Chapitre 3 : La chambre




   Ce manoir était immense. Bien qu'étrange était l'état de conservation des lieux, l'étrangeté même résidait dans l'attitude des habitants qui ne leur avaient pas posés plus de questions sur leurs mobiles. Depuis que le fameux James était venu les chercher - non sans une discrète timidité absolument adorable, les deux jeunes n'avaient cessés de passer devant des portes par dizaines, toutes closes pour la plupart. Que pouvait bien faire quatre garçons avec autant d'espace ? Elliott n'avait pas prononcé un mot depuis le départ, ce qui ne semblait pas déranger leur guide sujet à une bonne humeur constante. Jenelle espérait juste que cette nuit passe vite.

   Leur hôte finit par stopper devant une porte en bois qu'il ouvrit de suite.

-  Celle-ci c'est ta chambre. Annonça-t-il à l'intention d'Elliott. Tu verras, tu y seras très bien.

   Elliott se pencha depuis l'encadrement de la porte, ses yeux se baladant dans la pièce à priori spacieuse. La jeune femme s'approcha dans l'espoir de constater à quoi elle devait s'attendre mais Elliott se déplaça si rapidement qu'elle fut obligée de rester où elle était.

-  Je n'en doute pas. Lança-t-il, presque ironique.

   Il jeta à la jeune femme aux cheveux châtains aux reflets roux un regard glacial qui eut le don de lui faire baisser les yeux.

-  Si tu as besoin de quoi que ce soit, nos chambres sont à l'étage. Proposa le blond. Tu devrais t'y retrouver sans problème.

   Elliott se tenait de telle sorte que James comprit de suite qu'il attendait qu'ils partent. Il ne s'attarda pas.

-  Bien. Lança simplement le brun.

   Il attendit patiemment que le blond lui tourne le dos pour aussitôt claquer la porte, s'enfermant dans sa chambre attribuée. Jenelle manqua de sursauter. Elliott lui en voulait encore beaucoup.

-  Suis-moi. Fit le blondinet en regardant la châtain par-dessus son épaule.

   Sa demande avait été prononcée d'une voix si douce que Jenelle obéit sans bronder. Elle rattrapa son allure et ils continuèrent à marcher dans ce couloir interminable. Perdue dans ses pensées, elle ne sentait pas sur elle les regards à la dérober de James qui l'observait d'un œil distrait.

-  Est-ce que tout va bien ? Finit-il par demander, soucieux.

   Jenelle sortit de ses pensées brusquement, levant la tête vers son hôte. Elle découvrit ses yeux d'un bleu ciel innocent fixés sur elle.

-  Quoi ?

-  Tu as l'air ailleurs. Avoua-t-il, comme démasqué. Quelque chose ne va pas ?

   Aussitôt elle porta sa main au pendentif à son cou. Elle ne devait en aucun cas laisser penser qu'ils n'étaient pas réellement perdus; Elliott n'apprécierait pas la moindre gaffe.

-  J'ai juste très envie qu'on retrouve notre chemin. Fit-elle calmement.

   Le blond la regarda un instant sans réelle expression, avant de détourner les yeux. Avait-il le moindre soupçon ? Pourquoi ne la questionna-t-il pas davantage ? Ces garçons étaient-ils si naïfs que cela pour laisser entrer et même dormir des étrangers chez eux ? Au moment où Jenelle s'apprêtait à ajouter quelque chose, son logeur redressa la tête pour planter ses iris claires sur elle.

-  Ne t'en fais pas, tout sera vite réglé. Rassura-t-il en souriant. Je ferais de mon mieux pour que tu puisses rentrer chez toi.

-  C'est gentil... Fit-elle en forçant un demi-sourire.

-  James.

   La douceur de ce dernier était déjà suffisamment étonnante, alors son assurance lors de ses dernières paroles mirent complètement en déroute la jeune femme. Elle se contenta d'acquiescer en silence. Le blond ne s'y attarda pas, et reporta son attention sur le bout du couloir devant eux. Après plusieurs mètres et deux changements de couloirs, James s'arrêta enfin devant une porte. Jenelle observa les alentours, ses doigts continuant de tripoter le pendentif. Malgré toutes ses portes, pourquoi se retrouvait-elle à dormir si loin d'Elliott ?

-  Vous n'êtes que quatre à habiter ici ? Demanda-t-elle, ses yeux scrutant l'obscurité.

-  Quatre c'est déjà pas si mal. Surtout quatre garçons.

   La porte s'ouvrit, captant l'attention de la châtain.

-  Entre. Incita le blond en lui souriant.

   Jenelle obéit, passant devant lui pour pénétrer dans la pièce. Et là, le choque. Jamais de toute sa vie elle n'avait vu d'aussi grande chambre. Evidemment, la majorité des meubles étaient en bois et sûrement anciens. Mais le tout formait une ambiance parfaitement contrôlée d'ancienneté, quoi que légèrement austère. Le lit deux places situé au centre de la pièce collé au mur par la tête était si grand que même si elle s'étalait entièrement, il resterait toujours de la place.

