Direct to the heart- TOME 2*-Chapitre 4
Thor
Quelle journée de merde ! Je me demande encore comment cette catastrophe a pu survenir. Le boxer que j'entraîne depuis plusieurs mois a été malade en plein milieu d'un combat. Était-ce le stress ? Probablement. Je me rappelle la honte que j'ai eue lorsque le combat a dû être arrêté. Il a perdu, naturellement.
Découragé, je pousse un long soupir. Tous ces efforts pour absolument rien. Il était au meilleur de sa forme et n'a pas pu faire un round complet avant de se mettre à vomir. Putain de merde !
Étant entraîneur de boxe depuis ma sortie de prison, je mets beaucoup d'énergie dans cette occupation. Les boxeurs travaillent avec acharnement afin de combattre les meilleurs adversaires de la province. J'ai moi-même reconverti un vieil entrepôt en centre de boxe. La plupart des hommes ou femmes qui y viennent veulent s'entraîner à bas prix, la plupart du temps parce qu'ils viennent de milieux défavorisés. Je pêche les plus doués pour les entraîner afin de combattre et de gagner ainsi de l'argent. Eux, pas moi. Je fais cela bénévolement. Je travaille à la brasserie des Midnight Demons, faisant moi-même partie de ce gang de bikers, afin de gagner un peu d'argent de poche. Gabin, un de mes potes, m'engage afin d'assurer la surveillance de la brasserie. Chaque soir, je patrouille autour du terrain afin qu'il n'y ait pas de voleur ou de fouineur qui rôdent autour.
J'étais parti depuis trois jours en région avec quelques boxeurs, mais je reviens plus tôt que prévu après ce fiasco. Personne dans la voiture ne parle. Chacun rumine ces moments de honte tandis que le perdant en question reste silencieux. J'aimerais lui en vouloir, mais le pauvre n'a pas pu contrôler son angoisse. Certains s'évanouissent, d'autres font pipi dans leur culotte. J'ai déjà vu un boxeur se mettre à pleurer comme un môme. Pourtant, jamais je n'aurais cru que quelque chose de ce genre arriverait à l'un de mes protégés. Je vais devoir mieux les préparer, à l'avenir.
Nous arrivons au club de boxe vers neuf heures du matin. Chaque boxeur part chez lui se coucher après une nuit blanche. J'ai moi-même besoin d'un peu de repos. Je déverrouille la vieille porte en acier qui résisterait à n'importe quel assaut, puis ouvre les lumières. L'endroit est désert, ce qui est normal. Toutefois, je compte bien rouvrir le centre demain matin. Après ma sieste, je vais passer à la brasserie quelques heures, puis je reviendrai préparer le club. Je dois trouver d'autres boxeurs. Je ne m'avoue pas vaincu. Je compte bien entraîner les meilleure athlètes de la province. J'en fais mon affaire personnelle. Ayant été un boxeur professionnel quelques années auparavant, je ne peux hélas plus m'inscrire aux compétitions à cause mon dossier criminel. J'ai décidé d'aider les jeunes adultes à parvenir à atteindre leur but et à partager mon expérience. Avant d'être incarcéré, je m'entrainais quarante heures par semaine et j'avais un plan d'entraînement très rigoureux. J'essaie désormais d'appliquer ce même programme à mes boxeurs.
J'entre dans le vestibule et me crispe immédiatement, pressentant un danger. J'entends du bruit dans le vestiaire, ce qui est anormal. Personne n'a la clé, à l'exception de quelques personnes en qui j'ai une confiance absolue.
J'avance tranquillement, sur mes gardes. Quelqu'un aurait-il laissé l'eau de la douche couler par inadvertance ? J'espère que non, sinon cet imbécile va en entendre parler.
Soudain, l'eau s'arrête. Putain ! Il y a vraiment quelqu'un dans la douche. Un sans-abri ? Comment est-il entré ?
J'attends que l'importun se montre, ce qui ne tarde pas. Sauf qu'il est à l'opposé de ce que je m'attendais. Ou plutôt, elle.
