Addicted to you-TOME 1- Chapitre 12

     Maisie

Bang. Bang. Bang.

J'ai l'impression qu'un marteau-piqueur a élu domicile dans ma tête.

Bang. Bang. Bang.

Et ça recommence.

Mes yeux s'entrouvrent difficilement et je reste pendant un instant éblouie par la lumière du jour. Lorsque ma vision se stabilise, je parviens à me lever. La migraine que j'ai en ce moment me donne le goût de me recoucher.

Je me souviens alors de ma petite excursion de la veille, ou plutôt, de cette nuit. En jetant un regard à mon réveille-matin, je me rends compte qu'il est sept heures passés. Par chance, c'est mon jour de congé.

Habituellement, je suis levée dès l'aube puisque mes enfants font un boucan d'enfer. Ce matin, ce sont des coups répétitifs qui m'alarment, comme si on frappait quelque chose sans relâche. Sont-ils en train de détruire la maison ?

Je me lève aussitôt et me rends compte que je suis encore habillée de mes vêtements de parfaite espionne...qui s'est fait prendre la main dans le sac par un biker qui m'attire autant qu'il me terrorise.

Pas le temps de me changer. Je m'élance vers la source du bruit, dans le sous-sol. Je m'agrippe à la main courante des escaliers pour ne pas tomber puisque la tête me tourne légèrement. Je ne toucherai plus jamais à la boisson...quoique celle que j'aie bue cette nuit était divinement bonne. En tout cas, la prochaine fois, j'arrête de boire après un verre. Avec ma corpulence de fourmi, ça ne m'en prend pas beaucoup pour que l'alcool me monte à la tête. Je l'avais oublié après toutes ces années sans boire.

Lorsque j'arrive au sous-sol, ma mâchoire se décroche face à la scène qui s'offre à moi. Vêtu d'une paire de jeans, d'une chemise de travail et d'un sac à clous qui lui tombe sur les hanches, Gabin est en train de monter un mur en plein milieu de mon sous-sol, avec l'aide de Jonas et d'une apprentie que je dénomme Charlotte. Cette dernière imite les gestes des deux hommes avec son marteau-jouet et son tournevis en plastique. Théo, lui, est dans sa petite chaise en train de manger ses céréales du matin sous la supervision d'Audélie.

- Bonjour, me salue-t-elle en m'apercevant. Mon père m'a dit que tu aurais besoin d'aide avec les enfants, alors je me suis fait un plaisir de l'accompagner puisque je n'ai pas de cours avant quatorze heures.

Je dois avoir l'air d'un poisson avec la bouche ainsi entrouverte, mais je n'arrive pas à comprendre ce qui se passe.

- Que faites-vous ici ? demandé-je aux bikers.

- Marius t'a proposé d'aménager une chambre au sous-sol pour que tu puisses dormir sur tes deux oreilles, me répond Jonas, qui est en train de fabriquer la cloison avec des 2x4.

Je fronce les sourcils en essayant de me remémorer cette conversation. Je me souviens avoir discuté de plusieurs sujets avec les bikers mais, après ma deuxième bière, je ne me rappelle pas de grand-chose. J'ai le vague souvenir que Gabin m'aie raccompagnée chez moi et qu'on ait discuté un peu en chemin, mais c'est pêle-mêle dans ma tête.

- Ah, bien sûr, je réponds en faisant semblant que ça vient de me revenir.

Gabin, qui n'est pas dupe, ricane.

- Ouais, et moi je suis le Père-Noel.

- Quoi ? s'exclame Charlotte d'un air ahuri.

- C'est juste une expression, je me dépêche de lui expliquer en jetant un regard noir à l'homme qui bousille ma vie.

Mon explication semble la satisfaire car elle reprend son travail.

- Alors, tu te souviens certainement du marché que tu as passé avec nous, raille Gabin.

Devant mon manque de réaction, il secoue la tête comme si je le décevais.

- Les meufs et l'alcool, rigole Jonas.

