Lorsque Sura et Mikey passent la porte de la salle de réception, tous les regards se tournent vers eux. La jeune femme est très mal à l'aise. Elle a toujours détesté être le centre de l'attention.

Elle est très nerveuse. A tel point que Mikey, est obligé de rester planté là, avec elle. Elle tremble un peu, quand les regards se font plus insistants.

Mikey la connaît. Il sait dans quel état elle est en ce moment. Elle est en train de perdre tous ses moyens. Il faut qu'elle soit rassurée. Alors, il pose sa main sur celle dont elle se sert pour lui tenir le bras.

Sentant son contact, elle reprend un peu ses esprits. Elle lui lance un regard furtif et tout deux se détachent. Ils s'avancent parmi les invités, enclenchant quelques banales conversations.

Malgré les différents sujets abordés par les petits groupes d'invités, s'étant rassemblés, le nom de Manjiro Sano est sur toutes les lèvres.

Certains sont effrayés, d'autres fascinés, mais tous sont curieux. Pourquoi Sura Tanaka, avocate tout juste diplomée il y a deux ans, a été choisie par Manjiro Sano pour le défendre ? Voilà la question qui est dans tout les esprits.

Le patron de la jeune femme, n'a pas manqué d'expliquer que les deux jeunes gens se connaissaient, bien avant que le jeune homme ait besoin d'un avocat.

Ainsi, la véritable nature de leur relation est devenue, la chose à découvrir. Comme s'il s'agissait du dossier le plus brûlant du moment.

Voilà ce que voulait éviter Sura. Elle se sent épiée. Comme ces animaux au zoo, qu'on observe à travers une barrière de plexiglas et qui n'ont aucun moyen de s'échapper.

Ce n'est pas vraiment son stress qui l'importe le plus en ce moment. Du coin de l'œil, elle observe Mikey. Ce genre de situation pourrait l'énerver et elle sait que trop bien ce qui se passe quand Mikey est en colère.

Pour le moment, il semble rester cordial à sa manière. Il a une expression neutre, ses réponses sont très courtes, mais il semble calme. Ça la soulage un peu.

Elle se dit qu'elle peut donc aller prendre l'air, sur le balcon terrasse des bureaux. Elle a bien besoin d'air. Vingt minutes dans cet endroit, lui ont semblées des heures.

Elle donnerait n'importe quoi pour retirer ses chaussures, qui lui donnent l'impression de marcher sur du verre. Toutefois, ça ne se fait pas dans ce genre d'endroit.

Elle râle interieurement et s'adosse à la rambarde du balcon, levant son visage au ciel. L'air frais et le semblant de calme de cette terrasse, lui font du bien.

Sa tranquillité est vite rompue par l'arrivée d'un homme qu'elle connaît. C'est avec cet homme qu'elle a eu un rendez-vous, quelques jours plus tôt. Elle aurait dû se douter qu'il serait là.

Apparemment, la maladie grave qu'elle s'est honteusement inventée, ne le fait pas fuir. Une vraie tuile. Se dit elle.

Des femmes, il y en a plein. Alors pourquoi, ce mec s'accroche ? Il est pourtant évident que Sura n'en a rien à faire.

Se plaçant à ses côtés, il lui offre un grand sourire, dont elle se serait volontiers passé.

Elle se redresse et se retourne vers lui, attendant non sans une certaine apréhension ce qu'il a à lui dire.

- Tu es vraiment superbe ce soir. Lui dit il. Je me sens chanceux.

- Chanceux ? Fait elle, arquant un sourcil.

- Oui. Aucun homme présent ici, ne peut se vanter d'avoir eu le droit de passer une soirée avec toi. Il faudrait peut être qu'on remette ça.

"Là, tu te plantes mon grand"

Sura souffle fortement. Non, il n'a rien comprit. Elle a accepté un dîner avec lui, parce qu'il l'a eu à l'usure. Elle pensait qu'il se rendrait compte, qu'elle ne voulait pas de lui.

Apparemment, l'égo de certains hommes laisse peu de place à la réflexion. Il en est la preuve vivante. Elle a tout fait pour le faire fuir.

- Je ne serai pas disponible, pour quelques temps. Tente t'elle.

- Oh je me doute. Mais... je suis sûr qu'on pourra trouver du temps.

Elle roule des yeux. Comment est ce qu'elle va s'en débarrasser maintenant ?

- Je pense qu'on ferait un très beau couple Sura. Tu es une des plus belles femmes que je connaisse. Tu as un sacré caractère, mais tu peux le changer.

"Ne changes jamais, tu es parfaite à mes yeux."

C'est aux paroles de Mikey, des années plus tôt, qu'elle repense entendant les dires de l'homme en face d'elle. Elle se demande pourquoi, cela lui vient à l'esprit d'ailleurs.

- Je suis sûr que si tu fais quelques efforts, ce petit défaut n'en sera plus un et...

Il se coupe lui même, quand Sura sent une légère chaleur sur ses épaules. Regardant d'où ça provient, elle constate qu'une veste de costume à été posée délicatement autour d'elle.

