Chapitre 34 - Il ne faut pas jouer les héroïnes
Mardi 2 Septembre 1997 :
Assise à mon bureau, j'essayai vainement de me concentrer sur les leçons que j'allais dispenser aujourd'hui, sans y parvenir. J'avais passé une terrible nuit, le discours sans état d'âme de Severus, laissant présager de mauvais augures au sein du château, ne cessant d'occuper mon esprit.
Secouant vigoureusement la tête pour chasser les idées noires qui envahissaient malgré moi mes pensées, je me replongeai dans mon manuel de potions, tachant de me remémorer les différents noms des ingrédients de la Potion que j'allais apprendre à mes septièmes années d'ici une dizaine de minutes. Merlin soit loué, je commençais aujourd'hui à 10h, ce qui m'avait permis de ressasser un peu mes cours ce matin, afin d'être fin prête pour ma première heure. D'ailleurs, j'entendis des bruits étouffés provenant du couloir, signe que les élèves commençaient à arriver. Un rapide coup d'œil à mon emploi du temps m'apprit que j'avais cours avec les étudiants des quatre maisons confondues, puisque seulement un petit groupe de septième année s'était décidé à suivre l'enseignement de Potions pour leur ASPICs.
Après avoir inspiré un bon coup pour me donner contenance, je me levai et me dirigeai vers la porte d'entrée. Arrivée à sa hauteur, j'entendis des brides de conversation à voix basse que je ne parvins pas à déchiffrer. Lorsque j'ouvris la porte, les élèves les plus proches - un groupe de Serdaigles et de Poufsouffles - sursautèrent et je vis l'un d'entre eux se dépêcher de fourrer quelque chose dans sa poche, dont je ne pus distinguer qu'un éclat doré. Mettant ma curiosité de côté, j'adressai un sourire à mes élèves, puis les invitai à entrer.
Une fois qu'ils furent tous installés, je leur prononçai un discours sur le cours de Potions, les ASPICs, ainsi que toutes les banalités de début d'années, avant de les inviter à poser leurs questions, s'ils en avaient.
Tout d'abord, personne ne se manifesta et un silence religieux envahit la salle. Je m'apprêtai à enchaîner sur autre chose lorsqu'une main se leva. Il s'agissait du garçon de Poufsouffle qui avait dissimulé quelque chose dans sa robe dans le couloir.
« -Comment t'appelles-tu ? lui demandai-je aimablement.
-Ernest Macmillan. Mais tout le monde m'appelle Ernie.
-Et bien, Ernie. Je t'écoute. Quelle est ta question ? »
Il me toisa du regard, sans qu'un seul sourire ne vienne illuminer son visage. Refroidie par son comportement défiant, je ne fis pourtant rien paraître sur mon visage, me contentant de garder un air détendu.
« -Je me demandais si les rumeurs étaient vraies... vous concernant, finit-il par avouer d'un ton grave. »
Des murmures à la fois inquiets et inquisiteurs accueillirent sa déclaration et tous les regards se mirent à toiser successivement le jeune homme et moi-même, attendant visiblement ma réponse. Ernie, pas le moindre du monde impressionné, ne me lâcha pas du regard.
Sa question souleva une vague de tension dans la salle de classe, autant qu'à l'intérieur de moi. Bataillant contre moi-même pour ne rien laisser paraître, je demandai, d'une voix que je voulais parfaitement calme :
« -Et quelles sont ces rumeurs, Monsieur Macmillan ? »
Si j'avais espéré que le sorcier se montre hésitant face à ma répartie, ce ne fut malheureusement pas le cas. Très loin de se laisser démonter et ce, malgré les airs angoissés de ses camarades, il se redressa sur sa chaise et me répondit, d'un ton que je ne saurais distinguer d'agressif et impassible :
« -Vous savez, celles au sujet de Rogue et vous. Comme quoi vous auriez notamment trahi l'Union du Phénix en participant à l'assassinat de Dumbledore. »
Des voix scandalisées s'exclamèrent aussitôt :
« -Ernie ! »
Le Poufsouffle ne broncha pas, bien qu'il se soit tout de même raidi sur sa chaise. En d'autres circonstances, j'aurais certainement admiré son courage et sa détermination, mais ses accusations me firent beaucoup trop mal pour que je pense du bien de ce sorcier. Pourtant, j'aurais dû me réjouir : la mascarade de Severus fonctionnait à merveille. Mais je ne supportais pas le rôle que l'on m'attribuait là-dedans. Certes, en restant au côté de Severus, je savais bien ce que je risquais, cependant il y avait une grande différence entre accepter des conséquences qui nous semblent encore lointaines et de les prendre en pleine figure, comme à cet instant. Je l'apprenais aujourd'hui à mes dépends.
