Chapitre 1

Les chiens, elle les avait toujours préférés dans leur niche, maintenus sagement par les maillons entremêlés d'une chaine en acier. Ainsi, lorsque ce bien audacieux marchand déroba sa main gantée afin d'y déposer un baiser, Roxana ne put s'empêcher de l'imaginer à quatre pattes.

Il n'existait, au sein de l'empire et bien au-delà des frontières, de fêtes plus extravagantes et somptueuses que celles qu'elle organisait. Ce soir-là, si les chanceux invités (plus ou moins humains) ne tentaient de fusionner avec les buffets débordants, ils s'abandonnaient aux différents spectacles offerts par les arlequins.

Aussi étirés que souples, leurs corps difformes pourvus de collerettes en plumes et de costumes bouffants incrustés de fil d'or, ces derniers ne passaient jamais inaperçus. Bien que symbolisés par leurs masques de porcelaine aux expressions grotesques, ils se voyaient davantage appréciés pour les grelots tintant de leur chapeau bicorne.

Fruit d'une union entre le grand théâtre et la salle de bal, l'aile impériale dans laquelle ils se trouvaient dépassait l'entendement. Comme si les réjouissances demeuraient bien trop abondantes pour être contenues sur un seul et même sol, la fête se propageait sur les balcons bordant les murs. Semblables à des galeries suspendues, leurs rambardes finement ornées d'or reflétaient les éclats vacillants des lustres opulents.

En effet, maintenus par des chaines au plafond, tantôt couverts de fresques, tantôt de constellations étincelantes, ils se déployaient tels des grappes. Par conséquent, il régnait entre les différents étages une atmosphère à la fois intime et vaniteuse.

Au centre de la salle s'élevait une fontaine nacrée, repère de l'orchestre, perché sur des socles à chacun de ses niveaux. Responsable de la frénésie omniprésente, les instruments (comme toute chose touchée par la magie) semi-humain se mirent à ralentir. Par la suite, une épaisse fumée dorée aussi énigmatique que scintillante se mit à serpenter autour des convives. Alertés par le changement soudain de la mélodie, les arlequins se balançant au milieu des lustres et des balcons se mirent à déboiter leur corps aux rythmes des quelques notes.

Une tension presque angoissante fit frémir l'assemblée dès l'instant où la guitare gratta les cordes qui lui faisaient office de côtes. En parallèle, les flammes des chandeliers se tamisèrent afin de laisser place à des lueurs écarlates. Face aux yeux ébahis, la dame castagnettes ajouta les claquements réguliers de ses doigts, suivis de près par le dernier instrument et les percussions de sa colonne vertébrale.

Tel un bourgeon en éclosion, une femme à la peau d'or sortie du sommet de la fontaine dans une position théâtrale. Croulant sous des rivières de perles et les vagues d'étoffes, elle se mit à chanter, éveillant chez les convives une transe collective. Qu'importait si elle diffusait des mots dont elle seule comprenait le sens, les invités dansaient avec une énergie effrénée. Au milieu de toute cette euphorie, les rires et les applaudissements se mêlèrent aux acrobaties infernales des arlequins.

De l'autre côté des balcons se trouvaient, atteignables par quelques marches, une estrade semblable à une alcôve royale. Sous l'arche sculptée et pourvue de rideaux de velours, Roxana et les trois membres de sa cour étaient aux premières loges du ballet fastueux qui se déroulait en contrebas.

La jeune femme termina la coupe de son nectar épicé à l'aide de la main qui ne se faisait point souiller. Élégamment avachi sur son divan, elle subsistait sous son imposante robe rouge. Les différentes couches de tissus se chevauchaient sous son bustier avant de plonger sur les marches en marbre tel une trainée de sang. Ses yeux aux iris de la même teinte vive se plissèrent avec mépris, laissant, tant ils étaient longs, ses cils blonds caresser ses pommettes par la même occasion.

- Encore une fois, vous êtes exquise, ma chère, attesta le marchand en recoiffant ses moustaches aussi arquées que les dos des arlequins.

Exquise... Parfait exemple du genre d'éloge qu'elle exécrait.

Tout en enroulant autour de son doigt juvénile l'une des infinis mèches d'or de Roxana, l'enfant niché sur l'accoudoir du divan se mit à pouffer. Perché sur la marche la plus haute, il grimaça face à son geste.

- Dites-moi, l'invita-t-elle en le regardant de haut.

Le marchand, identifiable grâce au badge épinglé à sa poitrine, se redressa, le torse bombé et la bedaine rentré.

