— Q-Qu'est-ce que tu fais ?! m'exclamé-je en perdant mon sang froid.

— Je m'excuse à ma façon.

— Non mais je déconnais ! C'était de l'ironie ! Je ne veux pas d'excuse alors que le mal est déjà fait ! Je veux juste qu'on arrête de me casser les couilles.

— Tes couilles hein ?

— Putain mais non.

Je pousse malgré moi un soupir en sentant ses lèvres contre mon cou. Mes mains ont envie de la repousser mais je n'y arrive pas. Je suis agrippé à mon t-shirt et j'ai l'impression que mon esprit tient plus à ne pas dévoiler mon torse marqué qu'à se fait caresser.

Un foutu complexe qui va me pourrir.

« Détends-toi. On règle ça en quelques minutes, j'insiste auprès de mon copain pour qu'il arrête de vouloir ta mort et c'est terminé. Tu es gagnant. »

Non, je ne suis pas gagnant parce qu'ironiquement, c'est moi qui suis en train de me faire agresser sexuellement par une fille qui ne m'a pas demandé mon avis et ignore mon refus.

Je ne pensais pas un jour être dans cette situation... Je pensais que ça n'arrivait qu'aux meufs mais non. Il y a bien des hommes dont on abuse, le regard sur la situation n'est malheureusement pas le même dans ce cas-là.

« T'es chanceux ! Elle devait être bonne ! Pourquoi tu te plains ? »

Parce que je n'en ai pas envie. Oui, j'aimerais avoir mes premières expériences sexuelles mais pas comme ça. Je suis tétanisé alors que je pourrais me défendre... Mais mon corps s'est bloqué.

Je ferme les yeux avec force jusqu'à m'en donner mal à la tête alors qu'une de ses mains commence à caresser mon boxer. Ses lèvres s'égarent sur ma joue lorsqu'elle soupire et chuchote :

« T'es trop coincé. »

Un sentiment de soulagement m'envahit avec l'espoir qu'elle abandonne et se barre.

« Je vais te faire bander, tu vas voir. »

Soudain, ses lèvres s'écrasent contre les miennes alors que sa langue réussit à entrer dans ma bouche.

Non. Tu ne peux pas laisser faire ça.

Et lorsque je lui mords la lèvre pour reprendre la situation en main, c'est à cet instant précis que la porte de l'armoire s'ouvre et que Red l'attrape par la taille pour la jeter au sol.

Elle pousse un cri alors qu'il tente de lui faire une prise de soumission avant qu'il ne hurle également lorsqu'elle lui arrache quelques cheveux rouges.

— Putain mais t'es folle ?!

— Toi t'es folle ! s'écrie Pina, une grimace déformant son visage. Qu'est-ce que tu foutais là ?!

— Et toi alors ?! T'étais à deux doigts de le violer ! On sait tous que t'as une réputation de salope mais bordel, depuis quand tu te sers de ton corps à ce point ?! Lui aussi tu le veux dans ton harem ?!

— T'es malade ! T'as encore la rage contre moi, Red. Tu pues la jalousie d'ici ! J'étais venu exprès pour qu'on règle nos comptes parce que je sais que c'est de ta faute si Punch n'a pas pu finir de lui casser la gueule !

— Casse-toi d'ici avant que je n'arrache ta tête, que je la foute dans un blender avec du lait de coco et que je la serve à boire à ton copain pendant la fête de demain soir.

Le regard intimidant de Red ajouté à sa menace achève la blonde se relevant avec difficulté avant de me regarder d'un air de dire « Tu vas continuer à prendre cher », et de partir. Nous l'entendons descendre les escaliers alors que mon voisin ferme la porte d'un coup de pied.

Le silence dans ma chambre est pesant depuis que Red s'est relevé et fait face à la porte. Il passe ses doigts sur ses poignets et retire son élastique pour attacher ses longs cheveux. Quelques mèches tombent au sol, surement celles agressées par les mains de Pina, lorsqu'il se retourne enfin.

« Ça va ? » me demande-t-il d'une voix faible.

