37🍬IT'S A TRAP !

Sa main tendue vers moi, j'essuie la mienne maladroitement sur mon jean avant de l'attraper, espérant que ma moiteur soit partie.

Il fait froid, je n'ai pas de gant et je devrais avoir les mains ultras sèches car je suis partie sans crème mais... être seul avec Red, ça me stresse. Pas un stresse à se pisser dessus mais le genre qui te fait perdre tous tes moyens quand tu ouvres la bouche.

« Putain, ça caille. » chuchoté-je lorsque nous arrivons sur le toit d'un commerce. Red ne dit rien et continue de me faire signe de le suivre jusqu'à ce qu'après avoir gentiment sauté de bâtiment en bâtiment, il se stoppe enfin.

Je me rapproche du bord et retiens un sifflement d'admiration en voyant le contrebas tout illuminé : nous sommes au-dessus de la rue marchande, observant le monde devenu tout petit depuis le toit du cinéma.

« T'as faim ? » demande-t-il en me faisant sursauter au passage.

Je me tourne vers lui et remarque une sorte de grosse boite en métal qu'il a planquée près d'une grille d'aération. Dedans, se trouve un trésor inattendu : des chamallows. Ça, et des petits paquets de bonbons ainsi qu'une minuscule enceinte bluetooth et un allume-gaz.

— Je me cale souvent ici quand je ne veux pas qu'on me fasse chier.

— Je peux connecter mon portable ? dis-je alors qu'il referme la boite.

— Fais-toi plaisir. Mais ne mets pas de la musique de merde.

— C'est quoi pour toi, « de la musique de merde », monsieur l'élitiste ?

— Pas ta merde de Beatles que tu fous chaque matin quand t'es sous la douche.

— Eh ! C'est un des meilleurs groupes de leur génération et-

— Ouais, ouais, « All you need is love » et mes couilles sur ton front.

— Mais j-

— All you need is to fermer ta gueule, poser ton cul et ne pas avoir des goûts de chiottes.

Je veux protester mais me ravise et pousse un soupir avant de le suivre avec l'enceinte jusqu'au rebord assez surélevé et sécurisé par une barrière pour s'assoir dessus sans craindre de tomber.

Red semblait avoir tout prévu car il sort deux piques en métal également présents dans la boite, avant de planter des chamallows pour en faire une brochette qu'il commence à brûler avec le feu de son allume-gaz.

— T'es vraiment chelou comme type...

— T'es mal placé pour dire ça, « Limoncello ». Putain, quel surnom de merde.

— Tu aurais trouvé mieux, toi ?

— Citrus, c'est déjà suffisant. Pas besoin de surnom, simplement « toi ».

Je détourne le regard et laisse mon souffle chaud s'évaporer dans la nuit devant moi alors que notre proximité me tend de plus en plus.

« Relax. On ne fait que grignoter. »

Comme s'il avait dit des mots magiques, mes épaules se relâchent et je pousse un nouveau soupir faisant partir cette tension qui n'a pas lieu d'être.

Red a un pouvoir sur moi : ses mots me font directement réagir.

Ce n'est pas la première fois qu'il arrive à calmer mes émotions et le flot de connerie qui se bataille dans mon cerveau. Il me permet de « laisser couler » et d'oublier la moindre chose me prenant la tête.

Avec lui, les choses ont l'air compliquées, pourtant, elles sont réellement d'une simplicité enfantine.

Il me tend une brochette de chamallows grillés que je n'hésite pas une seconde à dévorer. Le goût n'est pas aussi bon que cuit au feu de cheminée mais ce n'est pas ça qui compte. Ce qui compte, c'est qu'il l'ait fait pour moi.

« Je n'avais pas envie que Freya s'intéresse à toi », commence-t-il en fixant sa brochette, « Elle est sympa mais c'est une vraie sangsue. Dès qu'elle trouve quelqu'un d'un peu plus talentueux que les autres, elle s'accroche à lui et tente de le vendre à prix fort. Elle travaille pour les Jelly Beans en tant que manager mais surtout chasseuse de tête... Et à cause de son travail, j'ai déjà connu des gens perdre de vue qui ils étaient réellement. La célébrité, tout ça à notre âge, ça rend dingue. »

J'approuve en hochant la tête, ne pouvant qu'imaginer cet enfer dont il me parle alors que je suis déjà saoulé à mon âge d'être « célèbre » pour une vie passée qui ne m'appartient pas.

Les notes de musique sortant de l'enceinte s'emparent de nous, créant une bulle nous mettant à l'écart du monde alors que Red m'interroge du regard sur mon choix très loin des Beatles.

— C'est l'OST de GRIS. Un jeu indé où tu joues une fille qui traverse différents paysages pour retrouver sa voix. Les paysages se colorent à mesure que l'on avance et que notre personnage arrive à surmonter la noirceur de son âme due à sa perte.

