Chapitre dixième
Macabre était... troublé.
Ce mortel, l’astronome comme il aimait l'appeler, occupait ses pensées depuis plusieurs jours, sans que le vampire n’arrive à le chasser de son esprit. Il l’avait observé chaque soir étudier les astres et les cieux et aurait mille fois aimé pouvoir ne serait-ce qu’échanger un mot avec cet étrange petit squelette aux yeux dorés.
Mais il était un mortel et lui un vampire du clan de la nuit.
Alors, dans sa chambre, regardant distraitement la lune par la fenêtre, il réfléchissait en soupirant.
Puis il eut une idée et prit du papier et une plume pour écrire une lettre. Une simple lettre anonyme pour simplement parler de constellations et d'étoiles. Puis, ayant terminé, il créa une petite chauve-souris d'un doux reflet lavande avec sa magie avant de la laisser s'envoler vers le village.
******
À la grande surprise d’Encre, Fallacy était revenu la nuit suivante. Il avait prit un air désolé et s’était excusé piteusement de son comportement de la veille avant de se sentir rassuré en admirant le sourire éclatant de l’artiste.
-Ce n’est rien, vous étiez un peu sur les nerfs, cela peut arriver !
Un peu surpris, le vampire s’assit à sa place habituel en regardant le squelette aux os blancs.
-Vous tentez de le cacher mais vous avez beaucoup de questions à l’esprit. Je... je me ferai un plaisir d'y répondre si vous le désirez.
Le peintre ouvrit de grands yeux brillants.
-Vraiment ?! Vous n'êtes pas obligé vous savez.
-J'y tiens... Et vous ?
Excité comme un enfant, Encre s'assit en face de lui en essayant de rassembler ses idées.
-Et bien... vous avez parlé d'un certain conseil la nuit dernière... qu'est-ce que c’est ?
Fallacy fit une grimace équivoque.
-Le Haut-Conseil des vampires... C'est un conseil qui réunit chaque ambassadeur des clans de la nuit. C'est un peu comme... si votre roi d’Angleterre rencontrait les rois de France, d’Italie, de Germanie et d’Espagne.
-Mais... vous n’avez aucun problème pour communiquer ? interrogea le français.
-Nous sommes des vampires, ricana l'autre en lui souriant. Nous ne comptons pas le temps de la même façon que vous. Une nuit est un battement de cils, nos décennies sont vos années et nos siècles vos décennies. Tout se retrouve décalé, la façon de prévoir les choses également. Nous pourrons passer plus de temps à étudier et nous parlons tous couramment la langue des uns et des autres. Je parle anglais, français, italiens, espagnol et germain couramment.
-Germain aussi ?!
-Ja, aber ich liebe nicht zu viele.
Les deux squelettes rirent de bon coeur avant de continuer leur discussion. Encre ne cessait d’admirer les qualités innombrables du vampire qui se dévoilait un peu plus, mais restait toujours évasif sur les sujets plus importants.
Pourtant le peintre se surprit à penser qu'une éducation comme celle-ci n'était pas à la portée de n'importe qui. Au fond de son âme, il le sentait. Ce vampire avait quelque chose de particulier.
Qui était vraiment Fallacy ?
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-Raahhhh.... T-toujours rien...
Lofy se laissa tomber parmi les piles de livres étalées sur le sol de la bibliothèque. À côté d'elle, un squelette aux pupilles bleutées feuilletait toujours les gros livres de cuir des archives de la ville.
-Lofy tu pourrais quand même garder patience, ricana presque l’autre. On va finir par trouver quelque chose.
-S-Simon, ta b-bibliothèque est rangée n-n’importe comment ! Ça fait p-presque un m-mois qu'on cherche !
-Les archives étaient là avant que j’emménage ! essaya de se justifier le denommé Simon en rajustant ses lunettes avec un soupire. Tu as trouvé quelque chose Orion ?
En tournant la tête, il remarqua qu'un jeune squelette avec un béret bleu s’était endormi sur une pile de livre, visiblement épuisé. Souriant, l’adulte le prit dans ses bras et se dirigea vers les escaliers.
-On devrait faire une pause ce soir... Demain nous allons en forêt avec Orion, je le lui ai promis. Il y a des hiboux particuliers qu'il voulait voir.
-D-Dans la f-forêt ?! D-de nuit ?! M-Mais et l-les vampires ?!
-Lofy, nous serons prudents, soupira Simon en montant coucher son apprenti. Et puis, les vampires ne sont peut-être pas si horribles que tu me les décris...
La scientifique ouvrit de grands yeux effarés et l’attendit en grommelant dans le salon. Une fois revenu, le squelette bibliothécaire leur servit à chacun une tasse de thé.
