Partie 2 ◇7◇

Il y a certaines personnes, qui choisissent un métier par vocation. Sura Tanaka est de ceux là. Tous ceux qui la connaissent s'accorde sur ce point. Bien qu'elle soit nerveuse avant chaque audience, elle n'est jamais plus à l'aise que lorsqu'elle plaide.

Il lui a été confié une multitude de petites affaires, depuis qu'elle a débuté. En deux ans, elle n'en a jamais perdu une seule. Il est hors de question pour elle, qu'il en soit autrement pour celle ci.

Ainsi est Sura Tanaka. Déterminée. Faire ses preuves, n'est même plus la raison pour laquelle elle tient à gagner, aujourd'hui. Il s'agit de justice et de punition exemplaire envers ceux, qui baffouent tout ce en quoi, elle croyait jusque là.

Surtout, il s'agit de le sauver lui. Rien ne motive plus Sura, que de se battre pour quelqu'un qu'elle aime. Quelques soient les autres crimes qu'il a pu commettre, elle ne l'abandonnera jamais.

Enfin, faire payer les coupables de nombres de ses craintes actuelles est aussi une source de motivation.

Alors, lorsqu'elle entend la voix de la juge, demander à ce que la défense entre dans la salle, une fois tout le monde installé, elle prend une grande inspiration et d'un pas décidé, franchit la porte de la salle d'audience avec Mikey.

La voyant s'avancer dans l'allée qui les sépare, Maître Suzuki est sidéré, sous le choc et pris de nombreuses sueurs froides. On lui avait pourtant assuré qu'elle n'était plus de ce monde. La sérénité qui l'habitait quelques minutes plus tôt, semble être un lointain souvenir à présent.

Lorsqu'elle arrive à son niveau, Sura s'avance vers lui, les sourcils légèrement froncé.

- Tout va bien ? Lui demande t'elle. Vous avez l'air... surprit.

C'est le petit et discret sourire triomphant, qu'elle arbore en finissant sa phrase, qui confirme ce que Maître Suzuki vient de comprendre. Il a perdu. On ne se fait pas passer pour morte, pour revenir sans mettre K.O ses adversaires.

Une fois que Sura s'est installée, la juge prend la parole.

- Bien, avant de commencer, Maître Tanaka a porté à mon attention ce matin, une preuve supplémentaire qui selon moi, fera de ce procés, quelque chose de rapide.

- Nous n'en avons pas été informé ! Objecte Maître Suzuki.

- La dissimulation de preuve est légale, quand une vie est menacée. Intervient Sura. Étant donné, ce qu'il y a là dessus, la mienne l'était. Mais... je ne vous apprend rien.

- C'est pour cette raison, qu'après avoir fait authentifié ces vidéos, j'ai accepté qu'elles soient rajoutées au dossier. Conclut la juge.

Maître Suzuki enrage et panique. Toutefois, il ne peut rien faire et il le sait. Cette femme l'a bien piégé. Pense t'il.

Pendant une bonne demi heure, en cette fin d'après midi, toute l'audience découvre enfin, le fin mot de cette affaire.

Ils voient les nombreuses réunions défiler sous leurs yeux. On y parle à visage découvert et en toute confiance, de la victime. Cet homme honnête, qui voulait dénoncer les magouilles et les crimes, de ses supérieurs et de ses collègues. On y parle aussi de comment il a été réduit au silence, dans son propre appartement. De comment, se servir de ce meurtre pour faire accuser Manjiro Sano et ainsi, faire tomber le Bonten et mettre à sa place, un gang qui leur versait des pots de vins faramineux.

Surtout, il est dévoilé le prénom du véritable coupable, sans que sa présence ne soit nécessaire. Un mystère donc. Mystère que Sura, semble décidée à dissiper à l'instant même où les vidéos s'arrêtent.

Elle se lève et attend, d'avoir toute l'attention de l'audience.

- Comme vous avez pu le voir, ces vidéos disculpent totalement mon client. Mais, ce n'est pas tout. Elle nous révèle le prénom du coupable. Un certain Raito. Pendant un moment je me suis demandée, qui cela pouvait être. J'ai cherché sans relâche. Une vraie énigme. Quoique, Maître Suzuki ? Fait elle, se tournant vers l'interessé. Oserais je... vous demander vôtre prénom ?

Un soupir choqué, monte dans l'assistance. Mikey est le premier surprit de la révélation de Sura. Pour une fois, ça se voit sur son visage. Même à lui, elle l'a caché.

Devant le silence coupable de l'avocat, c'est la juge qui intervient.

- Répondez Maître Suzuki !

- Raito. Révèle t'il, la machoire serrée. Mais... un prénom n'est pas une preuve Maître Tanaka !