— Ouais, j'en avais entendu parler. C'est très poétique mais...

— Mais ?

— On croirait entendre mon histoire.

— Hein ?

Red mache un de ses chamallows avant de regarder ses pieds pendouillant dans le vide. Un soupir las et les yeux levés vers le ciel, je sens qu'il s'apprête à me faire un aveu qui le pèse.

— Une fille qui perd sa voix et qui fait tout pour la retrouver... quitte à sombrer dans la dépression et se faire bouffer par elle. C'est mon histoire, Citrus.

— Je ne comprends pas...

— La Red Apple précédente n'arrivait plus à chanter comme celles d'avant. Elle « perdait sa voix » un peu plus à chaque concert. Elle n'avait plus rien d'exceptionnelle et ne touchait plus les cœurs. Y'a qu'à lire les articles de la presse people sur elle, c'était bourré de potins sur elle et sa santé, sa légitimité dans les Jelly Beans, etc.

— Ce qui explique la dépression, j'imagine.

— Un enfer que personne ne pouvait voir. Elle subissait une pression monstre en coulisse quand sur scène, elle faisait tout pour briller. Du moins, elle essayait.

J'écoute avec attention Red qui aborde une rare expression de tristesse sur son visage. Je ne sais pas quoi dire et je pense qu'à cet instant, rien de concret ne pourrait sortir de ma bouche.

Si ce que j'ai appris est bien vrai, c'est Citrus Lime qui aurait poussé Red Apple au suicide... Mais il y a tellement de flou sur cette histoire que ça me semble un peu tordu.

Citrus aimait Red et elle, elle n'avait pas l'air indifférente d'après le message sur la plage qu'a fait faire Monsieur Minh. Du moins, avant la fin.

— J'ai toujours cru ce qu'on avait raconté, comme quoi l'ancien toi l'avait poussé au suicide. C'est pour ça que je t'en ai voulu dès notre rencontre. Je ne supportais te regarder.

— Yes, nickel... Mais qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ?

— Toi.

La tête soudainement tournée vers moi, ses yeux jaunes devenus brillant avec les lumières sous nos pieds m'intimident autant qu'ils me gênent. Je me rends enfin compte que nous sommes vraiment proches tous les deux et qu'il suffirait d'un rien pour...

— T'observer m'a convaincu que tu n'étais pas le problème. Ça, et le peu d'expérience que l'on m'a transmis sur mon passé.

— Tu as des souvenirs « d'avant » ?

— Pas très précis mais des bribes qui m'ont petit à petit convaincu que nous deux, on ne devait pas être ennemi. Même l'inverse, que l'on devait être très proche. Un constat qui rend les accusations sur Citrus Lime bancales.

— Et si je lui demandais ?

Red fronce les sourcils, ne comprenant pas où je veux en venir alors que je regrette d'ores et déjà ce que je viens de proposer.

Mais savoir qu'il y a une sorte de mystère entre nous à cause de notre passé, ça pourrait me bloquer et empêcher toute relation de n'importe quelle nature avec lui.

— Je pourrais demander à Citrus Lime s'il a vraiment poussé Red Apple au suicide.

— Pfff, t'es con.

— Je ne déconne pas. J'en ai la possibilité.

— Comment ?

— Chaque année, pendant les fêtes d'hiver, on m'oblige à aller le voir en prison. Le gouvernement cherche depuis des années à lui soutirer la moindre information sur ses actes mais il ne dit jamais rien... Alors depuis quelques années, ils me forcent à lui parler face à face, sans caméra ni micro.

— C'est stupide. Comment est-ce qu'il pourrait chopper la moindre information ?

— Pas si stupide parce que Citrus Lime sait repérer quand il est sous surveillance. Il n'ouvre la bouche devant moi que quand il n'y a plus rien entre nous. Je pourrais lui poser la question sur Red.

— Est-ce qu'il t'a déjà parlé, même ?

— Non... Parce que je n'ai jamais rien eu à lui dire. Enfin si, une fois je lui ai fait tous les reproches que j'avais sur le cœur à cause de ce qu'il m'a fait subir mais il s'est contenté de sourire.

— Alors ce n'est pas une bonne idée. Oublie.

— Mais ça nous permettrait d'en savoir plus ! Il me manque tellement d'information sur mon passé pour comprendre le présent !

— Oublie, j'ai dit.

— Pourquoi t'es aussi borné et-

— Parce que je ne veux pas que tu souffres pour ça !

Les yeux grands ouverts, je fixe la main de Red agrippant ma doudoune alors que ses yeux me foudroient sur place, m'imposant le silence. Il s'est rapproché d'un coup de moi et je sens son souffle chaud sur mon visage alors qu'autour de nous, l'air est de plus en plus froid.

