Chapitre 10 - première balade

{ A écouter avec la fabuleuse Somewhere only we know de Keane. J'espère que ce chapitre vous plaira 💙 }

- J'ai un projet., déclare-t-il sur le ton de la confidence.

Je hoche la tête, l'encourageant à continuer.

- Je veux rendre le monde plus beau.

- Genre Mère Theresa ?, je demande en haussant un sourcil.

Je peux voir dans le rétroviseur son sourire éclatant alors qu'il éclate de rire.

- Non, Pas comme Mère Theresa.

- Comment ?, je demande en effectuant un dépassement.

- Eummh... Tiens, regarde cet immeuble, juste là., dit il en pointant du doigt un vieil HLM de bord d'autoroute complètement réhabilité en un immeuble de standing. Qu'est ce qui le rend beau ?

- Je dirai... la façade., dis-je en tentant de me concentrer sur la route.

- Développe.

- Ils ont entièrement refait cet immeuble, Alex. Tu veux devenir architecte, c'est ça ?, je demande en essayant de comprendre.

Il hoche la tête de gauche à droite en se mordant la lèvre, les paupières presque closes.

- On peut très bien embellir certaines choses sans avoir fait des grandes études ou même être Picasso. Il suffit seulement que ça vienne de là., dit-il en posant sa main gauche sur sa poitrine musclée.

Je souris.

- Comment tu comptes t'y prendre ?

Il pose un doigt sur ses lèvres et me fait un clin d'œil.

- Je compte sur toi ?, demande-t-il plein d'espoir.

Je hoche la tête. Oh que oui. Plus que jamais, je lui offre mon soutien le plus profond.

Soudain, je le vois se tourner vers la portière d'un air soucieux et passer sa main dedans.

- Tu... Tu aurais vu mon gsm par hasard ?, me demande-t-il.

Je me mords si fort la lèvre que je finis par avoir un goût de sang en bouche. Tout en essayant d'avoir l'air très concentrée sur la route, je nie l'évidence.

- Ton téléphone ?! Tu l'avais quand on a pris le petit déjeuner non ?

- Merde..., soupire-t-il.

Je passe mon pied gauche sous le siège et je sens sous la peau épaisse de ma plante de pieds la surface lisse de son IPhone. Le rouge me monte aux joues. Je ne sais pas si mentir est la bonne issue mais ce Road Trip semble tellement lui tenir à cœur que je ne me sens pas de lui dire que son frère est décédé après un accident. Vraiment Pas.

Bien sur il y a aussi cette part étrange d'envie, comme une voix dans mon cœur qui me dicte de le garder a mes côtés, juste encore un peu.

Je. ne. lui. dirai. pas.

Point de vue, Alex :

Jane s'est endormie à la seconde où elle a garé la voiture. Son visage doux et paisible est posé sur le dessus du siège qu'elle a légèrement incliné. Sa poitrine se lève et s'abaisse au rythme de sa respiration paisible alors que les rayons de soleil brûlants de l'après-midi caressent sa peau de la manière dont je souhaiterai le faire avec la paume de ma main.
Elle a littéralement baissé la garde, elle qui a pour habitude de froncer en permanence les sourcils, une triste inquiétude dans le regard, a désormais un léger sourire aux lèvres et cette douce insouciance.
Mais ce qui me frappe le plus en elle, c'est cet air si fragile et chétif donnant l'impression qu'un simple rhume pourrait la tuer.
Mon Dieu, faites qu'elle n'attrape jamais de rhume je ne supporterai pas de la perdre.
Je détaille son corps avec envie un long moment, assis sur le siège passager, Et mon regard se pose sur ses cuisses. Incroyable. Sans arrières pensées, je pense que je pourrai sans problème en faire le tour avec mon pouce et mon annulaire, tellement elles sont frêles. Je n'en fais rien, evidemment, décidant plutôt de prendre l'air quelques minutes et de boire un café. Lorsque je m'extrais de la voiture, je sens le vent chaud et léger me caresser le visage. Je souris.

Cette drôle d'impression que chaque minute est plus belle que la précédente depuis le moment où je me suis assis pour la première fois dans cette décapotable rouge.

Je me dirige vers les portes vitrées et m'engouffre dans la station. D'après la carte affichée sur le mur défraîchi de la cafétéria, nous sommes à deux heures de New York, voire trois heures si Jane décide de prolonger sa sieste.

Je m'avance vers les distributeurs et sélectionne un cappuccino et un chocolat chaud, supplément chantilly-guimauves. Je suis décidé à la remplumer, ma petite protégée.
Alors que les gobelets de carton se remplissent du liquide chaud et crémeux, j'observe les gens autour de moi. Soudain, je sens une présence dans mon dos.

- Intéressant, non ?

Jane.

- Quoi ?, je demande.

- Tu ne connais donc pas la phrase ? Tous les gens sont intéressants lorsqu'on les regarde assez longtemps.

Elle regarde le distributeur un long moment jusqu'à ce que les guimauves aient fini de tomber sur la chantilly.

- Merci pour le chocolat chaud, en passant.

Je reste silencieux. Cette phrase me fait réfléchir. Devant moi défilent toutes sortes de personnes. Certaines d'elles sont toujours en training alors que d'autres sont tirées à 4 épingles. Et si, comme le disait Jane, toutes ces personnes étaient intéressantes ? Et si elles avaient toutes un parcours, une histoire à raconter ? Un long moment se passe sans que nous ne parlions, Jane sirotant son chocolat et moi, perdu dans une jungle de pensées se bousculant dans ma tête.

