donc se diriger vers la piste de danse. Putain ! Elle porte un short tellement court qu'on voit la rondeur de ses fesses tandis que son haut noué dévoile son ventre plat. Je remarque qu'elle a des bottes de cowboy identiques à celles des autres danseurs.

— Merde ! s'exclame Gregory. Cette fille est vraiment bien foutue.

Je lui jette un regard noir qu'il ne remarque pas et reporte mon attention sur June. Elle se place à côté des autres et ils commencent leur chorégraphie au rythme de la musique. Je fixe la jeune femme d'un œil nouveau. Elle bouge et tourne en suivant les pas du groupe et, pour la première fois depuis que je l'ai rencontrée, elle se montre décontractée. Elle parait calme et a même l'air de s'amuser. Elle ne se trompe pas une seule fois dans ses pas.

À la fin de la chanson, elle applaudit avec les autres, puis quitte la piste de danse et se dirige vers le bar.

— C'est le moment, nous dit Gabin. Nous devons l'intercepter.

Nous hochons la tête et traversons la foule en donnant des coups de coude. Thor n'a pas ce problème puisque tout le monde s'écarte en le voyant.

Gabin s'immobilise et je me demande s'il a changé d'avis. Je suis son regard et me crispe lorsque June serre un homme dans ses bras. Il l'embrasse sur les lèvres et s'attarde un peu trop longtemps.

— Sale connard, s'écrie Gabin en se remettant en mouvement.

Je ne comprends pas immédiatement à qui il s'adresse jusqu'à ce que l'homme qui a embrassé June se retourne. Thor reconnait également l'individu et se précipite à la suite du Président des Midnight Demons. Je reste en retrait, trop stupéfait pour réagir.

— Espèce d'ordure, hurle Gabin en arrivant à la hauteur de l'ancien membre du club.

Il l'empoigne par le cou et le pousse contre le bar, où plusieurs verres en tombent, créant un grand fracas malgré la musique. Quelques individus s'écartent, ne voulant pas se retrouver mêlés à une bagarre.

June écarquille ses yeux de terreur, surprise par le geste agressif de mon pote.

— Nate ! s'écrie-t-elle. Ça va ?

— Nate ? Comme ça, tu as changé de prénom ? Comme c'est arrangeant !

« Nate » est incapable de répondre puisque Gabin est en train de l'étrangler.

— Lâchez-le, espèce de brute, s'écrie June en essayant de repousser Gabin.

Celui-ci ne bronche pas, aussi solide qu'un roc. Il ignore la jeune femme, trop concentré sur son adversaire, et le fixe droit dans les yeux comme s'il essayait de déchiffrer son âme corrompue. Le Président des Midnight Demons peut être drôlement effrayant lorsqu'il s'emporte et la personne qu'il déteste le plus au monde se trouve présentement devant lui, ramenant les fantômes du passé.

— Calmez- vous, s'il vous plait, fait alors la barmaid blonde en s'approchant de nous.

Elle est grande et élancée et porte la même tenue que June. Un homme la suit et nous fixe d'un air désapprobateur.

— Messieurs, je suis James Hood, le propriétaire de cet endroit. Pouvez-vous régler vos différends à l'extérieur avant que je n'appelle la police ?

Il se tourne ensuite vers June.

— Mademoiselle Evans, si je comprends bien, vous connaissez ces hommes, alors sortez également et inutile de revenir terminer votre quart de travail.

— Pardonnez-nous, monsieur, lui répond Gabin. Nous réglerons ce petit problème ailleurs.

Austin, Gregory et lui emmènent de force Nathan à l'extérieur tandis que je m'avance vers June, qui me remarque enfin. La stupeur apparait sur ses traits délicats lorsqu'elle comprend à qui elle a affaire. Elle n'a pas reconnu mes potes, mais moi si.

Je lui adresse un rictus et lui disant :

— Comme on se retrouve, Blanche-Neige !

Avant qu'elle ne puisse s'enfuir, je glisse mon bras autour de sa taille et l'enjoins à me suivre. Elle se crispe, mais elle ne tient apparemment pas à produire un esclandre en public, alors elle se contente de faire ce que je lui demande. Son petit corps contre le mien me rappelle notre première rencontre pour le moins...explosive. Son parfum fruité me chatouille le nez et le contact de ma main sur sa chute de rein me perturbe plus que de raison. Sa peau est douce comme de la soie et sa chaleur contraste avec la fraicheur de la nuit.