Tournant un peu plus le visage, elle voit Mikey, lancer un regard des plus glacial à son interlocuteur.

En temps normal elle l'aurait incendié, lui disant qu'il n'avait plus le droit d'avoir ce genre de comportement avec elle.

Cependant, elle doit avouer que l'attitude de son ex petit ami, est salvatrice en ce moment. Elle l'en remercierait presque.

- Tout va bien ici ? Demande Mikey, le ton calme, fixant toujours cet homme en face d'eux.

- Je... hum... je vais retourner à l'intérieur. Bafouille t'il, s'en allant d'un pas rapide.

Le voyant rentrer, Sura soupire et s'adosse de nouveau à la rambarde, imitée par Mikey.

- Pardon. Commence le blanc. Il avait l'air de t'agacer alors...

Il ment. C'est de la jalousie pure et simple, qui l'a poussé à agir de la sorte. Voir un autre homme que lui, tenter se séduire Sura, lui est insupportable.

Il a déjà eu vent, de certaines de ses histoires, avec d'autres hommes. Il n'avait rien le droit de faire. Il le savait. Mais ce soir, hors de question que ça se passe sous ses yeux.

Surtout, il a entendu les propos du jeune avocat. On ne cherche pas à changer une femme comme elle. Il faut être fou, pour ne pas se rendre compte de la valeur de Sura. Pense Mikey.

- C'est rien. Répond t'elle, sèchement. Comment se passe ta soirée ? Demande t'elle, préférant changer de sujet.

- Ton patron est aux anges. Affirme t'il.

- J'imagine. Souffle Sura. Un verre de plus et il dira que c'était son idée que je te défendes.

- Si tu le supportes si peu, pourquoi ne pas ouvrir ton propre cabinet ?

- C'est loin d'être gratuit !

- Je pourrais t'aider si tu...

- Je ne veux plus rien de toi, Mikey. Le coupe t'elle. Retournons à l'intérieur.

Sans un autre regard, elle rentre à son tour. Mikey désespère. Elle est tellement sur la défensive. N'importe laquelle de ses paroles, n'importe lequel de ses actes, elle le prend de travers.

Plus il essaye de se rapprocher d'elle, plus elle s'éloigne. C'est presque une torture, de la voir ainsi avec lui. Si froide, si distante. Comme s'ils n'étaient que des inconnus au final.

Elle n'y est pour rien. Cette attitude avec lui est presque un réflexe chez elle. Elle a beaucoup souffert par sa faute. Elle cherche uniquement à se protéger.

Cette situation leur fait mal à tout les deux. Il a été son premier amour et elle a été le siens. Quelques soient les maux infligés par une telle relation, on oublie jamais son premier amour.

Leur relation était forte et unique. Ils seraient allés dans les flammes l'un pour l'autre. C'était une relation intense, très intense, qui les a tout les deux marqués, leur laissant un lien indéniable et indéfectible.

C'est bien ce lien qui pousse Sura, à se tenir à ses côtés aujourd'hui, à le défendre quoi qu'il arrive.

C'est aussi ce lien qui la rend malade. Cette sorte d'effet d'aimant qu'elle ressent à chaque fois qu'il s'agit de lui.

- Alors mademoiselle Tanaka, comment avez vous connu monsieur Sano ? Lui demande une jeune femme, consultante en communication.

C'est bien la seule dans cette salle, à avoir osé poser directement la question. Tous les autres se sont juste perdus en spéculations toutes plus absurdes les unes que les autres.

- Je l'ai connu quand j'étais au collège. Explique t'elle.

- Un ami d'enfance donc ?

- En quelques sortes. Soupire Sura.

- Rien de plus croustillant ? Demande t'elle, dans un sourire curieux. Des femmes tueraient pour qu'il les regarde comme il vous regarde. Précise t'elle. Donc... rien d'autre que des amis d'enfance ?

Ça ne la regarde pas. Juge Sura. Elle n'a pas à lui dévoiler sa vie, juste parce qu'elle le demande.

- Non rien d'autre. Assure t'elle.

Son interlocutrice semble déçue. Comme si elle attendait plus de réponses et de ragots, de la part de Sura. Cette dernière s'éloigne et place ses mains dans les poches de la veste de Mikey, qu'elle a toujours sur le dos.

Elle sent entre ses doigts, un papier qui la gêne. Elle le sort de la poche et y jette un coup d'œil. Il s'agit d'un ticket de caisse. Elle s'étonne de ce qu'elle y lit.

Il est écrit qu'il a acheté une boîte de chocolat. La marque préférée de la mère de Sura.

Ses yeux s'écarquillent malgré elle. Alors c'est lui, qui amène des chocolats à sa mère une fois par semaine ? Pourquoi fait il ça ? Surtout, pourquoi ne veut il pas qu'elle le sache ?

Elle préfère remettre ses questions à plus tard. Ce n'est ni le lieu, ni le moment de les poser. Surtout, elle a peur des réponses. Mais ça, elle ne se l'avouera jamais.