Chapitre 7

 Noeul fut réveillé par un bruit.

Une porte qui s'ouvrit et des pas s'approchèrent doucement de lui, comme si la personne ne voulait pas lui faire peur.

Puis, une voix lui dit :

— Nong ? Nong, faut te réveiller. Il est 9 h.

9 h ? Il avait autant dormi que ça ? Il devait être vraiment épuisé pour avoir dormi aussi longtemps. Mais soudain, le jeune homme fit un bond. Il était dans la chambre de Boss !

Il s'était levé aux aurores pour avoir une chance de pouvoir dire au-revoir au militaire avant que ce dernier ne disparaisse pour une mission dont il n'en connaissait pas le contenu.

Du regard, il étudia l'endroit où il se trouvait avant de découvrir le Sergent Prawae accroupi à côté du lit.

— Salut, l'entendit-il lui dire. Bien dormit ?

— Je... Je sais pas... bredouilla le garçon, un peu perdu.

— Prends ton temps, je te dépose ?

— J'ai... Je suis venu avec ma voiture, avoua le danseur.

— Ok. Rejoins-moi dans le couloir quand tu es prêt à partir.

Noeul hocha la tête et attendit que le bêta ne sorte pour s'étirer et reprendre un peu le fil de ses pensées. Il avait beaucoup pleuré, s'était endormi dans l'odeur de l'alpha.

Il se leva, tituba, mais réussi à se rattraper et entreprit de refaire le lit comme il l'avait trouvé.

Une fois plus frais, il quitta l'endroit pour rejoindre Prawae et Peat qui se trouvaient devant la porte.

— Tu te sens plus reposé ? demanda le médecin.

— Je sais pas si on peut dire ça, lui répondit-il.

— Tu veux qu'on te ramène ?

— Il m'a dit qu'il était venu en voiture, lui apprit Prawae.

— Ok. Ça va aller pour le travail ? T'auras assez de temps ?

— Oui, pas de soucis.

Noeul ne voulut pas s'éterniser ici. Étrangement, il ne s'y sentait pas bien. Peut-être parce qu'il avait le souvenir du Caporal et de leurs au revoirs qui lui compressait le cœur. Il prit alors congé et se dirigea vers sa voiture.

Une fois installé sur le siège passager, il laissa sa tête aller contre le dossier, poussa un long soupir douloureux.

— Qu'est-ce qu'il m'arrive ? laissa-t-il sortir. Pourquoi est-ce que je suis comme ça ? Je le connais même pas !

Des larmes se mirent à couleur sur ses joues. Est-ce que c'était ça, trouver son alpha ? Découvrir sa moitié et en être séparé sans être marqué ? C'était trop déroutant, trop douloureux. Il ne savait pas si ce qu'il ressentait était réellement ça, mais tout tendait à croire qu'il était bel et bien attaché à cet homme.

— Je suis fatigué... je crois... murmura-t-il, la tête posée sur son avant-bras, contre le volant de sa caisse.

Il démarra le moteur et quitta les lieux pour retourner chez lui afin d'y prendre une douche froide, espérant que celle-ci le réveille bien.

Il se changea et quitta son appartement pour rejoindre l'agence A où il devait commencer à travailler. Il se gara dans la rue, pas très loin de l'entrée du complexe, descendit, verrouilla sa voiture et prit une grande inspiration, pour se donner du courage avant de marcher vers le bâtiment.

Il grimpa les quelques marches puis pénétra dans le grand hall très chic. Il aperçut le comptoir d'accueil et décida de venir s'y présenter pour qu'on puisse lui donner la direction de son lieu de rendez-vous, car il devait rencontrer le directeur et son nouveau manager. Il devrait signer des dossiers, probablement raconter ce qu'il s'était passé et pourquoi il était là.

— Bonjour, fit une femme, un casque micro sur la tête, ne le regardant pas d'abord, puis, après un instant sans réponse, leva les yeux et sursauta.

Rêvait-elle ? Probablement.

— Bon-Bonjour, bredouilla-t-elle de nouveau, peu certaine de ce qu'elle devait faire face à cette personne.

— Bonjour, Phi. J'ai un rendez-vous avec le directeur et le manager de l'équipe B, lui dit Noeul.

— Ton... Ton nom, jeune homme ?

— Nuttarat Tangwai, répondit-il. Noeul Nuttarat Tangwai.

