Chapitre 5
Quand je me réveillai pour une énième fois, la nuit était passée et le soleil commençait à se lever. Lorsque je bougeai mes jambes, une légère brûlure me parvînt, mais c'était supportable.
Le sang séché craqua quand je me levai et je me dirigeai vers l'extérieur doucement étant donné que Matt ne se trouvait pas à l'intérieur. Je le trouvai assis de dos à moi. En m'approchant, je remarquai qu'il mâchait quelque chose. Il avait de la nourriture?
«Est-ce que tu manges?» demandai-je rapidement en plissant les yeux.
Il se retourna en s'apercevant de ma présence et me fit signe de le rejoindre, ce que je fis aussitôt.
«Ce sont des noix, sers-toi.»
J'en mis d'abord une poliment dans ma bouche avant d'en fourrer une dizaine d'un seul coup; j'étais affamée.
«Depuis quand as-tu ça? Je mourrais de faim!» essayai-je de parler la bouche pleine sans paraitre dégoutante.
«Oh! Désolé, mais tu ne m'as pas demandé.»
Je fulminais intérieurement, mais je ne voulais pas déclencher une autre chicane. Je passai difficilement au-dessus de sa remarque et enchaînai.
«Où les as-tu trouvées?»
«Il y en a quelques-unes enterrées un peu partout. Un peu comme si un écureuil les cachait en quantité industrielle.» haussa-t-il les épaules tandis que je mettais d'autres noix dans ma bouche.
«Tu les as juste trouvées comme ça?» fronçai-je mes sourcils. «Sans creuser, rien?»
Il acquiesça lentement.
«C'est pas un peu bizarre?»
«J'en sais rien. Je ne me pose plus trop de questions maintenant.» il garda son regard fixé droit devant lui.
Je hochai la tête en accord avec lui. Il y avait trop de questions pour peu de réponses, alors il valait mieux arrêter de se questionner.
Je regardais rapidement autour de moi en mâchant une énième noix.
«Tu peux me décrire l'animal de hier? Un loup peut-être?» me rappelai-je l'avoir entendu hurler.
Il se tourna vers moi et regarda droit dans mes yeux. Ses yeux verts me déstabilisaient.
«Tu dois savoir que dans cet endroit, il n'y a pratiquement aucun animal que tu verrais dans une forêt normale. Oublie les ours, les loups, les caribous.»
Je hochai la tête et lui fit signe de continuer en me concentrant sur ses paroles.
«Hier, c'était une sorte de...un ours plus agile avec des écailles et un queue de loup.» il fit une petite pause pour réfléchir. «Je ne l'avais encore jamais vu.» finit-il par déclarer.
Je haussai un sourcil et essayai de paraître sérieuse. Je mentirais en disant que je le croyais sans un doute. Sérieusement, comment un ours pourrait avoir des écailles? C'était totalement ridicule et j'essayai d'y croire, mais j'en étais incapable.
«Tu es en train de me dire qu'un ours a poussé un hurlement comme un loup?»fis-je tourner la phrase au ridicule.
«Ce n'est pas un ours. Tu m'as demandé de te le décrire et je me suis basé sur des animaux connus pour le faire.»
«J'y croirai quand je le verrai.» soufflai-je en souriant en coin, toujours amusée, mais curieuse.
Il me lança un regard tueur le plus noir jamais vu.
«Tu ne peux pas me blâmer.» commençai-je. «Tu essayes de me faire croire quelque chose que je n'ai jamais vu et l'image dans ma tête est totalement improbable.» je lâchai un petit rire à la fin de ma phrase.
Matt soupira et se réinstalla pour ne plus être en face de moi. Il se remit à regarder devant lui sans une fois me regarder du coin de l'œil.
«Ne mange pas toutes les noix. Je ne sais pas quand je vais en trouver d'autres.» il lança sèchement en changeant complètement le sujet.
Qu'est-ce qu'il se vexait vite!
Cependant, je pris une dernière noix et m'éloignai d'elles pour échapper à la tentation. Je remarquai aussi que Matt avait revêtu sa chemise bleue.
«Tu as réussi à la nettoyer?» lui pointai-je son vêtement qui était, la veille, salie de mon sang.
«Ouais et tes blessures ont déjà cicatrisées, alors je préfère les laisser à l'air libre pour qu'elle guérissent plus vite.» m'informa-t-il.
«C'est bien, c'est toi qui décide.» je haussai les épaules, ne m'inquiétant pas pour ces écorchures.
Ceci dit, un silence gênant pour moi s'installa entre nous. Je ne savais plus quoi dire et pour en ajouter, Matt semblait de mauvaise humeur.
«Sinon, tu as des choses à faire pour le moment?» commençai-je, incertaine.
«Toujours, pourquoi?» il tourna sa tête vers moi en plissant les yeux.
«On pourrait se rapprocher de la clôture.» lançai-je directement.
Il soupira fortement et passa une main dans ses cheveux bruns courts décoiffé.
