Arc The Artist : Une dette à rembourser.
Le lendemain des retrouvailles avec Mark, Lana se réveille en s'étirant longuement. Elle se lève et sort de son lit, l'esprit embrumé par la fatigue.
Une odeur appétissante s'incruste dans le nez de l'adolescente, le bruit de l'huile qui crépite se répand à son tour dans ses oreilles.
Elle se rend dans la cuisine et observe Mark faire des œufs sur le plat avec du bacon.
— Qu'est-ce que tu fais ? interroge Lana en bâillant.
L'homme pointe la poubelle jaune du doigt.
— En observant vos courses et ce que vous avez jeté, j'ai remarqué qu'aucune de vous deux ne faisait la cuisine. Il n'y a que des plats préparés et des sandwichs.
— Et alors ? rétorque l'adolescente sans voir le mal.
— Tu n'as connu que le laboratoire et Sayuri n'en voit pas l'utilité donc c'est normal que tu ne saches pas. Dans la vie, on se prépare à manger, c'est bien meilleur que manger des choses toute faite. Rien ne vaut la récompense suite à un effort ou à un travail. Un peu comme un fruit qu'on plante et qu'on fait mûrir, jusqu'à le manger.
Après quelques secondes de réflexion, Lana cherche dans les placards et prend des assiettes ainsi que des couverts.
— Je t'avoue que peu importe ce que je mange. Mon seul objectif est Leyla et l'anéantissement de tout ce qui a un rapport avec les laboratoires.
Elle s'assoit après avoir soigneusement mis la table, la jeune fille s'affale complètement en soupirant. Sayuri les rejoint quelques minutes plus tard, attirée par la cuisine de Mark.
— Pourquoi il fait à manger, miaou ? interroge-t-elle en s'asseyant en face de son amie.
— Une lubie bizarre... Je pense qu'il veut prendre soin de nous.
L'homme se rapproche avec la poêle et sert ses deux camarades avant de ramener du pain de mie et du jus d'orange.
— Voici ce qu'on appelle un petit déjeuner équilibré.
Toujours en abordant un air nonchalant, Lana se redresse, prend ses couverts et plante sa fourchette dans le bacon. Quelques secondes plus tard, ses yeux s'écarquillent tandis qu'une aiguille de plaisir se plante dans son cerveau.
— Trop bon.
Elle prend ensuite le pain et pose de la viande ainsi qu'un œuf sur le plat dessus, elle mange tout ensemble avant d'émettre une exclamation.
— Tu vois ? Avec de la préparation, c'est bien meilleur, non ?
Après avoir tout ingurgité, elle s'essuie et regarde timidement son ami d'enfance.
— Merci...
L'ancien chef de l'Hydre caresse les cheveux de Lana en se levant.
— Je préfère te voir comme ça. Je suis là pour faire revenir Leyla, mais aussi pour prendre soin de toi. Ma troisième vie servira à rembourser la dette que je vous dois.
Une éructation attire leur attention vers Sayuri ayant tout englouti.
— Miaou, c'était super bon, tu seras notre cuisinier officiel !
— Tu casses...
— Mais je suis d'accord avec toi Mark, coupe-t-elle sans prendre en compte son regard assassin. Je vais moi aussi aider Lana, c'est la seule qui ait pris la peine de me prendre réellement en compte, miaou.
— Tant que tu ne t'approches pas trop de moi quand tu es nue... soupire Lana en se levant.
Son téléphone vibre, son esprit aussi.
"Qui voudrait m'envoyer un message ? Tous les contacts de Leyla sont censés savoir que j'ai pris sa place."
Elle prend son portable, une sphère se forme à l'intérieur de son ventre, quelqu'un veut lui parler à elle.
— Si c'est Lily et Eve, je ne répondrais pas, encore moins si c'est Keith.
Mark s'approche à son tour, suivi par Sayuri.
— Que se passe-t-il ?
Lana montre son mobile et fini par aller sur l'application de messagerie.
— Un message de Dean... Si je fouille dans les souvenirs de Leyla, tu l'as combattu, il est proche d'une Alice.
