Grand'Peur
Lorsque la compagnie s'éveilla on vit au loin un Thorin observant l'horizon encore strié par les nuages, le ciel passant d'un orange chaud au bleu encore profond de la nuit. Ils savaient qu'à présent ils allaient pénétrer dans la dernière forêt entre eux et la montagne et pas un seul nain n'était prêt à cela, pas même le porteur de l'anneau qui devait avouer trouver un air terrifiant à cette forêt de Grand'Peur. Malheureusement, vint le temps où ils durent se mettre en route, et c'est avec des sacs lourds sur le dos qu'ils mirent les pieds sur le chemin des elfes qui traversaient la forêt. Dès que les premiers arbres furent passés, ils eurent la soudaine impression que le soleil du matin avait fait chemin arrière pour que la nuit tombe à nouveau. Tout était si sombre, l'air était suffocant et les chants des oiseaux c'étaient tus. On ne voyait pas plus loin que devant soi, on devait alors fixer le sol pour ne pas perdre les dalles cassées et ne surtout pas s'enfoncer dans les bois. On n'entendit alors plus aucun nain chanter pour leur chef, et ils marchèrent, faisant claquer leurs chaussures de métal sur le sol, dans des échos aussi effrayants que brisants. Jamais encore ces grands guerriers n'avaient connu une telle angoisse que lorsqu'ils marchèrent dans cette forêt. Et tout cela n'était qu'en journée. La nuit était bien pire !
Si le jour dans la forêt était aussi sombre que la nuit, la nuit elle était si sombre que lorsqu'ils fermaient les yeux ils ne voyaient pas de différence avec lorsqu'ils les ouvraient. On tenta le premier soir de faire un feu, mais ils comprirent vite que cela était une très mauvaise idée lorsqu'ils virent des yeux s'allumer comme des ampoules dans les arbres alentours. Ils refusaient d'attirer des prédateurs sur eux alors ils éteignirent leurs seules flammes étouffées par les ombres et ils dormirent bien peu. Ils marchaient sans comprendre si le jour ou la nuit était sur leurs têtes, mangeaient à peine de la nourriture de leur ancien hôte, et les journées à se prélasser dans la marre de Beorn semblaient bien loin. L'espoir s'envolait bien plus vite qu'on l'aurait cru, tout comme la nourriture, et on songea alors à chasser. Ils arrivèrent à tuer une chauve-souris, la flèche de Kili ayant fait mouche un soir, mais lorsqu'ils gouttèrent à sa chaire ils eurent bien du mal à retenir de grands haut-le-cœur qui secouèrent leurs poitrines. On ne pouvait manger ce qui se trouvait dans cette forêt, même l'air était vicié, ils devaient simplement marcher et ignorer le fait que les arbres étaient à perte de vue. On songea d'ailleurs plusieurs fois que ce chemin était bien trop sinueux, et qu'il aurait été plus judicieux de couper au travers des bois. Heureusement, notre hobbit avait encore sa tête et il leur hurlait toujours de ne pas songer à faire cela, quoi qu'il puisse advenir. On lui obéissait souvent, on avait bien trop peur de se perdre et de ne jamais être retrouvé, mais les ventres se creusaient, les sacs de nourriture s'allégeaient et les arbres ne cessaient de se montrer.
Mais, à l'aube du cinquième jour de marche dans la forêt, on vit une chose bien différente des autres. Une rivière. Bien des nains se précipitèrent vers l'eau et voulurent y plonger les mains pour boire de grandes gorgées mais Bilbon hurla à nouveau de sa petite voix inquiète.
« Beorn m'a prévenu que nous tomberions face à une rivière ! Il ne faut surtout pas y toucher ! Elle est ensorcelée ! »
« Ce Cambrioleur commence à m'échauffer !! » Hurla Dori qui commençait à ne plus supporter que Bilbon tente de le sauver.
Notre hobbit fut bien vexé par l'attitude du nain mais il vit alors Thorin rattraper ses guerriers et leur hurler d'écouter la sagesse de leur quatorzième. Ils obéirent bien sûr car même sans couronne sur son front, il restait leur roi, leur prince, et jamais ils n'avaient osé le contredire. On vit alors les deux plus jeunes se redresser du bord de la rivière et s'approcher de leur ami Hobbit, qu'ils avaient appris à adorer après tout ce temps à marcher ensemble.
