Chapitre 34 - L'aide

Samedi 4 Juin 1988 :

Dès lors, des éclairs se mirent à voler au travers de la salle, tandis qu'une vague d'agitation saisit les rangs des Mangemorts. Certains d'entre eux transplanèrent immédiatement, d'autres engagèrent l'attaque. Greyback me lâcha d'un geste sec et je tombai au sol, déséquilibrée. Me redressant au plus vite, je me mis à chercher des yeux ma baguette mais ne la vis nulle part. Je tournai la tête en direction de la porte d'entrée pour y voir s'étaler une dizaine de sorciers - des Aurors, sans aucun doute - leurs baguettes brandies, prêts à en découdre. Non loin de moi, une sorcière brune portant une longue robe violette avait déjà pris en joug Greyback qui répliquait férocement, des éclairs verts jaillissant de sa baguette. Un regard circulaire à la pièce m'apprit qu'une minorité de Mangemorts avait déjà pris la fuite, Selwyn en tête, à en juger par les vitres brisées et les débris qui jonchaient le sol. Mon pouls battait contre mes tempes et l'adrénaline se mêlait à ma peur, coulant à flots dans mes veines. Soudain, un Maléfice me frôla le visage et entailla ma joue. Je fis volte-face et découvris un Mage Noir à quelques mètres de moi, sa baguette pointée dans ma direction. Je me figeai sur place, n'ayant rien pour me défendre à portée de main. Heureusement pour moi, un sorcier survenant sur ma droite immobilisa le Mangemort en un coup de baguette avant de m'empoigner par le bras.

«-Miss Lynch, c'est bien vous ?»

Je hochai la tête, confuse.

«-Nous avons ordre de Dumbledore de vous reconduire à Poudlard. La mission est terminée.»

Le sorcier me poussa soudain sur le côté, m'épargnant des griffes d'un Mangemort qui finit par s'enfuir sous les coups avisés de l'homme. Cette altercation me laissa le temps d'assimiler les paroles du sorcier et je demandai :

«-Ordre de Dumbledore ? Vous n'êtes pas du Ministère ?

-Pas tout à fait, non, dit simplement le sorcier tout en maîtrisant un Mangemort qui finit par s'écrouler sur le sol, inconscient.»

Je regardai autour de moi pour voir que le combat venait tout juste de se terminer. La salle était désormais sens dessus dessous mais aucun blessé ou mort ne semblait être à déplorer. Quelques Mangemorts étaient au sol, ligotés et inconscients. Tous les autres avaient pris la fuite. Les sorciers qui étaient intervenus se chargeaient des prisonniers et celui qui m'avait sauvé in extremis me demanda quelque chose que je n'entendis pas.

Severus était en pleine conversation avec un des sorciers et je m'approchai d'eux, curieuse de savoir ce qu'ils se disaient :

«-... de Dumbledore, expliquait le Maître des Potions d'une voix grave, le corps raide, encore marqué par les récentes douleurs. Comment êtes-vous arrivés jusqu'ici ?»

Son interlocuteur, un petit sorcier chauve entre deux âges s'enquit, en époussetant d'un geste machinal sa veste émeraude :

«-Nous avons été alerté par Dumbledore, lui-même alerté par... la jeune demoiselle qui vous accompagnait.»

L'homme ne semblait pas s'être aperçu par ma présence car il poursuivit, d'un ton soupçonneux :

«-Que faisait-elle là, d'ailleurs ? C'est une nouvelle recrue pour l'Union ?

-C'est plus compliqué, se contenta de dire Severus, d'un ton las.»

Puis, il parut me voir car se détourna de l'homme à qui il parlait. Ce dernier suivit son regard et, me voyant, ouvrit la bouche pour parler, mais fut coupé par Severus :

«-Il est temps pour nous de rentrer.»

Il s'adressa ensuite au petit sorcier :

«-Je ferais un rapport à Dumbledore concernant l'altercation.»

Sans attendre de réponse de la part de son interlocuteur, il tourna les talons et rejoignit la sortie. À la tête consternée du petit bonhomme, il ne sembla pas apprécier le comportement du Maître des Potions. Je restai un instant au milieu de la pièce, ne sachant que faire mais fus interpellée par la voix impatiente de Severus :

«-Ne traînons pas, Lynch !»

