I - Ah, ce fameux Chopin !
La musique classique m'a toujours apaisé. C'est si calme, si lent, si... Hors du temps... Envoûtant... Oui ! C'est le mot exact que je recherchais ! Rien n'égale la douce mélodie d'une composition de musique classique. Sauf les craquements...
Ces délicieux craquements...
Les chansons de l'époque contemporaine ? Argh ! Jamais rien entendu d'aussi infâme que cette musique électronique ! Si l'on peut appeler ça de la Musique. Comment font les gens pour danser sur ça ? Je me le demande. Mais si nous réfléchissons bien à cette question, la réponse est très facile à trouver. Revenons un peu à la base d'une soirée.
Le but est de se "bourrer la gueule" afin d'oublier les problèmes de la vie quotidienne ! Vous savez, les relations amoureuses, les conflits entre les gens, les cours... Mon dieu, qu'est-ce que je déteste ce mot-là ! Mais je m'égare, là. D'après ma théorie, le vrai but de l'action qu'est "se bourrer la gueule" est d'oublier que les jeunes dansent sur une musique de merde. Certains vont même jusqu'à l'oublier, au réveil ! Bande de petits veinards !
Ah, ce fameux Chopin a tout compris à la vie ! Comme ces autres compositeurs illustres, d'ailleurs. Il n'y a rien de meilleur que de laisser parlé ses mains complètement et irrévocablement lorsque l'on joue d'un instrument. Il vaut mieux ça, plutôt que de faire une note sur un clavier (minimum), de les bidouiller sur un ordinateur et d'en faire ce qu'ils jugent être un "tube". Les gens sont tellement naïfs !
En finissant mon verre dans mon fauteuil de cuir, mes doigts voltigent juste au-dessus de l'accoudoir au moment le plus critique de la composition. Je suis tellement concentré que je ne remarque même pas l'ombre de l'une de mes servantes dans le clair de lune à ma gauche.
Bien sûr, notez bien que, plus tôt, j'ai fait remarquer que nous étions au moment le plus critique de la composition !
_ Monsieur ?, prononce la femme. Le dîner est servi.
Mes doigts sont en suspens dans l'air. Je pince mes lèvres et me tourne avec la plus grande lenteur vers la personne qui m'a dérangé pendant ma discussion avec vous. Je lui lance un regard sans expression.
C'est Coraline, cette empotée un peu ronde et maladroite, qui traine toujours dans mes pattes. Toujours à m'enquiquiner lorsque la situation ne convient pas.
Elle se dandine et baisse les yeux. Aucune personne n'arrive à me regarder dans les yeux. C'est incroyable, ce qu'ils sont malpolis, les gens de cette satanée ville !
Je me replonge dans mon fauteuil, à l'abri de son regard, pesant le mien sur mes doigts immobiles, comme un avion dans le ciel.
_ Aurez-vous encore besoin de mes services ?
J'avais dit que c'était un passage critique.
_ Non, Coraline, réponds-je d'une voix nonchalante. Nous n'aurons plus besoin de vos services.
Et doucement, mes doigts se referment tous seuls, petit à petit, comme l'eau qui s'écoule à travers un éboulement de pierre. Les suffocations, les doigts qui se referment, les notes de piano qui défilent. Et mon poing se ferme complètement. Ah, ce craquement divin ! Et ce fracas sur le sol ! Un petit sourire se dessine sur mon visage déjà sadique. En sirotant une autre gorgée, je fixe le sol en souriant à la personne d'en bas.
_ Je ne serai pas seul à table, ce soir. Régale-toi, mon cher ami.
Je pose mon verre sur le guéridon et me lève en remettant correctement le t-shirt noir que je porte. J'éteins la chaine hi-fi et sifflote, en enjambant le corps inerte, se désintégrant déjà pour rejoindre les tréfonds de la Terre, pour aller à la salle à manger.
_ Bon appétit, Lucifer !
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