Milion Eyes 🍗
Le vent s'engouffrait dans les couloirs de Poudlard, faisant vibrer les vitraux comme les cordes d'un instrument oublié. Hermione Granger était assise dans la salle commune des Gryffondor, seule devant un feu mourant. Un livre de métamorphose ouvert reposait sur ses genoux, mais ses yeux flottaient au-dessus des lignes imprimées, absorbés par des pensées bien plus chaotiques que les leçons académiques.
Depuis plusieurs jours, elle observait Ron. Il riait moins, et ses plaisanteries – qui, même maladroites, avaient toujours un don étrange pour la désarmer – s'étaient raréfiées. Il s'éclipsait souvent sans un mot, laissant une table pleine d'amis derrière lui, son assiette à moitié pleine. C'était Ron, et pourtant ce n'était pas lui. Et cette version de Ron, ce silence étouffant, la blessait plus qu'elle n'osait se l'avouer.
Elle ferma son livre d'un claquement sec. Assez. Elle ne pouvait plus supporter de rester là à se torturer l'esprit. Elle devait lui parler, ou au moins essayer de comprendre.
Elle finit par le trouver au bord du lac noir. Le crépuscule enveloppait le paysage d'une lumière surnaturelle, comme si le monde hésitait entre le jour et la nuit. Ron était assis sur une vieille souche, le dos courbé et le regard perdu dans l'eau sombre. À quelques mètres de lui, Hermione ralentit son pas, incertaine. Le vent faisait voler ses cheveux, mais elle n'y prêta pas attention. Ce qu'elle voyait lui serrait le cœur : Ron semblait écrasé par un poids invisible, comme s'il portait sur ses épaules tout le chagrin de l'univers.
— Ron ? murmura-t-elle, sa voix à peine plus forte qu'un souffle.
Il releva la tête, visiblement surpris de ne pas être seul.
— Oh... salut, Hermione, dit-il, sa voix rauque et fatiguée.
Elle s'approcha doucement et s'assit à côté de lui sur la souche. Le silence s'étira entre eux, rythmé par le clapotis des vagues contre la rive. Hermione n'osait pas parler tout de suite, craignant de dire quelque chose de maladroit.
— Qu'est-ce qui ne va pas ? finit-elle par demander.
Ron haussa les épaules sans la regarder, fixant obstinément ses pieds.
— Rien. Tout va bien.
— Ron, soupira-t-elle, ne me mens pas. Je te connais.
Sa voix n'était pas accusatrice, juste douce, presque suppliante. Elle vit sa mâchoire se crisper, et un long soupir s'échappa de ses lèvres.
— Tu veux vraiment savoir ? demanda-t-il enfin, sa voix tremblante.
Elle hocha la tête, posant un regard déterminé sur lui. Il tourna enfin la tête pour la regarder. Ses yeux bleus, habituellement si pétillants, étaient ternes, rougis par un chagrin qu'il n'avait manifestement pas partagé avec qui que ce soit.
— Je suis fatigué, Hermione, avoua-t-il. Fatigué de tout ça... De toujours être dans l'ombre de Harry.
Hermione sentit un nœud se former dans son estomac. Mais elle resta silencieuse, le laissant parler.
— Partout où je vais, reprit-il, on ne voit jamais moi. Je suis "le meilleur ami de Harry Potter", "le rouquin à côté du héros". C'est toujours pareil. Même ici, à Poudlard, les gens ne savent pas qui je suis. Ils me regardent, mais ils ne me voient pas.
Sa voix se brisa, et il passa une main tremblante dans ses cheveux roux.
— Et toi, Hermione... toi, t'es brillante. T'as pas besoin de Harry ou de qui que ce soit pour qu'on te remarque. T'es la fille la plus intelligente que j'aie jamais rencontrée. Moi, je suis juste... moi.
Hermione sentit son cœur se serrer à ces mots. Elle aurait voulu crier, hurler qu'il se trompait, mais les mots lui manquaient. Alors elle fit la seule chose qui lui semblait juste : elle posa une main sur la sienne. Ron releva brusquement les yeux vers elle, surpris.
— Tu n'es pas "juste" toi, Ron, murmura-t-elle. Tu es loyal, tu es courageux, et tu as un cœur plus grand que n'importe qui d'autre. Tu ne vois peut-être pas ce que je vois, mais... tu es bien plus spécial que tu ne le penses.
Il fronça les sourcils, comme s'il cherchait à comprendre si elle était sincère.
— Tu le penses vraiment ? murmura-t-il.
— Bien sûr que je le pense, dit-elle d'une voix douce mais ferme. Tu comptes plus pour moi que tu ne l'imagines.
Un silence suivit ses mots, mais ce n'était pas un silence froid. C'était un silence chargé de quelque chose de profond, de sincère. Ron détourna le regard, mais pas avant qu'elle ne voie une larme rouler sur sa joue.
— Avec leurs millions d'yeux, ils te regardent, murmura-t-elle, reprenant un souffle tremblant. Mais ils ne te voient pas, pas comme moi je te vois.
Ron émit un rire court et amer, un son qui semblait déchiré entre l'ironie et l'incrédulité.
— T'as toujours les bons mots, hein ? souffla-t-il.
Elle sourit légèrement, malgré la tension.
— Et toi, t'as toujours les blagues nulles, répondit-elle doucement, son ton teinté d'affection.
Il releva la tête, et cette fois, son sourire apparut enfin. Ce n'était pas un sourire entier, mais c'était un début. Un vrai.
Hermione sentit quelque chose bouger en elle, quelque chose qu'elle ne pouvait plus ignorer. Elle inspira profondément, et avant que son courage ne la quitte, elle se pencha vers lui. Ses lèvres effleurèrent les siennes dans un baiser doux et hésitant. Ron resta figé un instant, comme pris au dépourvu, avant de lui rendre ce baiser, maladroit mais sincère.
Quand ils se séparèrent, il la fixa avec des yeux écarquillés, ses joues en feu.
— Eh... euh... c'était...
— Pas un mot, Ron, dit-elle en riant doucement, sa voix tremblante mais heureuse.
Il éclata d'un rire, un vrai cette fois, et ce son lui réchauffa le cœur. Pour la première fois depuis des jours, il semblait un peu plus léger.
Ils restèrent là, côte à côte, regardant le lac noir s'étendre devant eux comme un miroir d'étoiles. Et pour Hermione, le monde semblait soudain un peu moins lourd, un peu moins sombre. Car, dans ce moment suspendu, ni les millions d'yeux qui observaient Ron, ni les ombres qui pesaient sur lui n'avaient d'importance. Pas ici. Pas pour elle.
....
et voila ton romione Loveen222 ❤️
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top