Bonus #4 (4/5)
Samedi 07 Mai 1988 :
Si l'apparition soudaine de la silhouette derrière le centaure ne manqua pas de me faire sursauter, je ne fus qu'à moitié surprise de reconnaître les robes sombres et le visage émacié du professeur de Potions lorsque la lueur de ma baguette vint l'éclairer. Mon cœur se serra dans ma poitrine et je ne pus me détourner de son regard incendiaire, tandis qu'un sentiment désagréable de garnement pris en faute s'empara de moi. Que diable faisait-il ici ? Comment ? Pourquoi ? Je fus prise d'assaut par de nouvelles interrogations qui s'ajoutèrent au capharnaüm régnant déjà dans mon esprit et dus me faire violence pour ne rien laisser paraître. Je soutins le regard froid de mon collègue, tachant de lui rendre une œillade tout autant inhospitalière.
« -Vous pouvez y aller Firenze, ordonna le sorcier au centaure d'une voix glaciale sans me lâcher des yeux. Je me charge de raccompagner Lynch au château. »
Humiliée, je me mordis la langue pour ne pas lui répondre sèchement que je n'avais aucunement besoin de lui pour rentrer au château. Même si cela me faisait mal de l'admettre, j'étais bien incapable de retrouver mon chemin sans guide. Firenze m'adressa un regard interrogateur, se demandant probablement s'il devait suivre les directives de Rogue ou rester à mes côtés. Je lui adressai un sourire crispé et hochai la tête pour lui faire comprendre que je n'avais plus besoin de lui :
« -Merci pour tout, Firenze. »
Ma voix n'était qu'un murmure penaud que je ne réussis pas à contrôler. Le centaure gratta la terre de ses sabots avant puis s'inclina respectueusement devant moi.
« -Pas de problème, Miss Lynch. J'espère que vous trouverez ce que vous êtes venue chercher en ces lieux. »
Il adressa un signe de tête courtois envers le professeur Rogue puis s'éloigna en trottinant jusqu'à disparaître dans l'obscurité lugubre de la forêt. Je regrettai presque de l'avoir renvoyé tant l'ambiance s'était soudainement refroidi en l'absence de la sympathie du centaure. N'ayant pas envie de laisser un silence peser sur mes épaules, je me tournai vers mon collègue et demandai, d'une voix plus sèche que prévue :
« -Comment m'avez-vous trouvée ? Vous me suiviez ? »
J'étais consciente d'être plutôt culotté de lui faire remarquer cela alors que je m'étais plusieurs fois surpris à le suivre pour déclencher des conversations entre nous. Cependant, la colère, la frustration et la fatigue parlaient pour moi et je n'avais pas la force - ni l'envie - de les réfréner. Rogue leva un sourcil inquisiteur et je me préparai à recevoir une remarque acerbe dans trois, deux, un...
« -Ce n'était pas la peine, répliqua-t-il d'une voix cinglante. Vous n'êtes pas connue pour votre discrétion. »
Je voulus rétorquer mais aucune parole ne me vint et je finis par renoncer. Je ne savais même plus si j'étais énervée contre lui, contre ma mémoire et contre moi-même tant plus rien n'avait de sens dans mon esprit.
« -Vous avez beau être professeure, Lynch, cela ne vous donne pas tous les droits. Je n'ai jamais connu une adulte aussi irresponsable que vous ! Qu'est-ce que vous croyez accomplir en vous pavanant seule dans la Forêt Interdite en pleine nuit ? Avez-vous ne serait-ce qu'une infime idée des dangers que renferment ces lieux ? »
Il ne me laissa pas le temps de répliquer et poursuivit, de sa voix basse et menaçante :
« -Bien évidemment que non, vous êtes bien trop concentrée sur votre propre personne pour penser à ce qui vous entoure et aux conséquences de...
-Je sais que je suis déjà venue dans cette partie de la forêt, le coupai-je sans détour, d'une voix étonnamment calme. Mais je n'en garde aucun souvenir. Firenze m'a expliqué avoir entendu du raffut ici-même le soir où il m'est impossible de me rappeler ce que j'ai fait. »
Severus leva les yeux au ciel, semblant exaspéré par mon comportement.
