8. Not speak, it's better
Je souffle pour me donner du courage et je vois déjà l'impatience de Daisy. Ce carnet me fait peur, car d'une certaine manière, j'ai l'impression qu'il contient des choses sombres. Peut-être que je pense ça, car j'ai vu son visage froid et éteins de tous sentiments dans ce couloir. J'avais envie de la comprendre et de la découvrir. Et s'il fallait franchir les limites en lisant son carnet, je le ferais.
━ Prêts les gars? demande Daisy.
Je hoche la tête pas très sûre de notre idée, mais je ne change pas d'avis. Je veux savoir, tout savoir.
Qui es-tu Luna?
Cette fois c'est Daisy qui prend l'initiative de faire la lecture. Mes membres tremblent inconsciemment, et la petite blonde lit sans se soucier de ce qui l'entoure.
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03/10/2016
Je bataille une nouvelle fois contre moi-même. Aller à l'université relève toujours de la torture, mais les menaces continuelles de mes parents ne m'aident pas vraiment. Il y a deux ans, je les auraient envoyé paître, mais aujourd'hui tout à changé.
Depuis cette nuit-là, je ne suis plus la même.
Alors, encore une fois, j'ai fait face aux petits étudiants qui se pensent au-dessus de tout le monde, et j'avais hâte de finir cette journée misérable. Mais histoire de me foutre encore plus les nerfs, Max m'a laissé à mon triste sort.
Je ne sais pas pourquoi je tiens tellement à ce qu'il me conduise à la fac, je pourrais très bien utiliser les transports en commun après tout. Cela m'éviterait de rentrer une fois sur deux à pied.
Je cherche désespérément à attirer son attention. Ce parasite, en revanche, ne souhaite en aucun cas rester plus d'une minute avec moi. Tout ce que je veux, c'est avoir une conversation, ou quelques mots échangés et non pas des disputes ou des regards noirs. Mon frère aime se vanter, se montrer, comme moi auparavant. C'est sûrement par ma faute qu'il est devenu ainsi.
J'étais une fille superficielle, méchante et égoïste. Quand je repense à cette période, j'ai l'impression d'avoir vécu une autre vie que la mienne. Et pourtant, quand je vais la voir à l'hôpital, je sais que c'est réel.
Mes parents bien sûr ne savent pas où je vais tous les vendredis. Jamais je ne leur avouerai. S'ils savaient, ils me détesteraient encore plus. Au moins autant que je me déteste déjà. J'ai foiré. Ça ne m'étonne même pas de moi, je fais toujours les mauvais choix.
J'aimerais revenir en arrière, mais je ne peux pas. C'est aussi pour cela que j'ai changé radicalement. Après cette nuit-là, j'ai lâché tous mes amis. Enfin, mes faux amis. Ils ont été si hypocrites envers moi que je préférais ne pas me prendre la tête pour des gens qui n'en valaient pas la peine.
Alors, je suis devenue une tout autre fille. Une fille fermée, transparente, sage et muette. Mes parents ont remarqué le changement, et ont cru à une blague. Je les ai laissés à leur supposition sur moi, et j'ai arrêté mes conneries.
Mon frère, lui, croit que je dupe tout le monde. Ce n'est pas le cas. Je n'ai plus l'envie de faire l'autruche ou de me montrer. Je veux simplement grandir et devenir une personne meilleure. Enfin, j'essaye. Lorsque j'ai prononcé ces mots à mon frère, il s'est moqué de moi.
" Toi changer? Non, mais on ne change pas les personnes ! Tu es une garce manipulatrice, et ça te suivra toute ta vie. Tu es catalogué comme tel. Il est trop tard pour que tu deviennes mère Térésa. "
J'ai simplement souris à sa réplique et je ne lui aie pas répondu, ce qui l'a fait rager. Je sais qu'une part de lui à raison. Comment je peux devenir une fille bien, alors que j'ai toujours été odieuse? Je ne sais pas comment faire.
