J'entendis un coup de feu. Quelqu'un venait de manier une arme et de l'utiliser.

Le temps que mon cerveau fasse l'analyse, j'entendais déjà des cris et des pleurs. Qu'est-ce qu'il se passe ?

Ma tête bourdonnait à nouveau. J'avais l'impression que toute la douleur du monde s'abattait sur moi. Comme hier, ou cette nuit.. Ou.. En réalité, quel jour sommes nous ? Je n'arrive plus à comprendre, ma vue se brouille.

Je fis un effort et me battais contre moi-même. Et puis d'un seul coup, la douleur s'en alla.

Je pu voir quelqu'un sur le sol ; et ce n'était autre que Raquël. Elle était inconsciente, baignant dans une flaque de sang.

« – D'où vient le tir ?!

– J'en sais rien, bordel de merde Raquël reste avec nous ! Hurla Jane entre deux sanglots étouffés.

Ces gouttes salées, que je voyais tombaient sur le sol même, humidifiaient chaque visage. Chacun se noyait dans ses larmes. Mais le tir.. A atteint son cœur. Merde, on lui a tiré dans le cœur ! Je sentais mon propre cœur se serrait dans ma poitrine. La rage montait au plus profond de mon âme, jamais aucuns sentiments n'avait pu me mettre dans un tel état. La colère, la tristesse et la haine se reflétaient dans la prunelle de mes yeux.

– Qui a fait ça ? Bordel, dites moi ! C'est quoi ce merdier ? Qui, putain pourquoi ? Mais merde, qu'est ce que nous avons demandé pour ça ?! Je vais me faire la personne qui a fait ça.. Oh, je vais me la faire.

Les larmes montaient.

– Aaron ! Calme toi ! J-je, on ne sait pas pourquoi Jake a fait ça.. Merde !

Léo mit sa main sur sa bouche comme s'il en avait trop dit. Mais c'était trop tard.

Je cherchais Jake du regard, et quand je l'aperçu, encore avec l'arme dans les mains, pointée vers Raquël, je ne parvins pas à me contrôler. Il avait l'air sous le choc, les yeux ébahis. Je me suis avancé à grandes enjambées vers lui et le pris par le col violemment, ses pieds ne touchaient plus le sol.

– Aaron ! Arrête, lâche le !

Clara me tenait par la taille et tirait mes habits le plus fort qu'elle pouvait. Je ne l'écoutais même plus et mis fin à ma retenue en balançant un poing dans le visage de Jake. J'avais tapé tellement fort que du sang gicla sur mon cou. Je pu percevoir des cris d'horreurs autour de moi.

– Oh mon Dieu Aaron, pose le ! Cria Max.

Cette fois c'était Max et Léo qui se chargèrent de m'empêcher de continuer de l'ammocher davantage. Mais du haut de mon mètre quatre-vingt seize, en étant le plus grand, ils ne parvinrent qu'à me faire rater mon second coup. Clara me gifla de toutes ses forces et me fixait d'un air horrifié et inquiet.

C'est là que je me rendis compte de la connerie que je voulais faire. Jake avait l'air confus et choqué de son propre geste, alors pourquoi l'avoir frapper ? Moi même je l'ignorais.

Je suis impulsif seulement que très rarement, mais là ça en valait la peine. Je crois.

Je fixais un point quelconque, dans le vide, toujours avec ma main accroché au col de Jake. Je pouvais l'entendre suffoquer.

Je l'ai lâché d'un geste brusque et l'ai rattrapé avant qu'il ne s'écrase au sol. Il était presque inconscient. Les yeux à moitié clos. Je pouvais lire sur son visage toute la tristesse et la peur du monde. Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi il avait fait ça, bon sang..

– Mais pourquoi avoir fait ça, tabarnak ?!

Je me mis à crier de rage et finis par lâcher quelques larmes, les toutes premières depuis que mon père n'est plus là, soit il y a trois ans, quatre mois et deux jours. En vingt-deux ans d'existence, je crois que c'est le seul jour où j'ai pu ressentir toutes ses émotions.

Bon Dieu, qu'est ce que nous avons fait pour mériter ça ?

– Jane.. Je suis désolée..

Quelqu'un prononça ces mots. Un autre tir. Cette fois personne, personne n'a tiré, nous avons entendu un tir mais nous ne savions pas d'où ça provenait. Cette voix m'était si familière.

Jane évita la balle car l'impact a été gêné par la voiture de Max. Nous avions tous eu un hoquet de surprise. Jane pleurait avec des larmes qui contenaient l'ombre de la peur, elle tremblait. Je cherchais des yeux quelqu'un qui avait pu faire ça, mais l'arme était toujours à terre, près du corps de Jake. Nous essayions tant bien que mal de le remettre sur pied, et voir si Raquël respirait. Mais avec nos souffles encore irréguliers, c'était compliqué de pouvoir entendre le moindre battement de cœur.

Elle n'est pas morte. Elle n'est pas morte. Elle n'est pas morte.

Je me suis levé et ai ramassé la balle qui était un peu plus loin, je pu voir que c'était exactement la même balle que celles que contenait le revolver précédent. Qui nous en veut au point de vouloir nous tuer ? Comment nous nous sommes embarqués là dedans ? Six jeunes, encore de minables petits adolescents dans leur tête, s'aventurant dans un coin complètement coupé du monde ; une maison située au fin fond du Canada, deux choses complètement clichés, mais qui pourtant, sont si réelles. On m'aurait raconté ça avant, je n'y aurais pas cru une seule seconde.

Encore accroupi, le regard dans le vide, j'essayais de sortir de mes pensées et de réfléchir. Une autre arme était présente dans les mains de quelqu'un, autour de nous. Je me suis levé. Je regardais autour de moi, encore les yeux humides, quand Max m'interpella :

– Aaron, ramène toi.

Je ne répondis rien, et j'avançais rapidement vers la bande.

– Hm ? Me contentai-je

– Je.. Regarde, regarde la position dans laquelle Raquël est.

Je me suis rapproché davantage, pour m'accroupir auprès du corps sans vie de Raquël. Mes yeux s'ouvrirent rapidement quand je vis qu'elle était allongée sur le dos, les jambes jointes, les bras écartés, et la tête légèrement penchée sur le côté gauche.

– Qui a fait ça ? Demandai-je.

– Personne Aaron, on s'est juste retourné pour voir Jake, et puis son corps était placé de cette façon. Répondit Léo calmement.

– D'accord. Très bien, et elle fait la croix de Jeez pour le fun tu crois ?

– Je jure qu'elle était comme ça, personne ne l'a touché avant que l'on t'appelle. Déclara Jane. »

Je soupirais et allais me lever, lorsque je sentis un courant d'air ainsi qu'une main, me frôler le cou.