« -Vous ne tirez donc jamais aucune leçon de ce qu'on vous dit ? »
Je l'ignorai et me détournai de lui, serrant les lèvres pour ne pas céder à la colère. De quel droit m'insultait-il de cette façon ? Avait-il ne serait-ce qu'une petite idée de ce que je ressentais à cet instant ? J'étais perdue, fatiguée, humiliée et toujours à la recherche d'une vérité qui semblait s'éloigner de moi dès que je faisais un pas dans sa direction. J'étais au bord de la crise de nerf. Pourtant, ignorant la tourna de qui grondait dans mon ventre, je fis quelques pas dans la clairière, en murmurant - plus pour moi-même que pour le sorcier :
« -Il s'est passé quelque chose d'important ici et je ne sais pas comment ni pourquoi je me suis retrouvée ici mais... mais je dois le découvrir, je dois... il le faut...»
Je m'embrouillai dans mes explications et fus contrainte de marquer une pause, me sentant soudainement un peu patraque. J'avais la sensation d'être à la fois si proche de ce que je recherchais et encore si loin de me douter de l'ampleur de ce qui m'attendait. Ce contraste me donnait le tournis. Je fis quelques pas autour de ma position, passant en revue les lieux, essayant de m'accrocher à n'importe quel détail qui saurait déclencher un déclic dans ma mémoire... c'était comme avoir un mot sur le bout de la langue mais être incapable de s'en souvenir malgré toute la volonté du monde pour y parvenir. Je me sentais nauséeuse.
Tourmentée par des souvenirs qui ne me revenaient pas, je finis par m'appuyer contre un tronc d'arbre, tremblante. J'allais devenir folle si mon obsession pour découvrir la vérité n'était pas assouvie après tout ce temps... J'entendis Severus faire quelques pas dans ma direction et je levai les yeux dans sa direction, m'apprêtant à encaisser une énième insulte. A l'instant où mes yeux croisèrent ses pupilles noires, un flash violent s'imposa dans mon esprit, me faisant perdre l'équilibre. Je me laissai tomber au sol, tandis qu'une scène qui m'était tout à fait étrangère et pourtant si familière se joua devant mes yeux troubles.
Des éclairs lumineux et agressifs qui troublaient une nuit épaisse... la douleur, la peur, les cordes vicieuses qui frottaient contre ma peau à vif... une voix, des mains, un murmure qui faisait frissonner mes tympans... une baguette brandie dans la direction... et la silhouette de son propriétaire qui m'enveloppait, qui me menaçait, qui m'étouffait...
J'émergeai de cette vision comme d'un cauchemar sans fin.
« -Lynch, par Merlin mais qu'est-ce qui vous prend ? »
La voix dure mais teintée d'une inquiétude qu'il ne sut pas dissimuler du Maître des Potions m'arracha définitivement de ma transe et je me redressai, encore assommée par toutes les images qui venaient de défiler dans mon esprit. A qui appartenaient-elles ? Que signifiaient-elles ? Que m'était-il arrivé ?
« -Qu'est-ce que... vous... vous m'avez... fait ? »
Je peinai à aligner plus de trois mois de suite et, instinctivement, ma main partit à la recherche de ma baguette, que j'avais perdu en tombant. Rogue, qui s'était approché de moi lorsque j'avais chuté, recula d'un pas, stupéfait.
