🎸 3. Liens sous tensions

"It's the end, the end of the 70's

It's the end, the end of the century"

Do you Remember Rock'n'Roll Radio - Ramones

* * *

Pdv Joe

Alan Roberts venait au jardin d'enfants toujours bien vêtu, des habits propres, repassés avec différents tons de couleurs choisis avec soin. Cependant, il n'y avait pas que son apparence qui confirmait nos interprétations à son égard. Alors à peine âgé de cinq ans, ce gamin détenait une expression ayant le don d'horripiler les autres gosses du jardin d'enfants.

Quels jugements portions-nous à son égard, qui étaient bien réels ? Un gosse de riche. Alan ne cessait de se vanter de la richesse de son père, argumentant que tout ce qu'il voyait à la télé, il pouvait l'obtenir. Une véritable tête à claque.

Comme tous les autres enfants, mes rapports avec Alan se montraient compliqués, électriques. Nous nous hurlions dessus à plusieurs moments de la journée, jusqu'à mettre nos éducatrices hors d'elles. Je me souviens d'un moment bien particulier démontrant mon intelligence supérieur à celle de cet imbécile.

Ce fut durant une journée hivernale de cette année 86, je me trouvais vers la fenêtre, à jouer avec un camion de pompier. À l'instant où je sentis une poigne forte agripper ma chevelure très bouclées, une grimace vint défigurer les traits de mon visage, puis je laissai échapper un cri strident de douleur. Sans surprise, c'était Alan. Le gamin de riche relâcha sa poigne pour venir s'emparer du camion de pompier avec lequel je jouais.

— Gaufrette, Alan m'a piqué mon camion ! hurlai-je au travers d'un cri de détresse.

Gaufrette – je l'appelai ainsi, puisque retenir son véritable prénom se relevait impossible pour moi et je ne m'en souviens toujours pas à l'heure actuelle - était l'une des éducatrice présentes sur le groupe d'enfants. Puis, comme à son habitude, au lieu de porter un regard sécurisant dans la salle, elle se trouvait occupée à papoter avec sa collègue.

Alors, je compris qu'il allait falloir agir seul, tel un grand. Les poings serrés, les traits de mon faciès renfrognés, je me dirigeai d'un pas furibond vers mon ennemi. Prenant une grande inspiration, je rassemblais toute ma colère, ma frustration dans mes bras qui repoussèrent Alan avec une violence qui le fit basculer en avant, la tête la première et le camion fut projeté au loin dans la salle.

L'enfant resta immobile durant quelques secondes, conscientisant ce qui venait de se produire, puis libéra une hurlée puissante, à tel point qu'un sursaut parcourut l'ensemble de mon métabolisme. Le regard rempli de haine d'Alan se reporta sur moi, je pus y déceler la fureur qui l'habitait, l'humiliation luire dans le creux de ses prunelles. Les lèvres pincées, les joues rougies par les larmes y ayant cascadé, il se releva, puis s'avança vers moi.

— Le père Noël ne viendra pas t'apporter de cadeaux parce que tu es méchant ! cracha-t-il à plein poumons, lâchant quelques postillons.

Sa lancée suscita la curiosité des éducatrices qui nous observaient au loin. Sans doute attendaient-elles de voir comment notre conflit allait se régler. Je tenais à être plus intelligent que cette brute, ainsi je pris soin de ne pas faire usage des poings.

— Je m'en fiche parce que le père Noël est déjà passé ! rétorquai-je, sur le même ton.

Puis, comme à l'accoutumé, ne trouvant rien d'autre à répliquer, Alan agrippa ma chevelure une nouvelle fois, ce qui provoqua l'intervention des adultes. Ainsi, pour cette unique raison, je n'appréciai guère la fréquentation des jardins d'enfants.

Parfois, il arrivait que la tâche de me garder fût conviée à Joeffrey, lorsque ce dernier n'avait pas d'école. Ceci ne le réjouissait guère, il en était de même pour moi. Ayant saisi que mon frère ne me portait guère dans son cœur, mon adulation à son égard s'était estompée.

Or, aucun de nous deux n'avait son mot à dire, mes pleurs déchirants lorsque ma mère quittait la maison n'y contribuaient à rien. J'étais contraint de rester sous l'autorité de Joeffrey. Lui, était dans l'obligation de bloquer sa journée pour moi.

En dépit de mes précautions pour éviter de le contredire, de lui tenir tête afin de passer une bonne journée, l'adolescent trouvait toujours le moyen de déclencher chez moi une grosse crise de larmes, pour ensuite me réprimander. Il n'était guère étonnant qu'une fois le soir venu, je rapportais à maman et papa, l'attitude de Joeffrey à mon égard.

Mon allocution achevée, je percevais les flammes furieuses briller dans le creux de leurs prunelles en direction du premier de la fratrie. La punition avec des conséquences tombaient, mais cela ne suffisait pas.

