Chapitre 29 - Cours particuliers (1/2)
Samedi 12 Mars 1988 :
Je me levai avec un mal de tête incroyable le lendemain matin, comme si quelqu'un s'était amusé à marteler mon esprit tout au long de la nuit avec une masse. Incapable de bouger, je restai un moment à contempler le plafond, éclairé par la lumière matinale. Je pris ainsi le temps de reconstituer les évènements de la veille et, à mesure que les souvenirs revenaient, les dizaines de questions qui les accompagnaient remontaient aussi, si bien que, cinq minutes plus tard, je décidai de me tirer du lit, la tête bourdonnante d'interrogations. Ce fut quand je vis la minuscule horloge moldue offerte par ma mère que je me rappellai avoir un "rendez-vous" aujourd'hui. Nom d'un troll ! Les aiguilles tendaient déjà vers neuf heures et demi que je n'étais pas habillée !
Désormais parfaitement réveillée, je me ruai sur mon armoire pour en tirer des vêtements que j'enfilai en quatrième vitesse, puis je passai à la salle de bain pour me débarbouiller un peu. Je décidai de sacrifier mon petit-déjeuner et, dix minutes plus tard, je trottai en direction des cachots, me maudissant de ne pas avoir eu l'idée de mettre un réveil. J'avais été tellement épuisée par la journée qu'à peine allongée, je m'étais endormie comme une pierre. Les couloirs étaient parfaitement déserts en ce samedi matin, la plupart des élèves étant dans leurs salles communes ou dans la Grande Salle. J'arrivai devant la porte des cachots, essoufflée et je me rendis compte à ce moment-là que je ne m'étais pas coiffée. D'un coup de baguette, je tentai de discipliner un peu mes cheveux, même si je n'aimais usuellement pas utiliser des sortilèges sur moi. Ça fera l'affaire. J'hésitai un instant avant de toquer, prise d'un doute. Pourquoi est-ce que j'étais là, déjà ? Le voulais-je vraiment ? La scène de la veille me revint en tête et j'eus une forte envie de rebrousser chemin. Après tout, peut-être avait-il pris mon retard pour une résignation ? Peut-être n'avait-il lui-même plus envie de me former pour cette mission dont je ne connaissais toujours pas le fond...
Respirant un grand coup, je tendis une main vers la porte pour informer ma présence mais au même moment, la porte s'ouvrit en grinçant. Il n'y avait personne derrière alors je me décidai à entrer dans la salle sombre. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine et j'étais sérieusement entrain de considérer l'idée de faire demi-tour quand une voix me retint :
«-Tiens, tiens, je commençai à penser que vous ne viendriez pas.»
Je tournai la tête vers l'endroit d'où venait le bruit et découvris Severus, dans l'ombre, appuyé contre le mur, le visage d'une froideur inexpressive. Je déglutis péniblement avant de dire, d'une voix penaude, n'ayant pas la force de rétorquer sèchement aujourd'hui :
«-Je... n'ai pas entendu mon réveil, je suis désolée. Ça ne se reproduira plus.»
Severus sortit de l'ombre, les pans de sa robe sombres traçant un sillon derrière lui. Il leva un sourcil à l'entente de mon excuse minable, ne s'attendant visiblement pas à cette réaction de ma part. Je baissai le regard, fatiguée d'avance à l'idée de me confronter encore une fois au sarcasme inépuisable du sorcier. D'ailleurs, celui-ci ne se fit pas prier :
«-Je suppose que je n'ai pas besoin de vous rappeler que la panne de réveil n'est pas une excuse.»
Cette fois-ci, je relevai la tête, le fusillant volontairement du regard avant de répondre, d'un ton faussement résigné :
«-En effet, Monsieur.»
Il plissa les yeux, l'air suspicieux puis, brusquement, il se désintéressa de moi et rejoignit son bureau, où il s'affaira un court instant, durant lequel je regardai la salle d'un œil distrait, me demandant bien ce qu'il me réservait. Il se redressa, baguette en main et demanda, d'une voix indifférente :
«-Vous avez votre baguette sur vous ?
-Oui.
-Très bien.»
Sans plus d'explication, il brandit sa baguette et d'un tour de poignet, lança un sortilège informulé. Aussitôt, les quelques meubles qui peuplaient la salle se mirent en mouvement et se décalèrent docilement contre les murs, seul le grincement de leurs pieds contre le sol brisant le silence froid. Perplexe, je regardai le dernier mobilier regagner sa place avant de me tourner vers Severus, qui se plaça en face de moi, au centre de l'espace ainsi libéré.
«-Je vais aujourd'hui tester vos réflexes de combat. Les missions dans lesquelles vous serez envoyées, si tant est que vous ayez le niveau, seront dangereuses et nécessiteront une parfaite maîtrise de l'art du duel. Agissez contre moi comme si vous étiez en situation réelle, comme si j'étais votre ennemi.