Elle tapa fébrilement le nom sur son logiciel pour découvrir qu'elle ne s'était pas trompée.

— Il est prévenu, dit-elle enfin, la voix plus éclaircit. Excuse-moi, tu es Eul, n'est-ce pas ?

— Euh... Oui, c'est moi, pourquoi ?

— Ah ! s'exclama-t-elle avant de se reprendre. Je le savais ! Je suis une grande fan de ce que tu fais ! J'ai adoré ta vidéo avec les Stray Kids !

— Euh... M-Merci, bafouilla le jeune homme, le rouge lui montant aux joues, peu habitué, voire pas du tout, à ce qu'on le complimente avec autant de sincérité.

— Est-ce que je peux te demander de me signer un autographe ?

— Après mon rendez-vous, si vous voulez, lui proposa le jeune homme, quelque peu gêné.

— Oh ! Oui, pas de soucis ! Tu vois les ascenseurs ?

— Oui.

— Tu prends celui de droite et tu vas au cinquième, c'est là où tu seras pris en charge par la secrétaire de Monsieur Gray.

— D'accord. Merci beaucoup, Phi.

Elle lui adressa un vrai sourire sincère et chaleureux. Il la quitta pour suivre ce que la femme lui avait indiqué et fini par arriver au cinquième étage.

Il tourna la tête pour trouver à sa droite un bureau avec une femme assise derrière, tapant sur son clavier. Il s'en approcha.

— Bonjour, dit-il.

— Bonjour, vous avez rendez-vous ?

— Oui, avec Monsieur Gray.

Elle lui demanda son nom et l'heure où il devait le rencontrer puis fut invité à attendre sur un siège, qui faisait face à une grande porte où était vissée une plaque portant le nom du directeur.

Noeul était stressé. Même s'il avait déjà rencontré le directeur de l'agence A, la plus connue du pays, il n'avait jamais ressenti un stress aussi grand, sûrement dû à sa grande fatigue et son état émotionnel.

— Monsieur Tangwai ? l'appela la secrétaire.

— Ou-Oui ?

— Le directeur est prêt à vous recevoir, lui annonça-t-elle.

Il se leva, le corps totalement raidit par la tension qui régnait en lui, s'avança et toqua à la porte.

Une voix l'invita à entrer.

À l'intérieur, il y retrouva Monsieur Gray, le directeur qu'il avait déjà eut la chance de rencontrer, deux ans auparavant, l'or d'une représentation de talents menée par son ancienne agence. À côté de lui se trouvait une femme et un homme qu'il ne connaissait pas.

— Bonjour, dit-il en les saluant respectueusement.

— Ah ! Voilà notre petit prodige ! s'exclama fièrement le directeur. Installe-toi.

— M-Merci.

Noeul s'exécuta, peu sûr de ce qui allait se passer dans les secondes suivantes.

— Nous avons reçu ton dossier, annonça le directeur. Ton ancienne agence nous l'a fait parvenir. Ajouté à ça le rapport militaire et médical de ce qu'il s'est passé. J'ai eu une conversation avec le Caporal Sermsongwittaya sur le sujet. Un homme assez froid, mais qui a bien voulu partager avec nous les détails de ce jour. De plus, une enquête interne a été effectuée dans ton ancienne agence, par le directeur. Il est sincèrement désolé de tout ce que tu as subi. Il m'a demandé de bien prendre soin de mes talents et de faire en sorte qu'il n'y ait aucun lynchage de ce genre chez nous.

Noeul resta silencieux durant toute la tirade de l'homme qui avait parcouru le dossier de long en large et en travers. La femme et l'homme installés à côté de lui, ne lâchaient pas Noeul du regard, ce qui le rendait très nerveux.

— Madame Leroy ta chorégraphe et Monsieur Prat ton nouveau manager, expliqua le directeur, captant le regard peu assuré du jeune homme.

— Bonjour, Nong, firent-ils.

— Bon-Bonjour... Phi...

— Tu n'as rien à craindre, Je connais ton ancien manager, un peu trop bien pour savoir que tu n'as pas commencé dans la vie avec une personne très... consciente de ses propres gestes, soupira Monsieur Prat, l'homme qui allait se charger du jeune homme à compter de maintenant.

— Autant dire que c'était déjà un vrai con quand nous étions à l'école, continua la femme.

