Chapitre 9 - Cocktail & prophétie
Samedi 4 Septembre 1995 :
Le tintement de la cloche annonçant l'ouverture de la porte d'entrée fit lever les yeux de M. O'Malley, le propriétaire des lieux. En me voyant, il posa sur son comptoir le verre qu'il était entrain de faire briller, mit son torchon sur son épaule et m'adressa un sourire radieux, comme à chaque fois que je venais dans son enseigne.
«-Mademoiselle Lynch ! s'enthousiasma-t-il en français, quel plaisir de vous voir ici ! Je commençais à penser que vous m'aviez oublié !»
Je m'approchai du comptoir.
«-Ne vous en faites pas pour ça, Jacques, je n'ai pas encore effacé de ma mémoire vos merveilleux cocktails !»
Mon français teinté d'un accent anglais dont je ne parvenais pas à me débarrasser malgré mes quelques années passées en France fit sourire de plus bel le cher O'Malley qui me demanda, tout en ramassant le pourboire déposé à l'instant par un client - encore un charmé par l'ambiance chaleureuse qui régnait dans le bar :
«-Ce sera quoi pour aujourd'hui, Mademoiselle ?
-Comme d'habitude, le cocktail du chef !
-Et pour vous, Monsieur ?
O'Malley se tourna vers Severus, qui s'était figé à quelques mètres derrière moi. Mon compagnon leva la tête vers Jacques et s'empressa de répondre un laconique : «la même chose» et, à ma plus grande surprise, il avait prononcé ces trois mots dans un français parfait.
Intriguée, je lui lançai un regard surpris, avant de l'entraîner vers une table libre pour attendre les commandes. Alors que je me faufilai entre les banquettes déjà occupées, Severus, qui me suivait de près, en profita pour me glisser à l'oreille :
«-Un bar moldu ? Sérieusement ?»
Je décidai de l'ignorer le temps de trouver une place et nous dénichai une petite table un peu à l'écart, où nous pourrions discuter sans attirer les oreilles indiscrètes. Je me glissai sur la banquette et invitai Severus à me rejoindre, mais celui-ci semblait réticent.
«-J'ai l'habitude de venir ici assez régulièrement, lui expliquai-je, ce n'est pas très loin du QG et ça me permet de souffler un peu, tu vois ? Jacques est très sympathique et ses cocktails sont des merveilles, tu verras ! Et puis, je ne suis pas la seule sorcière à venir ici...»
Du menton, je désignai un vieil homme, installé non loin de nous, plongé dans la lecture de la Gazette du Sorcier, à laquelle il avait soigneusement jeté un sortilège de Blocage pour que les photos cessent de gesticuler et n'attirent ainsi pas l'attention des moldus.
Loin de se laisser convaincre par mon enthousiasme débordant, le sorcier se laissa tout de même tomber sur la banquette à mes côtés, tout en jetant des regards circonspects autour de lui.
Depuis son altercation pour la moins violente avec Sirius, le sorcier était maussade, bien que faisant de son mieux pour ne pas le paraître. Aussi, j'avais profité du week-end pour tirer le professeur de Potions hors de Poudlard et ainsi, lui changer les idées.
Entrapercevant son malaise, je déposai une main sur la sienne.
«-Hé ça va, lui chuchotai-je gentiment, je sais bien que ce n'est pas ton truc le monde moldu et je comprends pourquoi, mais je t'assure qu'ils ne sont pas tous comme ton père. Certains sont très respectables, comme Jacques, ou mes parents. D'ailleurs, il faudrait que je te les présente, un de ces jours, ajoutai-je malicieusement.»
Je ne pus m'empêcher de rigoler en voyant la lueur paniquée dans les pupilles de mon partenaire.
«-Je rigole, Severus ! Détends-toi un peu.»
Les lèvres pincées, le concerné m'adressa un regard affligé et je me mordis l'intérieur de la joue pour ne pas exploser de rire. Ce qu'il pouvait être timoré parfois !
Je me décidai à changer de sujet de conversation, afin de le mettre plus à l'aise :
«-Alors comme ça, tu sais parler le français ? Je ne savais pas.»
Severus haussa les épaules.
«-J'ai quelques bases, en effet, expliqua-t-il simplement.
-Comment les as-tu apprises ?
-Lors d'un voyage, quand j'étais plus jeune, un des rares que je n'ai pas fait par obligation vis-à-vis de ma condition. J'avais besoin d'un ingrédient pour une potion et il n'existe qu'un seul fournisseur en Europe, en France.