Je me contente de hocher la tête alors qu'il me fait signe de la main de me lever du lit. Je refuse sans un mot mais il semble insister et plus les secondes s'écoulent, plus je sens que l'attente l'irrite.

— Allez, je t'ai déjà vu torse nu.

— Q-quoi ? Quand ?

— Quand tu étais malade. Tu pensais t'être déshabillé comme par magie ?

Non bien sûr... mais j'essayais de ne pas y penser.

Je me redresse et lui fais face à un mètre de distance. Mon t-shirt arrive enfin à quitter mes poings et glisse au sol. Petit à petit, je prends en compte ce qu'il vient de se passer lorsque mes doigts touchent mes lèvres.

— Merde... arrivé-je à articuler. C'était mon premier baiser. Elle me l'a volé.

— Ça va, le premier ou le centième, ça ne change rien. C'est le fait qu'elle t'ait forcé qui me préoccupe. Pourquoi tu ne l'as pas repoussé ? Tu en as la force pourtant.

— Je ne sais pas, j'ai... bloqué. Je... Mes mains... Je ne voulais pas qu'elle me voit « comme ça ».

Je hausse les épaules puis laisse tomber mes bras d'un air presque désolé alors que Red examine mon corps en plissant les yeux. Je rougis à mesure que le silence s'étire et en prenant conscience que c'est le seul être humain, hormis Roy et le personnel soignant me connaissant, qui me voient torse nu avec tous mes défauts.

Ça m'angoisse.

Red s'approche lentement de moi alors que je déglutis. Son regard me sonde jusqu'à ce qu'il s'arrête à une distance raisonnable et tapote de son doigt mon pectoral où est tatoué mon chiffre.

« Ça veut dire quoi ce « huit » ? me demande-t-il.

Je ne veux pas lui en parler. Je ne suis pas prêt à exposer les souvenirs d'une enfance entière comme expérience. Pas aussi tôt et dans cette circonstance.

— C'est la taille de ta bite ? Huit centimètres ?

— Respecte-moi un peu... soupiré-je en fronçant les sourcils.

— Huit centimètres en érection, c'est à peine au-dessus du micropénis là.

— Ta gueule.

— On va éviter toute confusion alors.

Red tend sa main vers mon bureau, ses doigts fouillant dans ma trousse avant qu'il n'en sorte un stylo-feutre noir. Un sourire machiavélique se dessine sur son visage lorsqu'il le débouchonne et commence à l'appliquer sur ma peau.

Je ne sais pas ce qu'il fait mais ce simple geste m'énerve autant qu'il fait palpiter mon cœur, à mon plus grand déplaisir.

« Et voilà, plus de confusion. »

Il se mord la lèvre pour se retenir de rire alors qu'il se décale sur le côté et me laisse m'admirer dans le miroir collé à ma porte : il a tracé un bâton. Un « un » juste devant mon tatouage de huit.

— Dix-huit centimètres. Tu es peut-être un chouia trop généreux.

— Un chouia.

Je ne peux retenir mon pouffement de rire provoquant enfin notre hilarité commune.

C'est déroutant la façon dont il a réussi à détendre une situation très inconfortable pour moi. Comme s'il avait saisi que je n'étais pas prêt à me livrer et que tout ce qui touchait à mon corps était presque « tabou ».

« Désolé pour... tout ça. »

J'arrête de rire alors que Red semble soudainement très gêné. Il détourne le regard et se frotte la nuque, repensant surement à ce qu'il a entendu depuis le placard.

Se disant que c'était de sa faute si Pina a débarqué ici et ne s'est pas gêné pour me prendre une de mes premières fois.

— T'inquiète mec, réponds-je en soupirant. Je... C'est bizarre. J'arrive à être fort, acide et à encaisser les coups mais quand ça touche à mon corps... Il suffit qu'une fille tente quelque chose et je perds mes moyens.

— On est que des ados. On a le droit d'avoir des craintes, des hésitations et autres sentiments foutant la merde dans nos cerveaux et créant des réactions étranges. Tu sais, Pina n'était pas comme ça avant... Et puis si tu la voyais bourrée, c'est la plus gentille des filles. Elle pourrait pleurer à tes pieds en s'excusant de ce qu'elle t'a fait subir.

