Chapitre 55

Lève les yeux, et observe Andromède

Harper — 25 ans

Je regarde jusqu'au dernier instant Eden disparaitre dans la grande salle que le temps a épargné, puis observe mon amie qui semble nerveuse. Vu la réaction de Greyson en me voyant émerger du vestiaire, je ne suis pas sûre qu'il était au courant de ma venue.

-    Bon... commence Courtney en souriant de gêne, après ce moment fort en émotions et très inattendu, je vais vous laisser discuter...

-    Non ! Nous nous exclamons en cœur avec Greyson.

Je me retourne lentement, riant légèrement face au comique de la situation mais le regard de Greyson reste figé sur Courtney, vide, froid.

Depuis mon dernier souvenir de lui en réel, il n'était pas aussi fin de visage et sa barbe ne semblait pas si drue ; les cernes sous ses yeux n'étaient pas si prononcées ; ses mains pas si abimées ; ses cheveux n'étaient pas coupés si courts.

L'homme en face de moi semble plus froid, plus mûr mais surtout plus triste. Il ne regarde pas Courtney avec la même lueur d'amusement qui brûlait son regard avant. Il ne semble plus touché par les émotions que nous venons de ressentir malgré ses veines qui trahissent ses pleurs. L'homme en face de moi semble si mal que je me prends une claque en plein visage.

Le pouvoir des réseaux sociaux est si fort, qu'on peut faire voir ce que l'on veut à travers une caméra.

-    Je suis désolée mes amours, mais là vous êtes obligés. J'en ai ras le bol de faire la girouette entre vous deux pour savoir comment va l'un, comment va l'autre... Tout ça est difficile pour tout le monde, mais maintenant qu'Harper vient de rentrer, il faut que vous vous parliez.

C'est facile pour elle, ce n'est pas celle qui s'est réveillée sur un lit d'hôpital avec une lettre lui demandant de quitter le pays.

-    Humm, laisse-nous s'il faut en arriver là, je lui dis et elle part en courant se réfugier dans nos vestiaires.

Greyson se retrouve obliger de me regarder. J'ai presque envie de rire tellement ça semble douloureux pour lui de poser ses yeux sur moi. Comme par réflexe, son regard parcourt mon corps avant de s'arrêter sur mon poignet nu. Il hausse un sourcil, unique expression intéressante depuis que nous sommes ensemble.

-    Tu t'es fais tatouer ? Me questionne-t-il en grattant l'arrière de sa tête avec gêne.

-    Oui, j'avoue en ramenant mon poignet près de mon cœur. Noah avait le même, au même endroit. Et je ne supportais pas de voir ces cicatrices alors j'ai décidé de cacher un petit peu avec ça.

-    Ça t'a fait mal ?

-    Pas autant que la lettre qui m'a expulsée du pays.

Son visage se crispe, il mord sa lèvre inférieure qui semble toute gercée, puis soupire. Dans celui-ci, il en profite pour détendre tous ses muscles contractés.

-    Je la méritais celle-là, tu peux te défouler.

-    Me défouler ? Je n'ai rien à te dire Greyson, je lui dis doucement. Tu m'as abandonné.

Cette fois, son regard se relève pour trouver le mien. La tête haute, je ne me détourne pas et l'affronte pleinement. Mon cœur se met à battre fort dans ma poitrine mais je l'ignore pour me concentrer sur Grey.

-    Je ne t'ai pas abandonné, c'était pour ton bien, je ne voulais pas que mon père te tombe dessus... Je me doutais que tu me détesterais, que tu m'en voudrais à mourir après avoir lu ce torchon de merde. Si tu savais à quel point je me suis haïs pour avoir écris ça ! Pendant toutes ces années je souhaitais juste que tu vives ta vie comme tu l'entends. Je ne te souhaite que le meilleur, vraiment. Et si tu le souhaites, je ne viendrais pas dans ta vie. Ça sera facile en plus comme Courtney part ce soir...

Je croise les bras sur ma poitrine, un peu amusée par la détresse qu'il me dévoile. Il fallait absolument que je lui fasse un peu peur pour qu'il comprenne que des choses se font, d'autres pas. Mais vu ce qu'il dégage, je ne pensais pas que lui-même se détruirait autant pour si peu.

-    C'est bon, tu as finis ? Je lui demande en riant.

Perdu, il recule un peu. Je lui souris en plus, ce qui semble totalement le désarçonner.

-    Je ne t'en veux pas, Greyson.

-    Tu ne m'en veux pas ?

-    Non, je ne t'en veux pas.

-    J'ai bien Harper en face de moi ?

J'explose de rire face à son incrédulité. Le pauvre il semble tellement à l'ouest.

-    Je t'en ai voulu, mais je comprends, expliqué-je. Je t'ai vu sur ma télé, dans mes journaux, sur mes réseaux. J'ai vu toutes les interviews avec ton père, j'ai compté le nombre de fois où on t'a parlé de ta fiancée, où on t'a demandé où elle était. 88 fois en cinq ans. C'est le nombre de constellation que nous avons dans notre ciel, et le nombre de fois où tu as répondu que je n'étais pas avec toi.

-    C'est vrai... il dit enfin en riant légèrement. J'ai compté aussi. Mais j'en ai plus si on rajoute les réseaux sociaux.

-    Je ne t'en veux pas Greyson, je lui répète de plus belle en m'approchant de lui pour prendre ses joues entre mes mains. Je ne t'en veux pas et j'ai fais ce que tu m'as demandé. Je suis diplômée. J'ai construit une vie qui me convient. Je t'en ai voulu mais la douleur s'est apaisée. Aujourd'hui, je suis prête à vivre ma vie. Pour Noah, pour Gareth, pour Kabir, pour Isaac.

Sa main se pose sur la mienne tandis que je caresse sa joue.

-    Si tu me laisses entrer dans ta vie à nouveau, je poursuis, je suis prête à tout recommencer. Tu auras quelqu'un à présenter au monde, une femme qui deviendra une grande astrophysicienne, et non une strip-teaseuse. Une femme qui t'aime bien que tu aies aimé un autre homme, parce que je n'en ai rien à foutre. Tout ce que je te demande en retour, c'est de prendre le temps qu'il faudra et de croire en nous, de t'autoriser à m'aimer comme je n'ai jamais cessé de le faire. Tu m'as brisé le cœur une fois Greyson, je ne te laisserais pas la chance de le faire une deuxième fois.

-    Je me suis moi-même brisé le cœur en te voyant sur ce lit, Harper. Laisse-moi me racheter, ce que tu m'offres est bien énorme pour que je ne te laisse partir.

Greyson s'avance pour rapprocher nos visages, mais je l'arrête en cours de route quand il s'apprête à réduire la distance entre nos lèvres. Surpris, sa bouche rencontre ma main ce qui me fait bien rire.

-    Prendre le temps, tu te souviens ?

Il hoche la tête en se reculant, les joues rosies. Mais je ne peux pas m'en empêcher, j'attrape sa nuque à deux mains et l'attire à moi pour poser mes lèvres sur les siennes avec violence. Greyson me le rend instantanément en souriant, attrapant ma taille pour mieux m'étreindre.

Et même quand nous entendions le cri strident de Courtney derrière nous, nous l'ignorons royalement, commençant ce qui aurait dû arriver il y a sept ans.

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