La seule chose qui me vient à l'esprit, c'est de ne pas sortir, ne pas boire, ne pas conduire et d'arrêter de parler. Quatre choses toutes simples qui me réussi plutôt pas mal depuis plus d'un an.
Mes conversations sont limitées au bonjour, aurevoir, tu as fait quoi de ta journée, bonne nuit. C'est si peu que je deviens jour après jour muette. Cela devrait me déplaire, mais en fait je préfère ça. Je ne suis pas obligé de parler pendant des heures, surtout si c'est pour rien dire.
Ma solitude était devenue mon quotidien. Parler me rendait malheureuse. Triste constat, mais véridique. J'ai longtemps pensé que mes parents s'intéresseraient de plus près à mon nouveau comportement, mais il faut croire que cette attitude leur convient. Ils font comme si tout cela était quelque chose de normal, et Max lui aime le fait que je ne râle plus.
Au fond, si je fais ça, c'est pour me calmer, ou pour essayer d'effacer la culpabilité, mais malheureusement elle est tenace. Elle ne me laisse aucun répit. Elle m'accompagne à chaque instant de la journée.
De la fac à la maison, en passant par l'hôpital. Tout ce que je vis aujourd'hui n'est rien comparé à elle. Alors, pourquoi je me plains? Je dois arrêter de ne penser qu'à moi. Je devrais avoir honte d'écrire ce genre de mots.
Tout ce qui m'arrive, je le mérite sûrement. Rien n'est jamais sans conséquence. Alors, peu importe ce que l'avenir me réserve, je l'accepterais, car je n'ai pas d'autre choix que de payer les erreurs du passé.
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Daisy arrête sa lecture et je sens un long frisson parcourir ma colonne vertébrale. Billy est secoué, lui aussi. La petite blonde est sans voix, comme nous à vrai dire. Lire une partie de ses pensées m'a complètement bouleversé. Les mots étaient mélancoliques, presque noirs. Cette fille en apparence normale cache en réalité de nombreux secrets.
Je vois à travers ses mots une fille blessée et paralysée par la peur. Elle ne parle plus, elle s'interdit de le faire.
Qui de nos jours fait ce genre de choix?
━ C'est horrible, s'exclame Billy après cinq minutes de silence.
━ Vous pensez qu'elle parle de qui quand elle va à l'hôpital? demande Daisy.
J'avoue, que c'est une question sans réponse. Elle a parlé plusieurs fois de cette même personne sans donner de nom. Mais le fait de ne pas le dire à ses parents ne me rassure pas.
━ Je pense que c'est grave, je dis. Elle semble s'en vouloir à propos de quelque chose. En tout cas son comportement a changé après ça.
━ Je ne la vois tellement pas garce ou manipulatrice, confie Daisy.
Je suis d'accord avec elle. Mais nous ne l'avons pas connu avant, alors forcément cela nous paraît illogique. Mais d'après ses dires, elle était horrible.
Le fait de découvrir un peu plus sa personnalité m'incite à en savoir davantage. Les mots qu'elle utilise sont si forts et tristes que j'ai besoin de plus. Je veux entrer dans sa tête pour mieux comprendre. Comprendre comment et pourquoi une fille comme elle en est arrivée là. Cela n'a aucun sens.
━ On continue?
Mes amis me regardent étonnés, mais acquiescent d'un signe de tête. Je pense que comme moi, ils ne sont pas vraiment préparés à la suite.
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21/10/2016
J'ai terminé les cours plus tôt aujourd'hui et comme chaque vendredi, je préviens Max de ne pas venir. Et comme il est heureux de se débarrasser de moi, il ne cherche pas à obtenir des explications. Tant mieux, il est hors de question qu'il sache un jour ce que j'ai fait. Il trouverait un moyen de plus pour m'atteindre.
J'ai toujours froid en arrivant dans cet endroit. L'hôpital, ça craint. Ce sont les blouses blanches, le sang, la mort. Les médecins ne sont là que pour faire pleurer les gens, leur annoncer une mauvaise nouvelle. Plus le temps passe, et plus je me dis qu'elle est condamnée.