-Tu parles d'autres langues ?
Severus baissa les yeux sur nos mains, toujours liées, alors que je caressais du pouce sa peau.
«-Je connais le principe fondamental de déchiffrement des runes, idéal pour comprendre certains anciens manuscrits. Sinon, j'ai quelques notions de latin, mon père avait un livre dans cette langue à la maison, c'est d'ailleurs l'une des rares choses pour laquelle il m'a aidé...
-Et voilà pour vous !»
L'arrivée détonante de O'Malley fit se crisper Severus qui retira vivement sa main de la mienne, pour la dissimuler sous la table. Son sourire mystique touché accroché à ses lèvres, Jacques déposa nos verres sur la table et je sortis mon porte-monnaie pour le régler :
«-Combien je vous dois ?»
Il eut un geste de refus de la main :
«-C'est offert par la maison, Mademoiselle.»
Je remerciai O'Malley d'un signe de tête timide, tandis qu'il repartait près de son comptoir, non sans m'avoir auparavant adressé un clin d'œil complice.
«-Alors comme ça, tu as tes petites habitudes avec Monsieur O'Malley-aux-merveilleux-cocktails, se moqua Severus, je ne savais pas.»
Je me tournai vers lui, haussant un sourcil.
«-Ça te pose un problème ? répliquai-je, un sourire taquin aux lèvres.»
Le sorcier leva les yeux au ciel pour toute réponse. Réprimant une envie de le taquiner davantage, je brandis mon verre dans sa direction :
«-À la tienne ! m'exclamai-je en français.»
Puis, je portai la boisson à ma bouche et ingurgitai une gorgée de cocktail - par Merlin, il était toujours aussi délicieux ! Voyant Severus hésiter à m'imiter, je le pressai, amusée :
«-Ce n'est pas du poison, ne t'inquiète pas !
-Je préfèrerai ne pas avaler un aphrodisiaque et, au vue de ton regard mielleux, celui-ci a l'air plutôt puissant.»
Je battis plusieurs fois des paupières.
«-Mon regard mielleux ? m'indignai-je sur un ton léger, dis-donc tu ne serais pas à un peu jaloux, Severus ?»
À nouveau, il ne répondit rien et finit par goûter au cocktail. S'il en appréciait - ou non d'ailleurs - la saveur, il n'en fit rien paraître. Je le soupçonnai de rester muet afin de ne pas admettre que les cocktails de Jacques étaient véritablement merveilleux. D'un regard inexpressif - du moins en apparence, il détaillait les environs, s'attardant quelques secondes en direction du comptoir, où O'Malley était engagé dans une discussion animée avec un client.
«-Tu viens ici souvent ? se renseigna finalement Severus, en reposant son verre sur la table.»
Je me tournai dans sa direction.
«-Assez régulièrement, oui. Du moins, quand j'ai le temps. Ça me permet de quitter un instant l'ambiance oppressante imposée par l'Union et puis... je renoue par la même occasion avec les racines de ma mère, à défaut de pouvoir la voir en vrai.»
À la pensée de mes parents, une boule se forma dans ma gorge. Ils avaient pris la décision de regagner la France il y avait un an, juste après les évènements qui avaient mis à feu et à sang la Coupe du Monde de Quidditch. Depuis, je n'avais échangé que quelques lettres avec eux par hibou, sans avoir eu la possibilité de les rejoindre à l'étranger. Severus dut sentir ma nostalgie car il s'approcha de moi et j'en profitai pour me coller contre lui, me sentant immédiatement mieux grâce à cette proximité. S'il n'était pas très à l'aise lorsqu'il s'agissait d'exprimer quelques gestes tendres en public, il répondit néanmoins en passant un bras autour de mon épaule.
Je finis par lever les yeux vers Severus :
«-Et toi ? La rentrée s'est passée comment ?»
Le concerné soupira de façon exagérée :
«-J'hésite encore entre déprimante, désespérante et affligeante.»
Je me décollai de lui et plantai mes yeux dans les siens.
«-Laisse-moi deviner : Harry t'a déjà causé des torts.»
Je sus que j'avais vu juste lorsque ses prunelles s'assombrir.
«-Potter est un idiot,vmaugréa-t-il, et arrogant par-dessus le marché.
-Harry est loin d'être idiot, le rectifiai-je doucement, et pour le peu que je l'ai côtoyé, il n'a pas exprimé beaucoup d'arrogance en ma présence.»