«Tu ne comprends pas. Une fois que tu l'as passée, la clôture disparait.» il passa sa langue entre ses lèvres en secouant la tête. «Tout comme tes chances de sortir d'ici.» il murmura dans sa barbe, mais j'avais clairement entendu.
«Ce que tu peux être négatif! Au lieu de rester ici à ne rien faire, pourquoi ne pas au moins essayer de s'en sortir?» je le questionna.
«Nos chances de survie sont beaucoup plus faibles si on se déplace constamment. Il faut penser à la nourriture, l'eau et les abris en plus d'avoir l'énergie suffisante pour se déplacer. Il ne faut pas oublier les dangers de la forêt. Ne crois pas que je n'y ait jamais pensé.» il me regarda en levant un sourcil.
«À quoi sert de survivre si on reste ici? De mon avis, il vaut mieux essayer de sortir pour avoir une raison de survivre. Je ne veux pas rester toute ma vie ici.» dis-je d'un coup, sans réfléchir à mes paroles qui me surprirent par leur cran.
Je levai les yeux vers lui quand j'eus fini et je surpris son regard pesant. Peut-être pensait-il la même chose que moi?
«Je ne savais pas que tu réfléchissais de cette manière. Tu es plus courageuse que je le pensais.» il confirma mes pensées en un commentaire troublant.
«Je vais prendre le tout comme un compliment, merci.»
Il roula des yeux directement devant moi et je souris en coin. Je commençai peut-être à l'avoir dans mon camp. Je restais gentille pour ne pas qu'il change d'avis, car même si je voulais foncer et sortir de la forêt, je ne le ferai certainement pas seule. J'avais quand même peur. Matt avait plus d'expériences que moi dans ces bois.
Aussi, je remarquai que nous avions en quelques sortes échangé de place. Hier, c'était moi celle qui ne voulait pas rigoler et aujourd'hui, c'est lui.
«Alors? Tu embarques avec moi ou tu restes ici toute ta vie?» je finis par demander.
Il me jugea du regard un long moment en pensant clairement au pour et au contre. Je priais silencieusement pour qu'il accepte parce que je ne voulais vraiment pas partir seule.
«Bien, mais on suit mon plan.» il soupira.
«Parfait!» tapai-je dans mes mains.
Après tout, je n'avais pas de plan et je n'avais encore moins l'étoffe d'une survivante courageuse à l'épreuve de tout alors qu'il prenne les choses en mains m'arrangeait.
«Pour commencer, nous allons dès demain au secteur dont tu m'as parlé. S'il n'y a rien de menaçant, nous pourrons être tranquille pour tout organiser.» il conclut la conversation.
*
Alors que la soirée se présentait à nous, Matt prépara un petit feu pour nous garder au chaud.
Même si je ne l'avouerai jamais, il m'impressionnait beaucoup avec toutes ses connaissances de la forêt. On aurait pu croire qu'il avait toujours habité ici alors que ça ne faisait que quelques mois. Je n'essayais même pas de m'imaginer tout ce qu'il avait eu à traverser seul.
De mon côté, si je ne l'avais pas déjà rencontré, je crois que je serais déjà morte au mieux de peur et au pire attaquée. Je ne me donnerai même plus la peine étant seule; je saurai qu'il ne me restait plus assez de chances de m'en sortir tandis qu'à deux, elles sont doublées. Le travail d'équipe n'avait jamais été ma force, mais si je devais le faire pour survivre, je le ferrai.
Je me reconcentrai sur Matt, les sourcils froncés et le bout de sa langue sorti au coin de sa bouche, signe qu'il était concentré dans sa tâche.
«Maelly, voudrais-tu aller me chercher une petit bout de papier dans mon sac, s'il te plait?» il demanda sans quitter son travail des yeux.
Je me levai et entrai dans la cabane faites de petits troncs d'arbres. Je repérai son sac à la même place qu'il l'avait laissé la nuit dernière. J'y trouvai un cahier de notes de cours et en arrachai un petit bout en inspectant le reste du sac.
Avec un petit coup d'œil, je vis que Matt ne me prêtait pas attention alors j'ouvris la deuxième pochette de son sac. Il y avait un porte feuille en tissu de couleur orange avec quelques cartes, de l'argent et des photos à l'intérieur.
Sur l'une de ces photos, il y figurait avec ce qui j'imaginais être sa mère et sa petite sœur. Tous les trois avaient des cheveux foncés et les mêmes fossettes creusées sur leurs joues. Sur la deuxième photo, un portrait d'un homme âgé près de la cinquantaine souriait à pleines dents et finalement, la dernière représentait la même petite fille que je devinais être la petite sœur de Matt. Elle était très jeune, peut-être quatre ans, et elle avait du gâteau partout sur son visage. Ses petits yeux verts ,comme ceux de son frère, rayonnaient et elle était clairement en train de rire lorsque le cliché fut prit.