Puisant dans mes forces les plus profondes pour ne pas montrer ma blessure, je répliquai :
« -Disons que c'est plus compliqué que cela. Mais si vous voulez en savoir plus, venez me voir à la fin de l'heure, je me ferais un plaisir de vous expliquer. »
Je ne savais pas où j'étais allée chercher toute cette assurance, mais ça eut le mérite de faire taire Ernie, qui s'adossa négligemment contre son dossier, en me fusillant du regard. J'inspirai longuement. Le cours pouvait reprendre.
*
Ernie Macmillan fut le premier à quitter la salle de cours, à peine eussé-je annoncé la fin de la leçon. Il n'avait pas ouvert la bouche depuis son intervention en début du cours et s'était contenté de prendre consciencieusement note de ce que je disais, tout comme la majorité des étudiants par ailleurs. Bien loin des élèves aimables et motivés à qui j'avais eu la chance d'enseigner il y avait quelques années, les septièmes années semblaient méfiants et très concernés par les évènements qui tourmentaient notre monde. Je ne pouvais pas réellement leur en vouloir : Severus était haï de tous à l'école, et, par conséquent, moi avec.
Ce fut donc avec appréhension que j'attendis mes prochains élèves, me demandant comment ils allaient se comporter à mon égard. Seraient-ils, eux aussi, méfiants envers moi ? Allai-je devoir passer une année à batailler pour obtenir la confiance de mes élèves ? Seulement y arriverai-je ? Abattue par cette constatation, je me promis au moins de faire tout ce qui était en mon pouvoir pour les protéger, et leur enseigner de mon mieux les Potions. C'était le moins que je pouvais faire.
Pas encore familiarisée avec mon planning, je lançai un regard dans sa direction pour apprendre que mon prochain cours, qui commençait dans cinq minutes désormais, était avec des premières années. Échangeant mon manuel de dernière année avec celui du programme du premier cycle, je me dirigeai ensuite vers la porte d'entrée, prête à accueillir les étudiants. Cependant, lorsque j'ouvris la porte, aucun élève n'était dans le couloir.
Intriguée, je sortis et fis quelques pas hors de la salle mais il n'y avait aucune trace de première année. Rebroussant chemin, je m'apprêtai à rentrer dans la classe de Potions quand des bruits atténués se firent entendre non loin de là. Je tournai la tête pour voir apparaître un groupe d'étudiants, tous collés les uns aux autres, s'avancer à pas tremblants en direction de ma salle. Je n'eus pas besoin de voir leur visage pour constater que quelque chose n'allait pas : les simples murmures paniqués mêlés à des sanglots me firent comprendre la gravité de la situation. Alertée, je me ruai vers eux.
« -Par Merlin, que se passe-t-... ? »
La fin de ma phrase mourut sur mes lèvres quand j'aperçus l'élève au centre du petit groupe : c'était un jeune homme de Serdaigle, difficilement soutenu par deux de ses camarades. Le visage blême, les yeux rougis par les larmes et le corps tremblant si fort que ses membres le soutenaient à peine, il pleurait à chaudes larmes, entourés par de jeunes sorciers en état de choc.
Tachant de dissimuler la panique qui s'était insinuée en moi, je m'agenouillai en face du jeune homme et lui demandai, d'une voix douce :
« -Comment tu t'appelles ? »
Il parvint à bredouiller, entre deux sanglots :
« -M... Mari... us Pont... Pontdarcy.
