Chapitre 11

  N'ayant rien à faire pour le moment, je m'installais plus confortablement sur mon canapé, fermais les yeux et laissais divaguer mes pensées. Celles-ci se tournèrent dans un premier temps vers Niall, qu'à la fois je redoutais mais que j'avais aussi hâte de revoir. Si je redoutais autant ce moment c'était pour plusieurs raisons : sa personnalité était-elle toujours la même ? Est-ce qu'après cette période passée loin l'un de l'autre notre amitié existait toujours ? Sera-t-elle aussi forte qu'avant ? Est-ce que j'allais me sentir toujours aussi libre de lui parler à cœur ouvert ? Allait-il continuer de garder mes secrets ? Rien n'était moins sûr.

Mais en même temps, Niall ne méritait-il pas une réponse ? Il s'était donné la peine de m'écrire chaque jour, tout en sachant pertinemment qu'il n'obtiendrait pas de réponse...

Et il me manquait tellement...

Ah ! Je détestais tellement être indécis... Que ferait Louis à ma place ? Louis qui avait brutalement perdu la vie. Qui avait dû abandonner sa famille, ses amis. Lui n'avait jamais pu dire au revoir à ses amis.

Cette dernière réflexion me décida. Je reprenais donc mon téléphone, le déverrouillai et ouvris l'application « message ». Et maintenant ? Et maintenant, les lettres formées sur le clavier numérique me semblèrent soudain hypnotisantes. Qu'est-ce que je pouvais bien écrire ?

« Salut Niall, c'est ton imbécile de meilleur ami qui t'a totalement snobé quand ses parents sont morts » ?

Certainement pas.

Un simple : « Salut Niall, c'est Harry. Comment vas-tu ? »

Non plus. Ce serait un peu déplacé.

Non je devais de vraies explications à Niall.

Alors je pourrais certainement faire comme... une lettre ? Écrire simplement ce que j'ai pu ressentir et le pourquoi de mon silence. Quelque chose comme :

« Niall. Tu sais à quel point j'étais proche de mes parents. Tu sais à quel point j'avais besoin d'eux pour vivre, pour ne pas chuter. Tout comme toi, ils étaient des piliers indispensables de ma vie. Les avoir perdu revient à m'avoir arraché une partie de mon cœur et de mon âme. Mais pas que. Avec leur mort, j'ai aussi perdu mes repères. Et tu sais à quel point ma santé mentale dépend d'eux. En me quittant, j'ai perdu mes rocs, mes seules barrières contre les moqueries qui continuaient malgré tout. Alors oui, je sais que je t'avais assuré que tout ça était derrière moi... Je t'ai menti. Je ne voulais pas que tu sois impliqué là-dedans.

Ce qui fait que j'ai fui... en quelque sorte. Je suis parti. Lâchement. J'ai tout balancé et j'ai essayé de recommencé ma vie ailleurs en essayant d'oublier tout le reste. Sauf que tu fais partie de ce « reste ». Et je n'avais pas le droit de te laisser tomber. Tu as toujours été un ami parfait et voilà qu'en un chagrin je te laisse de côté. Je n'avais pas le droit de faire ça. Si tu savais comme j'en suis désolé.

Je ne me cherche pas d'excuse. Enfin, peut-être que cela y ressemble, c'est possible. Prends-le plutôt comme un début d'explication. Je pourrais peut-être t'expliquer le reste chez moi, autour d'un bon café noisette ?

Je m'excuse sincèrement, tu me manques.

Harry. »

Et sans me relire, mon doigt appuya sur la petite flèche d'envoi.

Maintenant, il suffisait d'attendre. Mais combien de temps au juste ? Allait-il me répondre rapidement ? Il n'y était pas obligé... Surtout après mon silence. Et voilà que j'angoissais de nouveau. Niall répondra quand il sera prêt et qu'il en aura envie. Voilà, c'est ça.

Niall répondra quand il sera prêt et qu'il en aura envie.

Niall répondra quand il sera prêt et qu'il en aura envie.

Niall répondra quand il sera prêt et qu'il en aura-

Oh. Voilà que ça recommençait... M'en apercevant, je regardais bêtement autour de moi, ramenais mes genoux contre moi et les enserrais dans mes bras.

J'avais cette habitude quand j'étais petit. Quand quelque chose me faisait peur, je m'allongeais sur mon lit, sous ma couette, je serrais très fort mon doudou contre moi et je répétais « Doudou c'est le plus beau et le plus fort ». En général, je personnifiais ma peluche en un super-héros avec d'incroyables pouvoirs et je n'avais plus peur. En grandissant, j'avais juste garder cette histoire de phrases « mantra » que je me répétais. Ce réflexe avait pourtant disparu...