Il évita mon regard, ne croyant pas un mot de ce que je disais.
«-Le portrait craché de son père, poursuivit-il, têtu. Et si encore il n'était pas accompagné de tous ces Gryffondors prétentieux...
-Être professeur dans la plus grande école de sorcellerie d'Europe, si ce n'est du monde, est donc si pénible que ça ?
-Si tu savais... soupira pathétiquement Severus, heureusement que tu es là...»
Ses joues se rosirent à cet aveu et il fit naître une douce chaleur au creux de mon ventre. Le regard de Severus était perdu dans le mien.
-À quoi tu penses ? demandai-je dans un murmure.»
Mon compagnon était sur le point de me répondre quand soudain, le lecteur de la Gazette décida de s'en aller, laissant derrière lui son journal. Mon regard fut attiré par la première page et je faillis lâcher un cri de stupeur en déchiffrant l'entête :
"SIRIUS BLACK, VU A LA GARE DE KING'S CROSS, DES SORCIERS TÉMOIGNENT".
***
«-JE LE SAVAIS ! JE LE SAVAIS !
-Mme Weasley...
-JE LE SAVAIS !
-Molly, chérie...
-JE-LE-SAVAIS !
-Molly, je vous en prie, calmez-vous !»
La voix à la fois claire et intransigeante d'Albus Dumbledore eut raison de la colère de Molly et la femme, le visage empourpré, se tut, non sans fusiller du regard Sirius au passage qui, pour une fois, ne faisait pas le malin et était ratatiné au fond de sa chaise, les épaules basses.
Au centre de la table, autour de laquelle tous les membres de l'Union étaient installés, trônait un exemplaire de la Gazette du Sorcier, ouvert sur la première page, qui montrait une photo en noir et blanc d'un incarcéré - ou plutôt d'un ex-incacéré - de la tristement célèbre prison d'Azkaban. Le même homme se tenait à l'autre bout de la table, louchant d'un œil mauvais quoiqu'inquiet, en direction du journal.
Personne ne pipait mot ; Remus, installé aux côtés de son ami, affichait son habituelle mine tracassée et la pleine lune approchant, il était plus pâle que jamais ; Tonks arborait des cheveux d'un gris fade reflétant son état tourmenté ; Betty, un calepin en main, regardait fixement Dumbledore, attendant qu'il se décide de parler ; ce dernier présidait l'assemblée, nous couvant tous de son regard poignant ; Severus était à sa droite, n'ayant pas daigné s'asseoir parmi nous, les lèvres pincées mais le visage inexpressif - du moins l'était-il de façade.
«-La situation n'est pas à prendre à la légère, continua Dumbledore, d'un ton grave mais parfaitement maîtrisé. Néanmoins - il accorda un regard en direction de Molly - nous ne devons pas céder à la panique. Il y a plusieurs éléments dont j'aimerais vous faire part aujourd'hui. Tout d'abord, au sujet des nouvelles rapportées par la Gazette.»
Son regard s'attarda un instant sur le fautif, qui le soutint sans ciller, peu impressionné.
«-Il semblerait que M. Malefoy ait eu vent de l'escapade de M. Black à King's Cross.»
Alastor laissa échapper un insulte cinglante à l'égard du Mangemort, que Dumbledore ignora.
«-Le fait est que nous ne pouvons plus nous permettre un écart de plus, cela impliquant quelques concessions de la part de certains.»
Le vieil homme ne se priva pas d'une œillade insistante en direction de Sirius qui répondit d'un regard contrit mais se garda de faire une remarque. L'expression sévère que Remus lui adressa y fut peut-être pour quelque chose.
«-Ensuite, j'ai eu vent de l'enquête menée par le bureau des Aurors concernant M. Connoly. Les codes qui lui étaient demandés concernaient en réalité des coordonnées qui mènent dans entrailles du Ministère, aux Départements des Mystères, ce qui confirme les soupçons de M. Lupin quelques semaines plus tôt.»
Le concerné releva la tête à sa mention, les joues légèrement rougies, alors que Dumbledore se tournait vers lui.
«-Voldemort est intéressé par quelque chose que possède le Ministère, quelque chose dont je vais vous révéler l'existence aujourd'hui.