L'homme acquiesce et invite son amie à ouvrir son contenu.
— Il veut me voir, c'est urgent.
**
Le noir, couleur sombre.
Sombre, comme son esprit, son passé, son subconscient.
Subconscient, âme enfermée dans un monde qui n'est pas réel, un monde onirique.
Onirique, rêve, songe, les mots se mélangent, se disputent, hurlent de toutes leurs forces dans un cerveau tiraillé.
— Qu'est-ce qui se passe ? Je suis où ? panique la jeune Vandergrift en se réveillant brusquement.
Son regard écarlate, égaré dans l'enceinte d'un hôpital, se porte vers une infirmière murée dans le silence, figée dans le temps.
— Qu'est-ce qui vous arrive ? Vous avez jamais vu une comateuse se réveiller ou quoi ? Allez chercher quelqu'un !
Tandis qu'Eve arrache chaque électrode positionnée sur son corps, les médecins traitants son cas ainsi que Lily et Keyna font leur apparition.
— L'andouille aux yeux rougeâtre ! J'ai bien cru que tu allais nous quitter ! s'exclame Lily pendant que les docteurs vérifient les constantes de l'adolescente.
— Elle est complètement stabilisée, plus de trace du gûzen qui la manipulait.
Keyna observe silencieusement sa subordonnée.
— Tu es entrée en contact avec lui.
Eve acquiesce, Lily ne peut s'empêcher d'émettre une exclamation, l'air stupéfait.
— On dirait que son gûzen me transporte dans un rêve qu'il contrôle. J'étais dans une sorte de musée et je me suis fait attaquer par une créature. J'ai communiqué avec lui, mais on aurait dit un simple fragment de lui.
Toujours enfermée dans une réflexion profonde, l'agente tourne en rond dans la chambre. Elle ignore les remontrances des médecins qui, non sans une pointe d'énervement, quittent la pièce.
— Ça me fait penser au Reflect World, ce qui est étonnant, c'est que tu aies pu te réveiller sans l'aide d'une personne tierce ou sans son arrestation.
— Ce qui veut dire... ajoute Lily, en se connectant à Eve du regard.
— Qu'il y a des règles prédéfinies qui régissent son pouvoir... Et que d'une manière ou d'une autre, j'ai respecté celles-ci... termine la jeune Vandergrift en se relevant. Il faudrait déjà se renseigner dans le registre des gûzen s'il y a le sien.
Keyna observe Eve avec une certaine inquiétude, celle-ci le remarque et sourit.
— Je vais bien, j'ai juste fait une petite sieste !
— Un jour ! Ce n'est pas qu'une sieste, j'étais inquiète ! rajoute Lily tandis que leur cheffe fait signe de sortir de la pièce.
— Si tu te sens capable de bouger, on va d'abord aller manger un bout.
**
Le vent souffle avec grâce et douceur sur les arbres du 4ᵉ district. Assise sur un banc au milieu de l'immense parc naturel de Link, Lana attend son rendez-vous.
— Si j'attends, ne serait-ce qu'une minute de plus, je le tue.
À peine, l'adolescente finit sa phrase, qu'elle aperçoit Dean au loin. Elle s'avance vers le garçon aux cheveux marins. Rapidement, elle constate des cernes et un visage creusé par l'inquiétude.
— Tu sais que je ne suis pas Leyla, pourquoi faire appel à moi ?
L'adolescent, malgré son air chétif, ne flanche pas devant la pression qu'engendre chaque mouvement de Lana.
— Lily et Eve sont déjà sur une enquête. Les Vandergrift sont occupés et les autorités n'ont pas pris mes dires au sérieux.
Les sourcils de la détentrice se froncent.
"Le CCI ? L'affaire est si grave que ça ?"
— Raconte-moi.
— Alice a disparu, elle ne répond à aucun de mes messages et n'est pas allée en cours.
Lana soupire en claquant sa main sur sa tête.
— Dire que tu es venue pour ça... Elle est sans doute malade ou elle ne veut pas te voir.
