Chapitre huitième
Lofy avait examiné le corps de l’humain décédé quelques jours auparavant, procédant à une autopsie minutieuse et consciencieuse. Elle avait fait des analyses complètes et avait rendu son rapport un peu plus tôt, expliquant en détail les causes de la mort.
Elle était en train de faire d’autres recherches lorsque Eterna vint la voir, espérant trouver des informations supplémentaires.
-Lofy, tu as trouvé quelque chose ?
La femme-médecin soupira en lâchant son travail en cours.
-Pas grand-chose... La cause de la mort est dûe à une hémorragie causée par de multiples morsures à différents endroits du corps. Toutes ces morsures ont été rouvertes plusieurs fois sans que la plaie ait pu cicatriser, ce qui veut dire qu’on lui prenait régulièrement son sang en grande quantité, depuis une petite semaine je dirais...
-Ces créatures sont vraiment des bêtes sauvages, railla la chasseuse. Le prochain vampire que je croise, je me ferai un plaisir de lui trancher la tête moi-même !
Lofy sembla un peu mal à l’aise.
-Eterna... Sir Northwood nous a juste dis de les capturer... pas de les tuer...
La femme-poisson s’assit à côté d'elle en soupirant.
-Nous devons éliminer ces vampires, sans quoi nous aurons encore des morts à enterrer.
-Tu as sûrement raison...
La chasseuse lui fit un grand sourire et la prit dans ses bras en l’embrassant.
-C’est pour ta sécurité que je fais tout ça...
Lofy le savait, sa compagne était tout pour elle. Elle était tellement déterminée à protéger ceux qu'elle aimait...
-Au fait... Ça va peut-être te paraître bizarre... Sir Northwood nous a présenté cette homme comme un garde disparu mais... je n’ai pas souvenir que la victime fasse partie du village...
Eterna prit le temps de la réflexion et tiqua.
Maintenant qu’elle y pensait, elle n’avait jamais croisé cet homme ce qui, étant donné son statut de chasseuse et sa proximité avec les gardes, était un peu étrange.
Et si, comme le disait Lofy, il avait été retenu chez des vampires un moment, pourquoi personne n’avait signalé une quelconque disparition ?
-C'est bizarre... Tu pourrais te renseigner là-dessus ? Ça nous donnera peut-être un élément exploitable.
-Je vais aller vérifier les registres de Simon à la bibliothèque, répondit la femme-médecin en se levant. Fais attention à toi...
La chasseuse de vampire sourit et se leva à son tour pour l’accompagner dehors.
******
Fallacy avait rarement été aussi agacé. Personne ne l’avait jamais vu en colère et personne ne le souhaitait non-plus.
Pourtant le roi des vampires avait convoqué tous les ambassadeurs dans la salle du conseil en laissant son aura et sa magie imprimer les lieux de son agacement. Un à un, ils vinrent tous prendre place en silence, attendant que Fallacy prenne la parole.
Il paraissait calme, mais ne l’était pas.
-Qui a libéré notre prisonnier ?
La vague de froideur qui s’abattit soudainement glaça tout le monde.
Mais personne ne répondit, ne faisant qu’énerver un peu plus le vampire.
-La question est simple et j’attends une réponse.
Le silence se prolongea, angoissant tout le monde, avant que le squelette aux os noirs ne décide de laisser sa magie emplir la salle, écrasante, froide et brûlante à la fois.
-Je veux une réponse. Maintenant.
-C'est moi.
Il tourna la tête vers le vampire qui avait parlé et se figea en essayant de masquer son malaise.
-Macabre... Pourquoi ?
-Parce que tu n’écoutes jamais, cingla le français en se levant. Tu agis sans réfléchir, sous l'impulsion de tes émotions alors même que tu tentes d'en faire abstraction. Tu te laisses guider par ta colère et ta haine, sans te soucier des victimes. Cet homme méritait au moins de mourir pami les siens, ce que les mortels ont refusé à mon amant !
-Tu es vraiment... idiot, lança Fallacy en tournant la tête. Tu aurais pu...
-J'aurais pu quoi ? T'en parler ? Tu entends mais tu n’écoutes pas.
Il se transforma en chauve-souris et s’envola par la fenêtre en voletant dans la forêt, seul, pour penser et pleurer en silence.
******
Adrian faisait les cent pas dans ses appartements privés, énervé au possible, évitant les livres éparpillés sur le sol, et les repoussant violemment d'un coup de pied lorsqu'ils gênaient.