Je lui tendis une main qu'il regarda d'abord avec méfiance puis finit par empoigner. Je sentis ses tremblements se répandre contre ma paume au contact de nos mains. Le soutenant du mieux que je pouvais, je l'emmenai dans la classe, non sans m'être d'abord retournée vers les autres élèves et leur avoir dit :
« -Venez avec moi. Vous serez en sécurité dans ma classe. »
*
« -Marius, raconte-moi ce qu'il t'est arrivé. »
Quelques gorgées de Potion Calmante à l'appui, le jeune sorcier de première année avait fini par s'apaiser et ses sanglots avaient fini par laisser place à quelques reniflements timides. Assise à ses côtés, je lançai un regard à ses camarades, répartis docilement parmi les pupitres : silencieux, ils fixaient leur confrère avec inquiétude et dans leurs yeux brillaient un traumatisme qui ne s'effacerait probablement jamais totalement. Je n'osai pas imaginer ce qu'ils avaient pu vivre pour en être à ce point marqués. En réalité, j'avais bien quelques hypothèses, mais je préférais ne pas penser au pire. Prenant une inspiration tremblotante, Marius Pontdarcy finit par trouver le courage nécessaire pour expliquer, d'une petite voix encore enrouée par ses pleurs récents :
« -Nous avions cours avec... de... Magie Noire... »
Serrant les dents, je fis mine de rien laisser paraître alors que le petit venait tout juste de confirmer mes pires craintes. Il poursuivit, avec difficulté :
« -Il a dit... qu'il allait nous enseigner... ces sorts qui sont interdits... il a dit que... c'était important... qu'on devait savoir les faire... et ensuite... il a dit qu'il avait besoin de... quelqu'un pour tester les sorts... il a dit que je n'avais pas ma place ici... parce que mes parents sont des Moldus... puis il a... il a... »
Un sanglot s'échappa de sa bouche et le pauvre sorcier se remit à pleurer. Instinctivement, je le pris dans mes bras et lui murmurai :
« -Tout va bien se passer, Marius. Tu es très courageux. Et tu as ta place ici, ne doute pas un seul instant de cela. »
Plusieurs minutes plus tard, il réussit à sécher ses larmes puis je l'invitai à rejoindre ses camarades, ce qu'il fit d'un pas mal assuré. Lançant un regard à l'ensemble de la classe, j'avalai difficilement ma salive, ma gorge nouée n'aidant pas, puis dis :
« -Ce qu'il s'est passé pendant le cours d'Art de la Magie Noire n'est pas normal. Je vais en référer au Directeur et je peux vous assurer que cela ne se reproduira plus. Si quoique ce soit se passe lors de vos prochains cours avec les Carrow, je veux que vous veniez m'en parler, ou que vous en parliez aux professeurs McGonagall, Chourave ou Flitwick - ils sont de votre côté et vous protégeront. Nous ne laisserons pas les Carrow faire régner la terreur à Poudlard. Je veux aussi que vous compreniez que ce qu'ils ont pu vous dire - ou ce qu'ils vous diront dans les prochains cours - au sujet de la pureté du sang est faux. Il n'y a pas de sang plus pur, il n'y a pas de sorcier plus méritant. Si vous êtes là, ce que vous avez votre place alors défendez-la. Ne laisser pas les ténèbres avoir raison de vous, vous êtes plus forts que cela. Nous sommes unis et ensemble, nous pouvons leur faire face, nous pouvons vaincre. »
*
Animée d'une rage qui surpassait tout autre sentiment dans mon fort intérieur, je parcourais d'un pas rapide les couloirs de Poudlard, ma baguette fermement serrée dans ma main.
Après que mon cours avait les premières années fut terminé, je les conduisis à la Grande Salle où ils purent retrouver leurs camarades pour manger. Ensuite, ne prenant pas même le temps de repasser par ma classe, je m'étais dirigée vers l'aile du château qui abritait les salles d'Art de la Magie Noire.
Je ne savais pas très bien ce que j'allais dire ou faire une fois arrivée - et étais parfaitement consciente de la dangerosité de mon geste - mais je ne pouvais pas refréner la sourde rébellion qui grandissait en moi : je voulais venger ce pauvre Serdaigle, coûte que coûte. Et alors que mon cerveau me hurlait de faire demi-tour, mon cœur guidait obstinément mes pas vers Amycus Carrow.