« Que conseillez-vous, Bilbon ? » demanda alors Fili, tortillant les tresses au bout de sa moustache.
« Eh bien, je vois une petite barque de l'autre côté de la rivière puisque le pont est brisé. Il y a également des racines qui passent d'un bord à l'autre. »
« La barque, pensez-vous qu'elle soit atteignable ? »
« Peut-être... »
Thorin s'approcha d'eux et soupira longuement, son air princier plissant son front.
« Bilbon est le plus léger de tous, il passera par les racines, ira de l'autre côté et attachera une corde à la barque pour que nous puissions passer. »
Bilbon bafouilla un instant mais on ne l'écouta pas, l'encourageant à passer en premier pour sauver les autres. Le hobbit remonta alors son pantalon en le tirant par la ceinture puis il s'approcha des grosses racines. Elles passaient d'un bord à l'autre, vacillant déjà alors qu'il n'avait posé qu'un pied dessus. Mais il devait rester concentré, tomber dans cette eau serait très certainement fatale alors il ne comptait pas mourir ici et abandonner ces pauvres nains à leur sort. Il grimpa alors sur le tronc -il était doué pour se hisser dans les arbres comme bien d'autres à la Comté- et se glissa jusqu'à la première racine. Le hobbit su alors montrer un grand talent pour s'équilibrer malgré son sac sur les épaules, et il sut même sauter de racine en racine, frôlant parfois l'eau bouillant dessous de justesse. Il dut même avouer que lorsqu'il se pencha par-dessus l'eau il eut une irrésistible envie de s'y jeter et de boire une grande lampée. Il comprit alors mieux la soudaine colère que Dori lui avait montrée et un sourire orna ses lèvres. Il se disait que finalement il n'avait pas été détesté par cette compagnie et que bien au contraire ils lui portaient un grand intérêt tout en lui donnant des responsabilités, après tout, Thorin venait de lui confier les vies de toute sa compagnie !
Ainsi, alors qu'il mettait les pieds de l'autre côté de la rivière, il bomba le torse fièrement. Il s'approcha alors de la petite barque qu'il examina.
« La barque n'est pas percée ! elle devrait flotter ! mais elle ne portera guère plus de deux nains par passage !! » hurla-t-il tout en observant les ombres de l'autre côté de la rivière.
« Bien Cher Cambrioleur ! Fili va vous lancer une corde ! attrapez-la et nouez-la fermement à la barque ! » hurla alors Kili bien heureux que Bilbon n'ait pas chuté dans l'eau.
Chose dite, chose faite. Fili était bon lanceur et la corde avait fini par atterrir juste sur le crâne du hobbit dans un bruit de chute qui semblait douloureux on entendit alors un petit homme râler, masser le haut de son crâne avant d'entendre que la corde était passée dans un anneau à l'avant de la barque. Bilbon savait nouer des cordes, dans son petit chez-lui il tressait et nouait des cordes par plaisir et donc cela fut facile pour lui de nouer la corde bien solidement. Il se redressa alors et hurla.
« VOUS POUVEZ TIRER VERS VOUS ! »
Il vit alors la barque racler la terre avant de tomber à l'eau. Immédiatement elle fut emportée par le courant et les nains la ramenèrent à terre. On fit passer Thorin en premier avec Balin, avant de faire passer petit à petit des autres. On jugea que Bombur devait passer seul car son obésité l'amenait à presque couler la barque à lui seul. On dut le tirer bien fort pour le ramener, trois nains tiraient à l'unisson et cela agaça bien Bombur d'être à nouveau dernier. Il grogna alors tandis qu'il sortait de la barque et que les autres s'étaient assis au sol, épuisé. C'est alors qu'on entendit des pas, rapides, par coups de trois, venant de l'intérieur des bois. Thorin prit alors son arc, le banda et visa. On vit alors sortir des bois un magnifique cerf, d'une couleur si claire qu'ils eurent les yeux douloureux et plissés. Thorin n'hésita pourtant pas et décocha une flèche en sa direction. Il était très bon tireur mais pour la première fois il rata sa cible. Bilbon le regarda alors en soupirant.