— Ouais ben qu'elle reste debout. J'ai failli l'avoir à quatre pattes et elle m'a déjà violé la bouche.

— Ce n'est qu'un baiser, Citrus. T'as le temps d'effacer ce souvenir avec d'autres personnes consentantes et qui accepteront ta bouche au goût acide.

— Pfff, ce n'est pas parce que je m'appelle « citron vert » que mes lèvres sont acides.

— Ça, je n'en sais rien. Tu n'as qu'à me prouver le contraire.

Je déglutis sous son regard de prédateur. Il est si proche qu'il pourrait faire comme Pina et me pousser sur mon lit pour tenter de prendre possession de mon corps...

Mais il n'en fait rien et ça me rassure énormément.

Pourquoi est-ce que mon cœur bat aussi vite quand il dit ce genre de chose ? Je sais pourtant qu'il fait exprès, qu'il déconne... je crois ? Ou alors Red est...

Vite, change de sujet avant de laisser tes pensées trop dériver !

— Pina a dit que c'était de ta faute si on ne m'avait pas mis K-O au gymnase. C'est toi qui as actionné l'alarme à incendie ? C'est cette fille qui t'a prévenu ?

— Une fille ?

— Oui... dis-je en fronçant les sourcils comme pour me rappeler. Il y a une fille qui m'a vu me faire taper et qui est repartie en courant. Je ne me souviens plus trop mais en tout cas Pina a dit a Punch que c'était peut-être cette fille qui était venue et repartie en coup de vent, qui m'avait sauvé. Elle t'a prévenue ou... Red ?

Une tension s'immisce entre nous comme si je venais de parler d'un sujet très contrariant. Il s'écarte de moi, la tête baissée et l'air renfrogné avant de me tourner le dos.

« T'as rêvé. Il n'y avait pas de fille. »

Sur ces mots, Red ouvre ma porte et quitte ma chambre sans rien dire de plus. J'ai envie de le rattraper pour savoir pourquoi il me donne l'impression de mal prendre ce que je viens de dire.

Je n'aurais pas dû donner du mérite à cette inconnue alors que c'est lui qui m'a aidé, c'est ça ? Putain c'est sûr, Red a sa fierté et a dû mal le prendre...

Je pousse un long soupir, déjà exténué de ce début de journée alors que mon cœur se serre de plus en plus sans que je n'arrive à saisir pourquoi.

Le reste de la journée est « normal ». J'assiste aux répétitions des filles Cappuccino alors que Red s'entraine de son côté. Ensuite, Puccino nous emmène en voiture au Crazy Chicks d'il y a deux semaines où nous retrouvons Wild et Pop.

Nous passons notre soirée à parler de la fête du lendemain. Enfin « nous »...

J'ai la tête ailleurs et Wild me le fait souvent remarquer. Pop mentionne de nombreuses fois Cotton et la conversation dérive sans que je ne le souhaite sur les filles pouvant m'intéresser.

Mais je suis toujours troublé par ce qu'il s'est passé ce matin avec Pina et je n'ose pas leur en parler. Autant que ce qu'il se passe encore avec Red.

Je ne suis pas un personnage d'histoire cliché et je sais interpréter mes réactions physiques avec logique lorsque quelqu'un du sexe opposé m'attire.

Or du même sexe... Je n'y avais pas songé un seul instant. Est-ce que Red me fait vraiment de l'effet ou ce n'est que passager et selon la situation ?

Est-ce que l'ancien Citrus a connu quelque chose de similaire ? Connaissait-il Red ou n'étaient-ils que de parfaits étrangers ?

C'est sur ces réflexions que je me souviens ne pas avoir continué mes recherches sur lui alors que les YearBook trainent toujours dans le tiroir de mon bureau.

« Dites... Qu'est-ce que vous pensez de Red Apple ? »

Ma question semble flotter dans l'air tant elle est inattendue. Toute la table me regarde alors que Kapu-Kapu casse le silence insoutenable en aspirant son milkshake avec sa paille.

— Quoi ? J'ai pas le droit de poser des questions ?

