11🍬Pina pipa pour plaire

Pourquoi est-ce que j'ai l'impression d'être une souris de laboratoire piégé dans un labyrinthe ? Pourquoi cette sensation étrange de me sentir contrôlé ?

J'ai eu raison de mémoriser certains couloirs du bâtiment principal de l'Académie mais à chaque fois que je veux tourner pour me diriger vers une sortie, il y a un sportif qui m'attend et se joint à la course.

Une désagréable sensation...

Ils sont en train de me diriger. Je cours droit dans un piège... Non, ils n'auraient pas été si vicieux ?... Arrête d'être naïf, le monde est pourri et ses habitants sont créatifs lorsqu'il s'agit de faire souffrir quelqu'un de différent.

J'ai du mal à tenir malgré mon entrainement depuis mon enfance. J'ai perdu en endurance et les nombreux détours me cassent un peu plus. Je dois garder de l'énergie si je veux à nouveau fuir une situation désespérée...

Je prends le dernier chemin qui me reste, un couloir vide menant au gymnase, lorsque je ralentis en remarquant une chose étrange : je n'entends plus rien. Personne ne me suit.

Ça pue.

Je cherche mon portable dans ma poche pour envoyer un message à Pop lorsque je jure en me souvenant l'avoir laissé dans mon sac à dos.

Mon corps s'arrête au milieu du couloir, comme s'il avait compris qu'aller vers le gymnase pour tenter de sortir du bâtiment n'était pas du tout une bonne idée. Je commence à faire demi-tour lorsque j'entends plusieurs personnes courir dans ma direction. Les sportifs me coursant apparaissent au loin et me forcent à y aller.

Mais alors que je passe la porte, un violent coup de poing au ventre me fait tomber au sol. J'entends des exclamations, quelques applaudissements, mais je n'ai pas le temps de me relever que l'on me traine de force jusqu'au centre de la grande salle.

Je me relève en caressant l'endroit où l'on m'a frappé lorsque je prends conscience d'être littéralement au centre de l'attention.

Devant moi et investissant peu à peu les tribunes, une grande partie des lycéens. Du moins, tous ceux qui étaient présents à la cafétéria tout à l'heure. Ils sont debout à hurler les noms de leurs sportifs préférés et des insultes à mon encontre.

Ils ont tous été guidés ici par une des autres entrées. Tout ça pour assister à mon « exécution ».

Alors qu'ils commencent à former un cercle autour de moi, je repère Popcorn au loin, les bras retenus par l'un des potes de Punch, en train de crier sur une Pina qui se contente de s'accrocher au bras de son homme.

Elle tapote ses yeux d'un mouchoir, l'air exagérément triste lorsque son amie Cotton vient lui chuchoter quelque chose à l'oreille. Elle le répète à Punch dont le sourire s'élargit.

Le sportif embrasse la joue de sa copine et se plante devant Cotton. Son dos large la cache mais leur discussion ne dure pas et se conclue par le départ du gymnase de la fille aux cheveux roses.

Elle me l'avait bien dit que pour la prochaine fois, elle ne pourrait pas intervenir. C'est déjà énorme qu'elle ne lui ait pas raconté mon attitude très étrange et déplacée de vendredi dernier...

La foule se tait immédiatement lorsque Punch tape dans ses mains pour exiger le silence. Il se racle la gorge et s'approche de son groupe avant de me pointer du doigt.

« Pour celles et ceux qui ne le savent pas, ce gars, c'est Citrus Lime. Outre le fait d'être le clone raté d'un type considéré par les Nations Unies comme un criminel, ce mec à peine arrivé dans notre Académie a agressé sexuellement la capitaine des majorettes, sa référente et ma copine, Pina Colada !

Il a tenté de la violer putain ! Ce détraqué de mes deux ! Est-ce qu'en tant qu'adolescent jelly belly, peut-être futures élites du monde, nous pouvons laisser passer cet affront ?! Je ne pense pas. C'est même une évidence.

Le citron doit être puni. Ici et maintenant. »

Tous les élèves soutiennent le capitaine de l'équipe de foot frappant les mains de ses camarades comme s'ils allaient se taper la meilleure partie de leur vie...

Encaisse. Peu importe jusqu'où ils vont, encaisse. Ne réplique pas. Si tu réponds, ça se retournera contre toi. Supporte la douleur, tu t'en remettras, comme toujours. Ils ne vont pas te tuer, ils s'arrêteront avant. S'ils n'ont pas du sang, ils ne te lâcheront jamais. Ce châtiment injuste qu'ils t'infligent va calmer « le peuple » qui te voit comme un intrus.

De toute façon, qui pourrait te sauver ?

Punch fait signe à ses camarades sportifs pour qu'ils s'approchent de moi et commencent à me pousser comme si j'étais un ballon. Soudain, l'un d'eux me fait un croche-patte provoquant les applaudissements des spectateurs alors que je m'étale au sol.