Mes potes s'éloignent de la bâtisse afin de trouver un endroit à l'écart du regard des curieux et s'enfoncent entre un bosquet situé près du stationnement de l'auberge. Je les suis, bien que June et moi restions derrière le groupe, éclairé par le halo du gros réverbère. Je la tiens fermement, peut-être un peu trop même, mais je n'ai pas confiance en elle. Elle m'a eu une fois et c'était déjà trop.

— Qu'est-ce que tu fiches ici ? interroge Gabin en tenant toujours aussi fermement Nathan.

Les gars entourent le traître pour ne pas qu'il s'enfuie comme le putain de lâche qu'il est.

— Moi ? fait celui-ci d'un air faussement innocent. Je refais tout simplement ma vie dans cette ville.

— Menteur ! l'accuse Thor. Tu n'as apparemment pas retenu la leçon. Tu te souviens de notre dernière rencontre, non ? Tu hurlais comme une fillette.

Thor et Nathan se sont croisés en prison et j'ai entendu dire que le boxeur lui avait fait regretter d'être né. D'ailleurs, Nathan a changé. Il a raccourci ses cheveux et possède plus de cicatrices qu'avant. La prison, probablement. Ou Thor.

Notre ancien pote frissonne au souvenir des châtiments que lui a infligés le boxeur. Thor a accidentellement commis un homicide quelques années plus tôt, mais nous sommes parvenus, à l'aide d'un très bon avocat, a écourté sa peine. J'ignore qui a aidé Nathan à sortir de prison, mais je suis certain qu'il ne s'est pas assagi. Au contraire, il cherche apparemment à se venger en utilisant Blanche-Neige.

Mon attention se reporte sur la jeune femme et je retiens une grimace en songeant au fait qu'elle fréquente ce connard et que ces deux-là ont probablement planifié mon meurtre ensemble.

— J'ignore pourquoi vous êtes ici, dit Nathan, mais je n'ai rien fait de mal.

— Depuis Maisie, tu veux dire ? rétorque Gabin.

— J'étais sous l'emprise de la drogue.

— Peut-être, mais tu restes tout de même un sale type. Nous savons tous qui tu es, c'est-à-dire une petite merde. Et en plus tu as tué Marius, espèce d'enfoiré.

Ce connard n'a pas changé. Il est le maître des mensonges. C'est un serpent sournois qui joue avec vos points faibles et qui cherche à vous berner.

— Je vois que tu t'es trouvé une nouvelle proie à manipuler, ajoute Gabin en désignant June.

— Je ne vois pas ce que tu veux dire, ment-il effrontément.

Je m'avance vers lui, sortant de l'ombre.

— Et maintenant ? lui lancé-je.

— Jonas ! s'écrie Nathan en m'apercevant. Quelle surprise !

— Tu me croyais six pieds sous terre, n'est-ce pas ?

Gabin reprend la parole.

— Je comprends mieux, maintenant, dit-il. Tu as envoyé ta petite amie faire le boulot à ta place puisque tu es un putain de poltron.

— Je n'ai rien à voir là-dedans, se défend cet enfoiré. C'était sa décision.

Nos regards convergent vers la jeune femme, qui semble avoir perdu sa langue. Son air effaré démontre qu'elle comprend l'ampleur de la situation. Elle sait que les Midnight Demons ont retrouvé sa trace et que c'est mauvais signe pour elle.

— Tu ne lui as donc pas suggéré de nous attaquer ?

— Bien sûr que non. Cette idée vient d'elle, pas vrai beauté ?

June reste muette comme une carpe, mais Gabin compte bien la faire parler. Il se dirige vers elle et elle prend peur, mais avant d'avoir pu déguerpir, Thor la retient par le bras. La jeune femme hurle et essaie de se soustraire de sa poigne, mais il ne la lâche pas. Alors, elle l'attaque, ou plutôt, elle tente de l'attaquer. Son faible coup de poing atteint les abdominaux durs comme de l'acier du boxeur, qui ne bronche point. La jeune femme, elle, grimace de douleur en frottant sa main.

— Ça suffit ! s'exclame Judicaëlle. Vous ne voyez pas que vous l'effrayez ?

— Crois-moi, chérie, cette enflure ne mérite pas ta compassion, dit Thor à son amoureuse.

— Je ne parle pas de lui, mais d'elle, répond Judicaëlle en pointant son ex belle-sœur. Lâche-là. Tu vas lui faire mal.

Il obéit et Blanche-Neige, qui essayait de se dégager de son emprise, tombe sur le sol caillouteux en poussant un cri. La pauvre n'en mène pas large. J'ai presque pitié d'elle. J'essaie de me convaincre qu'elle est une ennemie, mais elle me perturbe plus que de raison.