« Un cerf blanc... c'était un très bon présage vous n'auriez pas dû tirer... »
Thorin le regarda seulement avant que l'on entende un cri
« BOMBUR EST TOMBE A L'EAU ! »
On vit alors Kili se pencher au bord de l'eau et tirer le nain sur la rive. Il était allongé, l'air paisible sur le sol rocailleux, un sourire aux lèvres. On le secoua alors, le sommant d'ouvrir les yeux, mais rien n'y faisait, pas même les appels en langue de leurs ancêtres. Bilbon s'approcha alors et soupira.
« Cette eau est enchantée, je crois qu'il est dans un sommeil profond. Peut-être devrions-nous reprendre notre chemin, nous trouverons peut-être quelque chose qui le soignera plus loin ?... »
Tous pensèrent la même chose sans le dire, ils se lamentaient que ce soit le plus lourd de tous qui devait être porté. Mais on prépara tout de même de quoi le transporter plus facilement et quatre nains se relayaient dans le jour pour le porter alors qu'il semblait dormir bien paisiblement. Les esprits étaient ainsi échauffés et épuisés, tout comme leurs corps qui ne cessaient de réclamer plus d'eau et de nourriture. Mais nos pauvres nains n'étaient absolument pas au bout de leurs peines. Au loin, on vit que le chemin... avait disparu. On s'arrêta devant les dalles brisées qui se trouvaient face à plusieurs arbres enchevêtrés et courbés. On se regarda longuement, on pesta et on tourna en rond. Or, c'est ainsi que sans le vouloir ils s'enfoncèrent dans la forêt sombre, tournant plus en rond encore. Les bruits de pas, les grognements et les sons peu rassurants se multipliaient autour de la compagnie tandis qu'ils entraient dans une zone rocheuse. Ils virent que les branches à cet endroit étaient drôlement couvertes par des toiles, des toiles immenses et qui collaient aux barbes et aux cheveux. Mais personne ne fit de remarque, ils étaient bien trop enivrés par l'air enchanté et la colère. Même Thorin avait fini par perdre la tête, il répétait sans cesse que le jour de Durin approchait, comme un vieux fou le ferait, ressassant son passé sans cesse.
« Nous sommes perdus... nous sommes perdus ! » S'exclamait sans cesses Kili, que personne n'écoutait.
Seul Bilbon semblait ne pas encore avoir perdu l'esprit et il se mit à réfléchir lorsque les autres se mirent à tourner en rond autour de lui, tout affirmant qu'ils allaient vers l'Est ou l'Ouest, s'échauffants entre eux. Bilbon se donna alors une tape sur le front et regarda les hauts arbres autour de lui. Il fallait grimper, oui c'est ce qu'il fallait faire pour voir le soleil et savoir où aller ! il choisit alors un arbre tordu à ses côtés, un grand chêne noueux, auquel il commença à grimper. Plus il montait plus la lumière l'éblouissait, mais lorsqu'enfin il se trouva tout au sommet de cette arbre, entouré par une épaisse couche de feuilles il inspira longuement. Son esprit sembla soudainement se vider de tout son brouillard épais, comme nettoyé par l'air pur qui flottait autour de lui. il vit alors u loin un lac magnifique, une longue rivière qui coulait et serpentait joyeusement, alors que non loin, un pic solitaire se tenait, perçant la couche nuageuse. Bilbon en eut le souffle coupé tandis qu'il hurlait aux nains qu'il la voyait, enfin il voyait la demeure du roi sous la montagne. Mais personne ne répondit. Il se tourna alors en tout sens et vit que non loin, les arbres craquaient et se courbaient. Il se sentit soudainement frémir du bout de ses orteils jusqu'au-dessus de ses boucles dorées. Il descendit alors en vitesse de son arbre, trébuchant et manquant de se casser le cou chaque fois qu'il descendait d'une branche. Malheureusement, lorsqu'il retrouva la terre ferme, ses compagnons avaient disparu. Il haleta et se trouva bien stupide de les avoir laissés là sans les prévenir de son départ. Maintenant il était perdu !