Une main vient tirer sur mes cheveux pour relever ma tête alors que s'échappe de ma bouche un cri de douleur. Punch me regarde de haut avec un sourire malveillant, ne cachant pas le plaisir qu'il prend actuellement avant d'écraser ma tête avec son pied.

Encaisse.

On me relève à nouveau de force pour mieux me donner des coups de poing dans le ventre, dans le dos, sur les bras et j'en passe. À chaque fois que je tombe, les gens tapent dans leurs mains, réclamant plus de sang.

Encaisse.

Alors que le sang coulant de mon nez arrive jusqu'à ma lèvre supérieure, que l'on tire à nouveau sur mes cheveux blonds devenus sales, mon regard croise celui d'une personne à l'écart. Ma vision est floue, brouillée par les larmes dues à la douleur, mais j'ai l'impression de voir une femme. Elle a la respiration erratique et vient de débarquer dans le gymnase.

Défends-toi.

Je sens qu'elle me fixe mais sa silhouette disparait alors qu'un nouveau coup me fait manger le sol. Mon seuil de tolérance à la douleur est élevé mais là... ils se sont lâchés.

J'en ai marre. Pourquoi est-ce que je dois subir ça ?

Ma seule erreur a été de naitre.

Je n'ai rien demandé.

« Allez maintenant présentes tes excuses à Pina ! » s'exclame Punch alors que ses potes me soutiennent pour que je reste debout. Le public se calme lorsque la capitaine des majorettes s'avance jusqu'à nous.

Elle n'ose pas me regarder dans les yeux mais maintient son rôle de victime. J'entends à peine ce qu'elle me dit, trop concentré pour retenir mes larmes de douleur jusqu'à ce qu'elle parle plus fort pour que tout le monde l'entende.

« Je veux que tu me présentes des excuses pour ce que tu as fait, Citrus. »

...Pardon ?

Ahah, c'est une blague.

Toute cette vie est une blague.

J'étais en train de devenir ce genre de victime cliché que je hais mais je ne suis pas comme ça. Je n'ai pas à me maudire. Je n'ai rien à voir là-dedans. Les seuls que je devrais maudire, ce sont eux. Leur stupidité.

— Allez Citrus, intervient Punch, fais des excuses à ma copine et on arrêtera de te démolir.

— Ce sera rapide, me murmure Pina à l'oreille, un « désolé » que tout le monde peut entendre et cette histoire sera réglé. Je promets de te dédommager en nature pour ta peine.

Et soudain, alors qu'elle me sourit, la phrase de Red me revient en mémoire. Je calme ma respiration, ferme les paupières avant de me dégager des brutes derrière moi et de me tenir droit. Digne malgré le sang tachant mon pull d'uniforme et me raclant la gorge avant de m'exclamer :

« Pina pipa pour plaire. »

La blonde écarquille les yeux, la surprise déformant son visage alors que les spectateurs se mettent à pousser de gros « ouuuuuhhhh ! » en la pointant du doigt. Je ne suis pas expert mais visiblement, c'est une association de mots connue parmi les élèves.

— ...Qu'est-ce que tu as osé dire ? chuchote-t-elle avant de se mordre la lèvre par nervosité.

— La vérité.

— T'es un homme mort, tu le sais ça ?

— Ton mec et ses toutous peuvent me faire ce qu'ils veulent, je ne m'abaisserais jamais à te faire des excuses pour un crime que je n'ai pas commis. Je suis bien plus solide que j'en ai l'air.

— Ah ouais ? intervient Punch en se rapprochant de nous. On va voir quelles sont tes limites alors.

Il serre son poing et s'apprête à me foutre un coup fatal...

*DRIIIING*

Lorsqu'une sonnerie retentit dans tout le bâtiment.

Tous les étudiants partent en courant vers la sortie alors que Punch grogne et desserre son poing en regardant sa copine.

— L'alarme à incendie... Jure que ce n'est pas Cotton.

— On lui a fait promettre de ne pas s'en mêler ! Non... peut-être que c'est... elle est venue tout à l'heure pour repartir instantanément...

— Qui ?

Pina ne répond pas et fait signe à son copain de m'abandonner là avant que des professeurs ne débarquent. D'un regard, il me fait comprendre qu'il n'en a pas fini avec moi, avant de partir avec elle et leur bande.

« CITRUS ! »

Pop étant relâchée, elle court jusqu'à moi et tombe à genoux pour m'empêcher de m'écrouler. Elle sort un mouchoir de sa poche pour essuyer mon visage et mon nez avant de nettoyer mon sang couvrant le sol.

J'ai du mal à l'entendre mais elle semble se confondre en excuse puis s'énerver contre les autres pour enfin s'inquiéter de mon état et m'aider à marcher.

— J'ai pu récupérer ton téléphone, entends-je finalement.

— Hein ? Comment ça ?

— Quand ils m'ont attrapé, ils ont pris ton sac de cours et l'on vidé un peu partout dans le couloir là-bas... Je suis désolé, je suis à chier dans ce genre de situation ! Ça m'énerve ! Pourquoi l'humain craint autant ?! Malgré l'évolution de notre espèce, pourquoi est-ce qu'à chaque fois, les mêmes schémas se reproduisent ?!