Une jeune femme d'une vingtaine d'année s'essuie à l'aide d'une minuscule serviette enroulée autour de sa poitrine. Cette dernière est presqu'entièrement dévoilée, cachant seulement l'essentiel ou, plutôt, le plus intéressant. Le drap de bain est si court que j'aperçois presque son entrecuisse. L'inconnue éponge sa chevelure châtaine aux reflets caramel avec une autre serviette et, lorsqu'elle incline la tête vers l'avant pour absorber l'eau dégouttant de la pointe de ses mèches, j'aperçois le vallon entre ses seins. L'ombre d'un petit tatouage se dessine, mais je ne vois pas bien sa nature. J'aimerais bien savoir ce qu'elle a pu se faire tatouer à cet endroit, moi qui suis un adepte de l'art de la peau. Toutefois, ce n'est pas le moment de faire mon curieux.
Cette meuf est vraiment bien foutue ! Mince, mais pas trop, elle possède une silhouette fort appétissante. Ses jambes fines sont sans défaut, son cou est gracile et son visage...est caché.
J'attends patiemment, les bras croisés, qu'elle daigne relever la tête. J'ai à peine le temps d'apercevoir un petit menton pointu, des lèvres pulpeuses, un nez droit et des yeux marron pourfendus de longs cils noirs qu'elle bondit de stupéfaction, probablement stupéfaite d'avoir de la compagnie.
— Tu te trouves dans les douches pour hommes, dis-je seulement.
En fait, c'est plus un grondement. On me dit souvent que je possède une forte voix qui gronde parfois comme le tonnerre, surtout lorsque je suis en colère. Ma taille imposante et mon visage sévère dissuadent souvent les gens de me provoquer. De plus, les tatouages serpentant mon cou jusqu'à ma nuque me donne un air de dur à cuire, ce que je suis, assurément.
Je dépasse ce petit bout de femme d'au moins deux têtes et elle incline la sienne vers l'arrière afin de me regarder dans les yeux. Son visage passe de la surprise à la crainte. Mes sourcils froncés et mon air contrarié donne le ton à ce futur échange.
— Je...balbutie-t-elle, déstabilisée par mon ton de voix. Je me suis trompée. Je n'étais pas encore tout à fait réveillée.
Quoi ! Elle a dormi ici ?
— Où crois-tu que tu te trouves ? répliqué-je, de très mauvaise humeur. Dans une auberge jeunesse ? Je ne n'héberge pas les sans-logis.
Elle ouvre sa bouche, mais rien n'en sort. Elle me détaille, évaluant probablement mon niveau de dangerosité. Chérie, tu ne devrais pas te frotter à moi, du moins, pas de cette façon. Je gagne toujours mes combats, verbaux ou non.
J'attends sa réponse. Je m'oblige à la fixer droit dans les yeux au lieu de laisser mon regard vagabonder sur son corps presque nu.
— Et moi qui pensais qu'ils exagéraient ton amabilité, ironise-t-elle en croisant ses bras sur sa poitrine.
Je hausse un sourcil. Mademoiselle fait du sarcasme ! Cette meuf ne sait vraiment pas à qui elle a affaire ou on l'aurait avertie de ne pas me narguer.
Cependant, je suis déconcentré quelques instants par ses deux sphères d'apparence ferme qui se compressent, soulignant encore plus ses formes. Ça fait une éternité que je n'ai pas touché le corps d'une femme. La dernière fois, ça s'est soldé par une énorme bagarre et je n'en ai pas un bon souvenir du dénouement. Depuis ce temps, je me tiens loin du sexe opposé. Je les fréquente uniquement dans le contexte du club de boxe et je garde mes distances.
En ce moment, autre chose me passe par la tête, mais je me reprends rapidement.
— Qui t'a parlé de moi ? questionné-je finalement, intrigué. Et comment es-tu entrée ici ? Je pourrais porter plainte pour infraction.
— Pas la peine. Je dois partir, répond-elle en empoignant son sac à dos, déposé par terre. J'ai beaucoup de route et faire et...
— Oh que non ! m'interposé-je en lui bloquant la sortie.
Je veux savoir comment elle s'est retrouvée ici. C'est impossible de pénétrer par les fenêtres à moins de s'appeler Spider Man et la porte est infranchissable.
— Laisse-moi passer, m'ordonne-t-elle. Je ne te le répèterai pas deux fois.
Tiens tiens ! Le petit chaton sort ses griffes. J'aimerais bien qu'elle me saute dessus afin de voir son niveau d'agressivité, ou d'agilité.
L'adrénaline s'empare de moi, comme avant un combat. Sauf que cette joute a quelque chose d'encore plus excitant. Je sais que je vais gagner, mais je veux jouer avec elle. Voir si elle a des réflexes, si elle va fuir ou m'affronter. Va-t-elle se transformer en tigresse ou en petite souris ?