« -Je vous demande pardon ? murmura-t-il d'un ton qu'il voulait acerbe mais qui ne sonna pas aussi sûrement à mes oreilles. »
Mes mains tremblaient et je luttai pour ne pas laisser les larmes envahir mes yeux. Il avait été là, à cet endroit, et moi aussi. Que s'était-il passé ? Pourquoi avait-il brandi sa baguette dans ma direction ? Et cette voix, cette voix pernicieuse et ces mains qui avaient voulu me, me... mes doigts se resserrèrent enfin contre le manche de ma baguette et je m'accrochai à cette sensation, la seule sensation qui n'allait pas me rendre folle, l'unique sensation qui me permettait de m'accrocher encore à la réalité. Mes jambes étaient molles et mes muscles tétanisés. J'avais envie de m'enfuir, j'avais peur soudain, mais je n'arrivais pas à bouger. Mon esprit cherchant désespérément une explication à ce que je venais de souvenir parvint à articuler une seule et unique pensée : J'avais découvert quelque chose qui compromettait Rogue et ce dernier m'avait entraîné dans la Forêt pour... pour... pour m'empêcher de dévoiler la vérité... Était-ce lui qui m'avait blessée ? Était-ce lui qui m'avait attaché contre ce tronc, qui avait murmuré d'affreuses paroles dans mes oreilles ? Était-ce lui qui m'avait ensuite donné le coup de grâce ?
C'était la seule explication. Et je venais de commettre l'erreur une deuxième fois. J'étais de nouveau seule avec lui, loin de tous, loin de la protection du château.
« -Vous m'avez oublietté, affirmai-je d'une voix blanche alors que mon cerveau tentait de trouver une issue de secours, n'importe quoi qui put me tirer de ce mauvais pas. »
J'avais presqu'espoir qu'il niât, que l'incrédulité se lût sur son visage, qu'il fût innocent et sincèrement étonné par ce que je venais d'énoncer. A la place, il parut totalement pris de court et balbutia :
« -Que... comment ? Qu'est-ce que vous racontez ? »
Son visage s'était tordu quelques secondes dans une expression d'horreur et d'impuissance. Il m'avait oublietté. Il m'avait oublietté. Alors le reste de mon raisonnement devait être juste.
« -Lynch, je ne sais pas ce que vous avez bu ce matin mais si vous voulez bien cesser...
-JE... NE... SUIS... PAS... FOLLE ! »
Je me levai d'un bond, piquée à vif par sa remarque et, sans réfléchir, je hurlai :
« -IMPEDIMENTA ! »
S'il était bien meilleur duelliste que moi, Rogue ne s'attendît vraisemblablement pas à ce que je lui jetasse un sort puisque mon maléfice vint le frapper de plein fouet. Il fut projeter en arrière et cela me laissa suffisamment de temps pour quitter avec précipitation la clairière.
L'adrénaline coulait à flot dans mes veines et malgré la fatigue, la peur et mon esprit qui ne parvenait pas à suivre le rythme, mes jambes me guidèrent à travers les broussailles et les arbres. J'avançai vite mais dans une direction totalement aléatoire. Il n'y avait que très peu de chance que ma course me conduisit jusqu'au château, où je serais en sécurité des griffes de Rogue. Comment avais-je pu être aussi stupide de penser que je pouvais lui échapper ? Au moins désormais, je connaissais la vérité...
Dans la précipitation, mes pieds furent soudain pris au piège d'une racine traîtresse et je me sentis basculer en avant. La dernière chose à laquelle je pensais avant de sombrer dans l'inconscience fut la silhouette menaçant de Rogue qui grondait : « Oubliettes ! »...
*
Hello, j'espère que vous allez bien ☺
Bon, bon, bon, c'était à prévoir : Severus retrouve une Ella complètement perdue au milieu de la Forêt et la scène est si familière qu'elle ne manque pas de faire ressurgir des souvenirs dans l'esprit tourmenté de la jeune femme... malheureusement, elle les interprète mal et là voilà persuadée (vraiment ?) que Rogue l'a entraîné dans la Forêt pour la faire taire. Manque de chance, Rogue est le seul qui peut potentiellement la reconduire au château... mais que va-t-il se passer dans l'épisode (le dernier !!) prochain ?
La vérité va-t-elle éclater ? Rogue va-t-il préserver dans ses mensonges et Ella dans cette fausse conception des faits ? Ils vont (encore) s'affronter et aucun d'entre eux ne sortira indemne, pour sûr... :)
J'espère que vous avez aimé cette partie, je vous retrouve dimanche prochain pour clôturer cette alternative ❤
D'ici là, prenez soin de vous comme toujours !
PetitKoala
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