La jeune femme se relève difficilement et s'écrie :

— Vous n'êtes que de sales brutes. Laissez-nous tranquilles.

— Il y a quelque chose que tu n'as pas compris, ma chère, lui répond un Gabin remonté. On ne s'attaque pas sans conséquence aux Midnight Demons. Demande à ton cher « Nate » ici présent et il te le confirmera. Tu as blessé deux de mes frères et ruiné la réception de mon mariage.

— Vous n'avez aucune preuve que c'est moi, argue-t-elle en se croisant les bras.

— Tu as raison, affirme Gabin. Thor ?

Ce dernier s'approche à nouveau de June, qui écarquille ses yeux de terreur. Le boxeur prend un air redoutable qui pourrait effrayer quiconque ne le connait pas. Il lève les poings comme s'il s'apprêtait à passer à l'attaque, mais je sais qu'il ne la touchera pas. Thor ne s'attaque jamais à plus faible que lui, et encore moins aux femmes. Toutefois, il sait comment apeurer des adversaires. Certains font même dans leurs culottes lorsqu'il prend cette allure dangereuse et inquiétante.

Blanche-Neige pousse un cri d'effroi et lève ses mains devant son visage, certaine que Thor va passer à l'attaque, mais celui-ci se penche sur elle.

— Tu as dix secondes pour avouer, lui glisse-t-il à l'oreille, mais assez fort pour qu'on l'entende, sinon sache que je suis très doué pour briser des doigts. Demande à ton copain.

Terrifiée, June tremble de tous ses membres.

— Un, deux, trois, compte Thor en se penchant encore plus vers elle.

À sept, il saisit son poignet et elle tente de se dégager, en vain. Il est beaucoup plus fort qu'elle.

— Huit, neuf...

Il ne va tout de même pas le faire ? Je connais mon ami depuis longtemps et si Gabin lui demande quelque chose, il s'exécute sans rechigner. Pourtant, en cet instant, j'ai un léger doute. Le Président du club est très énervé et il ne semble pas disposé à faire preuve de compassion. Je lui jette un regard et aucune émotion ne traverse son visage. Il semble dans son monde à lui : un monde où les ténèbres prennent l'ascendant du démon.

Thor saisit lentement le doigt de June, dont les larmes coulent le long de ses joues. Je dois avouer que n'importe qui aurait avoué sa faute bien avant. Elle a du cran ou bien elle est complètement inconsciente.

Elle secoue la tête de gauche à droite.

— Non, souffle-t-elle.

— Ce serait dommage d'abimer une si jolie main, non ? lui lance Gabin. Tu ne pourras plus travailler pendant plusieurs semaines, comme notre pote Dave, qui a reçu des éclats de feux d'artifices qui l'ont brûlé au deuxième degré. Tu mériterais de savoir ce que ça fait d'être privé de ses bras, de ne plus pouvoir exercer le job que l'on aime.

June sanglote. Regrette-t-elle son acte ou a-t-elle plutôt peur ?

Elle se tourne vers Nathan, qui parait imperturbable. Cet enfoiré n'essaie même pas de défendre sa petite amie. Quel lâche !

— Je...je ne voulais pas...blesser quelqu'un, finit-elle par articuler.

— Tu as tenté de tuer mon meilleur pote, l'accuse Gabin.

Elle ne répond rien et croise mon regard. Je lis dans le sien de la peine et des regrets. Elle finit par baisser les yeux, affligée.

— Bon, fait Gabin en poussant un long soupir. On s'en va.

Il se tourne ensuite vers Thor et ils échangent un regard.

Celui-ci hoche la tête et lâche le doigt de June, qui semble soulagée. Personnellement, je le suis. J'ai littéralement retenu mon souffle pendant tout ce temps.

Thor hisse alors Blanche-Neige sur son épaule et elle hurle :

— Lâche-moi, espèce de sauvage.

— June ! s'écrie Nathan, semblant enfin se réveiller. Putain, qu'est-ce que vous faites ?

— Tu devrais être content de t'en tirer à si bon compte, lui répond Gabin. Souviens-toi : chaque fois que tu tenteras de nous attaquer, nous répliquerons toujours comme les démons de la nuit que nous sommes. Ceci est un avertissement.

— Qu'allez-vous lui faire ? demande-t-il en désignant June, qui se débat toujours.

— Ça ne te concerne plus. Oublie-la, ce sera mieux ainsi.

— Connard, lui lance Nathan en lui crachant dessus. J'aurais dû faire saigner davantage ta sal...

