Cela fait vingt ans que Daichi Nori est chirurgien. Il a passé seize ans à travailler pour plusieurs dispensaires de Tokyo. Il a toujours jouit d'une excellente réputation et d'une grande renommée. Ses compétences n'étaient plus à prouver.

Il y a quatre ans, Kokonoi Hajime l'a approché, quand il sortait de sa garde. Il lui a proposé un salaire mirobolant en échange d'une totale discrétion et surtout, d'une entière collaboration avec le Bonten.

Le gang avait besoin d'un médecin à disposition, quand leurs missions sont devenues de plus en plus dangereuses et nombreuses. Hors de question pour aucun des cadres, de se rendre à l'hôpital, s'il était blessé.

Daichi n'avait pas réfléchit très longtemps à cette proposition. Après seize ans de bons et loyaux services, il estimait qu'il avait le droit de mener la grande vie. Le salaire proposé par le Bonten, lui en donnerait amplement les moyens.

Après avoir donné son accord à Kokonoi, il avait démissioné et avait installé tout son équipement, à proximité du QG. A partir de ce moment, il était devenu un membre du Bonten. Il se consacrait uniquement aux membres de ce gang, que Manjiro Sano lui ordonnait de soigner.

En quatre ans, il les avait pratiquement tous soignés de blessures plus ou moins graves, faites par balles ou d'autres moyens.

Alors, quand Mikey l'a appelé aujourd'hui, pour se préparer à intervenir, il ne s'attendait pas du tout à ce qu'il allait voir.

Alors qu'il préparait Sura, à recevoir une anesthésie, elle avait reprit conscience et s'était fortement débattue, pensant qu'il s'agissait encore une fois d'un homme qui lui ferait du mal. Il n'attendait pas une telle énergie, par rapport à ce qu'on lui avait raconté sur ce qui l'avait conduit ici.

Elle avait crié, l'avait frappé et avait tenté vainement de s'enfuir, jusqu'à ce qu'il arrive à lui faire entendre raison, lui montrant son tatouage du Bonten, derrière son oreille.

Elle s'était finalement calmée. Elle s'était même excusée en pleurant. Daichi ne lui en tenait pas rigueur. Personne ne peut savoir l'impact que peuvent avoir de tels sévices sur quelqu'un.

Quand elle était complètement endormie, il avait pu procéder à un examen. Il aurait pu le faire sans anesthésie, mais il craignait que ce ne soit trop douloureux.

Ainsi, il avait pu constater les nombreuses lacérations dans son dos. Il y en avait vraiment beaucoup. Au premier coup d'œil, il n'aurait pas su dire combien de fois, la main de son bourreau s'était abattue sur elle.

Ensuite, il avait vu plusieurs traces bien visibles de coups un peu partout sur le haut de son corps. Jamais, depuis les quatre ans qu'il avait passé au Bonten, il n'avait eu affaire à un tel cas.

Il avait préféré, à la vue des traces de coups, s'assurer qu'aucun des organes de la jeune femme, n'était endommagé. Par miracle sans aucun doute, ce n'était pas le cas.

Scientifique chevronné, Daichi n'avait pas de religion et ne croyait en aucune force supérieur. Pourtant, il se disait que c'était sûrement quelque chose de ce genre, qui avait protégé sa patiente.

Il avait passé quatre heures à s'occuper d'elle. Il avait refermé minutieusement, chaque blessure qui le nécessitait, avait appliqué bon nombre de baumes et de traitements sur les zones qui en avaient besoin et surtout, il lui avait injecté de puissants anti douleurs s'avérant nécessaires, pour son réveil. Il ne lui avait appliqué aucun bandage. Ses blessures devaient guérir sans.

Physiquement, elle allait s'en remettre. Mentalement, cela dépendait d'elle. Daichi savait que ça n'aurait rien de facile, de retrouver une vie normale après ça. Mais elle était en vie. C'était une chance qu'elle avait.

A l'issue de ces heures de soins, Sura était toujours endormie, dans une des salles du QG du Bonten, où elle avait été transporté, spécialement aménagée pour elle.

Il était hors de question de la laisser rentrer chez elle. S'il y avait un endroit où elle serait plus en sécurité qu'ailleurs, c'était bien ici.

Après s'être assuré que Sura ne manquait de rien, Mikey fait face à Daichi, qui lui explique qu'elle est hors de danger, qu'elle a un traitement à suivre scrupuleusement et qu'elle aura besoin de beaucoup de repos.

Mikey acquiesce et prend la parole.

- Qu'est ce qu'il lui a fait exactement ? Demande t'il, la machoire on ne peut plus serrée.

- Elle m'a dit qu'elle préférait vous le dire elle même. Mais, si vous voulez savoir...

- Non. Le coupe Mikey. C'est entendu. Elle me le dira elle même. Quand elle sera prête.

Le médecin hoche la tête, prenant congés de son boss. Mikey retourne auprès de Sura, prend une chaise et s'assoit au bord du lit où elle est allongée.