C'est alors qu'il entendit des pas arriver en vitesse vers lui et sans même qu'il puisse hurler quoi que se soit il se sentait palpé, tourné et entortillé dans une chose gluante et froide. Ils e senti être transporté, tenu entre des pattes longues et poilues. Il se sentait paniquer alors qu'il se sentait enfin pendre par les pieds il ne savait où, alors que grouillaient autour de lui ce qui semblaient être des immenses araignées, qui devaient bien faire trois fois la taille de notre petit hobbit. Mais ce voyage l'avait changé. Il y a bien longtemps, lorsqu'il ne vivait que dans ses livres, il aurait déjà laissé tomber et se serait laissé dévorer. Mais cette fois il le refusait ! il prit alors son épée qui n'avait plus jamais quitté sa ceinture depuis longtemps et il la dégaina. Ainsi, lorsqu'il senti une chose se placer au-dessus de lui pour croquer rien qu'un bout, il sorti son épée comme il le put et perça l'animal passant par son abdomen et remontant dans son thorax. Il entendit crisser les mandibules de l'araignée avant qu'elle ne se replie sur elle-même et tombe du haut de l'arbre où Bilbon avait été pendu. Il se sorti alors de l'immense cocon de toile et enfila immédiatement son anneau. Il ne devait pas être vu. C'est alors qu'il vit et entendit surtout, les araignées tournant autour de lui.
« Ils sont bien gras ceux-là... »
« Je voudrais chiper un morceau, rien qu'un morceau ! »
« Certains sont plus maigrichons... que des os ! »
Bilbon bomba alors le torse et commença à marcher le long des branches. Il détachait peu à peu ses amis nains qui tombèrent au sol lentement et délicatement, leur chute ralentie par les différentes toiles qui se trouvaient sous eux. Bilbon reconnaissait ses amis en voyant un gros nez dépasser, une chaussure ou quelques cheveux ce qui lui permit de trouver tout le monde et s'assurer que personne n'avait été perdu. Mais c'est alors qu'il allait libérer le dernier, vraisemblablement Bombur au vu de la rondeur du cocon, qu'il remarqua qu'une araignée avait repéré que bien de leurs proies avaient été libérées. Il s'approcha alors et donna un grand coup d'épée, coupant une mandibule et faisant hurler l'araignée des « Ou-est-ce ?! » qui firent sourire Bilbon. Il continua alors de frapper devant lui avant de planter toute son épée entre les huit yeux de la créature. Il l'entendit alors hurler dans un dernier souffle sifflant un « ça a un dard ! » ce qui trouva bien saillant comme nom d'épée. Il termina donc par libérer le gros nain et tous en bas se dépêtraient de leurs toiles. Le petit hobbit bomba alors le torse et commença à glisser le long de l'arbre au tronc épais où ils avaient été accrochés. C'est alors qu'il senti quelque chose glisser de sa poche, et comme un écho doré prenant ses oreilles, il l'entendit, son anneau, rouler entre les racines et disparaître hors de sa vue. Il se senti comme paralysé par l'inquiétude alors qu'il dégringolait entre les racines, son anneau était perdu, et c'était comme s'il était emporté dans un tourbillon de tourments. Il entendit alors n petit écho cristallin, comme si l'on frappait avec douceur un métal précieux. Il tourna alors sur lui-même, a genoux dans l'humus englué de toile. C'est alors qu'il le senti, brulant et chauffant son index alors qu'il l'avait touché par grand hasard. Il le tira alors vers lui, murmurant un « A moi, tu es à moi », avant de se rouler en boule à l'ombre d'un grand chêne. Il l'enfila finalement, sentant soudain un grand soulagement prendre sa poitrine et son âme.
