« J'espère que le cours d'aujourd'hui vous a plu. Profitez de votre week-end pour vous amuser mais n'oubliez pas de lire les chapitres que je vous ai recommandés. »

Je commence à peine à ranger mes affaires en ce cinquième jour de cours que les étudiants se pressent encore à mon bureau. J'ai retenu tous leurs noms et je sais déjà qui est là pour me poser des questions pertinentes ou me proposer d'aller boire un verre.

Mais même si je suis attendu ailleurs, je prends le temps comme un bon professeur de répondre à tout le monde.

J'avoue que la pique de Stella lors de mon footing il y a quelques jours m'a vraiment énervé. C'est rare que je sois dans cet état mais tout ce qui sortait de sa bouche me donnait envie de la faire taire en lui faisant un croche-patte pour qu'elle s'écrase sur le goudron.

Pardonnez-moi Seigneur Dieu car je suis un homme mauvais.

Jill Stella était tellement agaçante aussi... Et puis quel gâchis, cette femme ! Elle a surement du potentiel si seulement elle n'était pas tout le temps mal fringuée, hautaine et puante de transpiration.

Sérieusement, comment on peut se laisser aller à ce point ?

Je réponds à une dernière question lorsque le fruit de mes pensées apparait devant moi. Enfin plutôt derrière Nora Kacem qui me fait un grand sourire et s'apprête à me faire une demande qui j'en suis sûr, n'a rien à voir avec mon cours d'aujourd'hui.

Au moins elle, elle montre sa beauté et met en valeur sa peau basanée avec un maquillage travaillé et des bijoux. Jill Stella ne doit même pas savoir que l'anticerne existe.

Diable qu'elle réveille mon sale côté ! On croirait entendre Javier quand il critique les femmes gratuitement...

— Professeur Luna ! s'exclame-t-elle alors que nous ne sommes qu'à un mètre. Est-ce que vous seriez partant pour aller à la soirée de bienvenue de l'université ce week-end ?

— Vous avez besoin d'un chaperon ? Pourtant, vous êtes des grandes filles, non ?

— Vous êtes drôle, professeur.

— Je serais déjà à cette soirée, réponds-je en terminant de faire mon sac. J'espère vous y voir avec autant d'enthousiasme, vous et votre amie.

— Je ne viens pas, intervient Jill derrière elle en secouant la main.

— Oh Jillou ! Tu pourrais faire un effort pour une fois !

— Pourquoi ? Te regarder te bourrer la gueule jusqu'à en vomir ? Remember la soirée d'intégration de l'an dernier ?

Nora fait la moue à son amie et leur échange me fait sourire car il me rappelle certains moments avec mes frères...

« Toc toc toc »

En parlant d'un Luna, on en voit sa queue.

Nous nous retournons vers la porte d'entrée et je roule déjà des yeux en voyant mon étudiante baver à la vue de mon frère, Dante Luna. Sa chemise bordeaux est juste assez ouverte pour laisser une fine toison de poil en sortir et son regard carnassier ne manque pas de dériver sur mes élèves avant qu'il ne triture son alliance du doigt.

Une pointe de regret presque dissimulée dans ses yeux.

Ah mais oui mon bon Dante ! Un ancien Don Juan maintenant marié n'a plus le droit à l'infidélité, surtout lorsque sa femme est une Hoffman et que son beau-frère peut vous tuer d'un coup d'éclair.

— J'étais si en retard que ça ? dis-je en attrapant ma besace. On devait se retrouver devant le Comité.

— Ma foi, Miguel, tu as des étudiantes charmantes ! Enchantée mesdemoiselles ! Dante Luna. Ancien professeur d'anglais à Londres.

— Enchanté, monsieur Luna ! Nora Kacem et... mon amie qui fait la gueule derrière moi, c'est Jill Stella.

— Oh ben pourquoi elle fait la gueule ? Qu'est-ce que tu as encore fait, Miguel ? Quand une fille te dit non, il ne faut pas insister. Ça s'appelle du harcèlement.

— Hiiiinnnn mais je n'ai rien fait !

Merde.

Mes étudiantes me regardent avec de grands yeux brillants alors que j'ai craqué. J'ai laissé s'échapper mon TIC de langage devant elle, en plus de m'exprimer comme un gamin.