Alors, docilement, en adressant quelques regards aux sorciers qui m'entouraient et m'avaient sans aucun doute sauvé la vie, je sortis de la pièce, un millier de questions tournoyant dans mon esprit.

Nous marchâmes une dizaine de minutes dans les rues désertes et je constatai que le boitement de l'homme avait repris, sûrement à cause de la torture qu'il avait subi. J'aurais peut-être dû m'inquiéter de son état de santé mais, à la place, je dis, d'une voix blanche :

«-On ne les a pas remerciés. De nous avoir sauvé la vie.»

Severus haussa les épaules, indifférent, avant de faire remarquer :

«-C'était leur objectif.

-Qui sont-ils, au juste ?

-Plus tard.»

Réprimant un soupir de frustration, je me tus, me contentant de marcher dans les pas du sorcier. Le manque d'informations que j'avais me faisait perdre la tête et je n'avais qu'une seule envie : que l'on me raconte tout, tout ce qu'il y avait autour de cette mission, autour de Dumbledore, de Severus et de ces sorciers, surgis de nulle part. Je voulais savoir.

Severus finit par marquer une pause et je reconnus l'endroit où nous avions transplané. Je brisai le silence :

«-Laisse-moi faire. Tu es blessé.»

Je ne savais même pas pourquoi je l'avais tutoyé. Les mots étaient sortis tout seul de ma bouche, sans que je ne puisse les contrôler. Le sorcier me regarda un instant sans rien dire et je fus incapable de déchiffrer l'expression dans ses yeux.

«-Ce n'est rien, rétorqua-t-il, je peux le faire moi-même.»

Lui tenant tête, je tendis ma main, d'un geste certain. Il parut hésiter une seconde avant de se résigner. Sa main pâle rencontra une nouvelle fois la mienne et nous quittâmes les lieux.

***

Je n'avais jamais vu Albus Dumbledore aussi agité. Suite au résumé fait par Severus sur les récents évènements, il faisait les cent pas dans son bureau, une main frottant machinalement son menton et murmurant dans sa barbe des remarques que ni le Maître des Potions, ni moi-même ne pouvions entendre. Je lançai un regard à Severus mais celui-ci garda les yeux rivés sur notre supérieur, le visage fermé.

Finalement, après cinq minutes à voir Dumbledore enchaîner les aller-retours, le vieil homme s'arrêta, se tourna vers nous, nous toisa longuement tour-à-tour, puis dit, d'une voix à peine plus forte qu'un murmure :

«-J'aimerai adresser quelques mots à Severus. Miss Lynch, si vous voulez bien quitter mon bureau. Je vous prie d'aller voir Pompom, elle vous donnera de quoi vous remettre sur pied le plus rapidement possible.»

Je voulus rétorquer mais je n'en eus pas le courage. À contre-cœur, je sortis de la salle, ayant encore l'impression que l'on me cachait la vérité. Pourquoi m'inclure dans une mission dont je ne connaissais rien ? Je descendis à pas lents les escaliers en colimaçon, ne prenant même pas la peine d'écouter à travers la porte. Je n'avais pas vraiment envisagé d'aller voir Pompom Pomfresh, n'étant moi-même pas blessée, mais mes pas m'y conduisirent malgré moi. Je me retrouvai donc à marcher hasardeusement entre les lits de l'infirmerie, tous vides, quand une voix douce retentit derrière moi :

«-Elladora Lynch ! Je peux vous aider ?»

Je me retournai et vis la sorcière en charge de l'infirmerie s'approcher de moi, un sourire sincère aux lèvres.

«-Heu... oui. Je...»

Je fus incapable de terminer ma phrase car, en réalité, je ne savais pas ce dont j'avais besoin. Finalement, ce fut Pompom qui brisa le silence :

«-Non, ne dîtes rien, je sais ce qu'il vous faut : une puissante Potion de Sommeil pour vous faire passer une nuit sans rêve et reposante.»

J'étais partagée entre le soulagement qu'elle ne me pose pas de questions indiscrètes sur les raisons de ma visite et la curiosité de savoir comment elle savait ce dont j'avais besoin sans même m'ausculter. Avant même que je ne puisse formuler ma question, la sorcière s'affairait déjà dans ses armoires pour en tirer une fiole, contenant la dite-Potion.

«-Tenez, dit-elle en me tendant le contenant en verre. Une bonne nuit de sommeil pour récupérer.»

