Chapitre 9

La nuit arrivée, je n'arrivais pas à dormir. À côté de moi, Matt était profondément endormi depuis de bonnes heures. Une jalousie minime apparu en moi.

En l'observant de plus près, ce que j'eus le temps de faire souvent en plusieurs heures, je trouvai qu'il avait l'air perdu, fatigué et surtout épuisé. Jamais je ne l'avais vu se montrer ainsi, mis-à-part lorsqu'il dormait. Il se montrait tellement sûr de lui et capable de tout surmonter que je n'aurais jamais cru qu'il en était tout le contraire. Encore une fois, j'essayai de me mettre à sa place pour un instant et de tout quitter du jour au lendemain pour vivre seul et entouré de danger dans la nature.

J'avais évidemment vécu quelque chose de similaire, mais lui était là depuis plusieurs mois et personne ne lui était venu en aide comme lui m'était venu en aide. Il savait tellement de choses à propos de cette forêt que je me doutait qu'il était en train d'oublier ce que ça faisait de vivre normalement, à l'extérieur de ces lieux. Je crois qu'aucun de nous deux méritait ce sort. La seule chose à espérer était de survivre et sortir de la forêt en un seul morceau rendu ou nous en étions.

Je passai mes mains sur mon visage aux traits fatigués en chassant ces pensées de ma tête. Toute cette activité dans mon esprit me rendait nerveuse pour le lendemain, le jour de notre départ. Départ était un grand mot, ce n'est pas comme si nous allions quitter la forêt pour de bon tout de même.

Même si je n'étais pas ici depuis longtemps, je m'étais déjà habituée à la routine de Matt. J'étais en quelque sorte effrayée de sortir de nos habitudes en traversant la forêt et les secteurs que ni Matt ni moi ne connaissions. Et si on se faisait tuer le premier jour? Et si Matt se faisait tuer et je me retrouvais seule? Je crois que c'était ma plus grande peur. Je préférais mourir que de me retrouver seule ici maintenant que Matt était toujours à mes côtés. Je ne voulais en aucun cas me retrouver seule et ça me faisait peur. Tout me faisait peur. J'étais terriblement peureuse ces temps-ci.

J'avais conscience que notre réussite ne se ferait pas en un claquement de doigts, et ça aussi, ça me faisait redouter le lendemain. Je savais que plus tôt on commencerait, plus tôt on finirait, mais je savais aussi que nous nous jetions dans une sorte de marathon interminable. J'avais peur de ne pas être capable de reprendre mon souffle à mi chemin. Une fois en route, nous ne pourrions plus nous reposer comme nous le faisions ici, dans la cabane. Tous les jours, nous devrons marcher des heures et des heures, sans trop savoir où aller. C'était inquiétant et effrayant.

Je me mis à inconsciemment claquer des dents, la peur et l'angoisse s'emparant de moi. Je portai mes ongles à ma bouche pour en ronger le peu qu'il y avait, mais me résignai en me rappelant la crasse sous ceux-ci.

Soudain, un bruit pas assez subtile pour l'ignorer attira mon attention; une sorte de grattement sinistre qui faisait battre mon cœur beaucoup trop rapidement. Je me figeai, mes yeux étant la seule partie de mon corps qui bougeait frénétiquement. À nouveau, le grattement se répéta, tout proche. Une masse sombre de l'autre côté de l'abri, collée à celui-ci, fit rater des battements à mon cœur. Toutes mes peurs me revenaient en pleine face.

Je dirigeai lentement ma main tremblante vers le corps endormi de Matt. Je le secouai le plus silencieusement possible tout en restant brutale pour ne pas informer la chose à l'extérieur de notre présence.

Matt se réveilla assez rapidement dû à la force que je mettais à le secouer et me regarda avec des yeux inquiets. Je posai ma main sur sa bouche pour l'empêcher de parler et pointai de mon doigt instable, la masse noire. Elle gratta une nouvelle fois ce que j'imaginais ses griffes sur le bois de l'abri. J'avais l'horrible impression qu'elle me voyait, qu'elle ne me lâchait pas du regard, même en baladant ses griffes sur la paroi.

Matt me tapota l'épaule doucement pour ne pas me faire encore plus peur.

«Nous ne craignons rien.» il m'offrit un doux sourire en chuchotant. «Si quoique ce soit nous voulait du mal, on aurait déjà mal, crois-moi. Rendors toi et oublies ça, il n'y aura plus rien demain.»

Il s'allongea de nouveau, m'entraînant avec lui. Comment gardait-il son calme? Il n'avait même pas ciller à la mention d'une bête inconnue et dangereuse à moins d'un mètre de nous deux.  Il était clairement impossible que j'oublie ce grattement incessant. Je sentais littéralement un regard sur moi et j'avais peur que si je levais les yeux, j'allais voir un regard bestial dans l'une des fentes entre les morceaux de bois. Un regard qui veut clairement me bouffer.

«Je...je ne peux pas, Matt.» je sortis en un petit souffle, au bord des larmes.