Certains pensent que la prison m'a rendu fou. Au contraire, je sais désormais à quel point votre vie peut basculer en un instant. À ma sortie, j'ai décidé de faire uniquement ce que j'aimais, de laisse mon ancienne vie derrière moi.
Sauf que le passé vous rattrape toujours, où que vous soyez. Il n'y a pas une journée où je ne repense pas à cette fameuse bagarre qui a gâché une partie de ma vie. Je suppose que ces réminiscences ne me quitteront jamais, que je devrai vivre avec elles pour le restant de mes jours. Je l'ai accepté, toutefois, lorsqu'une occasion en or comme celle-ci se présente, j'en profite pour laisser de côté mes frustrations, comme celle de la catastrophe de ce weekend.
La jeune femme recule, puis elle me tourne le dos et cours dans la direction opposée. Va-t-elle se cacher dans une douche ?
Pourtant, elle les dépasse et se dirige vers une porte au fond des vestiaires. Merde ! J'avais oublié la deuxième sortie, qui mène dans la salle de musculation.
Je lui emboîte le pas et la poursuit. Le drap de bain remonte sur ses cuisses alors qu'elle file, pied nus, devant moi
— Arrête ! m'écrié-je, mais elle ne m'écoute évidemment pas. Tu ne vas tout de même pas sortir dans la rue accoutrée ainsi !
Elle ne me répond pas et contourne l'appareil de musculation pour biceps. Puis, elle saute par-dessus un banc plat et évite de justesse une altère.
Elle est plus rapide et plus agile que je ne le pensais. Si elle continue ainsi, elle va s'échapper et se retrouver dehors à-moitié nue. Je pourrais la laisser filer, mais je veux absolument savoir comment elle est entrée dans l'entrepôt (et lui éviter la honte de se retrouver nue dans une ruelle loin d'être sécuritaire).
J'étire le bras et parviens à l'agripper ou, du moins, à agripper sa serviette. Celle-ci glisse et j'ai le temps d'apercevoir dans son dos un arbre de vie tatoué entouré d'une envolée d'oiseaux. L'inconnue rattrape la serviette juste avant que je ne puisse apercevoir plus bas. Cependant, mon regard reste fixé sur sa colonne vertébrale. J'ignorais que cette partie du corps pouvait être aussi sexy. J'y passerais bien mon doigt afin de la voir se courber comme une petite chatte.
— Tu es douée pour la course à obstacle, mais je suis le plus fort, argué-je en gardant ma main accrochée à sa serviette.
— Lâche-moi, espèce de pervers ! crache-t-elle.
— Moi, pervers ? éclaté-je. Si tu ne veux pas que je te mate, alors habille-toi.
Elle considère mes paroles, puis acquiesce finalement.
— D'accord. Tourne-toi.
— Et tu vas essayer de me faire croire que tu es pudique ! m'esclaffé-je. Chérie, tu t'exhibes devant moi depuis tantôt.
Ses joues prennent une jolie couleur écarlate.
— Je ne suis pas ta chérie, s'écrie-t-elle. Et je me croyais seule. Maintenant si tu veux bien te tourner, je vais...
Une voix d'homme l'interrompt.
— Mais qu'est-ce que vous foutez ?
Nous nous retournons tous les deux vers le nouveau venu ou, plutôt, les nouveaux venus. Gabin, Maisie, Dave et Jonas se tiennent à l'entrée du gym et nous fixe avec circonspection. J'avoue que notre position peut laisser sous-entendre de drôles de choses.
Je lâche la serviette de la jeune femme, qui s'empresse de la remettre en place.
— Salut, les mecs, leur dis-je. Je viens d'arriver de voyage et j'ai surpris cette intruse chez moi en train d'utiliser les douches.
— C'est moi qui l'ai laissée entrer, répond Gabin.
— Hein ?
Depuis quand Gabin laisse des intrus pénétrer chez moi et, qui plus est, sans m'avertir ?
— Elle cherchait un endroit où dormir, ajoute Maisie, et tu n'étais pas joignable, alors j'ai pensé à ton club. Tu as des chambres libres et tu n'étais pas là...
— Mais maintenant, j'y suis et vous savez tous que je n'aime pas qu'on envahisse ma vie privée.