Gabin, déjà remonté, réplique d'un coup de poing directement sur la gueule de cette raclure. Le sang éclabousse son visage et son tee-shirt et il s'effondre par terre. Toutefois, mon ami n'en a pas fini avec lui. Il le rue de coups de pieds, hors de lui, et Austin et Gregory doivent s'en mêler avant qu'il ne l'achève. Gabin lui crache alors dessus et lui promets mille tourments si jamais il recroise sa route.

June hurle devant cet acte de violence.

— Au secours ! Aidez-moi ! s'époumone-t-elle.

Thor la descend de son épaule et, avant qu'elle ne puisse réagir, presse son cou. Elle s'évanouit instantanément et il la rattrape avant qu'elle ne heurte le sol.

— Qu'est-ce que tu lui as fait ? m'alarmé-je.

— C'est une technique de point de pression, m'informe-t-il, afin de mettre tes adversaires K.O. Elle reprendra conscience d'ici quelques minutes, le temps qu'on parte d'ici. Il n'aurait pas fallu qu'elle alerte tout le monde.

Je me passe la main dans le visage, déconcerté. Cette soirée est vraiment merdique. Je n'aurais jamais dû mettre mes potes au courant de cette tentative de meurtre. Ils exagèrent. Et en plus, ils savent très bien que Nathan l'a influencée.

Je me tourne vers Gabin.

— Qu'est-ce que tu fous ? lui lancé-je. On ne peut tout de même pas l'enlever ! C'était ça, ton plan initial ?

— Absolument pas. Je voulais seulement l'humilier afin qu'elle regrette de nous avoir défiés, mais j'ai changé d'idée.

— Qu'est-ce que tu as l'intention de faire ?

— Jonas, si elle reste ici, Nathan trouvera un moyen de la convaincre de se venger à nouveau et, cette fois-ci, elle ne te ratera pas, mec. Nous devons l'éloigner de lui et, en même temps, nous pourrons la surveiller.

— Donc, tu appliques le vieux dicton « Garde tes amis près de toi et tes ennemis encore plus près. »

— Exactement.

— Et comment allons-nous la ramener chez nous ? questionné-je. Nous sommes venus à moto, je te rappelle.

Gabin m'adresse un sourire narquois.

— Elle montera avec toi, m'indique-t-il.

Je cligne des yeux, stupéfait.

— Elle est inconsciente !

Il sort quelque chose du petit coffre de sa moto et me le lance. Je rattrape les menottes dans les airs.

— Mec, tu commences à m'inquiéter, lui dis-je sérieusement. Pourquoi trimballes-tu ça avec toi ?

— Elles ne sont pas à moi, mais à Maisie, répond-il. Elle aime que nous...euh...tu comprends.

— Ok, ne poursuis pas, dis-je en grimaçant.

— Tu ne lui feras pas mal. Elles sont recouvertes de fausse fourrure.

Vivement la fin de cette soirée ! C'est un vrai cauchemar.

— Tu n'as jamais menotté tes amantes ? me demande Gabin.

— Oui, mais elles étaient consentantes et, surtout, conscientes, soupiré-je, excédé par son commentaire.

— Tu entoures ses bras autour de ta taille et lui passe les menottes, comme cela elle ne tombera pas de ta moto, dit Gregory, amusé par ma réaction.

Je grogne de mécontentement, mais nous n'avons pas le choix. J'espère seulement que Gabin sait ce qu'il fait. Nous n'avons pas pour habitude de kidnapper les gens.

— Fais-moi confiance, Jonas, me dit mon pote. Elle doit partir d'ici. Je ne l'aime pas, mais je lui sauve littéralement la vie. Nathan est une tique qui va tout tenter pour parvenir à ses fins. Il la détruira.

— Dans ce cas, pourquoi veux-tu la sauver ? lui demandé-je.

— Ce n'est pas par bonté d'âme, crois-moi. J'ai une idée afin qu'elle nous rembourse les dommages qu'elle a causés.

Je souffle d'agacement même s'il a probablement raison, puis monte sur ma moto. Mes amis y installent June et je l'attache à moi.

— Dénoue sa chemise pour qu'elle ne prenne pas froid, dis-je à Austin.

Il s'exécute et le tissu tombe sagement sur ses hanches. Au moins, elle est plus couverte. La nuit n'est pas bien froide, mais se balader le ventre à l'air n'est pas recommandé.

Eh merde ! Je vais devoir endurer le supplice de sentir son corps divin contre le mien durant tout le voyage. Sa tête repose sur mon épaule et sa poitrine, d'assez bon gabarit, est appuyée contre mon dos.

Je sens que la ballade va être longue...

Et lorsqu'elle reprendra conscience, elle voudra m'assassiner...encore.