-Vous allez... me confronter en duel ?
-C'est exact. Ne perdons pas de temps, sortez votre baguette !»
Ne laissant pas de place à l'hésitation, je tirai ma baguette de ma poche, tandis que Severus pointait la sienne sur moi. Je fis de même.
«-N'oubliez pas que nous sommes en situation réelle. Vous êtes face à un Mangemort qui n'hésitera pas à vous tuer, ou pire. Votre objectif est simple : le neutraliser avant qu'il ne prenne le dessus. Usez de tous les sortilèges que vous connaissez... évitons tout de même les impardonnables.»
Je me contentai de hocher la tête, une main crispée sur ma baguette. Je ne m'étais pas encore décidée avec quel sort commencer qu'un éclair jaillit de la baguette sombre du sorcier en face de moi et je peinai à l'arrêter. Malgré le sortilège de protection que j'avais lancé au dernier moment, la force de l'impact m'obligea à reculer de deux pas, deux secondes de déconcentration qui me valurent ma première défaite : Severus enchaîna sans plus attendre sur un second sortilège qui me frappa de plein fouet et me fit chuter lourdement au sol. Je réprimai un cri de douleur et me relevai en me massant le bras gauche sur lequel était venu s'écraser le reste de mon corps. Visiblement satisfait de cette première victoire, le sorcier en face de moi ne prit même pas la peine de m'aider à me relever, se contentant de me toiser d'un air presqu'amusé. Humiliée, je le fusillai du regard et sa seule réaction fut de me faire remarquer :
«-Ce n'est pas très brillant. Il faut se concentrer sur les attaques avant la défense, il faut agir avant l'autre, anticiper ses actes !»
Je serrai les dents, assimilant malgré moi ses conseils. Il se remit en position de combat et, bien que la motivation me manquait, je l'imitai. Cette fois-ci, je ne me fis pas prier : sans hésiter, je lançai un Maléfice d'Entrave, à l'instant même où un éclair jaillit de la baguette de Severus. Nos sorts s'entrechoquèrent dans une explosion colorée qui fut source de ma deuxième défaite. Heureusement, cette fois-ci, je parvins à rester sur mes pieds mais ma baguette s'échappa de mes mains pour atterrir dans celles du sorcier en face de moi, qui murmura :
«-Pathétique. Une seconde d'inattention suffit. Concentrez-vous sur votre unique but, videz votre esprit de toute distraction susceptible de vous faire perdre le match !»
Je respirai longuement pour calmer la frustration qui grandissait dans mon estomac et récupérai d'un geste vif la baguette que me tendait Severus. Le duel reprit. De deux gestes de baguette à la suite, je lançai un Sortilège de Désarmement, suivi d'un Sortilège de Stupéfixion. Malheureusement pour moi, le premier rata à sa cible et le second fut interrompu par le sorcier, qui renchérit aussitôt par un sort que je parvins à esquiver in extremis en me décalant sur le côté. Je levai ma baguette pour répliquer et ne fus pas assez rapide pour éviter le deuxième éclair qui filait sur moi. Des lianes s'emmêlèrent autour de mes chevilles et je basculai en avant, perdant l'équilibre.
«-C'est loin d'être suffisant. Soyez plus rapide, c'est la vitesse d'enchaînement qui vous fera gagner. N'hésitez pas, ne faisez qu'une avec votre baguette. Écoutez-la elle et non vous !»
Mordant la poussière, je sentais des larmes d'humiliation me monter aux yeux mais je les séchai aussitôt, me concentrant sur un tout autre sentiment qui montait en moi : la colère. Severus annula son sortilège et je récupérai ma baguette d'une poigne ferme.
«-IMPEDIMENTA ! hurlai-je à peine m'étais-je relevée, espérant jouer sur l'effet de surprise.»
Severus bloqua aisément mon sortilège et répliqua par un sortilège puissant qui me fit basculer en arrière. Dans ma chute, je lançai en dernier recours un Maléfice d'Entrave qu'il arrêta tout aussi facilement que le premier avant de me désarmer. Je ne pus réprimer un juron de colère.
«-Vous êtes trop prévisible, ne me laissez pas voir à l'avance quel sort vous allez lancer ! Variez vos coups et privilégiez les sorts informulés !»
Une demi-heure plus tard, j'essuyai ma vingtième défaite, bien que les affrontements duraient de plus en plus longtemps avant qu'il ne réussisse à m'immobiliser. Et à chaque fois, il en allait de ses commentaires acerbes : «Soyez plus agressive !», «Travaillez votre précision !», «Imposez-vous !» et ses critiques virulentes : «Vous ne serez jamais prête !»,«Même un Troll se débrouillerait mieux que vous !»... Et lorsque j'eus le malheur de demander une pause, il siffla :
«-Vous n'aurez pas de pause durant les missions, Lynch ! Pas plus que vous n'aurez un adversaire qui vous donne des conseils et attend que vous vous releviez avant de poursuivre le combat. Si vous vous battiez comme vous le faîtes aujourd'hui, vous seriez morte depuis longtemps ! Levez-vous ! On continue !»