Alors ces trois-là se connaissaient d'avant ? Pas étonnant qu'ils réagissent ainsi. Mais ce n'était pas le moment de se laisser aller, Noeul savait, de par son expérience, qu'on se montrait doux le premier jour pour ensuite tout jeter pour dévoiler sa véritable nature. Il devait être prudent.

— Nous irons te faire visiter après que nous aurons lu et signé ces documents avec toi, indiqua le directeur.

L'entrevu ne dura pas plus de trente minutes avant qu'il soit embarqué pour une visite guidée des différents étages et espaces du building. Quand ils arrivèrent aux vestiaires, on lui montra le sien et il put y ranger déjà sa tenue de sport, ses baskets et une serviette qu'il avait embarqués avec lui. Il plaça un cadenas et bloqua l'accès avant de repartir en exploration. On lui montra les douches, les salles d'entraînements, les deux salles de sport et fitness, une autre pour la relaxation. Il fit la rencontre de l'équipe avec qui il serait à compter du lendemain.

— Bonjour tout le monde ! s'exclama Monsieur Prat.

La troupe se mit en ligne, saluant le manager puis la chorégraphe avant de remarquer le directeur ainsi qu'une nouvelle tête.

Il y avait huit garçons pour environ neuf filles, ce qui faisait presque équitable. Ajoutant Noeul, le compte était bon.

— Oh ! J'y crois pas ! s'exclamèrent plusieurs d'entre eux. C'est Eul !

— Oh, mais... oui ! C'est lui !

— Monsieur Gray, est-ce que ça veut dire que...

— C'est exact. Je vois que ta notoriété dépasse le stade de juste influenceur, s'amusa l'homme. Votre tout le monde ! Suite à une histoire avec son ancienne agence, il a été décidé que Noeul ferait partit de notre agence. Je compte donc sur vous pour l'accueillir comme il ce doit et que vous puissiez le former aux chorégraphies que vous avez dans votre répertoire pour la présentation de la semaine prochaine !

— Oui, Monsieur Gray ! s'exclama le groupe en entier, visiblement très heureux d'avoir un nouveau venu, mais surtout d'avoir une certaine vedette d'internet dans leur troupe.

— Bien, je vous laisse. Noeul, voici tout un dossier où tu y trouveras ton badge, ta carte d'employé, et divers autres documents ainsi que ton emploi du temps. Tiens-moi informé si celui-ci est trop chargé pour toi, nous essayerons de le négocier sans que ça n'impacte trop ton groupe.

— Entendu, merci, Monsieur, lui dit le jeune homme en récupérant un dossier assez gros avant de le voir partir.

Une fois le directeur ailleurs, le groupe encercla Noeul qui eut un mouvement de panique. Il sursauta et se recula d'un pas, surprenant tout le monde.

— Dé... Désolé, je...

— Ne t'inquiète pas, lui dit son nouveau manager. Ils sont juste trop heureux de te voir, c'est tout.

— Oui, désolé, on ne voulait pas te faire peur.

— C'est vrai ! On a vu la vidéo où tu parlais de ton agression... On est désolé... On aurait dû y penser...

— Ce... C'est rien, bredouilla le garçon qui tenta de calmer les battements de son cœur. Je... Ça va prendre un moment avant que j'arrête de sursauter à chaque fois que je suis encerclé...

Sous l'émotion, le groupe baissa la tête, partagé entre la honte d'avoir été trop excité et de ne pas avoir pris en compte son traumatisme récent et d'avoir justement oublié cette partie de son histoire.

Noeul fit alors le premier pas, après quelques minutes de silence et leur proposa qu'ils lui montrent la chorégraphie la plus récente à présenter pour l'évènement. Surexcités, ils se mirent en place. Madame Leroy lança la musique et Noeul étudia chacun des danseurs, ses pas et les emplacements pour pouvoir essayer une dizaine de minutes après. On lui proposa de se mettre au centre, afin de pouvoir répéter les pas de base avant d'expérimenter les plus complexes ainsi que quelques pirouettes.

Au départ, il eut un peu de mal, mais il prit vite le rythme, et après une heure d'entraînement, il réussit à maîtriser une partie de la chorégraphie. Madame Leroy lui confia un enregistrement de la session afin qu'il puisse l'étudier chez lui. On lui proposa de venir manger avec la troupe, mais, épuisée, Noeul décida de rentrer. De plus, il avait un rendez-vous important le lendemain avec une star qui avait accepté de le faire venir dans son studio de Bangkok afin d'y enregistrer une nouvelle musique dans laquelle il apparaîtrait en tant que featuring*.