-  Voici ta chambre ! S'exclama James, ses yeux pétillants comme si il partageait sa joie.

-  C'est immense... Souffla Jenelle en parcourant le plafond des yeux.

   Un léger rire sortit de la bouche du blond.

-  On ne soigne pas n'importe quel invité. Cela dit, désolé mais les autres chambres près de celle de ton ami ne sont pas vraiment en ordre... J'espère que ça ne te dérangera pas d'être séparé de lui.

   La châtain ne l'écoutait déjà plu. Elle fit un tour lent sur elle-même, fixant le plafond haut et voûté jusqu'à se retrouver face au blond. Elle observa un instant la satisfaction sur son visage, se rendant compte qu'il était absolument mignon quand il souriait.

-  James, tu es sûr que...

-  Absolument. Coupa-t-il. Pas de panique. Cette maison ne manque pas de pièces. Cette chambre est la tienne.

   Face à la sincérité rassurante de James, Jenelle dût détourner le regard pour cacher son sourire conquit.

-  Si la chambre t'épate autant, je crois que tu n'es pas au bout de tes surprise.

   Les yeux du blond brillèrent d'une nouvelle lueur.

-  Ferme les yeux. Ordonna-t-il doucement.

-  Quoi ?

   Sa perplexité n'empêcha pas le blond de s'approcher doucement d'elle, sans ciller une seule fois de ses yeux bleu.

-  J'ai de quoi te surprendre encore plus. S'il te plaît, ferme les yeux. Ne crains rien.

   Malgré la méfiance qui se réveilla chez Jenelle, elle se fit piéger par la voix douce de James. Ses doigts lâchèrent leur emprise sur son pendentif au moment où les mains de James se posèrent en douceur sur ses épaules. Leur proximité la fit presque bafouiller, et elle se força à fermer les yeux pour qu'il ne le remarque pas.

-  Avance. Intima le blond, proche de son oreille.

   Il la fit pivoter sur ses pieds et la jeune femme obéit. James était derrière elle et la guida à travers la pièce. Elle sentit le stress monter en elle, cette angoisse de ne rien contrôler... Une porte s'ouvrit, puis une pression la fit stopper. Elle sentit à nouveau le souffle chaud du blond sur sa peau.

-  Vas-y, ouvre les yeux.

   Sans demander son reste, Jenelle obéit. Face à elle, une salle de bain. Une immense salle de bain. Elle était de taille moyenne, bien plus cependant que nécessaire. Elle comportait une douche dans un coin et une grande baignoire îlot sur pieds, un lavabo de très bon goût et un miroir tout le long du mur. Incroyable.

   Amusé par son étonnement muet, James ne quitta pas des yeux une Jenelle à la bouche grande ouverte.

-  Je t'assure, ce n'est pas un rêve. Rit-il doucement.

-  C'est... C'est pas croyable. Souffla-t-elle.

-  Tout comme votre venue ce soir, il faut bien l'avouer. Si cela te rassure davantage pour que tu ne t'enfuies pas en courant en pensant que nous sommes inconscients de vous avoir proposé de rester, alors je vais trouver d'autres choses pour que tu restes.

   Son ton avait été doux, sans l'once de moqueur ou de méchanceté. Jenelle sentit ses joues rougirent. Elle tourna la tête sur le côté, feignant une observation des murs pour camoufler son visage par ses cheveux encore humides. Elle se demanda si James avait vraiment conscience que ses paroles pouvaient être interprétées comme celles d'un dragueur.

-  Je vais te laisser. Fit-il alors en la lâchant. Si tu as besoin d'autres vêtements, la penderie en est remplie.

   Il fit demi-tour et Jenelle l'imita. Elle le raccompagna jusqu'au milieu de la chambre, tirant sur les manches de sa veste, avant que James ne se retourne une dernière fois vers elle.

-  Oh, et évite de te promener dans les couloirs. Conseilla-t-il, bienveillant. Les autres gars n'apprécieraient pas.

   Dans la lueur qui brilla dans ses yeux, Jenelle sut que ses paroles ne cachaient aucune plaisanterie.

-  D'accord. Répondit-elle. Je ferais attention.

-  Si tu as besoin de quoi que ce soit, de n'importe quoi... Ma chambre est la deuxième porte à gauche, au-dessus.

   La jeune femme força un sourire sur ses lèvres.

-  Merci, James.

   Accepter d'employer le prénom d'une personne fraîchement rencontrée était une astuce bien connue pour faire comprendre, ou faire croire, à une personne que l'on ne se méfie plus vraiment d'elle. Le blond sourit légèrement et ne s'attarda pas. Il disparut derrière la porte qu'il prit soin de refermer. Le sourire de Jenelle retomba.

   Pour combien de temps encore en avait-elle à jouer la comédie ?

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