«May?» chantonna Matt, pas loin devant moi.

«Hmm?» je sortis un son mélangé d'épuisement et d'ennui de ma couche pâteuse. 

«Tu voudrais jouer à un jeu pour mieux se connaître?» il demanda, toujours de la même humeur, lui donnant l'air d'un enfant. 

Je soufflai, sachant déjà ce qu'il allait proposer. 

«Tu me poses une question à laquelle je réponds sincèrement et je fais pareil avec toi.» il se tourna un peu pour me regarder du coin de l'œil, souriant. 

Même d'ici, je pouvais voir ses fossettes et je ne pus qu'accepter pour les revoir encore. 

«Très bien.» je répondis sans grand intérêt. 

«Ton animal préféré?» 

«Peut-être le chien, je ne sais pas trop.» 

«Le chien? J'aurais pensé que tu allais dire le chat. Tu ressembles à une fille qui aime les chats.» il sortit d'une traite. 

«Je ne sais pas vraiment comment le prendre. Es-tu en train de dire que j'ai l'air d'une fille qui va finir vieille et entourée de chats?» il pouffa, mais ne répondit pas, aggravant mes soupçons. «Je n'aime pas les chats, pour tout te dire. Ils me font peur.»

«Quoi?» s'écria Matt, s'arrêtant de marcher d'un coup. 

Il se tourna du mieux qu'il le pouvait sans pour autant lâcher l'abri. 

«Tu n'aimes pas les chats? Mais qui n'aime pas les chats?»

«Moi, il faut croire.» je ris de sa réaction. 

«Comment peuvent-ils te faire peur? Ils sont tout mignons, adorables et doux.»

«Et  bien, quand j'étais jeune, nous avions un chat et il me fixait toujours  d'une étrange manière. On aurait dit qu'il préparait ma mort ou quelque  chose comme ça.» je frissonnai faussement aux souvenirs. «Il me griffait souvent, aussi.» j'ajoutai pour finir. 

«Tu n'as même pas eu un peu de peine lorsqu'il est mort? Pour moi, la mort d'un animal de compagnie est toujours atroce.» il se remit en marche, m'entraînant avec lui. 

«Mes  parents l'ont donné à une amie, je ne sais pas ce qu'il est advenu de  lui.» je répondis, un peu touchée par son affirmation. 

«Et depuis ce temps, tu as peur des chats?» il questionna, semblant intéressé. 

«Oui, un peu. J'imagine que c'est dans ma tête, mais je ne peux m'en empêcher.»

«Je comprends ce sentiment.» il répondit, compatissant. «Ton tour!» il enchaîna en reprenant son humeur joyeuse. 

Je réfléchis un instant avant de me lancer. 

«Ta plus grande peur?»

«Je dirais qu'en ce moment, ma plus grande peur serait de...» il fit une pause, réfléchissant. «Ne pas revoir ma famille.»

L'atmosphère changea excessivement vite. J'eus quelques frissons dans le dos en pensant à ne plus jamais revoir ma mère. 

«Je  ne veux pas les quitter sans leur dire que je les aime. Il y a tant de  choses que j'aimerais leur dire.» il partit un instant dans ses pensées.  «J'aimerais aussi rendre sa poupée à ma sœur.» il sourit un peu,  imaginant surement la scène. 

«J'aimerais  revoir ma mère aussi.» je dis doucement. «On ne s'est pas quitté en de bons termes et il y a beaucoup trop longtemps que je ne lui ai pas dit à quel point je l'aime.»

Il  y eu un silence rempli de songes venant de Matt et moi. Nous pensions  tous les deux à quel point il était important de sortir d'ici vivant.  Il y avait tellement de choses que je n'avais pas fait. J'étais jeune et  je ne voulais pas que ma vie est un terme aussi tôt. 

«On va s'en sortir.» Matt parla silencieusement, un peu comme une promesse. «Ensemble.» il rajouta encore plus bas. 

Je hochai la tête pour moi-même alors qu'il ne me voyait même pas. J'avais un bon pressentiment  sur la suite des évènements. Je me voyais, dans ma tête, sortir fièrement de la forêt avec Matt, toutes les caméras sur nous.  J'exagérais probablement, mais j'aimais me l'imaginer ainsi. 

Le silence envahit de nouveau notre espace et les seules choses que je pouvais entendre étaient le bruissement des feuilles dérangées par le vent et nos pas lourds sur le sol. Nous avions un rythme lent, mais, au moins, nous avancions. 

Il  y a peu de temps, nous nous étions arrêtés pour manger et boire un peu.  Il ne me restait qu'un œuf que je mangerai surement le soir même.  Aussi, j'avais rempli ma gourde d'eau à l'aide de la rivière que nous  suivions depuis notre départ. 

Pour  un commencement d'automne, la température était assez chaude. Je me  surprenais souvent à souhaiter que la fraicheur arrive, mais, dans le  fond, je ne le voulais pas. Si la température chutait et que la nuit  amenait le gel du gazon et peut-être même de la neige, je savais que  nous aurions un gros problème. Comment allions-nous faire pour nous réchauffer? Nous n'avions pas les vêtements appropriés pour de telles conditions et j'avais peur de mourir de froid. Des engelures  arrivaient vite et ça faisait mal. Tous ces scénarios dans ma tête me  rendait légèrement anxieuse. Je ne voulais pas que ça nous arrive, je préférais marcher sous le gros soleil tapant. 

«Quel est le pouvoir que tu aimerais avoir?» Matt dit soudainement, me faisant sortir de mes pensées. 

«Un seul pouvoir?» je questionnai.