- Non. Un prénom, non. Mais une empreinte...

Sura se lève et porte à l'attention de la juge, un papier révélant des résultats d'analyses. Il est écrit noir sur blanc qu'une empreinte, appartenant à Raito Suzuki, a été retrouvée sur la scène de crime. Sura décide de s'expliquer.

- Voyez vous, vu le nombre de policiers présents sur ces vidéos, je me suis bêtement imaginée que c'étaient eux, qui avait procédé aux analyses de cette scène de crime. Après quelques recherches, pas bien longues, je me suis rendue compte que j'avais raison.

Le silence se fait dans l'assistance et tous sont suspendus aux lèvres de Sura.

- J'ai une très bonne amie qui a un frère dans la police. On a collaboré plusieurs fois tout les deux. Son honnêteté et son intégrité, m'ont souvent été d'une aide précieuse. Rarement à ce point là, cela dit. Il a ordonné d'autres analyses. De longues analyses. Précise t'elle. Vous aviez bien travaillé. Aucune de vos empreintes dans cet appartement. Sauf une.

Les sueurs froide saisissant Raito Suzuki, depuis que Sura est entrée dans cette salle, s'intensifient. Qu'est ce qu'il a oublié ?

- Selon moi. Reprend Sura. Vous avez dû être choqué, d'avoir tué quelqu'un. On le serait pour moins que ça. Alors... vous avez surement eu la nausée. Vous avez eu besoin de vous raffraichir, pour reprendre vos esprits. Vous avez passé de l'eau sur vôtre visage. Surtout, vous vous êtes tenu au lavabo. Vous avez dû oublier ce détail. Alors... vos empreintes sur les lieux du crime et vôtre prénom dans ces vidéos... j'ai l'impression que c'est terminé.

Un rire dément s'empare de Raito. Celui qu'on a lorsque l'on sait qu'on est piégé et qu'il n'y a plus aucun moyen de s'en sortir.

- Vous ne comprenez pas. Fait il. Vous ne comprenez rien. Ce mec... ce policier... il allait tous nous envoyer en prison... il allait gâché nos vies... vous savez ce qui arrive en prison, pour des hommes de loi...

- Ça suffit ! Intervient fermement la juge.

Elle fait signe aux officiers présents dans la salle, d'arrêter Raito. Il ne peut calmer son rire qui se fait à présent, désespéré. Quand les menottes sont à ses poignets, la juge reprend.

- J'ai déjà lancé les arrestations de tous ceux qui se trouvent sur ces vidéos. Vous retrouverez vos compagnons en cellule. J'ai bien l'intention que vos procés aient lieu rapidement. Je les présiderai moi même. En plus de vos crimes, j'ai horreur qu'on fasse honte à la justice de cette manière. Je ferai de vôtre cas, un véritable exemple je vous le garantis. Monsieur Sano ?

Mikey lève son regard vers elle, attendant ce qu'elle a à dire.

- Aux vues des preuves apportées par vôtre avocate, je vous présente nos excuses et prononce vôtre relaxe immédiate. En d'autres termes, vous êtes libre.

Il y a un bon moment que Mikey ne s'était pas sentit aussi soulagé. Ni même aussi reconnaissant, envers quelqu'un. Sura l'a sauvé et il ne l'oubliera jamais.

- Vôtre honneur. Intervient Sura, de manière hésitante.

La juge porte toute son attention sur elle et l'écoute attentivement.

- J'aimerai... formuler une requette. Je souhaiterai... que vous ajoutiez un autre chef d'accusation à leurs procés.

- Lequel ? Demande t'elle, intrigué.

Sura tremble un peu, mais ne se démonte pas pour autant.

- Incitation à la torture. Répond Sura, se sentant anormalement soulagée.

- Précisez. Demande la juge, ayant presque peur de comprendre.

Sura prend une grande inspiration, retire sa veste et s'apprête à faire la chose la plus difficile qu'elle ait faite, depuis très longtemps.

Tremblante, elle relève son haut, dévoilant ainsi les blessures de son dos, dont certaines, cicatrisent à peine, aux yeux de tous.

L'horreur s'installe dans la salle. Certains ont même du mal à réprimer une nausée.

Pour Mikey, c'est la première fois, qu'il voit ses blessures. Une colère noire monte en lui, à mesure que le dos de Sura reste exposé. Une envie que tous souffrent autant qu'elle, commence à sérieusement l'envahir.

"Pas ici, pas maintenant. Mais ils paieront. Ils paieront tous."

Lorsque Sura recouvre ses blessures, du tissus qui l'habille, elle ne saurait décrire tout ce qu'elle ressent. Un soulagement, une haine, une tristesse. Tout se mélange en elle.

- Ce sera torture pour ma part. Peu importe lequel d'entre eux a fait ça. Ils en seront tous accusés. Répond fermement la juge.