Pourquoi est-ce que tous mes proches ont cet effet là sur moi ? Fais chier. Adieu ma crédibilité.

Je racle ma gorge alors que le sourire de Dante s'étire et qu'il hausse les sourcils pour se moquer silencieusement de moi. Mais Nora me sauve de ce moment gênant en répondant pour sa copine :

— Elle ne veut pas m'accompagner à la soirée de bienvenue de demain.

— Quelqu'un a dit « soirée » ? répond mon frère tout excité. Quel étudiant refuserait ça ?!

— Le genre à passer sa vie à la bibliothèque ou devant sa console.

— Eh oh Nora, intervient la blonde, je suis là.

— Ahah ! On dirait Miguel quand il était haut comme ça !

— Merci de m'afficher devant mes élèves... J'adore ça.

— Allez jeune femme ! Ce genre d'occasion est trop peu fréquente pour les manquer ! J'aimerais tellement venir si seulement je n'étais pas un père de famille débordé... Mais je suis sûr que mon petit frère saura vous tenir compagnie, n'est-ce pas Miguechou ?

— Ta gueule. On y va ? Zéphyr doit nous attendre.

— VOUS CONNAISSEZ LE PRÉSIDENT ?!

Je manque de trébucher en entendant la voix de Jill Stella, comme si elle venait de se réveiller soudainement. Ses yeux sont brillants et je vois plus que de l'excitation sur son visage : j'ai l'impression de lui avoir annoncé une promotion délirante sur des pots de Nutella.

Nora lui saisit le poignet et lui chuchote surement de se calmer mais rien ne change, la blonde est pendue à mes lèvres en attendant une réponse que Dante finit par lui donner.

— Vous voulez le rencontrer ?

— PARCE QU'ON PEUT LE RENCONTRER ?!

— Jill putain ! s'exclame Nora. Calme ton fangirlisme ! Désolée, elle est... « très » fan du Président et de son travail.

— Miguel ? T'en dis quoi ?

Je hausse les épaules avant de sourire et de dire « Pourquoi pas ». Deux mots qui changent l'attitude blasée de Stella en pile électrique tout excitée alors que Dante lui fait signe de le suivre.

Nous marchons sans pression en direction du Comité de la magie lorsque Nora se met à marcher à mon niveau et m'offre une expression désolée.

— Ça doit vous embêter, professeur...

— Non, pas de soucis. C'est déroutant de voir votre amie comme ça, par contre.

— Oui, elle a toujours aimé la famille Hoffman. Enfin, « elle », nous plutôt. Je ne sais pas si vous êtes au courant mais nous venons des Orphelins de Salem et depuis une quinzaine d'années, Zéphyr Hoffman est le plus gros donateur de l'association. C'est grâce à son altruisme que nous avons pu vivre dans de meilleures conditions et arriver où nous sommes... Surtout Jill.

— « Surtout Jill » ? Excusez-moi si c'est trop personnel, vous n'êtes pas obligé d'en parler.

— Non pas de soucis ! Quand on arrive gamin aux Orphelins de Salem, on a souvent un petit « reste » de notre famille, un quelque chose comme une assurance vie pour l'avenir mais Jill... Elle n'avait rien. Avant les dons du Président, nous vivions modestement mais elle...

— Vous ne devriez pas en dire plus, je pense.

— Vous avez raison, on tombe vraiment dans le personnel. Mais j'ai l'impression que c'est facile de vous parler, monsieur Luna. Vous avez une aura qui pousse à se livrer à vous.

C'est vrai mais ce n'est pas forcément une bonne chose quand on a une mémoire absolue.

Mais alors que Nora s'apprête à relancer la conversation, Jill s'arrête devant elle et lui saisit la main, une expression toute timide sur le visage. Je comprends immédiatement pourquoi : Zéphyr, dans un de ses beaux costumes bleu nuit, vient à notre rencontre.

Bon, il a l'air agacé mais il a tout le temps l'air comme ça, donc rien d'inquiétant.

Le blond passe une main dans ses cheveux et range son portable dans sa poche avant de nous regarder et de froncer les sourcils en voyant les deux étudiantes avec nous. Dante presse soudain le pas et arrive à lui chuchoter quelque chose qui fait doucement apparaitre un sourire poli sur son visage détendu.