C'est vrai que je suis l'unique personne à occuper l'étage supérieure de l'entrepôt. J'ai créé quelques chambres pour les urgences seulement, mais elles n'ont jamais servi pour l'unique et bonne raison que je déteste partager mon espace de vie. Pendant deux ans, j'ai dû vivre dans une minuscule cellule avec d'autres prisonniers, alors je me suis juré que plus jamais personne n'envahirait ma zone de confort.
— Ça va, Judicaëlle ? lui demande Maisie, inquiète. Il ne t'a pas trop effrayée ?
Judy quoi ? Qu'est-ce que c'est que ce prénom ?
— Si ça va ? répète-t-elle d'une voix aigue. Ce type est cinglé ! Il m'a pourchassée dans tout le club alors que j'étais encore toute mouillée et que je n'avais qu'une serviette sur le dos ?
Elle pointe le tissu qui recouvre sa poitrine. Dans sa bouche, le mot « mouillée » prend une toute autre connotation et je m'efforce de me concentrer sur autre chose. Moi, cinglé ? C'est tout de même elle a commencé à courir.
— Tu avais juste à ne pas détaler comme un lapin, réponds-je brusquement. On aurait dit une voleuse et moi, je chasse les voleurs.
Gabin et Maisie soupirent à l'unisson.
— C'était apparemment une mauvaise idée, reconnait Maisie. Je pensais que tu reviendrais plus tard, Thor. Vous n'étiez pas sensés vous croisez. Je sais que tu détestes qu'on envahisse ton espace privée, mais elle avait besoin d'un endroit pour dormir. Je l'aurais bien emmenée chez nous, mais toutes les chambres sont occupées, alors j'ai songé à ici. Je suis désolée.
Impossible d'être en colère contre ce petit bout de femme. Gabin l'a bien choisie. Elle est adorable et pense toujours aux autres. Si j'avais voulu fonder une famille, j'aurais moi aussi aimé avoir une femme comme elle dans ma vie. Cependant, à trente ans passés et avec un lourd bagage derrière moi, j'ai décidé de me concentrer sur autre chose. Après tout, la vie ne se résume pas à faire des gosses !
— Je ne suis pas un hôtel, insisté-je.
— Relaxe, mon vieux, me conseille Jonas. Nous voulions seulement être gentils avec la nouvelle...
— Je n'ai pas changé d'idée, le coupe Judy-quelque-chose. Je pars. Maintenant, si vous voulez bien me laisser m'habiller, je commence à avoir sacrément froid.
Sur ce, elle me lance un regard glacial, puis retourne dans le vestiaire, Maisie sur les talons.
Les mecs et moi restons silencieux pendant un instant, puis nous éclatons de rire.
— De toutes les rencontres les plus étranges dont j'ai entendues parler, celle-ci est de loin la plus comique, rigole Dave.
— Tu parles ! s'exclame Jonas. La meuf à moitié habillée avec Thor qui lui court après. J'aurais bien aimé voir ça.
— Elle est habile, reconnais-je. J'ai failli la laisser filer sous un banc de musculation.
Et nous rions de plus belle. Ces mecs sont ma famille. Je ferais n'importe quoi pour eux. Ils m'ont manqué durant ces deux années de taule. C'est d'ailleurs grâce à eux que j'ai pu en sortir aussi rapidement, même si ces deux ans m'ont semblé en durer dix.
— Pourquoi es-tu revenu plus tôt que prévu ? me demande tout à coup Gabin.
Mon rire cesse immédiatement. Je pousse un long soupir.
— Un de mes boxeurs a été malade en plein combat, réponds-je.
Ils grimacent tous.
— Tu as besoin d'un bon remontant, me dit Jonas. Que dirais-tu d'une petite bière ? Nous n'avons qu'à aller faire un tour à la distillerie. Le magasin est encore fermé à l'heure qu'il est et nous pourrons en profiter pour boier un coup.
J'aurais préféré dormir, mais cette histoire de meuf en serviette m'en a coupé l'envie.
Maisie arrive au même moment en soufflant comme un bœuf. Elle va finir par accoucher si elle continue à se comporter comme une coureuse olympique. Elle ne s'arrête donc jamais ?
— Elle...est...partie...parvient-elle à articuler.
Les gars s'élancent vers la sortie.
— Rattrapons-la, ordonne Gabin. Il faut la convaincre de rester.
Bon...la bière qu'ils m'ont proposée vient de passer aux oubliettes.
Qu'est-ce que cette fille peut avoir de si particulier pour qu'ils veuillent la rattraper ?
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