Je ne laissai pas le doute s'insinuer en moi et ouvris à la volée la porte qui me séparait de la salle d'Art de la Magie Noire, baguette brandie. Quelle ne fut pas ma stupeur lorsque je vis, en face de moi, Amycus en plein affront avec un étudiant. Le Mangemort tenait l'élève par le col de sa robe et le menaçait de sa baguette, enfonçant négligemment le bout de celle-ci dans la gorge de l'apprenti sorcier. Passée l'effroi, je criai, ma colère reprenant le dessus :
« -LACHE-LE, CARROW ! »
Le Mangemort se tournait lentement vers moi et, s'il était surpris de mon irruption soudaine, il n'en fit rien paraître. Mon regard croisa celui de l'étudiant : c'était l'un des Gryffondors de septièmes années qui n'avait pas bien pris le discours de Severus la veille. Une large entaille barrait son visage rebondi, mais seule la détermination était visible dans ses pupilles. Le ricanement mauvais d'Amycus me fit me tourner dans sa direction.
« -Tiens, tiens, que vient faire la chienne de Rogue ici ? »
Il s'humecta les lèvres, un sourire carnassier figeant sa bouche dans une grimace terrifiante. Je pointai son visage de ma baguette, ne me laissant pas impressionnée. De toute façon, je ne pouvais plus faire marche arrière désormais.
« -Lâche cet élève, répétai-je en puisant dans ma colère pour ne pas laisser ma voix trembler. Lâche-le. »
A ma plus grande surprise, Carrow s'exécuta et repoussa l'étudiant qui parvint néanmoins à garder l'équilibre, les muscles raidis.
« -On poursuivra cela plus tard, Londubat. J'ai présentement une petite conversation à avoir avec Lynch. »
Essuyant fermement le sang qui perlait de sa joue, le dénommé Londubat lança un regard défiant au Mangemort puis prit congé, sans me lancer un seul regard. Dès l'instant où il quitta la pièce, Carrow me prit en joug.
« -Que me vaut donc cette honneur, Lynch ?
-Comment avez-vous osé utiliser des Sortilèges Impardonnables sur un première année ? crachai-je en m'avançant résolument d'un pas. »
Amycus laissa échapper un nouveau ricanement, peu impressionné.
« -Ça leur a plu ? susurra-t-il d'une voix odieusement mielleuse.
-Je ne vous laisserai pas leur faire du mal ! »
Ne pouvant plus réprimer ma rage, je lançai l'attaque. Evidemment, Carrow esquiva sans mal ma boutade et, sans se départir de son rictus mauvais, répliqua à son tour. Je voulus contre-attaquer, mais à ce moment, ma baguette quitta mes mains, à l'instant-même où celle de Carrow s'envola des siennes.
« -ASSEZ. »
Je me retournai d'un geste vif et tombai nez-à-nez avec un Severus impassible, tenant entre ses doigts nos deux armes. Je m'apprêtai à parler mais le directeur, ne m'accordant pas même un regard, se tourna vers le Mangemort :
« -Amycus, avec moi. Immédiatement. »
Sur cet ordre déclamé d'une voix sèche, il quitta la pièce en faisant claquer sa cape derrière lui. Carrow traversa la salle à sa suite et passant à ma hauteur, murmura, d'une voix grinçante :
« -Je ferais en sorte que tu regrettes cet acte, Lynch. Crois-moi sur parole, tu n'aurais jamais dû jouer les héroïnes. »
☆☆☆
Hellooo les amis !
J'espère que le chapitre vous a plus, on commence à découvrir le nouveau visage de Poudlard dans cette partie et il est plutôt sombre. Heureusement, l'espoir n'est jamais loin ^^ Encore une fois, Elladora a joué avec le feu, s'attirant les foudres d'Amycus... et croyez-moi, les menaces de Carrow ne doivent pas être prises à la légère ! L'avenir s'annonce donc menaçant...
Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Du comportement intrépide d'Elladora ? De la réaction des élèves la concernant ?
On se donne rdv dimanche prochain, prenez bien soin de vous d'ici là !
PetitKoala
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