Il ouvrit un œil et me regarda en coin pour finalement se mettre sur son flan, face à moi.

«J'ai peur.» pleurnichai-je.

«C'est ça le problème, Maelly. Ça...» il pointa de son menton l'endroit où se trouvait la masse. «...c'est là parce que tu as peur. Ça sent ta peur, tu comprends? Son seul but est de t'effrayer encore et encore plus.» il prit mes mains des les siennes après avoir essuyé les quelques larmes au bord de mes yeux. «Si tu veux que ça s'en aille, tu ne dois plus avoir peur. Tu ne dois plus montrer ta peur, tu me comprends?» je hochai la tête, mon regard toujours dans le sien. «Alors maintenant, tu vas respirer profondément et fermer les yeux. Tu vas penser à de belles choses et oublier tout ça, d'accord?»

Matt m'entraîner encore une fois à m'allonger à ses côtés, cette fois-ci laissant son bras autour de moi.

«Je sais que tu en es capable, May.»

Il me parlait un peu comme à une enfant, mais j'avais vraiment besoin de ce côté réconfortant. Il me flatta les cheveux et je fermai doucement les yeux, essayant d'ignorer le grattement. Lentement, très lentement, je me mis à penser à des choses plaisantes, de bons souvenirs. Ils étaient au départ entrecoupés par des pensées dirigées aux grattements et ce qui en était l'origine, puis de moins en moins, et finalement, le sommeil m'emporta, confortablement installée dans les bras de Matt, où je savais que j'étais en sécurité.

*

Le réveil fut difficile avec la fatigue, l'appréhension et le souvenir encore frais d'une bête aux grattements plus qu'effrayants. Matt m'avait fait cuire rapidement un œuf et me l'avait apporté dans mon coin alors qu'il mangeait ses noix dans le sien. Je croyais qu'il était un peu dans le même état d'esprit que moi par rapport à notre départ.

«Tu sais, on peu reporter cette journée.» me lançai-je, lui dévoilant du même coup mes craintes. «Je veux dire, on peu partir une autre journée, on est pas pressés.»

Il leva les yeux vers moi et réduit la distance entre nous pour venir s'assoir à mes côtés.

«Tu ne veux plus le faire?» il demanda calmement.

«Non, ce n'est pas ça.» soupirai-je, les yeux fixés devant moi pour limiter ma gêne. «C'est juste que j'appréhende beaucoup.» résumai-je.

«C'est une décision qui se prend à deux, Maelly.» je frissonnai à la manière qu'il prononça mon prénom. «À mon avis, nous devrions partir aujourd'hui, tout de suite, et affronter tes peurs. Si on attend encore et encore, tu appréhenderas de plus en plus, tandis que si on se lance maintenant, ça serra fait.»

«Est-ce qu'un retour en arrière serra possible?» je demandai d'une voix craintive.

Si toutes mes peurs s'avéraient se produire, je ne voulais pas rester en plain milieu sans rien faire. Je voudrais revenir ici et repartir à zéro avec un autre plan. C'était aussi plus sécurisant de savoir que ce n'était pas une décision définitive, qu'on pouvait toujours faire marche arrière.

«Non.» il dit catégoriquement, me faisant froncer les sourcils. «Ce n'est pas ici qu'on va réussir.»

«Et si on ne prenait pas le bon moyen pour réussir?» essayai-je en même temps de le faire douter.

«Vois-tu un quelconque moyen différent?» il demanda, ses yeux verts profonds directement encrés dans les miens.

«Non.» je marmonnai presqu'à regret.

«Alors tu peux être sûr qu'on a le bon.» il termina. «Maintenant, viens m'aider. On part bientôt.»

Il se leva en essuyant ses mains sur son pantalon et s'éloigna de moi. Il aurait pu être un peu plus doux avec ses paroles, mais je comprenais son point de vue. Je ne le partageais pas nécessairement, par contre.

Il ne m'avait pas tellement aidé à chasser mes peurs. Il ne pouvait pas être bon dans tous les domaines, non plus.

Je chassai toutes mes pensées, bonnes ou mauvaises, et me concentrai pour aider Matt. Je mis le nécessaire en plus des objets déjà présents de Matt dans son sac. J'ajoutai au contenu du sac à dos des noix qui traînait dans un coin de la cabane, ma veste roulée en boule et deux petites roches que Matt prenait toujours pour allumer les feux. Finalement, je fermai la dernière pochette après y avoir mis en sécurité les derniers œufs restants.

Pendant ce temps, Matt ajustait tout ce qu'il pouvait ajuster au niveau de l'abri. Il voulait être sûr de pouvoir passer la première nuit en sécurité sans paniquer à l'idée de chercher un endroit où s'abriter.

Je le regardai faire un moment, physiquement prête seulement.

«Je crois que c'est bon.» il tapa ses mains ensembles dans le but d'en enlever toutes saletés. «Es-tu prête?» se retourna-t-il vers moi, ses yeux détaillants mon corps de haut en bas.

«Oui, oui.» répondis-je rapidement.