Je replaçai le porte feuille en place et trouvai un lecteur de musique un peu plus loin dans le sac. Je passai par-dessus les autres babioles et tombai sur une poupée dans la dernière pochette. Je retins mon rire en voyant le jouet avec des tresses à moitiés détruites et un maquillage absurde. Matt traînait avec lui une poupée? Sur quel genre de garçon étais-je tombée?
Je la reposai à sa place en le trouvant ridicule et enfantin et retournai finalement auprès de lui avec un morceau de papier. Il s'en servit habillement pour allumer le feu et s'avachit ensuite à mes côtés. Il sortit quelques noix de ses poches que je m'empressai d'avaler avec de petites gorgées d'eau.
«Matt?»
Il me répondit à moitié, le regard perdu dans le feu.
«Comment t'es-tu retrouvé ici? De l'autre côté de la clôture, je veux dire.»
Il ne bougea pas un moment et lorsque j'allais répéter ma question, pensant qu'il ne m'avait pas entendu, il se plaça face à moi. Il se mâchouilla la lèvre en plissant les yeux.
«Pourquoi veux-tu savoir ça?»
«Fait juste me répondre, c'est pas la fin du monde.» roulai-je des yeux, énervée qu'il contourne ma question par une autre.
«Je revenais de l'école avec ma mère et ma petite sœur. Elles étaient venues me chercher à pied pour prendre une marche.» il se perdit dans ses pensées et je dus le secouer pour qu'il puisse continuer. «À un moment, nous avions dû passer proche de la clôture, je ne me souvient plus trop pourquoi.» il fronça les sourcils avant de remettre son regard dans le mien. «Ensuite, il y avait ma sœur qui pleurait parce qu'elle avait perdu sa poupée. Je n'ai aucune idée de comment sa poupée s'était retrouvée là, mais elle était bel et bien de l'autre côté de la clôture, ce qui est étrange parce que ma sœur ne l'avait pas lancée. J'ai voulu lui faire plaisir et lui rendre sa poupée, mais à peine traversé, je me suis fait attiré je ne sais comment par je ne sais qui. Et me voilà.»
Je me tus, se sachant pas quoi dire. Je suis désolée? Non, ce n'était pas de ma faute. Et puis, j'avais à peu près vécu la même chose, alors ça ne m'a pas trop surprise. Le point positif était que je savais maintenant la provenance de la poupée dans le sac de Matt. Je devais avouer que son histoire m'avait un tantinet touchée.
«Et toi?»
«Moi, c'est semblable. J'ai voulu sauver un ami et il s'est...» je m'arrêtai, ne trouvant pas les mots. «Tourner contre moi. Il m'a attaquée et jetée par-dessus la clôture et, comme toi, je me suis faite traînée par je ne sais qui.»
«C'est mystérieux, tu trouves pas?» il réagit.
«Oui, ça peut l'être. Mon ami était comme possédé. Peut-être que la poupée aussi.»
«Mais par quoi seraient-ils possédés? Ça signifierait que quelqu'un est aux commandes de la forêt?» Matt reprit, le doute clair dans sa voix.
«J'en sais rien, il peut y avoir pleins de possibilités. Tu crois aux fantômes? Peut-être que ce sont les esprits des personnes mortes dans la forêt qui veulent se venger.»
La simple idée de cette possibilité me donnait des frissons dans le dos. Je regardai discrètement autour de moi, la chair de poule sur les bras.
«Ça ne donne rien de s'effrayer avec ce genre d'histoires, je ne pense pas qu'on puisse en valider une de toute façon.» Matt vint ;a mon secours.
«Tu as raison.» je soufflai. «C'est tout de même inquiétant.»
Il s'approcha de moi et posa sa main sur mon épaule, la serrant doucement en reportant son attention au feu.
«N'y pense plus.»
«Facile à dire.» grognai-je à voix basse.
Il rit un peu, faisant apparaître des fossettes creuses sur ses joues.
«Ce l'est.» il confirma finalement en mettant une noix dans sa bouche, closant la discussion.
Malgré son conseil de ne plus y penser, je ne pouvais m'en arrêter. Je me rendais peut-être finalement compte de la gravité de la situation; j'avais été emmenée contre moi dans la forêt dont les légendes étaient les unes plus horribles que les autres, où personne n'en était sorti vivant et où on ne savait pas contre qui se battre. Tout était inconnu pour moi et le mystère enveloppant la forêt me faisait franchement peur. Tout ce que nous pouvions faire était de survivre, essayer de sortir, mais nous ne pouvions pas affronter l'inconnu. Le jeu était facile et gagné d'avance pour la personne qui nous avait emmenés ici, si elle existait bien sûr. J'avais l'impression qu'il ne nous restais plus rien à jouer, peut-être une carte, mais rien de suffisant pour gagner la partie.
¨¨¨
Un cinquième chapitre plus long cette fois-ci!
Que croyez-vous qu'il va arriver dans le secteur tant cité?
Quel a été votre chapitre favori jusqu'à maintenant et pourquoi?
**Après la publication du cinquième chapitre, les suivants arriveront dans un temps indéterminé pour l'instant. Faites moi savoir si vous voulez lire la suite!**
-Magiquee
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