- Nous réalisons une chambre à coucher afin que tu puisses avoir la paix et, en échange, tu gardes le silence sur nos activités...clandestines.

Ça alors ! J'ai fait un pacte avec ces démons. Les Demons of Hell.

Je suis certaine qu'ils ont fait exprès pour me faire boire afin de conclure ce grotesque marché avec moi. Je suis une citoyenne honnête. Jamais je n'aurais accepté cette...entente en temps normal.

Des brides de souvenirs me reviennent. Je me rappelle d'une phrase me promettant de me le faire regretter si je venais à raconter ce que j'ai vu.

Je me masse les tempes et le découragement s'abat sur moi.

- Les lendemains de veille sont toujours difficiles, m'agace Jonas.

Je suis incapable de l'envoyer balader, lui et son air espiègle. Contrairement à Gabin, il a toujours été sympathique avec moi. Il n'est pas le genre d'homme que je fréquenterais, mais plutôt celui avec qui j'irais boire un café.

Parlant de café, je crois que ça va m'en prendre un.

- Voulez-vous un café ? je propose aux travailleurs.

- Volontiers, répond Jonas en souriant. Noir, s'il te plaît.

- J'en ai déjà pris un, bougonne Gabin.

J'ignore sa réponse. De toute façon, il est toujours aussi irascible avec moi. Audélie décline mon offre car, selon son père, elle est trop jeune pour devenir accro à la caféine. Sur ce coup-là, j'avoue qu'il n'a pas tord.

Je remonte donc au rez-de-chaussée et démarre la machine à Expresso que James m'a offerte pour Noël il y a deux ans. En réalité, il l'utilisait plus que moi. Contrairement aux accros de cette boisson, je n'ai pas besoin de démarrer ma journée avec une tasse de café. J'en prends plutôt lorsque je dors mal et j'avoue que c'est devenu récurrent ces derniers temps.

Je devrais être enthousiaste à l'idée de pouvoir bientôt dormir toute une nuit sans être réveillée par un bruit de moteur, mais la condition à cette rénovation me sape le moral.

Je prépare cinq tasses et un biberon rempli de lait, les dépose sur un plateau et descend retrouver la bande.

- Café et chocolat chaud pour tout le monde, j'annonce en arrivant.

Audélie et Charlotte bondissent de joie et même Théo frappe de ses petites mains en suivant le concert. Les filles s'emparent de leurs breuvages et s'assoient à une petite table dans la salle de jeu.

- Merci, me dit Jonas.

Je tends ensuite une tasse à l'ours mal léché.

- Je le prends avec du lait, me dit-il avec son air suffisant.

- D'accord.

Je saisis le biberon et le presse pendant cinq secondes au-dessus de son breuvage.

- Est-ce que cet élixir convient à Monsieur ? je lui demande avec un petit sourire en coin.

J'entends Audélie et Jonas étouffer un rire. Gabin, lui, semble bouche bée. Eh oui ! Ma petite démonstration lui a cloué le bec. Il se penche alors vers moi et me demande à voix basse en pointant le biberon :

- Est-ce qu'il provient de tes seins ?

- Tu ne le sauras jamais, lui réponds-je avec un sourire énigmatique.

- Parce que, si c'est le cas, ce sera comme si je les goûtais, rajoute-t-il en prenant sa tasse.

Cette fois-ci, c'est moi qui reste interloquée et, vu son sourire satisfait, il est content de sa petite farce. Quoique...je ne sois pas certaine que ça en soit une... Je dois dire que la voix rauque qu'il a prise m'émoustille plus que de raison. Qu'ai-je, aujourd'hui ?

Je préfère ignorer son commentaire, ingurgite une longue gorgée de café, puis je me dirige vers Théo et lui tends son biberon. Il s'en empare et le boit goulûment.

- Je vais aller prendre une douche, annoncé-je à l'équipe. Si vous avez besoin, faites-moi signe.

Gabin s'étouffe alors avec sa gorgée de café et je comprends, vu son regard lubrique, que je viens presque de les inviter se joindre à moi. Je rougis des pieds à la tête et bafouille un « à tout à l'heure » en m'esquivant en vitesse.