Quand je l'ai amenée ce soir-là, je ne savais pas que c'était si grave. J'ai été inconsciente et aujourd'hui, elle est dans ce lit sans vie entourée de machines. Je déteste aller dans sa chambre, mais je me force quand même.
Je crois que c'est pour me punir encore plus. Et encore ce n'est rien. Si je pouvais échanger ma place, je le ferais. Mais je n'ai pas ce pouvoir.
L'infirmière habituelle a encore soupiré en me voyant. Elle me laisse toujours passer. Je crois qu'elle a pitié de mon air désespéré. Comme à chaque fois, je suis resté une vingtaine de minutes avant que ses parents viennent.
S'ils me voyaient là, ils m'étranglerait sans problème. Je les comprends...
Quand ma petite visite prend fin, j'attends un bon moment avant de rentrer chez moi, car je ne souhaite pas que mes parents où Max remarque mes larmes. Etre faible n'est pas dans mon vocabulaire, mais depuis bientôt deux ans, je laisse libre cours à mes sentiments.
Je voudrais parfois parler à quelqu'un de cette peine si profonde qui m'engloutit de l'intérieur, mais je n'ai plus personne. Je reste dans l'oubli et je me contente de la fermer en espérant que la douleur cesse un jour ou l'autre.
Peut-être si elle se réveille et que je lui explique... Non, elle ne me pardonnera jamais. Ni elle, ni ses parents. Je suis la méchante qui a créé un tas de problèmes, et pourtant, je ne suis pas la seule fautive, mais j'ai tout pris en pensant faire bien.
Maintenant, je me retrouve plus bas que terre et seule à surmonter cette terrible épreuve. Je l'écris pour extérioriser, et comme je ne parle pas, il faut trouver un autre moyen de faire passer ma tristesse et ma culpabilité.
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J'ai l'impression d'être encore plus dans le flou. Sa façon d'écrire ne m'aide pas. Elle reste vague et elle dit beaucoup de choses en même temps. Cette fille est bien plus fragile que je ne l'imaginais.
━ C'est peut-être pour ça que la police est venue en janvier ! dit Daisy.
Daisy n'a pas tort. Elle s'est fait embarquer sans aucune raison.
━ Et le sujet en question serait cette mystérieuse fille à l'hôpital, ajoute Billy.
━ En tout cas, la vie n'est pas très clémente avec elle, souffle la blonde.
━ Ouais. Daisy, ça ne te dérange pas qu'on laisse le carnet ici? je demande.
Elle opine de la tête et range le précieux objet dans un coin de sa chambre. Ma tête est brouillée par ses différentes révélations, et je décide de retourner chez moi. Billy reste dormir chez Daisy, ce qui ravit la blonde.
Pendant le trajet retour, mes pensées sont perturbées et je vois à nouveau Luna le soir de la fête, ainsi que dans le couloir de la fac. Elle avait cette même lueur dans le regard, celui de la tristesse.
Je veux lui venir en aide, mais je pense que l'approcher s'annonce difficile. Je perds surtout les pédales. Il faut que cette brune arrête d'intervenir dans ma tête. Pourquoi n'est-elle pas comme tout le monde?
Je ne sais pas si c'est le destin qui a fait en sorte de me mettre sur le même chemin que ce carnet. J'ai voulu faire mon curieux et maintenant j'essaye de rassembler des pièces d'un puzzle bien trop complexe à mon goût.
Je voulais des réponses à mes questions, mais j'ai encore plus de questions qu'auparavant...
***
Bonsoir ! Comment allez-vous?
Je profite de mon week-end pour vous partager un nouveau chapitre, j'espère qu'il vous à plu.
Comme promis, une bonne partie de celui-ci se concentre sur le carnet de la belle Luna. Vous êtes perdus? Moi aussi (j'écris l'histoire, donc non!) Désolée pour mon humour !
Très sérieusement, j'ai glisser pas mal d'indices, et il semblerait que les trois mousquetaires soient sur l'enquête. Alors, j'espère avoir également vos hypothèses !
Je vous dis à bientôt et gros bisous ! 😙
Cynthia.
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