Elle dort profondément. Il passe délicatement ses doigts sur le visage de la jeune femme. Aujourd'hui, on pourrait lui annoncé la pire des catastrophes, il ne bougera pas jusqu'à ce qu'elle se réveille.

Les autres cadres l'ont bien comprit et bien qu'ils s'étonnent, de voir une telle douceur chez leur boss, ils ne pensaient pas qu'il en serait autrement.

Lorsque Sanzu revient dans la salle commune, tous se tournent vers lui.

- Alors ? Il a parlé ? Lui demande Kokonoi.

- Une vraie pipelette. J'ai même pas eu besoin de forcer. Il est pas très marrant. Se plaint il. Cet imbécile a perdu connaissance. J'en profite pour faire une pause. Je me suis vraiment ennuyé. Je pensais qu'il serait un peu plus combatif.

Tous rient silencieusement, face à la déception du second du Bonten. Cette passion pour la torture, ils ne l'ont jamais vraiment comprise. Qu'à cela ne tienne, se sont ils toujours dit. Chacun d'entre eux, est bizarre à sa façon.

- Tu penses qu'il a encore des choses à dire ? Demande Kakucho.

- J'en sais rien, mais Mikey m'a dit de... laisser traîner. Je pense qu'il veut aller le voir. Explique Sanzu.

- C'est compréhensible. Déclare Ran.

- Sura a un caractère de merde, mais il faut bien lui reconnaître qu'elle n'a pas parlé, contrairement à ce mec. Ça force le respect. Intervient Kokonoi.

- On dirait que ça te fait mal de reconnaître ça. Constate Sanzu. Tu ne l'aimes vraiment pas ?

- Je ne la déteste pas, loin de là. Mais... je ne sais jamais sur quel pied danser avec elle. Est ce qu'elle va être agréable, ou passer ses nerfs sur moi ? Je me demande ça à chaque fois. Puis... on a jamais vraiment eu l'occasion de se connaître elle et moi. Même lors de ma brève contribution au Toman... Mikey ne la mélait jamais à rien.

- Et il a eu raison. J'aurais fait la même chose, je pense. Intervient Kakucho.

- Je suis d'accord. C'était la meilleure option. Rajoute Rindou.

- Vous pensez qu'elle s'en remettra ? S'inquiète Sanzu. Je veux dire... on ne sait jamais ce genre de chose. Les personnes que je torture meurent à la fin. Alors...

- Ce sera sûrement compliqué. Explique Kakucho. Elle va avoir besoin de beaucoup de temps.

- Mais elle est forte hein ? Elle peut s'en sortir, non ? Redevenir comme avant. Tente de se convaincre Sanzu.

Personne ne saurait lui répondre. Aucun d'entre eux, n'a vécut ce genre de chose. Ce qu'ils savent, c'est que eux même vivent avec certains traumatismes, dont ils ne se sont jamais vraiment remit. Ils ont simplement apprit à vivre avec, mais aucun n'est redevenu comme avant.

Deux heures plus tard, Sura émerge difficilement. Ses paupières sont assez lourdes et la lumière, bien qu'elle soit plutôt douce, lui agresse les yeux.

Elle distingue Mikey assis près d'elle, son regard fixement posé sur elle.

- Salut. Fait elle, faiblement.

Mikey ne saurait décrire le soulagement qu'il ressent, de la voir réveillée. Il lui sourit un peu et carresse son visage.

- Salut. Comment tu te sens ?

- Je crois que je plane carrément. Répond t'elle. Je suis à deux doigts de voir des licornes.

Mikey souffle du nez et rit silencieusement en secouant la tête.

- C'est sûrement ton traitement. L'informe t'il. Le médecin m'a dit que c'était puissant.

- Je vais pas m'en plaindre. Au moins je n'ai mal nulle part.

- Tant mieux.

Il veut savoir ce qui lui est arrivé. Cependant, elle n'est pas du tout en état de lui répondre et il le sait. Sura prend la main du jeune homme dans la sienne et le regarde.

- Merci.

- Pourquoi ? S'étonne t'il.

- D'être venu me chercher, malgré... ce que je t'ai dit.

- Je te l'ai dit, c'est oublié. N'y penses plus.

- Est ce que... je peux t'embrasser ? Lui demande t'elle.

Elle a vraiment l'air de douter de la réponse qu'il peut lui donner. Mikey ne comprend pas vraiment pourquoi, mais lui répond.

- Autant de fois que tu voudras.

Il se penche vers elle et saisit délicatement ses lèvres avec les siennes. Lorsqu'il se redresse, il constate que l'emprise qu'elle exerce sur sa main se resserre. Il l'interroge du regard.

- Tu ne me laisses plus seule... hein ? Le prie t'elle.

Il embrasse le dos de sa main et lui répond.

- Plus jamais. C'est promis. 

Il compte bien tenir sa parole. Il a eu beaucoup trop peur. Il ne laissera plus jamais ce genre de chose arriver. Surtout, Sanzu a raison. Il a bien l'intention d'aller voir ce type au sous sol et de ne plus jamais le laisser voir la lumière du jour. Toutefois, il n'a pas l'intention, que sa mort soit douce.