- Avant toute chose, je tenais à complimenter encore une fois la grandiosité de cette réception.

Roxana, laissa échapper un bâillement volontaire qui eut pour effet de secouer le chapeau carrousel qu'elle portait sur le côté de sa tête. Comme s'il venait d'être mis en mouvement, les chevaux de ce dernier se mirent à tourner.

- Avec l'intention évidente de venir vous saluer, je me suis souvenu soudainement que j'avais emporté avec moi un laissez-passer vers la route du sud qui nécessite votre signature.

L'homme sortit de son pourpoint aux motifs irréguliers une plume duveteuse ainsi qu'un rouleau de papier jauni.

Assis sur le divan adjacent, les jambes croisées et le bras reposant sur la bordure, un homme aux imposantes cornes de bélier s'évadant de son nuage de cheveux bruns et vêtu d'un costume de paon, poussa un hoquet stupéfait. D'une manière exagérée et plus amusée que choquée, l'avant-dernier membre de sa cour plaqua le bout de ses doigts bruns contre ses lèvres entrouvertes.

Il ne manqua point de les retirer aussitôt lorsqu'il se souvint de la quantité de poudres et de paillettes qu'il arborait sur son teint impeccable.

- Quelle impolitesse ! s'offusqua-t-il sur un ton frivole.

Ses manières firent pouffer l'enfant de plus belle. Comme trempé dans l'hiver, le garçon à la peau aussi blanche que le papier et aux cheveux pales comme la neige arborait un simple ensemble brodé.

- Vous ne seriez tout de même pas en train d'oser m'importuner avec vos affaires pendant ma réception ?

- Affaires qui m'ont l'air tout à fait douteuses, tout à fait, répéta l'homme à cornes.

Pris de court, le marchand balaya leurs craintes d'un revers de la main tout en rassemblant ses mots.

- Je peux vous assurer que mes affaires sont on ne peut plus honnêtes, se rattrapa-t-il en claquant ses bagues serties de pierres contre le rouleau. Ma foi, il n'était pas dans mes intentions de vous importuner, je pensais simplement faire d'une pierre deux...

L'enfant, après avoir simplement jugé un coin du papier à l'aide de ses grands yeux bleus, l'interrompit.

- Il est pourtant écrit à la sève de murmurier, ou à l'encre invisible, comme vous préférez, que toutes marchandises, légales ou non, vous seront autorisées à transporter.

L'homme à cornes protégea brusquement son cœur à l'aide de sa main, secouant ainsi les plumes de son costume iridescent. Quant à Roxana, elle haussa un sourcil critique.

- Baliverne ! Vous n'allez tout de même pas croire les paroles d'un enfant...

- Tenteriez-vous de me duper ? l'interrogea-t-elle en se redressant légèrement.

- Bien sûr que non ! jura le marchand désemparé. Je ne suis qu'un marchand honnête. Comment cet enfant pourrait mieux connaitre que moi les clauses de ce laissez-passer qu'il n'a même point lu ?

Ennuyé, Roxana, porta son attention une seconde sur une femme qui arborait à la place du cou un sablier. Au rythme de la musique, elle exécutait sous les encouragements de son cercle une danse mécanique. Perché sur des bottes à talons recouvertes de lierre et excessivement hautes, elle semblait prendre ses gesticulations très au sérieux.

De nouveau concentrée, Roxana battit ses longs cils devant le marchand. Ce simple geste le fit trébucher d'une marche.

- Vous m'importunez, puis vous tentez de me duper, et maintenant, vous accusez un membre de ma cour de mentir... Il n'y a donc point de limite à votre culot.

À la recherche d'un morceau de bon sens auquel se raccrocher, le marchand croisa le regard du garçon qui lui tira la langue.

- Vil petit... !

Le concerné fit tourner son doigt avec un sourire mesquin. Soudain, le soi-disant laissez-passer de l'homme se recroquevilla avant de venir se fourrer dans sa bouche. Sa mesquinerie contrastait sauvagement avec son allure d'ange des neiges.

Silencieuse depuis le début, la femme sur le dernier divan recouverte par ses épaisses ailes de papillons duveteuses forma un O avec ces fines lèvres. Derrière ses longues mèches d'un rose grisâtre assorti à sa peau, ses yeux crème dépourvus de pupille brillèrent de surprise.

- Mais pourquoi chercher à te tromper ? s'inquiéta-t-elle en remuant ses oreilles pointues.

- Il faut croire, ma chère Brunille, qu'il cherchait à se faire dompter.

Le marchand parvint enfin, bien que plus rouge qu'une fleur de pavot, à cracher la boule de papier.