Ce mec a le sang chaud, réagissant au quart de tour à chaque fois que l'on ne va pas dans son sens. Se retenant plus d'une fois de m'en coller une parce que ce serait contradictoire avec ce qu'il ressent.

Au fond, qu'est-ce qu'il ressent, Red ?

« Je ne veux pas que Citrus Lime te fasse souffrir, que tu revives des moments douloureux en sa présence et qu'il te monte la tête contre moi. Je ne veux pas... »

Il s'interrompt, relâchant doucement ma doudoune alors que ses longs cils papillonnent et que sa langue vient humidifier le coin de ses lèvres.

Je remercie la semi-pénombre de la nuit cachant le rougissement excessif de mes joues à mesure que je l'observe et que j'attends qu'il exprime un peu plus ses sentiments.

Oubliant tout. Ma relation ne servant à rien avec Cotton, mes problèmes de crise d'identité, mon soi-disant talent inexistant, mes notes catastrophiques et ces rumeurs sur moi tournant dans toute l'Académie depuis mon arrivée.

Cet inconfort constant qu'il arrive à faire passer à la trappe rien qu'en me regardant avec intensité.

« Je ne veux pas que tu t'éloignes de moi. Je suis un putain de possessif et je n'arrive pas à dire pourquoi. Je sais qu'on est lié, toi et moi, par notre passé mais en vrai... Même sans le savoir, je savais qu'il y avait un truc. Que je voulais passer plus de temps avec toi, t'observer, te découvrir un peu plus et te faire sourire. Je veux seulement... Merde c'est simple et compliqué à la fois... »

Il prend une grande inspiration avant de caresser ma joue de ses doigts glacés et de murmurer :

« Comment est-ce qu'un mec aussi acide peut cacher un esprit si tourmenté et un cœur si sensible ? »

Je n'ai pas le temps de répondre ou esquisser le moindre geste qu'il se rapproche dangereusement de moi. Je ferme instinctivement les paupières et entre-ouvre la bouche, succombant à ce que désirent mes lèvres depuis cette première et dernière fois où nous nous sommes embrassés.

Sauf que je me fais avoir.

« IT'S A TRAP ! » s'écrie Red après m'avoir embrassé la joue et passé sa langue dessus pour la rendre dégueulassement humide.

Oui, dégueulassement est un mot existant faisant partie de mon vocabulaire. J'ai vérifié sur internet et ça se dit bien !

Le grand rouge est amusé par ma réaction à la fois surprise et déçue. Je dirais même qu'il s'en délecte, le salaud.

— Putain, tu verrais ta tête, c'est gold.

— Mais, mais, mais, mais..!

— Mais ce que tu veux, ça se mérite ! Commence déjà par mettre de l'ordre dans tes relations et ensuite on y reviendra. Je te donne jusqu'à la fête de Noël.

— Pourquoi ce soir-là ?

— Notre pari, tu te souviens ? Je bosse déjà sur ce que tu as écrit pour moi mais ce n'est pas encore suffisant pour me satisfaire.

— Et qu'est-ce qui pourrait te satisfaire ?

Red se contente d'arquer un sourcil, me souriant malicieusement avant de me faire un clin d'œil et d'enfiler d'autres chamallows sur son pique.

Il aime jouer avec moi, le sadique.

Mais il a raison, j'ai tellement de choses à mettre au clair que continuer je-ne-sais-quoi avec lui, ce ne serait pas réglo. Pas du tout réglo alors que je suis censé avoir une copine. Meh.

Il va falloir arrêter la comédie.

🍬🍬🍬

Je scanne les articles devant moi, tel un robot ignorant la moindre des remarques de son patron. Monsieur Minh m'apprend le travail d'employé de supérette d'une façon particulière : il me donne des consignes sans m'apprendre comment faire et me montre la bonne façon de faire qu'après m'avoir vu me tromper.

Donc qu'après m'avoir engueulé.

Niveau compétence managérial, j'ai vu mieux. Mais Wild m'a dit qu'on s'y faisait vite et que cette méthode n'était pas si « à chier » quand on avait les épaules solides.

Heureusement que Monsieur Minh est un très bon psychologue après mes heures de boulot... et un très bon cuisinier qui me réprimande pour mon alimentation quotidienne désastreuse.

Sur ses conseils, et l'acharnement de Roy sur ce sujet également, j'ai souscrit au programme de livraison de plat fait maison par des étudiants en cuisine de l'Académie. Le repas coûte plus cher que des nouilles instantanées mais je peux être livré directement au dortoir et gérer, via une application contrôlée par ma GIC, mes préférences alimentaires.

C'est ce qu'énormément d'étudiants font, dont Red que je soupçonnais à tort d'être un très bon cuisinier en sentant certains soirs une délicieuse odeur émaner de sa chambre.

« Je sais bien faire les gâteaux mais pour le reste, je suis un noob. » m'avait-il dit quand je l'avais surpris avec un bol de gnocchis au pesto.