Elle m'adressa un sourire complice et je me demandai si elle n'était pas au courant de tout ce qu'il se passait autour de Dumbledore. Je préférai ne pas faire de commentaire là-dessus et murmurai un bref «merci», tout en m'emparant de la potion. Je m'apprêtai à quitter les lieux afin de rejoindre mes appartements quand je demandai soudain :

«-Est-ce que je pourrais avoir une deuxième potion ? Pour... le professeur Rogue.»

Là encore, si Pompom se questionnait sur ce qu'il y avait derrière ma requête, elle ne fit rien paraître et se contenta d'approuver :

«-Oui, j'ai ce qu'il lui faut.»

Je la suivis jusqu'aux armoires où étaient entreposées tous les potions et autres breuvages à usage médical et mon regard se posa distraitement sur l'étagère où Pompom s'était arrêtée pour chercher la fiole adéquate à ma demande. Je remarquai que chaque petite bouteille était marquée d'une étiquette sur laquelle était inscrite le nom du breuvage, ainsi que son destinataire. Toute la rangée que la sorcière examinait portait l'inscription : «S. Rogue». Je ne pus m'empêcher de questionner la femme, rattrapée par ma curiosité :

«-Il a toute une étagère réservée ?»

Pompom se tourna vers moi, une fiole à la main et répondit, d'un air vague :

«-Disons qu'il est un patient régulier... et ceci depuis qu'il est arrivé à l'école.»

Un silence accueillit sa déclaration et je ne sus que penser de ce qu'elle venait de dire. Que signifiait «depuis qu'il est arrivé à l'école» ? Était-il malade ? Son état nécessitait-il un traitement régulier ? Pourtant, je n'avais pas l'impression que c'était le cas... Le raclement de gorge de la sorcière me fit revenir sur terre et elle dit, en m'offrant la deuxième fiole de Potion du Sommeil :

«-D'ailleurs, vous pourriez lui dire de passer me voir dès que possible ?

-Heu... oui, oui, bien sûr. Merci beaucoup, Pompom.»

***

«-J'ai peut-être le droit à quelques réponses maintenant.»

Je m'assis en face de Severus, qui était debout au milieu de la pièce. Il soupira, déposa la fiole de potion que je venais de lui donner sur son bureau avant de se tourner vers moi, me gratifiant d'un regard impénétrable.

«-Posez vos questions.»

Je fus surprise de sa réaction, m'attendant presqu'à me faire réprimander et jeter dehors sans qu'aucune réponse ne me soit apportée. Aussi, je restai un moment sans rien dire, tant de questions tournoyant dans ma tête que je peinais à faire le tri. Finalement, je l'interrogeai sur la plus évidente :

«-Qui étaient-ils, ces sorciers qui nous ont tirés des griffes des Mangemorts ? Ils ne travaillent pas pour le Ministère, mais alors pour qui ? Dumbledore ?»

Severus eut une grimace qui ressemblait vaguement à un rictus avant de me répondre, sarcastique:

«-Vous avez déjà les réponses à vos questions. Que diable voulez-vous donc ?»

Ne me laissant pas démonter, je repris :

«-Mais... qui sont-ils exactement ?

-Ils viennent d'horizons divers... des employés du Ministère, quelques Aurors, des boutiquiers, des retraités... des professeurs.»

Il avait marqué une hésitationsur les deux derniers mots mais je ne le remarquai qu'à moitié, l'esprit tourmenté par les mille-et-une interrogations qui y fleurissaient.

«-Que font-ils ?»

Severus se cala contre son bureau et expliqua, d'une voix calme et dénuée d'émotions :

«-Ils se battent contre un ennemi commun. Toujours le même. L'Ordre du Phénix a été dissout peu de temps après... la chute de Vous-Savez-Qui. Dumbledore l'a réinstauré au début de l'année, dès les premières mutineries Mangemorts. Il craignait que... ces attaques annoncent Son retour.

-L'Ordre du Phénix ? m'étonnai-je, entendant pour la première fois ce nom.

-Oui, c'est comme ça qu'ils se faisaient appeler...

-Faisaient ? Ce n'est plus le cas ?»