L'homme à corne poussa un gémissement dégoûté lorsqu'elle tomba couverte de salive à ses pieds. Instinctivement, il écarta ses talons irisés.

Roxana qui commençait enfin à s'amuser, arracha quelques-uns de ses cheveux qu'elle envoya s'enrouler autour du perfide qui tentait déjà de s'enfuir. De la même manière qu'un lasso, ils projetèrent l'homme à leurs pieds avant de se durcir en un magnifique collier de bronze.

Étranglé, il convulsa. La chute de son chapeau dévoila ses oreilles poilues de chat.

- Mets-toi à quatre pattes, lui ordonna-t-elle avec un sourire sadique.

Dans l'incapacité de contrôler son propre corps, le marchand obtempéra.

Telle une marionnettiste, elle agita ses doigts, remuant des fils invisibles. Docilement, il s'arrêta au pied de Verion, l'homme à cornes.

- Avale-la, commanda-t-elle en dévisageant la boule de papier. N'en laisse pas une miette.

Déjà plus maître de sa conscience, il ingurgita le document et lécha même les gouttes de salive qu'il avait déposées. Lorsqu'il eut terminé, il revint tel un bon chien devant Roxana. Satisfaite, elle lui tapota la tête négligemment.

-Ton visage m'insupporte, va te balader et laisse les invités t'humilier. Quand ils en auront fini de toi, offre ta vie aux arlequins.

La langue ballante et le regard vitreux, il s'en alla comme l'animal qu'il était.

Comme si cela ne suffisait point, l'enfant lui envoya une dernière pichenette aérienne. Cette dernière eut l'effet d'un coup de pied au derrière. Ainsi, son corps gras se mit à dévaler les escaliers avant de s'effondrer sur le parquet.

Verion et Roxana ne purent retenir un éclat de rire moqueur.

- Tu ne le veux même pas dans l'enclos ? demanda Plum fière de son geste.

- J'en ai déjà un tas des comme lui, expliqua-t-elle en scrutant le misérable se faire piétiner.

Verion fit remuer les plumes de paon de son éventail devant son visage brun. Comme s'il ne s'était rien passé, il se pencha vers la jeune femme et les deux autres membres de la cour avant d'ajouter :

- Vous ne devinerez jamais ce qu'on m'a rapporté, jamais.

Curieuse, Brunille dégagea ses ailes ternes semblables à une cape avant de se pencher à son tour. Dernier membre de sa cour et véritable esprit de la nature, il trônait au-dessus de ses tempes deux maigres bois.

- La duchesse de Lustra...

- Celle qui a six yeux ? demanda Roxana en tentant de se remémorer son visage.

Brunille secoua la tête.

- Non, celle-ci, c'est la comtesse d'Arachi. Je crois qu'il parle de la femme du...

Bien trop impatient de leur révéler son ragot, Verion les coupa nets.

- Celle qui a toujours un abat-jour sur la tête !

- Ahhh... poussèrent en chœur les deux femmes, celle-ci !

- Je vous passe la partie du comment c'est arrivé jusqu'à mes oreilles, évidemment. Soit, figurez-vous qu'un marchand du royaume d'Orix s'est arrêté au duché pour vendre sa marchandise. Jusque-là, rien de bien méchant. Or, il aurait, le cœur peiné, révélé à l'une de ses clientes, un peu trop intrusive si vous voulez mon avis, ce que le porte-parole des dieux avait rapporté. Mais qui passait par là au même instant... la dame de chambre de la duchesse de Lustra ! Évidemment, elle a tout entendu et s'est dépêchée d'aller tout raconter à sa maitresse, qui l'a ensuite raconté à son ami, qui l'a rapporté à sa sœur qui me l'a rapporté.

Plum leva les yeux au ciel.

- J'ai toujours été curieux de savoir ce que les dieux demandaient dans les autres royaumes, donc j'ai été on ne peut plus heureux qu'on me rapporte...

- Par pitié, abrège ! s'impatienta le garçon, exposant ainsi ce que tout le monde pensait.

Offusqué qu'il eût osé lui couper la parole, Verion fit claquer sa langue contre son palais avant de froncer ses sourcils arqués.

- DONC, je disais... Oui... Où en étais-je... Bon sang, j'ai oublié de quoi je parlais par ta faute !

- Ce n'est pas grave, le rassura Brunille, tu allais nous révéler quelle requête les dieux avaient faite à leur porte-parole au royaume d'Orix.

Verion claqua plusieurs fois des doigts, faisant ainsi tinter ses bagues avant d'hocher la tête.