Cela ne prouvait présager qu'une seule chose : je recommençais à me laisser submerger par mes angoisses. Et ça, ce n'était pas possible. J'allais devoir trouver quelqu'un pour m'aider mais, en attendant, il fallait simplement que je pense à autre chose. Quelque chose comme... le piano désaccordé de Louis !

Mais oui ! En effet, bien que ce dernier eût un propriétaire, il se trouvait dans ma maison et, de ce fait, je pouvais en faire ce que j'en voulais, non ? Cet instrument méritait d'être mis en valeur. Et puis ça ferait probablement plaisir à Louis...

Je décidais donc de contacter quelqu'un qui puisse le descendre au rez-de-chaussée et qui puisse l'accorder. Dans ma tête, officiellement, je faisais ça pour mon moi de cinq ans qui restait stupéfait par les gens sachant manier cet instrument. Officieusement, c'était pour Louis. Louis qui, j'avais pu le constater, semblait adorer son piano. Peut-être que ça lui ferait plaisir de voir son bel instrument retrouver sa vigueur d'antan... Peut-être que cela pourrait même l'aider à trouver la paix ?

Que ce soit l'un ou l'autre ma décision était prise : ce piano serait bientôt dans mon salon.

Je m'asseyais donc correctement, repris de nouveau mon téléphone portable et lançais directement une recherche Internet. Il y avait deux boutiques sur le thème de la musique : un spécialiste de vente d'instruments et une autre spécialisée dans la dispense de cours pour tout instrument. Mais ce n'était pas tout, la personne tenant cette deuxième boutique était également accordeur professionnel. Tout ce dont j'avais besoin. Et le meilleur était qu'il s'avérait que la boutique de ce petit Monsieur ne se trouvait seulement qu'à deux ou trois rues de la maison. Au moins, je n'allais pas payer trop de frais de déplacement...

  Sans hésiter, je lançais donc l'appel. Il y eu une première sonnerie. Une deuxième.

Mince, je m'étais lancé sans vraiment réfléchir, mais quel jour étions-nous ? Je regardais rapidement sur l'écran de mon téléphone tandis que les sonneries continuaient de retentir.

Jeudi. 14H00.

Bon. Déjà, j'étais certain de l'appeler à une heure décente. Mais il semblait être occupé. Et alors que, je le sentais, la messagerie allait se lancer, un homme, à la voix grave, certainement d'un certain âge, me répondit enfin.

   « Serge j'écoute ?

   - Oui, bonjour Monsieur, voilà je possède un piano et j'aurais souhaité quelques renseignements...

   - Oui, bien sûr ! Dites- moi tout.

   - Alors voilà, je suis le nouveau propriétaire du Manoir qui borde-

   - Oh c'est toi le gamin qui a repris l'ancienne auberge ?

   - Heu oui ?

   - Et j'imagine que tu veux me parler du piano droit, au deuxième étage ?

   - Oui...

   - Ne prend pas peur gamin, c'est moi qui me suis toujours occupé de l'entretien de cette vieille canaille. Je le connais par cœur ! »

Et bien je ne pouvais pas mieux tomber ! Louis allait être ravi.

   « Alors vous seriez partant pour venir l'accorder ?

   - Et comment ! Je refuse que des sales pattes n'y connaissant rien touche cette beauté ! »

Le ton bourru de l'homme me fit ricaner. Il avait l'air de vraiment aimer son métier. Il semblait presque considérer les instruments comme des êtres vivants...

   « Alors dis-moi gamin, quand est-ce que je peux passer ?

   - Et bien je ne bouge pas de chez moi donc faites selon vos disponibilités...

   - Je peux passer ce soir... vers dix-huit heures si c'est bon pour toi.

   - Heu et bien oui, pas de problème à ce soir. »

Et l'homme raccrocha.

Et bien, je ne m'attendais pas à ce que ça se fasse si vite... J'imagine que de tels professionnels ne doivent pas courir les rues, ce Serge doit avoir un agenda plus que rempli... Et pourtant voilà qu'il me donnait rendez-vous pour dans quatre heures !

Les SMS envoyés, le rendez prit pour le piano, cette journée était plutôt pas mal finalement.

Maintenant il ne me restait plus qu'une chose à faire : ma dissertation de français.

Et ça c'est moins cool.

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