Tous avaient les yeux rivés sur Dumbledore, personne n'osait parler et la tension qui régnait dans la pièce rendait l'atmosphère suffocante, d'autant que peu d'entre nous n'avait le cran de prononcer à voix haute le nom de Vous-Savez-Qui, contrairement au vieil homme. Le directeur de Poudlard, toujours aussi détaché, s'enquit :
«-Voldemort recherche une prophétie.»
Je me raidis et, d'instinct, me tournai vers Severus. Se pourrait-il qu'il s'agisse de LA prophétie dont ce dernier m'avait parlé à Godric's Hollow ? En tout cas, le sorcier sembla soudain fébrile, comme si la simple évocation de la fameuse prophétie était source de malaise chez lui. Je pus conclure sans trop de risque qu'il s'agissait bel et bien de la même prophétie.
«-Une prophétie ? demanda prudemment Kingsley mais dont les trémolos dans sa voix grave laissaient suggérer son impatience.»
Dumbledore eut un signe imperceptible de la tête avant de poursuivre :
«-Oui M. Shacklebolt, vous avez bien entendu. Une prophétie, qui concerne Voldemort et...»
Le vieil homme, jusqu'à là sûr de lui, eut un instant d'hésitation, quelques secondes à peine mais un voile passa devant ses yeux cristallins.
«-Et Harry Potter, acheva-t-il.»
Sirius releva brutalement les yeux, son visage désormais animé d'une expression paniquée. Dumbledore ne lui laissa pas le temps de s'exprimer sur la question :
«-Par mesure de sécurité, je ne peux pas vous dévoiler le contenu de cette prophétie mais ce que vous devez savoir est la chose suivante : Voldemort ne doit jamais, au grand jamais, avoir accès à cette prophétie. Aussi, notre devoir est de la protéger des mains des Mangemorts, et ceci coûte que coûte.
-Comment peut-on aider si on ne sait même pas de quoi elle parle ? rétorqua Sirius, visiblement avide d'en savoir plus.
-Qu'est-ce que tu n'as pas compris dans «par mesure de sécurité» au juste, Black ? répondit Severus d'une voix mauvaise.
-Severus, je vous en prie, le rabroua aussitôt Dumbledore.»
Docile, le professeur ne répliqua rien même s'il mourait d'envie de le faire. Les poings serrés, le corps tendu à l'extrême, il écouta la suite du discours de Dumbledore.
«-La mission de l'Union est la suivante : nous allons organiser des tours de garde et nous rendre tour à tour au Département des Mystères afin de garder un œil sur cette prophétie. Les professeurs Poudlard seront exemptés de cette tâche. Je compte sur le volontariat des autres membres.»
Aussitôt, plusieurs sorciers se proposèrent, dont Kingsley, Tonks, Remus, Emmeline, Hestia et Alastor. Je ne tardai pas à me dévouer également et Arthur Weasley fit de même.
«-Arthur, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée, s'alerta Molly, c'est dangereux...
-Molly chérie, c'est mon devoir d'agir au nom de l'Union. Ne t'en fais pas pour moi, je connais le Ministère comme ma poche.
-J'ai déjà perdu Percy, murmura la pauvre femme d'une voix tremblante, je ne veux pas te perdre ensuite...»
Arthur passa un bras autour des épaules de sa femme et murmura, d'une voix rassurante :
«-Rien ne pourra m'arriver là-bas...»
Et pourtant, Merlin savait que Molly Weasley avait raison de s'inquiéter...
☆☆☆
Hellooo mes petits Botrucs !
Comment allez-vous ? Vous êtes en vacances ? Moi non ahah, la semaine prochaine seulement.
Donc voilà un chapitre relativement calme, mais qui annonce les prochains évènements... et oui, nous sommes en plein cœur du cinquième tome de la saga ! Je vous laisse donc deviner sans trop de difficulté ce qu'il peut se passer dans la suite... quoiqu'elle puisse vous surprendre quelque peu ^^
En bref : qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Qu'attendez-vous pour la suite ? Qu'aimeriez-vous voir de différents par rapport à l'intrigue originale ? N'hésitez pas à commenter pour me faire part de vos idées !
Autre chose : la talentueuse rodnoffyrg a réalisé une magnifique illustration pour ma fanfiction, que je vous mets ici pour que vous puissiez l'admirer :
N'est-ce pas magnifique ?
Personnellement, je suis en admiration totale devant ! Merciii beaucoup ♡
Voilààà, ce sera tout pour aujourd'hui ! À dimanche prochain et passez une bonne semaine !
*PetitKoala*
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