- En effet, merci ma chère. Soit ! Ils ont demandé au peuple marin de laisser trois sirènes sur le sable sec et brulant des dunes, sans eaux, pendant un mois, parce qu'ils étaient curieux de voir à quoi ressemblaient des sirènes séchées.

Un silence tomba sur eux, décomposant leur visage par la même occasion.

En parallèle, après le tir d'un arlequin, le marchand qui s'était transformé en ballon explosa dans les airs en une pluie de confetti.

- Répugnant, finit enfin par déclarer Plum.

- Comment peuvent-ils toujours demander des choses aussi horribles, s'indigna Brunille les mains collées à ses joues rebondies.

- Les dieux sont horribles, rappela Roxana en soupirant. Au moins, nous savons maintenant qu'ils ne le sont pas seulement avec notre empire.

Sur ce continent, les dieux n'avaient de divin que le nom. Même s'ils se voyaient dotés d'une magie imprévisible, jamais elle ne servait à faire le bien. En d'autres termes, les dieux pouvaient être comparés à des enfants immatures en quête perpétuelle de divertissement. Ainsi, des requêtes comme cette dernière, ils ne manquaient jamais d'en faire part à leur porte-parole. Toujours plus absurdes ou inhumaines que la précédente, elles impliquaient la plupart du temps des châtiments, en cas de non-respect, davantage contraignants.

- Petit jeu, proposa Verion en claquant ses mains. Celui qui trouve qu'elle a été la pire demande gagne.

Des effluves de pomme acidulée vinrent chatouiller leurs narines lorsque la fumée atteignit enfin l'estrade.

- Quel est le prix, renchéri soudain le garçon intéressé.

Roxana n'était pas certaine que cette petite compétition soit équitable entre Verion et sa mémoire défectueuse, Plum qui, à l'inverse, était une archive vivante et Brunille qui n'osait même pas dire à voix haute les mots violents.

Toutefois, habituée, elle s'apprêta à commencer juste avant que son attention ne se porte sur un tabouret. Si ce fut son contraste avec la décoration qui la dérangea, ce fut sa course effrénée qui l'alarma.

Sachant très bien ce qui arrivait, Roxana déglutit difficilement. Sa robe devint soudainement trop serrée et l'ambiance trop pesante. Il fallut qu'elle s'y reprenne à trois fois avant de pouvoir respirer normalement.

- Roxana tout va bien ? demanda Brunille en posant sa main délicate sur son épaule.

La concernée serra les poings afin de masquer ses mains tremblantes.

- Il arrive, la fête est finie.

Sur ces mots, Plum fit sonner l'horloge qui marqua la fin de la réception, tandis que d'un claquement de doigt, Verion disparut avec Brunille.

Bien qu'ouvertement déçus, les convives bousculés par une vague de soupir lui offrirent des révérences avant de commencer à disparaitre par magie les uns après les autres. L'orchestre, lui aussi, s'évapora en un instant, au même titre que les arlequins dans une tempête de ruban.

D'un revers de la main, elle défit les illusions, puis toutes les décorations, les lumières, et les buffets disparurent pour ne laisser dans leur sillage que les fragrances entêtantes de la fête précédente.

Plum fut le dernier à partir.

Seul dans cette salle de bal vide, toujours perché sur son divan, elle pouvait entendre ses pas irréguliers. Pourtant, ce qui l'assourdissait, c'étaient les battements violents de son propre cœur.

Il approchait.

Il était là.

Sa simple vue lui donna envie de vomir.

L'Empereur.

Vêtu d'une simple tunique en soie aux broderies de fil d'or et d'un pantalon droit, il fit craquer le parquet dès le premier pas qu'il fit dans la salle.

- Je vois que tu es encore parvenu à faire tout disparaitre à temps...

Victor caressa l'arrière de ses mèches blondes avec une peine presque crédible.

Après avoir suffisamment étudié la salle en proie à un dernier signe de célébration, il soupira, vaincu, avant d'afficher un sourire excessivement charmant.

- Je ne prends pas mal le fait que tu ne m'invites jamais, affirma-t-il sur un ton posé.

Tout en s'efforçant de rester la plus inébranlable possible, elle l'interrogea avec un gloussement.

- À qui mens-tu au juste ?

Nullement affecté par sa remarque, il se contenta d'étudier sa silhouette. Ses iris violettes brillaient avec trop de convoitise pour qu'elle ne s'en inquiète point.

Bien trop vite, il arriva bien trop vite en haut de l'estrade à son goût.

Tel un serpent, il se glissa de l'autre côté du divan. Sa présence derrière son dos lui donna l'impression d'avancer à reculons vers un feu ardent.