C'est lorsque Bilbon se coupa du monde que plus loin les nains avaient réussi à se sortir de leurs toiles. Mais ils n'avaient pas au bout de leurs surprises. Leurs provisions avaient disparu, Bombur était soudainement réveillé, comme si la piqure d'un tel arachnide l'avait sorti de sa torpeur, mais surtout ils étaient désarmés. Ils ne savaient qui les avait sortis de ces toiles, ils n'avaient pas eu le temps de le voir, mais il avait disparu, les laissant seuls et désarmés face à des immenses dames à huit pattes affamées. Ils n'hésitèrent guère à courir dans la pénombre de la forêt, prenant branchages et pierres pour se défendre. Ils ne faisaient que les ralentir et peu à peu, ils se dispersaient, perdant le petit groupe. On vit tout d'abord FIli et Kili ralentir pour lancer plus de pierres, ils perdirent en premier les autres, on vit ensuite Bombur disparaître derrière, épuisé de courir, écrasé par son poids et le venin qui coulait encore dans ses longues veines. Puis peu à peu les nains disparurent dans la forêt. C'est alors qu'on vit Thorin, seul, armé d'une grande branche de chêne, poursuivit par une immense araignée mère. Son abdomen était enflé, raclant le sol lorsqu'elle se précipitait vers lui. Le prince sous la montagne se prépara, il hurla un dernier grand cri pour se donner courage lorsque soudainement il se senti soufflé par un grand courant d'air glacé. Il tomba à la renverse, dégringola le long d'une butte et tomba contre un arbre. Ainsi, alors qu'il massait son crâne, se demandant qui avait bien pu le sortir de cette misère, l'éloignant du regard de ces affreuses créatures, qu'il entendit des bruits de bottes. Il se redressa vivement, tâtonnant dans la pénombre, il hurla alors après ses compagnons, se disant que cela ne pouvait être qu'eux. Mais il fut bien surpris de voir que face à lui se tenaient des hommes, parfaitement coiffés, armés de grands arcs de hêtre, et bottés de magnifiques chaussures de cuirs polies. Il soupira longuement, et il comprit alors qu'il venait de rencontrer les elfes de bois que Gandalf avaient cités, et qui, selon lui, n'étaient guère d'une grande aide. Mais, malgré tout, il tendit ses mains, ces elfes étaient surement plus sages que ces grandes araignées, et de plus il mourrait de faim.
Les elfes des bois furent bien surpris de voir le fils de Thrain dans les bois, et surtout ils lui connaissaient une humeur bien déplaisante, ils ne comprenaient guère pour quelle raison il s'était rendu avec tant de facilité. Mais cela ne fut pas encore commenté, et on attacha ses mains en prévoyance. Enfin, on le fit marcher dans la forêt, leur chemin éclairé par des torches de lumière blanche. Ainsi, ils savaient reconnaître les reliefs et chaque tronc de la forêt pour simplement retrouver la grande demeure de leur Roi, le Roi de la forêt, le plus sage des rois elfes à des lieux : Thranduil. C'était un roi bon, sage, mais il refusait la critique. Il y a bien longtemps, alors que Thorin même n'avait pas vu le jour, ce grand roi faisait affaire avec Thror, le priant de forger pour lui de magnifiques gemmes de lumière. Or, selon les peuples, là l'histoire diverge. Les nains disent que les elfes ont refusé de payer pour leur travail et que pour compenser cela, jamais ils n'avaient donné les pierres au roi. Thranduil, lui, disait que Thror avait été trop avare, et qu'il avait payé déjà très gracieusement, mais que le roi faisait un chantage inacceptable pour en avoir toujours plus... Thorin, lui, penchait pour croire son grand-père et cela avait encore plus nourrit sa colère envers les elfes.
Au loin, on vit apparaître la demeure de Thranduil, immense, comme creusée à même un immense arbre millénaire. On poussa à l'intérieur un Thorin au front plissé et blessé par sa chute sur l'arbre. Il n'osait avouer que l'architecture des elfes l'avait impressionné lorsqu'il passa la porte. Tout était de sorte à être une immense pièce remplie de lumière, où coulait un chemin de bois menant au centre d'une pièce polie et taillée. Là, se trouvait le trône du grand roi, qui, le torse bombé, observa le nain aux cheveux hirsutes s'approcher. Il n'eut pas de difficulté à le reconnaître, Thranduil était un elfe qui avait vécu à des temps immémoriaux, et sa mémoire ne lui faisait jamais défaut lorsqu'il fallait reconnaître un visage.