— Si si, commence Wild en regardant sa copine, c'est juste qu'on parlait de tes possibles « amours » et que tu nous ignorais royalement avant de mettre le prénom de Red sur la table.

— Aucun rapport, précisé-je en mentant légèrement. Alors ?

— Ben pour ma part, je suis son référent donc je le connais bien. C'est un gars intelligent, qui du coup est flemmard mais s'en sort bien malgré le nombre de cours qu'il sèche. Il a des phases parfois où il est très calme et réfléchi énormément.

— Il fait flipper ! s'exclame Kapu-Kapu. Il fait grave peur avec ses yeux jaunes ! À chaque fois qu'il me regarde, j'ai l'impression d'avoir dit une connerie et qu'il va me démembrer sur place !

— T'abuses, répond Cappuccino. Red est sérieux en ce qui concerne la musique en tout cas. Étonnamment, c'est quelqu'un de fiable et qui n'hésite pas à donner son avis. Il a de l'humour aussi et le fait qu'il soit décoincé par rapport à tous les autres élèves de l'Académie, ça fait du bien.

— « Agressif », ajoute Pop, c'est souvent le mot qui revient dans la bouche des gens. Mais en vrai, je lui ai déjà parlé quelques fois et même s'il a tendance à rembarrer, à force il se détend.

— D'accord, alors maintenant j'ai besoin de savoir ce que l'ancien Citrus Lime a fait à Red Apple.

Nouveau silence. Personne n'ose rien dire et ce mystère autour de lui commence à m'irriter. Pourquoi est-ce qu'il avait envie de me péter la gueule à mon arrivée ? Et pourquoi maintenant il me sauve le cul ?

Ma carte GIC m'empêche de faire des recherches sur lui et sur les anciens nous... Et je sens que le YearBook ne m'apportera pas des masses de réponses alors j'ai besoin de savoir.

— Et puis est-ce que Red est gay ? osé-je demander en plus.

— Hein ? s'étonne Pop. Qui t'a dit ça ?

— Toi ! Enfin sans vraiment le dire clairement mais c'était tout comme !

— Pourquoi ça t'intéresse ? intervient Wild en haussant un sourcil, question que j'ignore.

— Ben ça dépend en fait... C'est quoi pour toi « être gay » ?

— Non mais tu ne vas pas me demander la définition de l'homosexualité !

— C'est juste plus complexe que ça n'y parait, ajoute Puccino. Surtout dans le cas de Red.

Ça m'exaspère. Tout le monde attend que je trouve la solution tout seul, comme si ça serait bien plus gratifiant.

Lorsque soudain, une idée germe dans ma tête. Quelque chose de tordu mais... tout de même.

« Je dois y aller. Et pas de soucis, je paie ma part. »

Ignorant leurs exclamations, je quitte le restaurant après avoir réglé d'un coup de scan de GIC avant de courir en direction de l'Académie. Je contrôle mon souffle et ménage mes efforts alors que je passe devant une ribambelle de décoration pour Halloween et d'adolescents préparant leurs plus beaux costumes.

Mon portable en main, je fais glisser mes contacts et arrive enfin jusqu'à celui de Roy que j'espère ne pas déranger à 22h passé.

— Allo Roy ? dis-je en l'entendant décrocher. J'ai une question à te poser.

— Et moi j'en ai plusieurs à commencer par une certaine vidéo qu'on m'a envoyée où l'on te voit en train de te faire tabasser par un groupe de sportif. Tu m'expliques ?

Aïe. J'aurais dû y réfléchir à deux fois avant de le contacter.

Tellement de chose à dire dans ce chapitre ! Que pensez-vous de l'attitude de Pina ? De son altercation avec Red et du baiser volé ? De ce rapprochement Citred et de leur relation ?

Que pensez-vous des complexes et réflexions de Citrus a ce sujet ? De la réaction de ses amis ? Et enfin, comment va réagir Roy son tuteur en apprenant les derniers événements à l'Académie ?

🍬Vos réponses la semaine prochaine avec un nouveau chapitre ! En attendant je compte sur votre soutient avec des votes et des commentaires en masse !🍬