- Qu'importe que j'assiste à ces fêtes dont je ne suis apparemment pas le bienvenu, développa-t-il en saisissant une mèche de ses longs cheveux qu'il laissa glisser entre ses doigts. Tant que je peux t'avoir rien que pour moi à leur fin, ça me suffit.

L'air manquait, ou du moins, elle avait cessé de respirer.

- As-tu signé les décrets que j'avais laissés sur ton bureau ? Tenta-t-elle pour détourner son attention.

Roxana le regretta aussitôt lorsqu'elle sentit la pression de son imposante main sur son épaule.

- Évidemment que je l'ai fait, c'est ce que tu voulais, non ? Chaque mot d'une bonté hypocrite lui fit l'effet d'un clou dans la poitrine. C'est toujours comme tu veux. Tu assistes aux conseils, tu organises les bals, tu me fais signer ce qui te chante. C'est comme ça que tu m'aimes, non ? Quand je suis aussi docile que les hommes que tu gardes dans ton enclos.

- Ne parle pas comme un sot.

Victor gloussa avant de glisser sa main autour de son maigre cou.

- Et voilà que tu me reprends de haut. Moi, le pauvre empereur incapable de faire quoi que ce soit. Est-ce comme ça que tu me vois ? Penses-tu être meilleur que moi ?

À vrai dire, oui, elle en avait la certitude.

- N'oublie pas que si je te laisse agir ainsi, c'est uniquement parce que tu me rends service. Sans moi, tu n'es rien. Sans mon sceau, tu n'es rien. Que ça te déplaise ou non, je suis l'empereur. Et toi...

Il tapota le bout de son énorme chapeau carrousel. Face au contact de sa paume, ce dernier s'agita avant de se dresser sur sa tête. Comme s'il était enfin libre après des années d'emprisonnement, il s'empressa de dévaler l'estrade.

Roxana, observa les chevaux du manège s'enfuir. En d'autres circonstances, ça aurait pu être comique. Lorsqu'ils furent déjà loin, elle ferma les yeux.

- Toi...Tu m'appartiens.

Lorsqu'elle sentit son souffle dans sa nuque, elle sut qu'il était trop tard.

Victor commença à déposer sur son épaule quelques baisers brulants. Environ six. Puis, il remonta jusqu'à sa mâchoire. Seulement deux.

Il sentait l'empereur, un mélange de bois et d'ambre. La jeune femme détestait cette odeur, plus que celle des cadavres éventrés par les corbeaux.

Sans perdre de temps, il emprisonna son visage entre ses doigts. Sa poigne était trop puissante pour qu'elle puisse détourner la tête sans se déboiter le cou. Roxana le savait puisqu'elle avait déjà essayé.

Cela faisait déjà plusieurs minutes qu'elle s'était déconnectée. Seule, elle jouait seule au jeu de Verion. Ainsi, lorsque l'empereur écrasa ses lèvres contre les siennes, elle ne pensa qu'à la fois où les dieux avaient demandé que toutes les personnes de 111 ans soient tuées. Ils devaient sans doute manquer d'inspiration.

Puis, lorsqu'il laissa ses mains défaire le laçage de son corset et força l'accès à sa bouche, elle revit la fois où tous les points d'eau avaient dû être colorés en jaune. Mis à part la quantité de potion utilisée et l'impression d'avaler de l'urine pendant deux semaines, ça n'avait causé la mort de personne.

Enfin, quand il gravi le dossier du divan pour presser son corps trop lourd contre elle, Roxana ne put s'empêcher d'être contrariée. Elle s'était dit au cas où, que si elle portait une robe suffisamment volumineuse ainsi qu'un chapeau encombrant, Victor aurait plus de mal à avoir accès à son corps.

Foutaise.

C'était un chien lui aussi.

Et les chiens retrouvaient toujours leur chemin.

Tant pis, de toute façon, elle avait eu trop chaud toute la soirée et ce chapeau était ridicule. Cette fois-ci, elle ne put s'empêcher de glousser. Même si le style extravagant était répandu dans l'empire, comment pouvait-elle avoir mis un carrousel sur sa tête.

- Quelque chose te fait rire, demanda l'empereur en laissant une marque sur son cou.

Un sourire béat aux lèvres, elle contempla un instant l'homme qui la surplombait comme si elle n'était que spectatrice et non celle qui subissait.

Il n'y avait jamais eu de doute.

Elle pouvait sentir son aversion à son égard dans chaque parcelle de son corps.

Roxana détestait son frère.

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