A ces mots, la juge prononce la fin du procés. L'officier qui tient fermement les bras de Raito, l'entraîne vers l'extérieur. Alors qu'il passe devant elle, Sura retient le bras de Raito quelques secondes.

- J'ai gagné, enfoiré. Lui chuchotte t'elle, avant qu'il ne quitte les lieux.

Au fur et à mesure, tous quittent la salle encore sonnés, de tout ce qui vient de se passer.

Sura s'appuie de ses deux mains, contre le pupitre devant elle. Le visage vers le sol, elle respire profondément, tentant de se reprendre.

- Ça va ? Lui demande Mikey, posant une main sur son épaule.

- Oui... j'ai... besoin de quelques minutes.

- Prends ton temps. Lui assure t'il.

Après quelques instants, la juge s'avance vers eux.

- Je peux vous parler, Maître Tanaka ?

- Oui, bien sûr. Répond Sura, le visage toujours baissée.

- Je t'attend juste devant. Affirme Mikey, obtenant un hochement de tête, pour réponse.

Alors qu'il s'éloigne, la juge s'installe aux côtés de Sura et prend la parole.

- Félicitations, c'était une remarquable plaidoirie.

- Merci. Souffle Sura.

- Cette discussion n'est pas désintéressée. La prévient elle. Un poste d'avocat est à pourvoir au sein de mon bureau. Je serai ravie de vous l'offrir, quand vous serez prête.

Sura soupire et s'assoit à son tour.

- J'en suis très flattée. Mais... honnêtement... je ne sais plus si j'ai vraiment envie d'être avocate. Je veux dire... je croyais en la justice. Pour moi, elle était fiable. On pouvait... avoir foi en elle. Mais... après cette affaire... je ne suis plus sûre de rien.

- Je vois. Soupire la juge. Vous savez, quand j'ai débuté, j'avais aussi les mêmes espoirs et les mêmes illusions. Puis, à force de procés et d'affaires douteuses, ça s'est envolé. Alors, je me suis promis d'incarner à mon niveau, cette justice en laquelle je crois.

Sura hoche la tête, restant attentive aux paroles de la juge, qui reprend.

- Vous êtes faite pour être avocate, Maître Tanaka. Ça se voit. Vous aimez plaider et vous le faites admirablement bien. Je suis persuadée que si vous continuez dans cette voie, avec les années, vous deviendrez une très grande avocate.

Sura sourit un peu, face à ces compliments et répond.

- A vrai dire, j'avais dans l'idée... plus tard, d'ouvrir mon propre cabinet d'avocat. Mais... je ne suis plus sûre de rien.

- Si l'envie vous revient, contactez moi. Je me ferai un plaisir de vous aider. Mais, pour le moment concentrez vous sur vôtre guérison. Vôtre vraie guérison.

Sura assimile les conseils qui lui sont donnés. La juge a raison. Elle a assez été dans le déni.

- Oui. Soupire t'elle. Il est temps que je m'y mette.

La juge a un sourire compatissant.

-  Vous y arriverez. J'en suis sûre.

- Merci vôtre honneur.

- Kora. Appelez moi, Kora.

Quand la juge prend congés, Sura sort de la salle, rejoignant Mikey. Ils prennent en silence le chemin de la voiture, garée derrière le tribunal. Sura ne tenait pas à affronter la ribambelle de journalistes agglutinés à l'avant.

Ils arrivent devant la voiture de Mikey et Sura se fige. Dans ce silence et après cette journée, c'est comme si tout ce qu'elle avait enduré, lui revenait en mémoire, la frappant violement et continuellement. Elle ne peut plus rien contenir. Elle va exploser.

Elle ferme les yeux, sous le regard inquiet de Mikey et craque finalement. Un cri déchirant émane d'elle, comme si tout ressortait enfin à travers sa voix qui se brise. Ce cri résonne dans cette nuit, venant de tomber. Un cri blessant au premier abord mais qui pourtant est, libérateur.

Ses pleurs commencent et ne trouvent aucun moyen de s'arrêter. Elle pleure sans relâche libérant enfin tout ce qu'elle ressent.

A bout de force, elle se laisse glisser le long de la voiture, continuant de pleurer. Ses sanglots sont si intenses, que sa respiration se coupe.

Mikey s'assoit près d'elle et l'attire contre lui, tentant tant bien que mal, de la calmer.

Ça lui fait mal de la voir comme ça. Paradoxalement, il est fier d'elle. Enfin, elle accepte de se laisser aller. La berçant un peu, il embrasse sa tempe à plusieurs reprises.

- Tu vas aller mieux, tu verras. Je ferai tout ce que je peux pour t'aider. Je te le jure.

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