Ma petite troupe s'approcha alors du trône, les elfes se courbèrent tous, rangeant leurs épées dans leurs fourreaux, mais le nain refusa de se courber, au contraire il bomba d'autant plus son torse. C'est alors que le roi aux longs cheveux blonds s'approcha. Il descendit les longues marches de bois qui entouraient son magnifique trône taillé, puis il marcha jusqu'à Thorin. Il le surplomba de bien des distances, le regard tendre mais pourtant intransigeant.
« Thorin Ecu-De-Chêne, je suis ravi de vous recevoir dans ma demeure. »
« Poings liés ! SI vous m'accueillez je ne pense guère mériter un tel traitement ! »
« Vous avez pénétré illégalement sur mes terres, qui sait ce que vous y faisiez... bien des maux grandissent dans cette forêt, bien des maux... je me demande ce qui pourrait vous mener à la traverser plutôt que de la contourner... » Thranduil comme je vous l'ai répété, était très sage, et il ne lui fallait pas bien d'indices pour savoir pourquoi Thorin était passé par-là.
« J'allais commercer avec des nains de ma famille, plus loin, après la ville sur le lac. »
Thranduil n'en croyait pas un mot. « Ici vous êtes bien proche de votre demeure sous la montagne, je sais que vous désirez retourner sur votre trône, et... par ma grâce je vous y aiderai. »
« Et qui vous dit que j'accepterai Votre aide ?! »
« Votre grand-père était plus sage que vous ne l'êtes... j'ai des armés, des hommes qui seraient aptes à occire ce dragon... mais beaucoup des miens perdraient la vie dans cette conquête, voilà pourquoi si je vous aide je vous demanderai une participation... se trouvent sous la montagne des gemmes que je convoite bien plus que tout... »
Thorin se mit à bouillir de rage alors que Thranduil s'était approché gracieusement de lui. Il rejeta alors ses cheveux en arrière levant le menton haut vers le grand elfe. Ses poings de forgeron étaient serrés, son torse bombé alors qu'il battait du pied irrégulièrement.
« Vous n'avez pas d'honneur ! Pas de pitié ! Rien que de la peur et de la couardise ! Vous dites vouloir nous aider à regagner ce qui nous est dû mais vous voulez en échange que je vous offre les richesses de mon peuple ! Je vomis vos paroles Thranduil le lâche ! »
On entendit le nain grogner des insultes, des médisances dans sa langue d'antan. Cela fit trembler de colère le grand elfe qui rejeta en arrière sa longue cape dorée. Il fit signe à ses soldats de se redresser sur leurs pieds, ils attrapèrent alors tous le nain qui se débattit violemment entre les mains fines. Et alors qu'il s'asseyait dans son grand trône taillé il donna ordres.
« Bien, dans ce cas pourrissez dans nos cachots, cent ans si cela vous chante, ce temps n'est rien pour un elfe... j'attendrais... »
Il emporta alors durement le nain qui passa les couloirs cette fois les pieds trainant tant on le maintenait et forçait à marcher. Il se vit alors jeté dans une cellule sombre où il ne trouva qu'un lit et une fenêtre que des racines avaient presque obstruée. Il insulta une dernière fois les elfes qui le détachaient et lorsqu'ils fermèrent la cellule derrière eux, on entendit un dernier grognement de la part de Thorin qui prit place sur le lit, déjà inquiet. Il n'avait plus personne, plus de compagnie, même le hobbit n'était plus là ! qui sait ? Peut-être avait-il été dévoré par une araignée ! à cette idée il se mit à tourner en rond partout où il le pouvait. Il était perdu, enfermé, et maintenant seul...