Tandis qu'elle fait volte face et commence à partir, Dean lui prend le bras. La tension monte d'un cran dans l'esprit de la sœur de Leyla, elle se retourne, prête à en découdre.
— Si tu ne me lâches pas...
Le visage ferme de Dean immobilise instantanément Lana, impressionnée de l'assurance dont il fait preuve.
— Si je suis là, c'est parce que je suis déjà allé au dortoir, j'ai enfoncé la porte, il n'y a aucun signe de vie d'Alice depuis plusieurs jours. J'ai même demandé à ses amis, personne ne l'a vu revenir.
Il lâche la pression sur le membre de son interlocutrice qui se dégage instantanément. Elle rembobine le film sur Dean.
— Tu étais un connard au tout début... Ma sœur t'a battu, ensuite, tu as commencé t'intéresser à elle. On aurait même dit que tu étais amoureux d'elle. Ensuite, tu l'as aidé contre les Vandergrift... Puis contre Mark et tu t'es rapprochée d'Alice lorsque tu as été blessée par ce Picks crée grâce à nos cellules... Dégueulasse.
Elle soupire et prend son menton, l'obligeant ainsi à soutenir son regard.
— Franchement, j'ai d'autres choses à faire que t'aider... Mais c'est moi qui suis là, pas Leyla. Il faut bien que je rembourse la dette qu'elle te doit. Tu vas venir avec moi, par contre, je te préviens.
Elle le lâche et recule tout en marquant un temps de pause.
— Oui ? s'interroge le garçon, interloqué.
— Ce que je vais te dire est secret, si tu divulgues quoi que ce soit. Je te crève. J'espère que c'est bien rentré dans ta petite tête d'ange.
Dean prend un air décidé, de ses pupilles, jaillit une puissante aura d'une pureté sans précédent.
— Je te promets de rien dire.
Lana sourit et l'invite à le suivre.
**
Une trentaine de minutes plus tard, après un long silence pesant sur le mental de Dean, ils arrivent devant la porte de la suite de l'adolescente.
— Tu ne devais pas me le dire ton secret ? raille Dean en souriant.
— On aurait perdu du temps, car tu ne m'aurais pas cru. Ensuite, tu te serais énervé, je t'aurais frappé et j'aurais dû te porter jusqu'ici.
— Mais si je m'énerve ici ? s'enquiert le jeune homme en fronçant les sourcils.
Lana pouffe sarcastiquement de rire.
— Je te frappe et j'ai juste à te mettre sur le canapé.
La détentrice ouvre la porte donnant directement sur le salon. Mark installé sur le canapé détourne son attention de la télé pour voir son ancien adversaire.
— Tu l'as donc amené ici. L'affaire doit être urgente pour que tu nous mêles à lui.
La sœur de Leyla acquiesce et invite son camarade à rentrer dans l'appartement. Le garçon aux cheveux bleuâtres s'exécute et rentre en analysant tout d'un air grave.
— Sa copine, Alice, a disparu depuis quelques jours. Sans doute un kidnapping, j'ai une dette à rembourser pour ma frangine.
L'ancien chef de l'Hydre éteint la télé, se lève et se dirige dans la cuisine. Lana et Dean le suivent et tombent nez à nez avec Sayuri, mangeant des rillettes de saumon avec du pain de mie. Le corps de l'adolescent se crispe instantanément avant que celui-ci ne se mette en position de combat.
La féline affiche un sourire mesquin avant de se redresser, Lana s'approche et frappe le crâne de son amie.
— Arrête de le taquiner, Sayu.
La féline s'assoit en se massant le crâne.
— Je voulais juste lui faire peur miaou...
Dean se calme malgré lui et s'assoit en face de Sayuri, la détentrice se positionne à côté de sa camarade tandis que Mark se pose avec le nouveau venu.
— Donc c'est ça ton secret... Tu t'es fourrée avec une criminelle, et la plus manipulatrice de l'Hydre ! s'exclame-t-il, le regard perçant.
— Deux pour être exact, corrige Mark en souriant. Tu ne me reconnais pas car j'ai un nouveau corps, mais je suis Mark.
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