Hated Love-TOME 3- Chapitre 21


June

Je m'aperçois tout de suite que quelque chose cloche lorsque j'entre dans la chambre. Jonas est assis sur son lit, les bras croisés, et me fixe sévèrement.

— Qu'est-ce qu'il y a ? questionné-je d'une voix mal assurée.

— Ce qu'il y a ? répète-t-il. À toi de me le dire, June.

Ce doit être hyper important puisqu'il m'appelle par mon vrai prénom.

— Je déteste les devinettes, lui lancé-je sèchement.

— Et moi, les cachotteries.

Mon cœur s'accélère brusquement lorsque j'aperçois plusieurs billets dans ses mains.

— J'ai trouvé ta cachette, ajoute Jonas. Tu me dois des explications.

Deux choix s'offrent à moi : fuir ou tout lui raconter. Jonas me regarde avec une intensité qui me fait peur et j'ignore jusqu'où il peut aller pour me faire avouer, alors je préfère me retirer le temps qu'il se calme. Malheureusement, il ne l'entend pas de cette façon.

Alors que je recule de deux pas, il s'approche comme un fauve vers sa proie. Je n'ai même pas le temps de cligner des yeux qu'il est déjà sur moi. Ce type a des réflexes de malade. Je me retrouve plaquée contre la commode. Ça me rappelle étrangement une autre scène de ce genre. Je me crispe, pas habituée à ce qu'on envahisse ainsi ma bulle. Son délicieux parfum me chatouille le nez et me procure de drôles de frisons. Je crois que je deviens dingue, ma parole ! Jonas est sur le point de me m'étriper et moi, je ne pense qu'à le humer. Peut-être que mon état psychologique est pire que je ne le croyais. Ou que cela résulte du fait d'habiter avec un bel homme attirant.

— Récapitulons, dit-il d'une voix tranchante. Après avoir essayé de m'assassiner, avoir détruit mon aquarium et avoir causé de lourds dommages à la brasserie, nous t'engageons afin que tu rembourses ces préjudices. Je t'offre l'hébergement, je te défends auprès des miens et, surtout, je te fais confiance, et toi, tu détruis tout en moins de deux semaines. Alors je ne me répèterai pas, June. Pourquoi as-tu volé cet argent ?

Je retiens mon souffle depuis que le biker s'est penché vers moi. Ses lèvres sont à un centimètre des miennes et ses yeux sont plantés dans les miens. Je ne peux plus me défiler.

— Parle ! crie-t-il, me faisant sursauter.

Le Jonas imperturbable que j'ai rencontré n'est plus. Ici, j'ai affaire à un démon de minuit, certes très attirant, mais dangereux.

Les minutes s'égrènent sans qu'un son ne parvienne à franchir mes lèvres. Me croirait-il si je lui racontais que des types à qui mon frère doit de l'argent me menacent ou penserait-il que je mens pour sauver mes miches ?

Jonas pousse un long soupir.

— J'étais prêt à t'aider, souffle-t-il, mais Gabin avait raison : je vivais au pays des Calinours. Je croyais que tu étais différente de ton frère, mais j'avais tort. Tu ne recherches que l'appât du gain, comme lui.

Ses paroles me font mal. Je ne suis pas une fille matérialiste. Pourtant, le fait qu'il me considère comme tel me fait mal.

— Tu ne peux rien pour moi, rétorqué-je en le repoussant. Si je ne leur remets pas cet argent, ils vont me...

Je n'ose pas prononcer ces mots, mais Jonas n'est pas stupide. Il devine la fin de ma phrase.

— De qui tu parles ? questionne-t-il en fronçant les sourcils.

— Je...je ne voulais pas trahir ta confiance, lui dis-je, mais c'est une question de vie ou de mort.

— Vas-tu finir par m'expliquer ? fait-il, énervé.

— Dominique avait de grosses dettes et, si je ne rembourse pas à sa place, je vais finir dans une tombe.

Un silence me répond.

— Étais-tu dans son gang ? me demande-t-il enfin. Si oui, je dois le savoir.

— Quoi ? Non, je ne savais même pas ce que Dominique tramait. Je vivais ma vie paisiblement jusqu'à il y a quelques mois. Demande à Alicia, si tu ne me crois pas. Ma vie se résumait à travail et danse.

— Seulement ça ?

— Oui.

— Et tu sortais avec Nathan, insiste-t-il. T'est-il venu à l'idée qu'il aurait pu être mêlé à tout ça ?

— Non.

— Tu es trop naïve.

C'est moi qui commence à être énervée.

— Je n'ai rien à voir dans tout cela. L'autre jour, lorsqu'on était à la quincaillerie, un homme m'a acculée dans un coin et ma menacée. Si je ne rembourse pas les dettes de mon frère, je suis morte.

— Tu n'as rien à craindre tant que tu restes parmi nous, m'assure Jonas.

— Et lorsque je partirai ? Ils vont finir par me chopper.

— Alors, reste.

Je reste bouche bée. Jonas tiendrait-il suffisamment à moi pour vouloir que je reste ? J'en doute, mais un infime espoir germe en moi. J'essaie de m'imaginer vivre avec lui à long terme comme...un couple. L'idée fait sa route, mais semble trop invraisemblable.