Mais, il ne l'était pas ! dans les couloirs, une petite ombre filait entre les elfes, discrète et silencieuse, elle allait et venait de partout pour savoir qui était enfermé dans toutes ces cellules. Il compta alors, et il ne fut pas difficile de retrouver des nains en colère dans cet endroit. Il les entendit de très loin frapper contre les barreaux, grommeler et jurer. Il ne lui fallut que peu de temps pour conclure que tous étaient là. Thorin avait été le dernier à être attrapé, et Bilbon était entré en même temps que lui. Il le savait donc en sécurité dans la grande cellule à l'étage inférieur. Il ne restait plus à ce qu'il trouve un moyen de tous les faire sortir de là, et ce n'était pas une mince à faire. Les nains étaient si bruyants, et les gardes si nombreux... alors, caché dans l'ombre il s'installa et se mit à réfléchir. Les faire sortir impliquait d'attendre le bon moment, un moment calme où les gardes se relayeraient par exemple. Mais il leur fallait surtout une sortie. Il décida donc de visiter. Il passa par les nombreux étages de la demeure, visita avec grand plaisir une si belle construction, avant d'enfin trouver un balconnet. Il regarda, respira et apprécia cet instant. La forêt était derrière eux à présent, la montagne au-devant, et ce qui était mieux encore, c'est qu'il y avait un moyen de s'enfuir non loin d'eux. Une rivière ! elle menait à un grand lac où il vit bien des habitations qui lui semblaient si minuscules vues de si loin. Mais il descella le fait qu'elle était fermée par un grand mur, il n'y avait qu'une porte, et il trouva également que cette ville n'était reliée au sol que par un grand pont de bois qui lui aussi semblait gardé. Traverser la rivière les mènerait pour sûr à cette ville, et à des soucis pour entrer et trouver des armes. Mais ce n'était guère important, il devait sortir par là car il n'y avait pas d'autres sorties qui les menaient hors de la demeure de Thranduil et de la forêt.
Le hobbit descendit les marches vers les cellules et c'est alors qu'il remarqua une chose, l'occasion de sortir c'était présentée bien plus vite qu'il ne l'aurait cru. Le soir-même, un grand buffet allait être organisé pour célébrer une fête dédiée aux étoiles. Bilbon devait donc se hâter à trouver un moyen de sortir ses amis tandis que peu à peu les couloirs se vidaient. Il commença donc par suivre discrètement le garde en charge des clefs, se cachant dans son ombre pour ne pas être vu. Puis, alors que le garde descendait aux caves pour ramener le vin au roi, il surprit le bourge à se servir gracieusement en compagnie du sommelier. Ce vin venait des grandes contrées du nord et il était bien rare de pouvoir en boire rien qu'un peu. Ils profitèrent donc dans le dos du roi pour boire, mais ils ne se contentèrent pas d'un seul verre, ce qui donna la délicieuse opportunité à Bilbon pour subtiliser le trousseau de clefs. Ainsi, l'anneau toujours au doigt, il fila, rasant les murs et pressant les clefs contre lui pour ne pas les faire tinter. Et enfin, il arriva devant la première cellule. Il passa la clef dorée à l'intérieur de la serrure et discrètement il la déverrouilla. Lorsqu'il entra à l'intérieur il ôta son anneau, ne voulant pas dévoiler ce secret pour le moment, et il entra dans la pièce sombre. Il entendit vaguement le son de froissements de draps du lit avant d'entendre un grognement.
« Quoi encore ?! je crois avoir le droit de me reposer malgré que je sois votre prisonnier ici ! » grommela Thorin qui jouait avec sa cuillère d'argent qu'il avait subtilisé sur son plateau dans l'idée de crocheter la serrure.
« Thorin ? C'est moi, Bilbon... » Murmura le hobbit en posant une main sur l'épaule couverte du prince.
« Bilbon ?! » Thorin se redressa et enroula ses bras autour du corps fin du hobbit, l'amenant contre son torse avec douceur. « Mon ami... ».
Tous deux profitèrent longuement de cette étreinte, leurs visages glissèrent lentement sur l'épaule de l'autre, trouvant un réconfort bien étrange dans les bras de chacun. Mais cela ne dura malheureusement pas et Thorin se détacha du hobbit, non sans perdre son délicieux sourire soulagé.