Elle avale sa toute dernière gorgée, jete le gobelet dans la poubelle et se dirige vers la sortie de sa démarche fluide, me laissant seul à mes pensées. Je prends mon café maintenant tiède et je vais, à mon tour, sortir de la cafétéria lorsque des bombes de peinture exposées dans le magasin attirent mon attention. Je pousse la barrière et entre dans le rayon froid et aseptisé, à la manière d'un supermarché. Je m'abaisse à la hauteur des bombes et en prends quatre : vert, la douce couleur de l'espoir, jaune, pour la joie, rouge, pour la profondeur cinglante de cette couleur qui me fascine et enfin, un bleu ciel délicieusement délicat.

Je m'affale contre le siège en cuir, mon sachet blanc à la main.

- T'en as mis, du temps., me fait-elle remarquer.

- C'était pour la bonne cause., j'affirme.

- La quelle ?

- Celle de rendre le monde plus poétique, plus beau, plus drole.
Démarre.

A ces mots, elle tourne la clé dans le contact et appuie sur la pédale, alors que la belle décapotable se lance à nouveau sur les routes noires et brûlantes des Etats-unis. Plus que deux heures.

Point de vue, Jane :

Nous sortons, hilares, de la petite auberge espagnole où nos avons passé la soirée. Nous. Sommes. A. New. York.
Le vrai New York. New York City.

Alex me regarde dans les yeux, alors que nous marchons sur le trottoir sous les buildings éclairés dans la ville qui ne dort jamais.

- J'ai passé une très belle soirée., déclare-t-il.

J'esquisse un sourire et baisse le regard vers ma petite robe noire, la seule que j'ai emporté.

- Moi aussi...

- J'aimerai que tu fasses une dernière chose avec moi.

- Quoi?, je demande, un peu inquiète.

- Regarde autour de Toi et trouve la chose la plus laide de cette avenue., m'ordonne-t-il.

- La ? La plus laide de... ? Mmh Pas facile. Je dirai... cet immeuble., dis-je en pointant du doigt un vieil immeuble délabré et vide de tout habitant.

Il m'attrape la main.

- Suis-moi.

Oui, Alex. Je te suis. Je te suivrai jusqu'au bout du monde, de Kyoto à Londres, en passant par Vladivostok. Je te suivrai jusqu'au bout du monde, du premier jour jusqu'au dernier. Je me battrai pour toi. Nous marchons main dans la main jusqu'à cet immeuble. Plus je m'en approche, plus je le trouve laid. Il est immense, surplombant très certainement la ville et plusieurs fenêtres sont brisées. Il est désespérément, tristement vide.

Nous entrons par une fenêtre brisée et commençons à monter les marches une à une. Au bout de plusieurs étages, je n'ai plus de souffle, Mais je m'accroche, plus que jamais, à la main douce d'Alex et je continue. Je monte. Encore et encore.

Apres une dizaine de minutes d'effort intense, nous arrivons dans une immense pièce du dernier étage. Le carrelage en damier et les murs blancs sont toujours intacts. C'est comme si les anciens propriétaires avaient déménagé hier. Pourtant, ce qui me frappe le plus, ce n'est ni la blancheur des murs, ni la propreté du carrelage. C'est cette immense baie vitrée qui donne sur une partie infime de la ville.

- Waouh..., je souffle.

Je m'avance avec précaution sur le carrelage et la vue de la ville se dévoile à moi, petit à petit. J'ai le souffle coupé. Le soleil se couche sur New York alors que le ciel rosé complète le tableau des buildings illuminés, la valse des taxis jaunes et le chassé-croisé des habitants qui regagnent leur domicile sans prendre la peine de regarder autour d'eux.

Alex me tapote l'épaule.

- Le mur juste derrière Toi est un des murs les plus visibles de la ville. Où que tu sois dans New-York, de la 1st à la 8th avenue, tu peux apercevoir ce mur., il souffle.

- Et ?

- Et cela correspond parfaitement à ma résolution de rendre le monde plus beau. Tu as déjà tagué ?

- Tagué?

- Oui, tagué. Du verbe taguer. Faire un tag.

- Jamais..., j'avoue.

- Amuse-toi., ordonne-t-il alors qu'il me tend une bombe de peinture d'un bleu clair doux et léger.

- Je peux ?, je demande.

- Tu dois.

Je m'élance alors vers le mur Et commence par faire un cœur. Il est parfaitement atroce. Pourtant, au bout d'une vingtaine de minutes, je commence à maîtriser la bombe. A mes côtés, Alex semble être dans son élément.

Nous sommes en harmonie.

Quelques minutes se passent sans que nous ne disions rien. C'est Alex qui rompt le silence.

- Tu connais l'histoire d'Alice aux pays des merveilles ?

- Comme tout le monde, oui., je réponds.

- A la fin, tu te souviens, Alice se réveille et se rend compte que tout cela n'était qu'un rêve, Et que par conséquent, le pays des merveilles n'existe pas. Alors qu'elle réalise qu'elle était en train de rêver, elle aperçoit un lapin blanc. Exactement comme celui de son rêve. Cela signifie qu'il y a toujours de l'espoir, non ?

Je prends un peu de recul pour admirer notre œuvre. Toutes ces couleurs, ces phrases, ces motifs. L'ensemble est parfait.

- Oui, je pense., je murmure en souriant.

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Bonchour mes lecteurs chéris 💙

J'espère que ce chapitre vous a plu ! Il est plus long que les autres, dites moi : est ce que vous préférez un long (2000 mots) par semaine ou deux plus courts (1000 mots fois 2) ?

Dites moi tout en commentaire Et, pitié, votez pour mon livre, ça me ferait tellement plaisir !

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