«Un seul.» il répéta. 

«Je  crois que mon envie du moment serait de voler. Ça serait vraiment  pratique et je pourrais sortir d'ici.» je répondis le plus sincèrement  possible.

«Et si tu n'étais pas dans la forêt?»

Je fronçai les sourcils dû à la précision qu'il voulait, mais je répondis tout de même. 

«J'aimerais pouvoir lire dans les pensées.»

«Pourquoi?» il demanda en enjambant une racine épaisse. 

Je passai par-dessus à mon tour avant de répondre. 

«Parce que j'aimerais savoir ce que les gens pensent de moi. Leur opinion est importante.»

«Du genre si tes vêtements sont beaux?» Matt continua sur sa lancée, toujours sérieux. 

«Oui, mais aussi ce qu'ils pensent de ma personne.»

«Pourquoi veux-tu tant savoir leur opinion sur toi?»

«Je ne sais pas.» haussai-je les épaules. «J'ai toujours l'impression qu'ils me jugent et j'aimerais savoir pourquoi ou comment.»

«Je  ne comprends pas pourquoi c'est si important pour toi. Tu continuerais  d'être toi-même si tu découvrirais pourquoi ils te jugent? S'ils te  jugent, bien entendu.»

«Je crois que je changerais un peu pour leur plaire. Pour qu'ils m'aiment un peu plus.»

«L'important pour toi est de te faire aimer par des inconnus et non par toi?» 

Je  ne répondis pas. Qu'est-ce qu'il voulait me faire dire? Que ma façon de  penser était étrange? Je le savais déjà, mais encore une fois, c'était  dans ma tête. Je ne pouvais m'empêcher de vouloir savoir ce que les gens  pensaient de moi. Je voulais que tout le monde m'apprécie. 

«As-tu confiance en toi?» il reprit, voyant bien que je n'allais pas répondre.

Tout  de suite après sa question, il déposa l'extrémité de l'abri au sol. Il  s'approcha de moi en me faisant face pour la première fois face depuis  notre dernière pause. Je m'arrêtai moi aussi, me demandant ce qu'il  faisait. 

Il répéta sa question une deuxième fois et je m'empressai de répondre.

«Oui, j'ai confiance en moi. Pourquoi tu demandes?»

«J'ai l'impression que tu n'es déjà plus toi-même, que tu ne t'acceptes pas telle que tu es.»

«Pas du tout. D'où te vient cette impression?» créai-je une fois de plus des plis entre mes deux sourcils. 

«Et bien, pour commencer, tu avais une meilleure amie et tout d'un coup, tu ne traines plus avec elle, mais  avec un groupe complet. Ils sont populaires, laisse moi deviner.» il  haussa un sourcil, me demandant silencieusement la réponse. «Ensuite, tu  me dis que l'avis des gens est important pour toi, que tu changerais pour leur plaire.  Pour plaire à des inconnus que tu croises dans la rue. Si tu avais  confiance en toi, tu te foutrais pas mal des avis des gens. Tu ferais ce qui te plait avec qui ça te plait sans te demander si les gens autour trouvent ça correct. Ne crois-tu pas que j'ai raison?» 

Je me posai à moi-même des questions. Je n'avais jamais douté autant en quelque chose. Est-ce que j'étais réellement moi?

Me coupant dans mes pensées, un énorme cri perçant retentit en haut de nos tête. Ce n'était définitivement pas un cri humain.

Notre  réflexe fut de couvrir notre tête de nos bras en se rapprochant un peu  du sol. Matt m'attira vers lui et m'entoura de ses bras. Un deuxième cri menaçant qui faisait presque mal aux oreilles nous parvint. Matt et moi restâmes dans cette position un moment, la respiration saccadée. 

«On dirait un cri d'oiseau.» m'informa Matt après quelques minutes en silence. 

Son souffle s'échouait dans mes cheveux alors qu'il parlait. J'inclinai ma tête pour le voir et hochai la tête une fois qu'il me regardait, confirmant ce qu'il disait. 

«Je ne vois rien. Et toi?» observai-je minutieusement le ciel au dessus de nos tête. 

«Rien non plus.»

Je me détachai lentement de Matt, ne me sentant plus à l'aise dans ses bras. 

«Quelle sorte d'oiseau fait un tel son?» je demandai, curieuse. 

«May.» il me donna une sorte d'avertissement. «Je te l'ai déjà dit: dans cette forêt, rien n'est normal. Ce n'est sûrement pas un oiseau que tu connais ou même qui existe autre part qu'ici.»

Je soupirai. Je n'avais encore aucune preuve de la véracité de ses paroles, mais je le croyais. 

«Mais  pour te répondre, ça doit être un gros oiseau.» il continua en  changeant de ton, le regard de nouveau fixé au dessus de lui.

Les  arbres faisaient une sorte de barrage entre le sol et le ciel, ce qui  nous empêchait de voir la créature. Je fronçai les sourcils, mais n'en rajoutai pas.

Je cessai de me questionner sur cet évènement, me disant que ce n'était  qu'un oiseau de passage. De plus, je ne voulais pas me remplir la tête  d'inquiétudes. 

«Nous devrions continuer  notre route.» dis-je à Matt alors que je profitais des quelques secondes restantes à notre pause pour étirer mes jambes.

Il acquiesça et se remit à sa place devant moi pour prendre son extrémité de l'abri. Ainsi, la route reprit tranquillement.

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Onzième chapitre sans trop d'action.

Qu'en dîtes-vous? Est-ce qu'il manque d'action?

Surprise au prochain chapitre! 💏💙💚

-Magiquee