Puis, vint le jour où le seuil de tolérance de papa atteignit son paroxysme. Je me trouvais dans le salon, jouant sur le petit piano synthétique, dans le salon, en compagnie de Joseph, mon unique public fidèle, toujours présent lors de mes représentations. Du coin de l'œil, je remarquai mon père s'engouffrer d'un pas furibond dans le couloir menant à nos chambres respectives.

Ayant tenu compte de sa démarche, de ses lèvres pincées, ainsi que son regard sombre, il ne me fut pas difficile à comprendre que ma figure paternelle recherchait Joeffrey. Cependant, j'ignorais la raison motivant cette décision. Je n'allais néanmoins pas tarder à le savoir.

— Joeffrey j'ai à te parler sérieusement, lâcha l'homme d'un ton sec.

Ouvrant la porte de la chambre, je perçus une musique agressant avec brutalité mes oreilles. Il s'avérait que l'adolescent écoutait un style se trouvait à l'opposé de celui qui m'accompagnait depuis le berceau. Bien plus tard, je découvris que ce genre musical était du rap.

En dépit de la porte refermée, ainsi que la sonorité affreuse inondant la pièce, je pus attraper quelques brins de la conversation entre les deux garçons.

— Tes notes sont déplorables, ton comportement est ingérable. J'ignore ce qu'on va faire de toi.

Le désespoir se faisait ressentir dans le timbre de sa voix. Maman et papa en venait à bout, c'était un fait qu'ils ne pouvaient plus cacher. Ce qui fut aussi évident était que Joeffrey se trouvait à l'origine de cet épuisement.

Occupé à presser sur les touches noires et blanches, je ne cherchai pas à suivre le reste de la discussion. Jusqu'à l'instant où l'ensemble de mes muscles se contractèrent d'effroi, à l'entente de mon prénom.

— Il est temps de te prendre en main, jeune homme. Puisque c'est ainsi, tu n'iras pas en veille avec tes amis. Tu resteras ici, à ranger cette chambre et à surveiller Joe, pendant que je vais chercher ta mère au travail.

Mon esprit refusa de découvrir la réponse de l'adolescent. L'estomac noué par la tétanie qui s'empara de mon organisme, je me relevai dans la précipitation, puis me ruai vers mon père, une expression de terreur imprimée sur mon faciès. Je me heurtai contre le corps robuste de ma figure paternelle, ce dernier venant de quitter la chambre de mon frère, le laissant se plaindre avec une colère expressive.

— Papa, ne pars pas ! Ne me laisse pas avec Joeffrey ! m'écriai-je, les larmes aux yeux.

Comme le faisait ma mère, papa s'agenouilla à ma hauteur, planta ses prunelles vertes dans les miens, de la même couleur. Avec délicatesse, sa main de déposa sur ma joue humide.

— Ne t'en fais pas, Joe. Je vais juste chercher maman au travail et je reviens très vite, me souffla-t-il, d'une voix calme.

— Mais Joeffrey, il n'est pas gentil avec moi.

La gorge serrée, je dus me retenir de lâcher une autre cascade de larmes. Papa allait vite revenir avec maman. Cette réalité m'aida à calmer cette tétanie qui grandissait dans mon être.

Après le départ de mon père, je restai dans mon coin, avec l'espoir que Joeffrey ne vienne pas m'embêter. J'étais retournée à mon clavier, Joseph toujours présent, tandis qu'un concert des Ramones était rediffusé à la télévision.

Je fus réprimé d'un sursaut à l'entente de l'ouverture de la porte. C'était l'adolescent qui avait quitté sa chambre. Vêtu d'une veste en cuir noire, chaussé de Vans, je compris qu'il s'apprêtait à sortir. Cependant, je m'abstins d'émettre le moindre commentaire, par crainte de me recevoir une de ces remarques acerbes dans la figure.

Muré dans un silence, je l'observais verrouiller sa chambre, puis enfiler la clé dans sa chaussure. Atteignant le hall d'entrée, son regard scruta la pièce dressée derrière lui, puis se braqua sur moi. Ses yeux verts flamboyants d'une certaine haine à mon égard me piquèrent d'une angoisse effroyable.

— Toi, si tu mouchardes quoique ce soit à maman et papa, je te fais la peau. C'est clair ? fit-il, me pointant d'un doigt accusateur.

Hochant la tête, je déglutis avec difficulté. À mon grand désespoir, le départ de mon grand frère ne chassa pas cette tétanie enveloppant mon être ; mes nerfs étaient toujours autant noués d'appréhension. Et ce, jusqu'au retour de nos parents.

Ce GIF montre un peu mes différends avec Alan et ce que j'avais envie de faire à Joeffrey, mais j'étais bien trop peureux pour passer à l'action. Parce que mon grand frère était bien plus impressionnant que cet imbécile d'Alan.

Sinon, comment avez-vous trouvé ce chapitre ? Un peu plus d'agitation dans celui-là, je vous l'accorde. Admirez ma répartie de génie ! Je suis parvenu à cloué le bec de cet idiot.

Bref, j'espère que vous serez toujours présents dans le prochain chapitre.

Adios !

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