— Bonjour mesdemoiselles. J'espère que vous passez une bonne journée et que les cours avec votre professeur d'Histoire sont intéressants.

— Très ! s'exclame Jill un peu trop fort. Monsieur Luna est captivant !

Mais quelle mytho cette fille. Ou plutôt, quelle hypocrite.

Zéphyr me regard d'un air amusé, fait rare chez lui, avant qu'il ne s'approche de moi et redresse par réflexe le col de ma chemise. Un geste qui avant m'aurait troublé mais qui maintenant que mon amour a disparu, ne me fait plus rien.

C'est avant tout mon meilleur pote et le garçon presque insensible avec qui j'ai grandi.

— Je ne doute pas une seconde que tu sois captivant, me dit-il avec son air malsain.

— Oh tu n'as pas idée, mon salaud.

— Et alors, tu leur as parlé de moi ?

— Un peu. Surtout de « l'avant-toi ».

— Vous pourriez venir dans notre cours pour parler de vous !

Nous nous tournons tous les deux vers Jill, toujours son air émerveillé alors que Nora à côté d'elle est rouge de honte.

C'est sûr que demander au Président du Conseil de la magie dirigeant notre monde s'il a deux heures à perdre dans un amphi pour raconter sa vie, c'est un peu... osé.

« Ce serait une excellente idée. » répond Zéphyr, nous surprenant tous et faisant se dessiner un grand sourire sur le visage de la blonde.

— Qu'est-ce qu'il te prend ? lui chuchoté-je.

— Les étudiants d'aujourd'hui sont les futurs électeurs de demain.

— Quel politicien... Si seulement tu n'étais pas si...

Charismatique.

— Quoi ?

— Occupé. D'ailleurs on n'était pas pressé à la base ?

Zeph regarde à nouveau son téléphone et je remarque un rapide sourire sur son visage en regardant son fond d'écran : une photo de lui, Roxy et leur fils Maxime. Tous les trois à la plage.

Mon meilleur pote qui vit sa meilleure vie et qui assure de tous les côtés, c'est un coup à être jaloux ça.

— Non ça va, une soirée chez Mercutio, ça commence toujours en retard à cause de sa brune de mes deux.

— Je te rappelle que c'est cette fameuse brune qui garde le plus souvent ton fils.

— Ouais, pour mon déplaisir. Bon allez, le temps d'acheter des vivres, on sera bon. Mesdemoiselles, c'était court mais nous nous reverrons quand votre charmant professeur d'Histoire décidera de m'inviter.

— Pfff, mardi ? Ça te va, mardi matin ?

— Seulement si tu gardes mon fils lundi soir.

— Deal. Ce n'est jamais une plaie de s'occuper de Maxime. C'est plus son papa gâteau, la plaie.

Dante et moi-même rigolons de Zéphyr tirant la tronche alors que mes deux étudiantes sont sur le cul depuis quelques minutes.

Elle ne devait pas s'imaginer que nous étions aussi proches d'une des personnalités les plus importantes de notre monde.

Et alors si elle savait ce que j'ai fait avec lui... Elle aurait de quoi écrire une fanfiction de cinquante pages sur notre relation.

— J'espère vous voir samedi soir, mesdemoiselles.

— À samedi, professeur Luna ! Et je vous promets d'arriver à trainer Jillou à la soirée !

La blonde fait une petite grimace mignonne, voulant surement cacher son agacement face à mon meilleur pote qu'elle admire. Je suis sûre qu'elle aurait voulu lui parler pendant des heures mais ce sera pour une autre fois.

Ce soir, c'est soirée entre couilles !

🌙🌙🌙

« Je crois que Sasha va me quitter, bouhouhou ! »

Soirée... entre couilles... Yeah...

Je soupire en buvant ma énième bière en regardant Thérius se foutre de la gueule de Mercutio à l'alcool triste. Ma tête posée sur mes bras, je fais la moue plus à cause de l'alcool que de l'état dans lequel est mon cousin.

— J'vais avoir quarante ans l'année prochaine putain, dit-il en fronçant les sourcils, j'suis un vieux pour elle !