— Ils n'oseront pas venir te chercher ici, ajoute le biker.

— Tu n'en sais rien, répliqué-je. Tu ignores ce qu'un homme pourrait faire pour l'argent.

— Au contraire, j'ai une très bonne idée.

Son regard s'égare durant une fraction de seconde et je me rends compte qu'il n'est pas né de la dernière pluie.

— Ce que tu ne comprends pas, June, c'est qu'à l'instant où tu as commencé à travailler pour nous, tu es entrée dans la famille. Les Midnight Demons te protègeront.

Je laisse échapper un petit rire amer. Pour qui me prend-il ? Une sotte ?

— Ouais, j'ai vu ça, raillé-je. Gabin qui me considère comme une psychopathe et qui éloigne son bébé de moi, Lewis qui joue à la coiffeuse, Thor qui me prend pour un punching bag. J'ai tellement l'impression d'être de la « famille ».

— Tu dois faire tes preuves et ce n'est certainement pas en nous volant que tu le feras.

— Je n'ai pas besoin de ton aide, argué-je. Je me débrouillerai seule pour rembourser ces malfrats même si je dois travailler jours et nuits pour gagner dix milles dollars.

Il écarquille les yeux, ne s'attendant probablement pas à une telle somme.

— Je peux demander à Gabin si...

— Ne te donne pas cette peine, le coupé-je. Il ne bougera pas un seul petit doigt pour moi.

Je m'écarte de lui, bien que je sente une drôle d'attraction entre nous, comme si ma personne était attirée par la sienne, bien que ce soit une pensée complètement stupide. Néanmoins, mon corps ne le considère plus comme un ennemi. Mon cerveau, lui, persiste à garder ses distances et c'est lui qui décide de s'éloigner.

— Je dois lui expliquer la situation, insiste Jonas.

— Il voudra certainement m'arracher la tête lorsqu'il découvrira ce que j'ai fait, dis-je d'un ton acerbe.

— Il comprendra...

— Comme toi tout à l'heure ? Tu m'as accusée...

Ses paroles me sont restées à travers la gorge. Je n'ai pas digéré son allusion puérile.

— Je ne connaissais pas la vérité, s'explique l'homme.

Je secoue la tête et tourne les talons en lançant :

— Je vois que la confiance règne.

— Je te renvoie la balle, rétorque-t-il. Si tu me faisais confiance, tu m'aurais parlé de ton problème, mais tu sembles vouloir mener cette bataille seule. Je te souhaite bon courage, alors.

Amen

Je vais me débrouiller seule et, même si je viens de perdre les mille cinq cents dollars que j'avais amassés, j'ai une autre idée en tête. Une idée qui me dégoûte, mais qui me permettra de gagner une grosse somme en un court moment...et qui n'est certainement pas la loterie.

...

Je prends une longue inspiration en observant la façade illuminée du bar « The Gates of Hell ». J'ai rencontré une jeune femme lors de la soirée sur la terrasse et elle m'a raconté qu'elle bossait ici. Certes, j'aurais pu poser ma candidature comme serveuse, mais le salaire n'équivaut pas à celui d'une danseuse. Plusieurs centaines de dollars en quelques heures m'ont paru rapidement gagnés comparés à mon travail de mixologue. Je n'ai qu'à me déhancher un peu, enlever quelques morceaux de vêtements et le tour sera joué.

Le videur me regarde en haussant les sourcils lorsque je passe devant lui. J'ai dû lui expliquer que je venais pour un job afin qu'il me laisse entrer. Je conçois immédiatement que mon style ne s'agence vraiment pas avec les lieux. C'est chic, luxueux et raffiné. Beaucoup de surfaces chatoient, comme le plafond noir et plusieurs miroirs derrières les poteaux sur la scène.

Je suis nerveuse. Je n'ai confié mon plan à personne tant j'en ai honte. Jonas se trouve actuellement à une réunion de bikers. J'ignore ce qu'ils y font, mais je m'en moque puisque j'ai pu me soustraire de son attention. Mon colocataire a repris le travail et a recommencé à pratiquer la boxe, ce qui me donnera suffisamment de temps pour travailler dans ce bar. Personne ne me connaît, ici, alors je passerai incognito. Et, surtout, je gagnerai assez de pognon pour rembourser les dettes de mon frère.

Je demande à rencontrer le propriétaire du bar. Ce dernier arrive quelques instants plus tard et me reluque avec curiosité. C'est un homme d'une quarantaine d'années très costaud qui porte les cheveux courts et une longue barbe foncée. Ses sourcils fournis lui confèrent un air sévère qui me rappelle un certain président du club des Midnight Demons.

— Je suis Ray, se présente-t-il. Que puis-je faire pour toi ?

— Je chercher un emploi. Sasha m'a conseillé de venir vous parler.

— Je vois...

Il me fait signe de le suivre et nous montons d'un étage. Il ouvre la première porte à gauche et je le suis avec une grande nervosité. Je ne connais pas ce type et m'enfermer avec lui dans une pièce inconnue met mes nerfs en pelote.