Je n'avais de toute façon pas le choix; nous allions partir si j'étais prête ou non.

«Bien.» il mit ses poings sur ses hanches quelques secondes avant de se mettre à l'action.

Ainsi, nous étions à quelques mètres de la cabane, le sac à dos en place sur les épaules de Matt, une gourde d'eau dans ma main gauche et dans la sienne et les extrémités de l'abri sous nos bras droits. Je lançai un dernier regard à l'endroit auquel j'étais restée près pour une période de quelques jours, réalisant seulement maintenant que c'était la dernière fois que je le voyais. Je n'étais pas triste; je ne m'étais pas attachée à un endroit, mais je ressentais quelque chose.

Je détournai finalement le regard quand mon pied s'accrocha dans un trou pour ne pas tomber. Matt avançai à un rythme rapide et régulier, ses épaules levant et descendant. J'étais derrière lui, pas très loin, seulement la distance de l'abri sur le long. Il avait tenu à ce qu'il prenne les devants pour prévenir tout danger et que je sois derrière. Il le sentirait s'il m'arrivait quoique ce soit puisque la moitié du poids des branches reposait sur moi.

Je regardai le sol devant mes pieds pour être sûre de ne pas tomber ou m'enfarger tout en remontant le cylindre de bois sous mon bras pour une prise plus ferme. Je m'arrêtai soudainement, pensant à quelque chose. Matt faillit tomber sur le dos dû à mon brusque arrêt.

«May? Pourquoi tu t'arrêtes?» il tourna le plus qu'il le pouvait sa tête dans ma direction.

«Pourquoi on va dans cette direction?» je demandai.

«Pour suivre le courant de l'eau.» me répondit-il comme si c'était évident.

Je tournai la tête pour voir l'eau s'écouler dans la même direction que notre marche.

«Pourquoi?»

«Pourquoi pas?»

Je soufflai en levant les yeux au ciel.

«D'après moi, la bonne direction à prendre est celle d'où je suis arrivée. C'est l'endroit le plus proche de la clôture que l'on connaisse.» je dis, essayant de le résonner.

«Nous y sommes aller l'autre jour. As-tu vu le moindre bout de clôture?» il changea le ton de sa voix, semblant plus énervé et impatient. «C'est mieux de rester le long de la rivière. En plus, nous aurons de l'eau quand nous en aurons besoin.»

«Mais nous ne savons même pas où nous allons! Si on cherche près d'où je veux aller, on va bien finir par la trouver!» je parlai plus fort pour me convaincre qu'il m'écoutait.

«Écoute, c'est sûr qu'on va trouver le bout de la forêt en suivant l'eau.» il déposa l'abri au sol pour mieux me voir et j'en fis de même. «Elle se déversera dans un lac où quelque chose comme ça à un moment.»

Je soupirai en lui lançant un regard noir rempli de reproches.

«Tu l'as dit toi-même: c'est une décision qui se prend à deux.» repris-je ses paroles contre lui. «Ce n'est pas vrai que tu vas tout décider tout le temps sans que je ne puisse dire un mot.»

Je vis Matt se mordre l'intérieur de la joue en regardant autour de lui.

«On perd du temps, May.» il radoucit son ton, espérant que je cède.

«Je m'en fiche! On va en perdre beaucoup plus si tu ne m'écoute pas, Matt.» prononçai-je son prénom comme il avait prononcer le mien.

«Tu sais quoi? On va faire roche papier ciseaux et on va dans la direction que le gagnant veut.» il passa sa main dans sa nuque et me parla comme à un enfant.

Je roulai des yeux, mais acceptai tout de même. Il se plaça à côté de moi et débuta le jeu. Il avait la roche et j'avais les ciseaux. Je jurai en le foudroyant du regard et il sourit en coin.

«Parce que maintenant, un jeu pour enfant va définir notre survie?» je crachai, hors de moi.

«Ça en a l'air.» il rit en reprenant sa place.

Je soufflai une dernière fois en jurant dans ma barbe et repris l'abri sous mon bras pour reprendre la marche. J'étais définitivement de mauvaise humeur.

¨¨¨

Les chapitre 9, 10, 11 et 12 étaient à la base qu'un seul et même chapitre. Pour garder une bonne moyenne en ce qui concerne la longueur des chapitres, je les ai séparés. Il se peut donc que ce soit légèrement ennuyant avant l'action.

Faites moi savoir si le chapitre vous ennuie, j'essayerai de l'améliorer. 

Que pensez-vous du comportement de Matt vis-à-vis May?

¨¨¨Je suis franchement désolée pour quiconque attendant ce chapitre. Je n'ai plus accès à ma chambre depuis un bon bout de temps et je n'ai donc plus beaucoup de temps à moi seule. J'ai tardé à corriger ce chapitre surtout que la semaine, j'ai des devoirs. Alors, pour régulariser mes publications, je vais changer la date au samedi ou dimanche. Je reviendrai au mercredi lorsque je récupérerai ma chambre. Merci de comprendre.¨¨¨

-Magiquee

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