Il m'en avait fait goûter une et c'est ce qui m'a définitivement convaincu.

Je sors de mes pensées en encaissant les étudiantes devant moi, discutant très fort du bal de samedi soir, de comment elles vont se coiffer et se maquiller ainsi que des garçons qu'elles vont inviter.

L'une d'elles me jette un regard aguicheur à ce moment-là et je ne réponds que d'un soupir las.

Lorsque les filles s'apprêtent à quitter le magasin, elles s'écartent à l'arrivée de Cotton Candy, comme si elle venait de séparer la mer en deux. Ma « copine », j'ai encore du mal, me fait un grand sourire avant de s'appuyer sur le comptoir devant moi.

Mettant en avant sa poitrine remontée grâce à la magie des push-up, secret que m'a appris Kapu-Kapu lors d'une discussion avec Pop.

Les filles et leurs petits secrets de beauté, alala...

Le gloss sur ses lèvres donnerait à n'importe qui l'envie d'y goûter, mais en ce moment, alors que la fête approche, je ne suis pas d'humeur. Mais mon humeur n'empêche pas Cotton de m'y faire goûter.

Ses lèvres ont bons goûts et glissent sur les miennes mais malgré l'agréable sensation, il n'y a qu'un souvenir qui me revient en tête. Un parfum que j'ai envie de sentir et un gémissement que j'ai envie d'entendre à sa place.

Pourtant, ce n'est qu'un bruit strident qui se met à résonner dans ma tête.

Oh non, pas maintenant. Ça ne me l'avait pas fait depuis des lustres ! Pourquoi là, à cet instant ?!

Je fronce les sourcils et ferme les paupières avec force, tentant désespérément de reprendre le contrôle en appliquant la méthode dont Pop m'a parlé : ne penser qu'à de bons souvenirs récents.

Mes sessions à la salle d'arcade avec tout le monde, les répétitions du groupe, les soirées films, etc.

Wild qui me fait faire un tour sur sa moto dans la nuit. Mes yeux regardant les lumières des lampadaires défiler à toute vitesse alors que le vent glacial me griffe la peau.

Puccino qui s'acharne sur un jeu de tennis contre moi alors que la file derrière nous fait grogner le gérant du 20 Percent Cooler.

Kapu-Kapu qui me fait goûter tous les parfums de son glacier préféré, mandarine, rhum-raisin, violette, alors que nous sommes en hiver.

Cappucino qui m'aide à reprendre la guitare, tous les deux dans le garage-studio de sa maison, préparant ma surprise pour lui.

Lui, Red. Tous nos échanges.

Ses textos pendant les cours, se foutant de ma gueule quand je me fais interroger. Nos discussions sur des séries et des jeux vidéo que l'on a faits et qu'il a soit adorés, soit détestés à mort. Aucune demi-mesure.

Ses pas de danse effrénés sur Dancerush Stardom et son sourire qui vaut mille étoiles lorsqu'il voit son pseudo, ROUGE, s'afficher en gros quand il réalise un nouveau record personnel.

Cette intensité dans son regard à chaque fois qu'il me croise. Il ne dit jamais rien et à l'air menaçant, snob, mais pourtant, j'ai l'impression de communiquer silencieusement avec lui.

Sa voix, putain, cette voix qui retourne le cœur et fait tomber de plus en plus dans ses filets.

Sa double identité. Sa masculinité assumée et sa profonde féminité.

Tout et encore plus qui m'ont fait basculer...

Oh merde, c'est confirmé. Je suis bel et bien un mordu de pomme.

Et alors que Cotton sépare ses lèvres des miennes, que ce constat se fait une place dans mon cœur, mon cerveau, lui, prend une tout autre direction.

Le bourdonnement strident devient encore plus intense, jusqu'à me couper des autres sons extérieurs et alors que je pensais réussir à vaincre cette crise d'identité...

Je me réveille quelques heures plus tard, allongé dans mon lit.

Nu et loin d'être seul.

Qu'est-ce que le... fuck ?



Mais oui, mais qu'est-ce que le fuck, Anthéa ?!

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? De la conversation entre Red et Citrus ? De ce que ce dernier est prêt à faire pour améliorer leur relation ? Des sentiments de Red se dévoilant toujours un peu plus ?

Des réflexions de Citrus pendant son travail et de l'arrivée de Cotton ? Sa relation avec elle et... sa crise d'identité qui vient de le coincé dans une situation encore incertaine ? 

J'ai eu quelques jours de maladie et je me rétablie très doucement donc je ne suis pas certaine de sortir le prochain chapitre jeudi mais on croise les doigts ! 🤞

🍬N'hésitez pas à me soutenir en votant ou donnant votre avis en commentaire ! On se retrouve bientôt pour la suite !🍬



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