Arc Den of Fear : Une nouvelle dissonance.
Assises devant l'iconique fontaine du domaine, Eve et Lily s'observent suite à la révélation de Vandergrift. Son interlocutrice, muette en contrat à durée indéterminée, ne prononce pas un mot.
— Lily, c'est sérieux... menace l'adolescente, troublée par sa propre conscience.
La jeune agente se claque les joues, revenant ainsi à la réalité. Elle se concentre en posant le pouce sur sa bouche.
— Tu t'es fait kidnapper par Sora, le fait qu'il te libère si facilement... Il y a un dicton qui dit "c'est trop beau pour être vrai".
Eve pose ses coudes sur ses genoux et ses mains sur ses cheveux, les yeux rivés sur l'herbe environnante. Elle se rend compte qu'elle ne serait jamais partie sans son accord, sans son bon vouloir.
« Naïve... Tu es naïve, ma chose bien aimée. »
La voix s'incruste plus profondément en elle, tapi dans l'ombre de chaque cellule, dans chaque recoin de son esprit. Prête à manier avec la grâce d'un marionnettiste, son corps, son inconscient et son cœur.
Au fur et à mesure des secondes qui la blessent, Sora prend le contrôle de ses battements, de sa respiration, de son sang. Jusqu'à ses pensées.
Elle entend une voix lointaine, très lointaine. Si loin que ça lui paraît irréel. Cette voix lui parle, mais elle ne parvient pas à déchiffrer la moindre parcelle de mots. Mystérieuse, elle s'éloigne encore tandis qu'elle court dans un monde brumeux pour la rattraper.
Un écho de cette voix se propage, une chaleur enivrante entoure cette sonorité frisant l'insolence. Tout d'un coup, la fuyarde rentre en résonance avec Eve.
— Oh ! Tu reviens parmi nous ? s'exclame Lily, tentant de faire revenir son amie en la gigotant dans tous les sens.
— Hein ? s'étonne l'intéressée, levant la tête, les yeux écarquillés. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
— Je ne sais pas, je t'ai dit un dicton puis tu es restée immobile ! J'ai eu beau te lever la tête, te pincer et te bouger, tu ne faisais rien !
— Il faut que j'aille le voir...
Lily fronce les sourcils en observant la jeune Vandergrift.
— Tu ne parles pas de Sora quand même ?!
— Si... Il m'a fait quelque chose, c'est sûr. Mais je ne sais pas quoi, ni comment. Il faut qu'on le tabasse, que je lui arrache ses membres et qu'on lui soutire des informations.
« C'est ça... Viens à moi... », résonne la voix de Sora, dans l'esprit enivré d'Eve, luttant pour la faire taire.
— Mais il ne faut pas oublier qu'il y a aussi ceux qui ont attaqué Lana dans le train et cette peste de Sayuri ! À deux, ils ont réussi à attaquer le domaine !
— Cette fois, on ne se laissera pas faire Lily. On va les buter et leur montrer de quel bois on se chauffe. T'es avec moi ?
Lily se mord le pouce en tentant d'analyser la situation, tandis qu'Eve semble plus que déterminée.
— Et Lana ?
— Surtout pas, elle est bien trop fragile en ce moment...
La jeune agente se remémore les derniers choix qu'elle a pu faire, sa conscience lui hurle de ne pas suivre la Vandergrift. Une autre partie de son esprit, quant à lui, ne peut se résoudre à abandonner l'une de ses meilleures amies.
— Ok... Mais dès qu'on est en danger, on part... Et... Eve ?
— Oui ? répond machinalement l'intéressée.
Lily serre les poings, le regard tremblant. Sa partenaire perçoit l'ombre des doutes planer au-dessus d'elle.
— On n'implique pas d'innocents... J'ai fait assez de dégâts comme ça. murmure-t-elle comme pour ne pas se rappeler ses vices.
Un sourire s'étend sur le visage d'Eve, la lumière coruscante qui émane de son amie l'éblouie totalement.
— Promis, Lily.
Les deux filles se lèvent du banc, décidées à en finir avec leurs ennemis.
**
Dans le 2ᵉ district, surnommé le "quartier des affaires", composé des plus grandes entreprises de Link, Keith sort d'une réunion, accompagné de nombreux gardes du corps. Une fois arrivé à l'entrée de l'immense dôme de fer abritant le siège social de Panthéon, une tripotée de journalistes l'assaillent de questions.
— Est-il vrai que vous avez doublé les dépenses de la ville dans le secteur de l'armement ? questionne l'un d'entre eux alors que les agents du fondateur de Link, lui indiquent de reculer.
— Avez-vous réussi à prendre le contrôle de Panthéon, plus grande industrie d'armes du monde ? tente un autre, à son tour repoussé.
Keith affiche un grand sourire avant de mettre ses lunettes de soleil et de rentrer dans sa voiture. Avant de se fermer complètement au monde, il jette un œil aux polémistes.
— Messieurs, vous aurez les réponses en même temps que tous les citoyens de Link. J'œuvre pour l'égalité, pas pour la loi de la jungle.