« Comment avez-vous réussi à venir ici ? »
« J'ai le pas léger comme le dirait Gandalf. Mais trêve de discussion, nous devons libérer les autres, suivez-moi. »
« A vos ordres Maître Cambrioleur. »
Ensemble, ils remontèrent donc à l'étage supérieur où les autres avaient diné et étaient à toujours enfermés. Thorin fut des plus soulagé lorsqu'il les vit tous être libérés par son fameux cambrioleur, qui avait su se faufiler chez des elfes et qui les avait sauvés des griffes de Thranduil et qui avait sauvé leur quête. S'ils avaient attendu pour que ce roi cupide -aux yeux de Thorin- jamais ils n'auraient pu arriver à la montagne pour le jour de Durin. Ainsi, toute la petite compagnie réunifiée se mit à suivre Bilbon qui avait entreprit de redescendre pour avoir accès à la rivière. Les nains étaient toujours aussi bruyants, comme le hobbit s'y attendait, et il devait avouer sursauter chaque fois que l'un d'eux posait son pied trop lourdement sur le sol de bois. Mais enfin, ils arrivèrent aux caves, où le sommelier accompagné du garde dormait allongé sur la table. Ils leurs passèrent donc sous le nez, lui rendirent les clefs et regardèrent avec attention autour d'eux. C'est alors que Bilbon se dirigea vers une descente dérobée, il s'agissait d'une grande trappe de parquet qui était activée par un levier non loin. Au-dessus de cette trappe attendaient quelques tonneaux qui devaient être envoyés dans la rivière jusqu'à la ville du lac. Les elfes et les hommes commerçaient souvent, et subvenaient les uns les autres à leurs besoins. Le lac faisait parvenir poisson, glace, lait, et viande de bétail tandis que les elfes faisaient circuler fruits, vin, armes, et parfois quelques bijoux manufacturés. Bilbon précipita alors les nains dans différents tonneaux, certains parmis des pommes et d'autres au milieu de viande séchée, avant de bien refermer les tonneaux. Ils ne devaient pas être vus.
Il termina par enfermer Thorin et il lui sourit :
« Je reviendrais vous sortir de ces tonneaux. Je vais vous précipiter dans la rivière, c'est la seule sortie, alors pardonnez moi d'avance pour les courbatures. »
Thorin eut un sourire doux et sincère. Il observa rapidement les tonneaux déjà refermés et après un regard tendre il caressa -un peu violemment, un peu à sa manière- le petit menton de pointe du petit bilbon. « Je mettrais ma vie entre vos mains sans hésiter maître cambrioleur, vos idées sont toujours les bienvenues. »
Bilbon, encore perturbé, aida son chef de compagnie à entrer dans le dernier tonneau qu'il referma. Enfin, il enfila son anneau et tourna en rond. Comment les précipiter dans la rivière à présent ? c'est alors qu'il entendit quelques bruits de pas se diriger vers la cave, ils e cacha alors derrière le tonneau de Thorin et s'y accrocha bien. Il vit alors deux gardes approcher et ils se mirent à rire à gorge déployée.
« Quels ivrognes ! les voilà pleins comme des barriques ! des vrais tonneaux ! » dit l'un.
« Oh, parlant de Tonneaux, ne devrions-nous pas envoyer ceux-ci à la ville du Lac ? Thranduil avait demandé à ce que ce soit fait ce matin déjà... » lui répondit l'autre.
La chance était avec eux car la paresse des elfes leur avait donné un ticket de sortie. Vous voyez, dans cette histoire, nous avons tendance à penser que cette petite troupe eu bien de la chance, mais en fait, disons plutôt que les cieux, et les ancêtres étaient derrière eux.
Ainsi, les elfes ouvrirent la trappe et les tonneaux dégringolèrent dans la rivière glacée. Ils passèrent dans des grands tunnels de pierre creusés sous le royaume qui débouchèrent finalement sur une grande rivière au lit large. Là, on vit les elfes ouvrir de grandes herses en chantant, laissant les nombreux tonneaux courir au fil de l'eau. Rapidement ils furent rattrapés par des elfes qui, plus loin sur la rivière, après que Bilbon ait dû monter un tonneau vide pour pouvoir rester à la surface, armés de grandes perches étaient venus récupérer les tonneaux.
Bilbon les avait sorti de chez Thranduil, et Thorin, malgré sa position inconfortable, ne pouvait céder à la colère, à la rancœur ou à la bougonnerie, il était trop heureux d'avoir revu ce petit hobbit et que celui-ci se soit montré si utile, si clairvoyant.
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