Je me mordis la lèvre inférieure en remarquant le froncement de sourcil du sorcier, qui n'appréciait visiblement pas d'être coupé dans son discours. Étonnement, il ne prit pas la peine de me reprendre et continua, imperturbable :

«-À sa restauration, de nombreux membres ont préféré changer le nom de l'Ordre, histoire de... repartir sur du neuf, ne pas refaire les mêmes erreurs que dans le passé. C'est ainsi que l'Ordre du Phénix a laissé place à l'Union du Phénix, afin de souligner la cohésion des membres... À mon humble avis, ce changement de nom est stupide.

-Alors..., commençai-je, ententant de rassembler tous les éléments que j'avais à ma disposition pour faire enfin exploser la vérité. C'est une sorte de... d'organisation clandestine ?

-On peut dire ça. Le Ministère n'est pas au courant de son existence.

-Mais pourquoi ? Je veux dire, il serait d'une grande aide, non ? Il pourrait fournir des hommes et de l'argent...

-Premièrement, par mesure de prudence : moins de personnes sont au courant de l'existence de l'Union, plus les chances des Mangemorts de trouver notre existence est faible. Et deuxièmement, parce que le Ministère a peur. Il fait tout ce qui est en son pouvoir pour que la rumeur de Son retour ne se propage pas. Et dans ses inlassables efforts pour étouffer une affaire qui, de toute manière, finira par le surpasser, il n'est pas efficace dans les priorités. Tu as déjà entendu parler de Betty Braithwaite ? (Devant mon air dubitatif, il précisa :) La journaliste de La Gazette, celle qui a écrit les articles sur les attaques Mangemorts. Elle a été suspendue. Et depuis, plus aucune ligne du journal n'évoque les attaques. Il ne permettrait jamais qu'une organisation secrète ne se crée et combatte un danger qu'il soutient comme inexistant.

-Pourtant, le Ministère envoie bien des Aurors sur le terrain, il a conscience du danger qu'il combat, fis-je remarquer, ne saisissant pas bien la complexité du problème.

-Ce que le Ministère renie, c'est que ce réseau pourrait être le prémice de quelque chose de bien plus grave. Il traîte les attaques comme des cas séparés et Braithwaite avait pris la liberté de les lier entre eux mais le Ministère l'a fait taire. Il ne veut pas risquer que des rumeurs ne se propagent trop rapidement.»

Il y eut un long silence, pendant lequel je fixai d'un oeil vide le sol sombre des cachots. Ainsi, j'étais entrée sans le savoir dans une organisation illégale, composés de simples sorciers combattant pour le plus grand bien. Je ne savais pas trop quoi penser. Lorsque le silence devint aussi oppressant que le regard du Maître des Potions sur moi, je poursuivis, d'une voix hésitante :

«-Et t... vous ? Vous faîtes parti de l'Union ?

-En quelques sortes, oui, dit-il, sans plus s'étendre, ce qui ne fit qu'éveiller ma curiosité.

-Et moi ? finis-je par lancer, en relevant la tête et soutenant le regard de mon collègue. Je suis où dans tout ça ? Je veux dire... je ne fais pas vraiment partie de l'Union, si ?»

Severus haussa les épaules, comme si ça n'avait pas d'importance.

«-Disons que vous êtes en période probatoire.

-Pourquoi ?

-Parce que l'organisation a besoin de membres, expliqua-t-il et je compris au ton de sa voix que mes questions commençaient à l'ennuyer ; pourtant, il prit le temps de détailler sa pensée : À sa reformation, une majorité des anciens membres n'ont pas répondu présents. Par peur peut-être de revivre une deuxième guerre des sorciers. Et aujourd'hui nous avons plus que jamais besoin de soutien. Les rangs Mangemorts grossissent de jour en jour. Si personne ne suit le mouvement à l'opposée, nous n'avons plus aucune chance.»

-Pourquoi Dumbledore ne m'a rien dit en m'incluant à la Mission ?

-Je suppose qu'il voulait tout d'abord s'assurer de votre réel engagement sur le terrain.»

Je hochai la tête, alors qu'une dernière question me brûlait les lèvres :

«-Et maintenant ? Il vous a donné l'autorisation de me dire tout ça ?

-Non, avoua Severus à mi-voix.

-Alors pourquoi l'avoir fait ?

-Votre inlassable curiosité aurait fini par le comprendre, de toute manière.»

Je ne pus réprimer un sourire devant ce constat pour le moins pertinent et j'étais prête à parier que la lueur qui avait illuminé pendant une fraction de secondes le visage du sorcier en était un aussi, à sa façon.

☆☆☆

*PetitKoala*

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top