Son espion, la personne qui lui avait certifié pouvoir trouver ce fichu repaire de vampires, était mort avant d’avoir pu révéler ce qu'il savait. Il avait cru que celui-là serait différent des autres, plus prudent, plus expérimenté, de façon à ne pas impliquer les villageois dans cette histoire.
Mais, non content de mourir trop tôt, les vampires l’avaient également laissé revenir à Bloodhaven !
Dans un sursaut de colère, il envoya une pile de livres valser par terre, laissant les pages déchirées voler dans tous les sens.
-Maudits vampires ! Toujours à contrarier mes plans !
Énervé au possible, il s’assit rageusement dans un fauteuil de velours en serrant les poings.
Il inspira un grand coup et, semblant retrouver un semblant de calme, siffla légèrement. Son serpent blanc arriva au-dessus de son épaule et redescendit le long de son bras en passant sa tête sous sa main, comme pour quémander de l’attention. D'un geste doux et machinal, le seigneur du village le caressa en résonnant sur les récents événements.
Certes, cela ne s'était pas déroulé comme prévu, mais il gardait toujours deux avantages.
Le pouvoir et la crédibilité.
Les vampires lui avaient renvoyé son espion sans lui laisser le temps de parler, très bien.
Ils avaient également montré une cruauté qui avait renforcé la haine que leur vouaient les villageois.
Il devait à présent impliquer Eterna, Lofy et Rufous. Parfait !
Cela lui permettrait de prouver aux habitants qu'il faisait quelque chose contre les créatures de la nuit, et ces abrutis, déjà sous sa coupe, ne feraient que le suivre aveuglement dans ses décisions.
Il avait envoyé la chasseuse de vampires chercher le repaire de buveurs de sang très probablement supérieur en nombre dans la forêt qui était leur terrain de chasse.
Qu’à cela ne tienne ! Si elle ne réussit pas, elle n’aura qu'à mourir et il ne lui restera plus qu'à trouver un autre chasseur plus compétant.
Tout problème avait une solution. Et, étant le maître du jeu, il avait les pleins pouvoirs pour mener à bien ses entreprises insidieuses.
Il eut un sourire en regardant son familier.
-Et toi ma jolie ?~ Tu ne me décevras pas, je le sais. Trouve-moi ce trésor dont nous a parlé l’Espagnol. Et mieux encore, trouve le roi à qui notre ami souhaitait longue vie~ Je me ferai un plaisir de lui enfoncer un pieux en plein coeur...
Le serpent émit un petit sifflement et se lova dans le creux de sa main. Le regard du jeune homme dériva sur une page arrachée d'un livre, une illustration d'un squelette aux os noirs et aux yeux or et rubis soulignés de marques bleutées.
-''Un roi maudit par son lignage, craint et respecté, à l'âme plus froid qu'une nuit d'hiver...'' Chaque personne en ce bas-monde possède une faiblesse... Qui aurait cru que le chasseur deviendrait la proie ?
******
Encre avait du mal à dormir, à peindre, à penser. Les récents événements tournaient en boucle dans son esprit, comme des spectres froids et envahissants. La journée paraissait plus longue et rien ne semblait le motiver à peindre, même pas le reflet du coucher de soleil.
Alors il pensa à un moyen de se vider la tête et se mit à écrire.
Il avait retrouvé un petit carnet dans les affaires qu'il avait ramener de France, un carnet de cuir brun, simple mais en très bon état. Le jeune peintre avait alors trempé sa plume dans l’encre et avait commencé à coucher les mots pages après pages.
C’était comme si les souvenirs se figeaient sur le papier, réels mais inoffensifs, proche mais lointain à la fois. Il y laissa dériver toutes ses pensées intimes ou anodines, de même que sa rencontre avec le vampire et ses conversations avec Adrian. Et, lorsqu'il referma le petit journal pour le ranger soigneusement dans un tiroir, il se sentit tout de suite mieux, apaisé.
-Ça ne peut faire de mal à personne...
Encre sourit et prit un autre carnet, de croquis cette fois-ci, et contempla la montagne qui entourait le paysage. Des pics enneigés par endroits, des nuages sombres annonçant l'orage, des pins et autres conifères à perte de vue...
Ses doigts attrapèrent machinalement un fusain et laissèrent l'imagination de leur détenteur noircir les pages en oubliant le temps qui passe.
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