— Calme... Je... M'faut de l'eau.

— Pardon, je parle trop. Je t'emmène dehors, tu t'allonges et je récupère le contenu de ton sac !

Je ne réponds pas et me concentre sur mes pas. La marche est longue jusqu'à un endroit à l'abri des regards et des responsables du bâtiment cherchant qui a pu actionner le système d'alarme.

— Ne bouge pas, demande-t-elle en me déposant sur un banc en pierre, je vais chercher tes affaires et de l'eau !

— Je...

— Quoi ? QUOI ?! Citrus ! NE MEURS PAS MAINTENANT !

— Je... ne comptais pas bouger.

Popcorn met sa main sur sa poitrine en poussant un soupir avant de partir en courant vers le bâtiment principal.

Elle est mignonne quand elle est prise de panique. Elle est dans l'abus, c'est intéressant comme réaction.

Allongé sur un banc en pierre, mes yeux se perdent entre les feuilles lorsque je remarque enfin où je suis : sous un saule pleureur. Celui où j'avais entendu la voix de cette fille...

Et si c'était elle qui avait entendu ma détresse et était venu me sauver ? Ahah non... Ce serait trop gros. Pourquoi elle l'aurait fait alors que nous ne nous connaissons pas ? Pourtant j'aime cette version de l'histoire.

Je ferme les paupières et me concentre sur le bruit des branches caressées par le vent. De timides rayons de soleil réchauffent ma peau alors que tout mon corps crie au moindre mouvement.

J'ai douillé mais normalement, si ce que m'a injecté Citrus Lime fonctionne encore, je devrais m'en sortir qu'avec plusieurs bleus et aucune fracture. Pour une fois qu'être une expérience d'un savant fou à un avantage...

Par contre ils vont tirer la gueule à l'Académie quand ils auront les résultats de mes analyses de sang et d'urine. Je n'y avais pas songé mais à tous les coups, ils vont faire venir Roy pour avoir des explications... Et ce dernier va remarquer en m'examinant que l'on m'a frappé.

Merde. Mais ça aurait pu être pire : j'aurais pu me défendre. Là par contre, j'aurais douillé encore plus.

Je passe un long moment allongé jusqu'à ce que Pop revienne avec des antidouleurs et une bouteille d'eau que je termine en quelques secondes. Elle a réussi à retrouver mon sac dans une poubelle ainsi que mes manuels et d'autres affaires peu importantes.

— Attends, dis-je soudain en fouillant mon sac, où est mon carnet ?

— Ton carnet ?

— Si tu sais... celui avec la couverture jaune que je me trimballe partout. Celui que je t'ai montré samedi soir à la plage !

— Je croyais que tu l'avais laissé dans ta chambre...

— Non ! Je l'ai sorti tout à l'heure en cours !

— Il n'y avait pas de carnet... Je te jure que j'ai fouillé toutes les poubelles du couloir mais l'intégralité de tes affaires était en tas contre un mur ! Est-ce que tu veux que j'y retourne pour t-

— C'est bon.

Je lui réponds sèchement avant de m'excuser et de passer mes mains sur mon visage et dans mes cheveux blonds en bordel. Je suis plus en colère par la perte de ce carnet que par la rouste en public que je viens de me prendre.

Putain. C'était mon trésor.

— Je vais le chercher, dis-je finalement en tentant de me relever.

— Non ! Tu dois surtout aller à l'infirmerie puis dans ta chambre ! Tu vas aggraver tes blessures si tu fais trop d'effort. Je vais le chercher ton carnet, partout s'il le faut ! Même dans l'endroit le plus dégueulasse de l'école !

— Tu parles des toilettes pour hommes ?

— J'allais dire les vestiaires des hommes après un entrainement sportif mais ça rentre aussi en compte.

Pop arrive à me faire sourire, ce que je regrette immédiatement en grimaçant à cause de la douleur ressentie. Elle réussit finalement à me convaincre de me reposer pendant qu'elle cherche mon bien.

— C'était qui... la fille qui est arrivée pas loin de toi quand je me faisais frapper ?

— La fille ? Il n'y avait pas de fille...

— Laisse tomber.

Ce n'est qu'à la fin de la journée, à 20h passé et allongé dans mon lit avec plusieurs bandages sur le corps, que je reçois un SMS de sa part me confirmant ce que je craignais : mon carnet a bel et bien disparu.

Avec ce karma, autant me couper une couille maintenant, ça ira plus vite.



Pina pipa pour plaire ! Pina pipa pour plaire ! Désolé j'imagine Red le chantonner dans tous les couloirs xD

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Du piège tendu à Citrus ? De son obligation d'encaisser les coups mais également de sa "révolte" en affrontant Pina et Punch ? De son sauvetage par une personne inconnue ? De la réaction de Popcorn ? Vos théories sur la suite ?

🍬Si ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à voter et donner votre avis en commentaire ! On se retrouve jeudi prochain pour un nouveau chapitre 🍬

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