Pourquoi suis-je toujours en train de me comporter comme une adolescente maladroite avec lui ? Je devrais être capable de parler à un homme sans m'enchevêtrer dans mes paroles. Après tout, j'ai été en couple durant plusieurs années. Sauf qu'avec James, ce n'était pas pareil. Nous étions copains depuis l'enfance. Il était mon meilleur ami et l'est resté jusqu'à ce qu'il ait le courage de me demander de l'accompagner au bal de finissants. Nous nous sommes déclarés notre amour cette nuit-là. Plus nous vieillissions et plus nos sentiments se renforçaient. Ma grossesse n'était néanmoins pas prévue mais, de toute façon, notre but était de fonder une famille ensemble, alors les choses se sont seulement accélérées.

C'est le seul homme que je n'aie jamais aimé.

Nous ne nous comportions pas comme le couple passionné que plusieurs connaissent mais, avant tout, comme des amis. Nous n'avions même pas besoin de parler lorsque l'un de nous n'allait pas bien ; nous le devinions immédiatement. Tout passait par le regard. Nos peurs, nos sentiments, nos victoires. C'était comme si nous faisions de la télépathie.

Même lors de nos disputes, qui n'étaient heureusement pas fréquentes, nous n'avions pas besoin de hurler. Les expressions de nos visages racontaient tout. Parfois, je nous trouvais ennuyeux, mais je ne pipais mot, car cette vie me convenait. Je recherchais la sécurité, la routine et c'est ce que nous avions. Jusqu'à l'accident.

Avec Gabin, je suis totalement perdue. Les flèches qu'il m'envoie me désarçonnent complètement. Je n'ai jamais eu besoin de batailler avec les mots. Je réalise que rester sans cesse sur mes gardes me bouffe toute mon énergie. Chaque fois que je le croise, je me demande ce qu'il va encore me sortir pour me juger. C'est éreintant, à la longue.

« Tu me transformes en quelque chose que je ne suis pas. C'est plus fort que moi. »

Pourquoi ai-je cette phrase dans la tête ? J'ai l'impression que je suis à deux doigts de trouver la réponse, mais mon esprit est encore trop embrouillé.

Afin de m'éclaircir les idées (et de démêler ma tignasse), j'entre dans la douche et ajuste la température. J'adore me laver à l'eau bouillante. Plus c'est chaud, plus j'ai l'impression de relaxer. Je savonne mes cheveux, qui auraient besoin d'une bonne coupe. Je suis toujours pressée, le matin, et je perds trop de temps à me préparer. Toutefois, je n'ai pas le goût de les raccourcir. James adorait ma longue chevelure et c'est une façon de le garder près de moi.

Lorsque je me sens propre et relaxée, je coupe l'eau et sors de la douche en frissonnant. Le plus dure, c'est toujours à la sortie. Le contraste avec la température extérieure me saisit à chaque fois.

Je me dépêche donc d'enfiler mon pantalon en jeans et un t-shirt à l'effigie de Mini Mouse. C'est mon petit côté kitsch. J'ai toujours aimé cette souris version féminine de Mickey Mouse. Le col en V avantage ma poitrine et je me demande pendant un instant si ce n'est pas trop osé puisque j'ai des invités masculins. Tant pis ! Ils n'auront qu'à regarder ailleurs. Je suis chez moi, après tout.

Je me sens légèrement revigorée après mon immersion sous l'eau, alors je décide de préparer le repas en avance. C'est rare que je puisse cuisiner sans être sans cesse dérangée, alors j'en profite pour essayer de concocter un poulet général tao. La liste d'ingrédients est longue, mais ça ne semble pas bien compliqué.

Je prends mon portable, mets de la musique pour couvrir les bruits de marteaux qui font un tapage et me mets en mode cuisinière. J'enfile mon tablier et débute ma recette.

J'ai décidé de démontrer à Gabin que je suis capable de faire quelque chose de mes dix doigts. Il va en tomber de sa chaise...ou de son échelle. 

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