L'homme me fait signe de m'asseoir sur une chaise devant un bureau et il prend place de l'autre côté.

— Sais-tu danser ? me demande-t-il.

— Oui, je danse de temps en temps.

Je fais référence, bien sûr, à la danse en ligne. J'espère que ça compte.

— Bien, répond l'homme. Ce n'est pas inclus dans le contrat, mais il va de soi que tes tâches iront plus loin que seulement la danse.

— Euh...je ne comprends pas, dis-je incertaine.

— Il y a beaucoup de bikers dans ce bar. Certains y travaillent, d'autre viennent se changer les idées. Les danseuses en profitent pour leur faire plaisir.

Par leur faire plaisir, veut-il insinuer ce que je pense ?

— Ce qui veut dire...commencé-je.

— Qu'il y a des petites salles derrière la scène pour avoir plus d'intimité. Certaines brebis ne se gênent pas pour le faire en public, mais la plupart préfèrent faire ça en privé.

Je déglutis et me mets à trembler. Sasha ne m'a pas parlé de ça. Je croyais que je n'aurais qu'à me déshabiller et à remuer mon popotin.

— Ne pourrais-je pas uniquement danser ? lui proposé-je. Je ne suis pas très à l'aise avec les hommes.

L'homme me fixe.

— D'où sors-tu ? me demande-t-il finalement.

— Euh...je travaille à la brasserie des Midnight Demons. En fait, je remplace Dave en tant que mixologue depuis qu'il a été blessé.

— Tu travailles pour eux ? s'étonne-t-il.

— Oui.

— Je vois. Attends-moi un instant. Je reviens.

Il se lève et me laisse seule dans cette pièce. Je n'aurais peut-être pas dû lui dire que je travaillais à la brasserie. J'espère que ça ne m'empêchera pas d'être embauchée. J'ai vraiment besoin de cet argent.

Il revient quelques minutes plus tard et se rassoit en face de moi.

— Si tu es mixologue, pourquoi ne pas travailler comme barmaid ? me propose-t-il. J'ai justement un poste à combler.

— J'ai besoin d'argent rapidement, insisté-je.

— Donc, tu accepterais les petits plus exigés ?

Je déglutis en hochant la tête. Si c'est pour me sauver la vie, alors j'accepte qu'on me touche. Je fermerai les yeux en m'imaginant avec un potentiel amoureux. Pas que je songe à quelqu'un en particulier...

— D'accord, alors tu me montres ce que tu vaux en effectuant une danse, et si je te trouve douée, je t'embauche. Marché conclus ?

— Oui.

J'essaie de garder un ton de voix neutre, mais le tremblement transparaît.

— Allons en bas et montre-moi ce dont tu es capable, ajoute-t-il en se levant.

Je le suis tandis que nous descendons les escaliers. J'ai enfilé un soutien-gorge en dentelle noir et une culotte assorties sous ma robe, mais rien d'extravagant comme les demoiselles que je croise. À peine sont-elles habillées. Même les serveuses semblent peu vêtues.

Ray me montre la scène d'un signe de tête et je me dirige tranquillement vers elle. Il n'y a pas foule, ce soir, mais bien assez de gens pour rire de moi si je me ridiculise. J'essaie de garder contenance en montant sur la scène. J'attends que la musique débute, ne sachant pas trop quoi faire. J'ai eu la bonne idée d'enfiler mes escarpins et je dénoue en vitesse mes cheveux pour être un peu plus sexy. En cet instant, je regrette de ne pas pouvoir compter sur ma longue tignasse. J'aurais pu me cacher derrière.

Les hommes me reluquent avec une lueur de concupiscence dans le regard. Je sens leurs yeux se promener partout sur mon corps, encore habillé, mais plus pour très longtemps.

La musique débute alors sous un air de Lady Gaga « Poker face ». L'ironie me fait presque rire, car c'est en effet ce visage que je devrai adopter si je veux effectuer ce travail. Je dois abandonner mes airs de petite fille vulnérable et adopter un air de femme fatale.

Je commence par me déhancher autour du poteau d'une démarche aguichante. Mes mains longent ma robe et s'arrête sur la fermeture éclair de mon dos. Je tourne le dos aux spectateurs et entreprends de la descendre tranquillement sous les sifflements de la foule jusqu'à ce que mon dos se dénude, puis mes fesses. J'ai pris soin d'enfiler un string, ne connaissant pas l'issue de la soirée. Issue qui n'ira pas plus loin puisque la musique s'arrête subitement.

Je me tourne vivement, me demandant ce qu'il se passe. Le propriétaire me trouve-t-il nulle au point de m'avoir laissée danser à peine trente secondes ?

Je vois ensuite trois grandes carcasses s'avancer à travers la foule qui me hue, déçue que je n'aie pas poursuivis ma prestation.

Et c'est là que je les reconnais : Gabin, Jonas et Thor. Dire qu'ils sont furieux serait un euphémisme. J'ai l'impression qu'ils vont me tuer d'un simple regard. 

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top