Je m'exécutai, à contrecœur, mon pouls battant sauvagement contre mes tempes. Le corps tendu, je brandis ma baguette et, fidèle à son habitude, Severus ne me laissa pas le temps d'agir qu'il commença l'attaque. Je parai son sortilège et me décalai aussitôt sur le côté pour en éviter un deuxième. Je répliquai à mon tour mais mon sort ne fut pas assez puissant pour l'atteindre. Il ricana de mépris avant d'intensifier le combat. Des dizaines d'éclairs illuminaient la salle toutes les trente secondes et je faisais de mon mieux pour stopper les piques de mon adversaire tout en l'attaquant quand la situation se présentait. Il ne faiblissait pas et je sentais la fatigue me gagner. D'ailleurs, elle ne tarda pas à se manifester et, alors que je voulais esquiver un maléfice en me décalant vers la droite, je m'emmêlai et trébuchai au sol.
«-Quelle maladresse ! railla Severus, on ne m'avait pas dit que Beauxbâtons formaient de si piètres sorciers !»
Ce furent les mots de trop.Tremblante de rage, je me relevai, rafermis ma main sur ma baguette, inspirai profondément, me concentrant à faire passer toute ma colère, mon énergie, mon humiliation dans le coeur de ma baguette. Puis je la brandis sur Severus et me mis à hurler. Un éclair puissant jaillit dans la pièce et frappa mon adversaire avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit. Il fut violemment projeté en arrière, tandis que je tombai à genoux, arrasée, vidée de mon surplus d'émotions. Je lâchai ma baguette et elle alla rouler sur le sol sans que je n'y prête plus d'attention. J'avais le souffle court et mes membres tremblaient de façon incontrôlée. Je n'osai pas regarder en direction de Severus mais le devinai entrain de se relever de sa chute. J'entendais presque ses futurs reproches siffler dans mes oreilles. Mais il n'en fit rien. Bien au contraire, il souffla, d'une voix étrange :
«-Intéressant... ça ira pour aujourd'hui. Demain, à la même heure et ne...»
Il ne termina pas sa phrase et, encore sous le choc, je n'avais pas relevé la tête vers lui. Ce fut quand il s'éloigna de moi que je trouvai en moi assez de force pour me remettre sur pied, récupérer ma baguette et quitter la salle avec précipitation, courant presque.
***
Dimanche 13 Mars 1988 :
Je revins le lendemain, même si je n'en avais pas particulièrement envie. Severus se montra plus silencieux au départ mais, dès ma première défaite, il alla de nouveau avec ses conseils, mélangés à des critiques vives. Ce jour-là, il dénonça mon manque de tact, mon déficit d'intelligence et mon absence de persévérance. Il me répéta de ne jamais quitter des yeux son adversaire durant un combat, de ne pas montrer sa douleur ou sa peur à celui que l'on combat, d'être en vigilance constante, en osmose avec le lieu de l'attaque qui pouvait se révéler fort utile. Je ne gagnai aucun duel mais essuyai tout de même moins de défaites que la veille, les combats durant plus longtemps, parfois jusqu'à dix minutes d'affilée.
S'il mit encore une fois mes nerfs à rude épreuve ce matin-là, je pus me détendre et retrouver un semblant de vie normale l'après-midi quand Pomona proposa une partie de cartes à tous les enseignants et que tout le monde, ou presque, acceptèrent. Aux abonnés absents était sans surprise Severus, mais aussi Septima qui devait gérer des problèmes personnels dans sa famille.
***
Lundi 14 Mars 1988 :
La semaine démarra sur les chapeaux de roue avec mes septièmes années, à qui je fis passer des «ASPICs blancs» afin qu'ils se confrontent à leurs lacunes et qu'ils puissent les rectifier avant le véritable examen qui approchait à grande vitesse. Le week-end ayant été très chargé, je profitai de tous les instants de pause pour plancher sur mes cours et mes corrections et pris même le temps d'envoyer un hibou à mes parents pour prendre de leur nouvelle.
Le soir, je me rendis une nouvelle fois aux cachots, pour poursuivre les entraînements. Comme à son habitude, le Maître des Potions ne s'étala pas avec des courtoisies inutiles et nous débutâmes les hostilités avant qu'il n'ait prononcé un seul mot. J'appris cette fois-ci que je n'étais pas assez futée, ni assez observatrice, ni même audacieuse pour espérer un jour remporter un duel face à un Mangemort. Il n'empêche que je désarmai non sans fierté mon adversaire à la quatrième manche.
☆☆☆
*PetitKoala*
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