-Ne me regarde pas comme ça, soupira-t-il de nouveau.
-Mais enfin, t-tu as b-bien vu le corps ! s’insurgea la femme-médecin en buvant maladroitement.
-Ça ne veut rien dire pour moi, coupa Simon avec autorité. Parmi nous, il y a des meurtriers. Pourtant nous ne voulons pas nous entretuer pour quelques cas particuliers. Les vampires sont une communauté que l’on craint, donc nous rejetons sur eux la faute d'une personne en particulier, ce qui est le comble même de la bêtise.
Lofy ne répondit rien et étudia silencieusement la question.
-C-c’est vrai... m-mais dans t-tout les cas, Sir Northwood v-veut...
Elle se tut de nouveau, consciente d'avoir failli dévoiler le plan du jeune seigneur. Surpris, Simon la regarda avant de soupirer et de prendre sa pipe en tirant une bouffée de fumée.
-Je ne lui fait pas confiance, trancha-t-il en fronçant les arcades. Il garde ses secrets pour lui et achète le silence par des paroles mielleuses. Je ne sais pas ce qu'il t’a demandé à toi ou Eterna, mais reste sur tes gardes.
Soucieuse, la scientifique réfléchit un peu plus. Il était vrai que le jeune seigneur aimait la discrétion et cultivait le mystère. Et s’ils ne trouvaient aucune trace de cette homme dans les registres, n’était-ce pas un signe ?
-Une dernière chose, fit Simon en fumant. Il m'a littéralement prit tous les livres qui parlaient des vampires il y a plusieurs semaines. Tu aurais une idée de la raison de cet emprunt soudain et conséquent ?
-N-Non... bégailla la femme-médecin, devenant de plus en plus méfiante. Écoute... j-je n'ai pas le d-droit de t'en dire plus... m-mais je serai prudente... Je ne veux pas qu’Eterna risque sa vie...
En la voyant s'inquiéter pour sa compagne, le savant soupira et se leva en enfilant un manteau.
-Je ne pense pas que nous trouverons quoi que ce soit dans les archives. Ce n'est pas la peine de se mettre martel en tête, il vaut mieux te reposer. Je te raccompagne chez toi.
Elle hocha simplement la tête et le suivit sans entrain, envahie par le doute. À qui se fier alors ?
******
Songe était un peu surpris.
Dans ses mains, une jolie lettre délicate avait été apportée sans qu'il sache comment sur sa table de travail, parmi le dédale de cartes et de relevés. Seul le cachet d'un bleu sombre avait attiré son attention, la faisant ressortir sur les papiers plus clairs.
'' Mes hommages messire,
Vous trouverez sans doute cette initiative de vous écrire un peu cavalière mais je ne pouvais m'empêcher de penser à vous en apprenant vos talents d’astronome. J’aurais aimé pouvoir échangé avec vous sur les astres et le royaume de la nuit, sur vos relevés et vos calculs.
L’hiver approchant, je ne puis m'empêcher de me fasciner pour la pluie d'étoiles filantes du solstice de décembre. Je sais que vous ne comprendrez peut-être pas et serez sûrement méfiant à mon égard mais je gage ma parole et mon âme que le savoir est le seul objet de ma convoitise.
Si vous désirez, à ma plus grande joie, me répondre, vous n'aurez qu'à donner votre lettre à la petite chauve-souris penchée sur votre fenêtre. Dans le cas contraire, je respecterai votre décision et ne vous importunerai plus. Sachez cependant que je ne peux révéler mon identité sans vous mettre dans une position plus qu’inconfortable, et que je ne vous forcerez pas à révéler la vôtre. Mais si vous voulez connaître mon nom, je vous le donnerez sans mensonge.
Personne ne devrait regarder un ciel étoilé pour se noyer dans la noirceur de l'espace.
J'espère avoir de vos nouvelles, bien amicalement,
Azimech. ''
Songe avait relu sa lettre plusieurs fois en sinterrogeant sur l’identité de l'inconnu.
La signature l’intriguant tout particulièrement.
Azimech est l'autre nom de Spica, l’étoile la plus prudente de la constellation de la Vierge. Les natifs de ce signe astrologique étaient des gens à l'esprit critique et analytique développé, des personnes têtues et parfois inflexibles, très observatrices et efficaces.
Est-ce que son mystérieux interlocuteur avait glissé là un indice ?
En tout cas, cette personne venait d’éveiller sa curiosité et ne semblait pas menaçante, plutôt avenante même. Et la dernière phrase le laissait perplexe. Ne pouvant résister, il prit du papier et une plume trompée d’encre et commença à écrire.
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