Depuis l'accident, Aymeric est différent. On dirait qu'il a peur de moi. Il n'a aucune raison d'avoir peur. Je ne lui ferais pas de mal. Les cours ont repris depuis deux semaines. Nous sommes à la pause du matin et Aymeric est scotché à son téléphone. J'aurais bien aimé en avoir un à mon époque. C'est quoi ce bruit ? Ah. Quelqu'un l'appelle.

-Allô ?

-C'est qui ?

Il me fait signe de me taire.

-Oui, c'est moi... Vraiment ? Bien sûr ! je vous remercie de m'avoir appelé. Au revoir.

Il raccroche et saute en l'air. Il fait souvent ça quand il est content. J'ai essayé une fois. Le carrelage n'a pas apprécié. Bah oui y'a des inconvénients à être un fantôme.

-Qu'est-ce qui se passe ?

Il me regarde et regarde autour de lui. Quelques personnes le dévisagent. En même temps il vient de sauter en l'air. Et depuis que la directrice l'a convoqué dans son bureau avec, je les cite, « son ami imaginaire », ils ne sont plus beaucoup à lui adresser la parole. Il n'a pas l'air de s'en formaliser plus que ça. Il pianote sur son téléphone et fais mine de réfléchir. Je me penche au-dessus de son épaule pour lire. Mon oncle est sorti de l'hôpital.

-C'est super ça !

Il recommence à taper. La directrice l'a appelé après l'accident. Elle lui a tout raconté. Oups. Je perds directement mon sourire.

-Désolé.

Puis je me rends compte d'un truc.

-Et ton oncle l'a cru ?

Il était au courant pour Léo. Je lui en ai parlé quelques temps après qu'il soit parti pour de bon. Je hoche la tête. La sonnerie retentit et nous nous dirigeons vers notre salle de classe quand Baptiste nous barre le chemin. Qu'il ne m'énerve pas lui. Y'a pas de briquer aux alentours mais ça ne m'empêchera pas de lui coller une raclée. Aymeric soupire et le regarde dans les yeux.

-Que veux-tu ?

-Il est où ?

-De qui ?

-Ton ami imaginaire ? On peut le prendre en photo ??

Ses deux larbins rigolent. Aymeric serre les lèvres. Tu vas voir si je suis imaginaire, stupide primate. Je lève la main mais le regard d'Aymeric me stop. Ok. Je me calme.

PDV Aymeric.

C'était moins une. J'aimerais qu'il évite de provoquer une autre catastrophe, si possible. Ma main se souvient encore de la dernière. En même temps, si ce bouffon pouvait arrêter de nous provoquer, ce serait plus facile. Depuis l'accident, j'essaye de trouver des moyens de renvoyer Charlie. Non pas que je ne l'aime pas. Seulement, un esprit vengeur pensera toujours à sa vengeance tant que celle-ci ne sera pas accomplie. Et dans le cas de Charlie, elle est impossible puisque le responsable de sa mort lui est inaccessible. Et même si il réussit à tuer Baptiste, il ne sera pas libre. Donc on va éviter les pertes inutiles. Quoi que... Non, ressaisit-toi, mon petit. On ne souhaite pas la mort de quelqu'un. Bref. Il faudrait peut-être que je lui réponde. Il a l'air de s'impatienter. Je regarde Charlie.

-Oh ! Quand je te parle, tu es prié de me répondre ! crie Baptiste en agitant sa main devant moi.

-Désolé, tu disais ? Ah oui, mon ami imaginaire ? Tu veux prendre une photo avec lui ? Me dit pas que tu es assez bête pour croire qu'il existe ?

-C'est ça, essaye de faire le malin.

Je soupire.

-Bon si tu y tiens tellement. Retourne-toi.

L'idiot se retourne et je vous jure que j'ai failli mouiller ma culotte tellement j'étais mort de rire. Le jardinier est passé à ce moment-là. Le type ressemble un peu à Gollum, pour que vous vous fassiez une idée. Baptiste, qui ne l'avais pas vu arriver, a poussé un cri digne d'une chanteuse d'opéra. Nous avons déguerpit en quatrième vitesse avant que Baptiste ne reprenne ses esprits. Je ne retourne pas en cours. De toute façon, je n'arrive pas à me calmer. Je me dirige vers la bibliothèque. Je vérifie qu'il n'y a aucun prof ou surveillant dans les parages et je me glisse dans un rayon. Il y a plein d livres sur les fantômes ici. Mais aucun ne m'a encore aidé. Je pense que je vais devoir demander à mon Oncle de me prêter le sien. Je me dirige vers un ordinateur. Mon oncle n'a pas de téléphone. Il trouve cela inutile. J'ouvre ma session et me branche sur ma boîte mail.