Satisfait du silence de ses réfractaires, il s'efface des médias en se plaçant au fond de la limousine. Son téléphone vibre, il met la main dans sa poche, le prend et répond.
— J'espère que c'est urgent. déclare-t-il d'un ton ferme, le regard droit devant lui.
Ses yeux s'écarquillent en entendant la réponse de la femme.
— Keyna a été ramené blessée dans un hôpital ?
La fille aux cheveux violets, disparue depuis le raid contre Mark fait un retour dans l'esprit de Keith, qui l'a cherchée des semaines durant.
— J'arrive de suite.
Sans plus tarder, Keith ordonne à son chauffeur de se rendre immédiatement dans le centre de soin.
Une quinzaine de minutes plus tard, le fondateur de Link arrive sur place. Il passe une porte automatique, se rend à l'accueil, où se trouve une jeune femme en blouse blanche.
— Je viens voir Keyna, emmenez-moi dans sa chambre.
— Je vous fais appeler quelqu'un. répond l'employée, obnubilée par les anneaux rouges sur les pupilles de l'homme.
Une trentaine de secondes plus tard, un groupe de quatre médecins accueille Keith, pressé. Ils l'invitent à les suivre, ce qu'il fait sans broncher. Le fondateur les suit jusqu'à un ascenseur qu'ils montent sans un bruit, la tension monte d'un cran alors que personne n'ose parler en sa présence.
Une fois arrivé au troisième étage, la bande s'avance jusqu'à la première porte à gauche, manquant de bousculer une infirmière avec un brancard, Keith continue sa route vers sa destination. Il pose sa main sur la boite de Pandore, elle s'ouvre et donne lieu à une vision désagréable.
— Elle était grièvement blessée quand on nous l'a déposée. Une personne tierce a tenté de lui faire les premiers soins, ce qui lui a sans doute sauvé la vie.
— Vous avez une idée de ce qui a pu causer de telles blessures ? tente Keith, en s'approchant de l'infirme.
Le médecin hoche la tête.
— Des combats, violents et répétés.
Keith continue d'observer la blessée, jusqu'à prendre sa main. Le docteur sent une aura envelopper le fondateur, des veines parcourent son visage tandis que son visage se crispe. La machine reliée à Keyna indique soudainement de nouvelles données, plus rassurantes.
— Impossible... Son pronostic vital n'est plus engagé, elle va même beaucoup mieux, qu'avez-vous fait ?
Les anneaux écarlates de l'homme aux cheveux noirs se positionnent en face du praticien.
— Je connais une fille qui aime les dictons. Il y en a un plutôt intéressant, "moins, vous en saurez, mieux vous vous porterez".
La conscience du vieil homme se perd dans la peur et le silence. Ses yeux tremblent si puissamment que sa vision se trouble, le corps tout aussi inconstant, manque de lâcher le médecin.
— Keyna, lève-toi. Je sais que tu es réveillée.
Un grognement retentit dans la salle, la silhouette couverte de bandage se redresse et fait face à son supérieur.
— Je voulais dormir.
— Allons bon, je pense que tu en as assez fait à ta tête. Klint est peut-être mort, mais ce n'est pas une raison pour abandonner. Je te rappelle que tu as une sœur à venger.
La jeune femme s'étire et se lève de son lit en arrachant les bandages sur son visage. Ses iris couleur améthyste perçoivent de nouveau la lumière du jour. Elle bouge ses bras, ses jambes avant de serrer le poing.
— Tu es génie Keithounet, je ne savais pas que tu avais des pouvoirs de guérison.
Keith sourit en sortant de la salle avant de s'arrêter juste devant l'entrée.
— Je ne t'ai pas guéri, tu as partagé ta souffrance avec moi.
— En tout cas, merci.
La détentrice suit Keith qui se dirige de nouveau vers le 1ᵉʳ district.
**
Enfermée dans sa chambre, Lana se réveille au milieu de l'après-midi. Silencieuse, les yeux grands ouverts, la respiration coupée, comme si elle avait oublié comment vivre.
Elle se lève prudemment, chaque pas est un danger, chaque sensation, une nouveauté, un renouveau. Une sensation de déjà-vu traverse l'esprit de la détentrice qui s'aventure dans son compartiment.
"Il faut que je trouve la porte, il fait noir."
Après quelques minutes dans la pénombre, la jeune fille parvient à retrouver la sortie donnant sur le couloir.
"J'ai l'impression que c'est si réel."
Au milieu du corridor, elle perçoit des fenêtres donnant sur l'extérieur du manoir, déterminée, elle se décide à les traverser. Elle saute dans leur direction et les casse sans le vouloir, elle atterrit violemment sur le sol.
— Aie... Merde !
Elle se relève instantanément, dans l'incompréhension. Elle se touche instinctivement la gorge, les yeux écarquillés.
— Cette sensation... Je peux parler... Je ressens le soleil, la douleur...
La détentrice court, manque de tomber plusieurs fois. Elle continue de courir dans le domaine, jusqu'à voir une fontaine. Elle court encore, toujours plus vite.
Elle parvient jusqu'au point d'eau, se regarde par le biais des reflets.
— Leyla... C'est le corps de Leyla.
**
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