— Ben non mec, répond Dante entre deux soufflements musicaux sur le goulot de sa bière, elle aussi est plus vieille. Ça ne change rien. Elle ne va pas te quitter pour ça.

— J'peux même pas lui donner de gosse...

— Elle n'en veut même pas ! s'exclame Zéphyr en posant sa tête contre mon épaule. En plus ta gonzesse serait une maman à chier.

— Ferme ta gueule, wesh !

— « Wesh » qu'il a dit ! T'as vu comment elle t'influence ?

— Zeph, t'es très mal placé pour dire que Sasha serait une mauvaise mère alors qu'elle joue tout le temps la baby-sitter pour ta progéniture.

— Nyanyanya !

— Putain, murmure Merc, t'as exactement les mêmes tics de langage qu'elle quand t'es bourré et tu oses dire qu'elle m'influence... T'es vraiment un petit con.

Les deux sorciers manquent de se jeter dessus pour se bastonner « gentiment » mais Thérius s'interpose en calmant le jeu tout en se foutant de leur gueule encore plus fort.

J'avoue que j'apprécie ces moments que l'on a tous gardés ensemble à boire comme des trous et à se plaindre de nos vies alors qu'elles sont exceptionnelles. Avant, elles étaient à chier, mais maintenant... pourquoi on continue ?

Je crois que j'ai bu un verre de trop là...

« Allez, Miguel va nous parler des deux p'tites étudiantes qu'il nous a présentées tout à l'heure ! Surtout la fangirl de Zeph ! C'était trop marrant, vous auriez dû voir ça les mecs ! »

Je pousse un grognement en enfouissant ma tête un peu plus avant de boire une nouvelle gorgée, la bouche pâteuse et mes sens légèrement brouillés par l'alcool.

— Elle n'est pas si bien que ça, c'te fille ! m'exclamé-je. Elle est méchante avec moi...

— Oh regarde ce gamin, répond Thérius en me frottant les cheveux. Il a été froissé dans son égo par une enfant !

— En plus je n'ai pas pu m'empêcher de lui faire des remarques déplacées... Pas dans ce sens, Thérius. Dans le sens, j'ai été méchant pour contrer sa méchanceté.

— Toi ? s'étonne Zéphyr. T'as été méchant avec une fille ? Mais qu'est-ce qu'elle a pu te dire cette blonde pour que l'éternel gentil Miguel s'efface ?

— Pfff... J'ai même pas envie d'en parler...

— Moi je vois bien sa copine avec toi, intervient Dante, tu sais, Nora. Elle est plus dans ton style et a l'air énergique ! Franchement vous avez quoi, dix ans de différence ?

— C'n'est pas comme si c'était important, HEIN ? s'exclame Mercutio avant de frapper son visage de sa paume.

Mon cousin dépité se rappelant encore du problème que la différence de dix ans avait causé lorsqu'il voulait être avec Sasha. On lui avait dit que ce n'était pas beaucoup et il a fini par accepter mais maintenant que je regarde mes élèves, je comprends pourquoi il bloquait.

En plus, j'ai déjà couché avec l'une d'elles sans perdre de temps.

« Mouais... Nora est pas mal... » laissé-je échapper sous l'emprise de l'alcool dans mes veines.

Une erreur que sobre, je risque de regretter pendant longtemps.

No zob in job... No fucking zob in job...

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? De la rencontre Dante/Zéphyr avec les filles ? Du fangirlisme de Jill sur Zeph ? De la relation meilleurs potes entre Miguel et Zéphyr ?

De la soirée "entre couilles" avec nos Marvelous Heroes ? Des réflexions sur l'attitude de Miguel envers Jill et enfin de la porte qu'il laisse peut-être ouvert pour Nora ?

Je vous rappelle qu'il n'y aura plus de chapitre le mardi et qu'il faudra attendre les samedi pour avoir votre dose de Miguechou 🤭

🌙N'hésitez pas à me soutenir en votant pour ce chapitre et en laissant un petit commentaire s'il vous a plu ! On se retrouve samedi prochain pour la suite ! Bonne année, surtout la santé, et passez du bon temps le plus possible avec ceux que vous aimez !🌙