— Oh ? Sérieux ?

— On attend la vidéo avec impatience ! s'exclama Pam, le leader de la troupe.

Un grand gaillard qui maîtrisait les sauts périlleux et toutes sortes d'acrobaties. Il était le type de gars qui menait tranquillement sa bande vers les plus hauts sommets sans jamais se mettre vraiment en avant.

— Merci, Phi, dit Noeul. Promis, une prochaine fois, c'est moi qui invite.

Les sourires élargis jusqu'aux oreilles, illuminant leurs visages, fit rire le garçon qui les salua et quitta l'agence, mais fit un arrêt à l'accueil.

— Phi ! s'exclama-t-il en apercevant la femme qui lui avait indiqué la direction pour rencontrer le directeur.

— Oh ! Nong Eul ! Tu ne m'as pas oublié !

— Non, sourit-il. Vous avez un stylo ?

— Oh oui, tiens mon mignon ! lui dit-elle en ouvrant son carnet personnel, avec un stylo.

Noeul rougit, il les lui prit et signa un petit mot de remerciement « pour une gentille grande sœur avec un bon cœur ».

Il lui rendit le tout et lui souhaita une bonne fin de journée. Il quitta enfin le bâtiment, retourna à sa voiture pour prendre la direction de la caserne, mais s'arrêta avant pour récupérer de quoi boire et manger pour Peat et Prawae ainsi que les infirmières qui s'étaient occupées de lui ce fameux jour.

Quand il arriva devant l'entrée des visiteurs, il se présenta comme étant Eul, mais immédiatement, la barrière se leva sans qu'on lui demande la moindre information supplémentaire.

— Vous êtes le compagnon du Caporal, non ? sourit le militaire qui faisait la sécurité, un grand sourire plaqué sur le visage.

Noeul ne sut quoi lui répondre hormis un sourire timide. On le laissa entrer et il alla se garer. En entrant dans le bâtiment, il demanda à voir le docteur Chaijindar et le Sergent Prawae. La femme le détailla étrangement, téléphona au médecin.

— Bonjour, Docteur. Un jeune homme est à l'accueil et demande à vous voir ainsi que le Sergent Prawae. Oui ? C'est quoi votre nom ?

— Noeul Nuttarat Tangwai, mais ils me connaissent sous le nom de Eul, répondit le garçon peu à l'aise.

— Il a dit... Oh, d'accord. Oui, je le fais patienter. Oui, Docteur, je m'en occupe.

Elle raccrocha et lui demanda d'attendre sur l'un des fauteuils peu confortable tandis qu'elle appelait le bêta qui accouru une fois l'appel terminé.

— Eul ! s'exclama-t-il en déboulant, une dizaine de minutes plus tard, le trouvant installé sur un siège, le regard perdu dans les photos de l'armée basée dans la caserne.

— Phi ! fit-il en se levant.

— Tout va bien ? Pourquoi tu es là ? s'enquit ce dernier, visiblement inquiet.

— Je voulais passer pour donner ça, répondit le jeune homme en lui montrant les sacs de boissons et nourriture.

— AH ! soupira le bêta, soulagé. Tu m'as fait peur ! J'ai cru qu'il t'était arrivé quelque chose de grave ! Le Caporal m'aurait tué si ça avait été le cas.

— Pardon, Phi. Je ne voulais pas te faire peur, sourit le garçon.

— C'est pas grave. Tu voulais voir le Doc ?

— Oui.

— Viens, suis-moi. Merci, N'Tam.

— De rien, répondit la femme qui ne leva même pas le regard vers eux alors qu'ils quittaient l'accueil pour traverser un couloir puis un deuxième sur leur droite afin de pénétrer dans l'aile médicale.

Le Sergent toqua à une porte et la voix de Peat les invita à entrer.

— Eul ? s'étonna l'oméga.

— Re bonjour, Phi. Je viens vous remercier pour tout ce que vous avez fait pour moi.

— C'est pas utile, dit-il, mais il fut interrompu par le jeune homme têtu qui déposa devant lui un buble tea et des snacks.

Noeul en tendit à Prawae et fit la distribution auprès des infirmières tout en leur adressant un mot de remerciement pour l'avoir aidé quand il avait été agressé. Les femmes présentes étaient très contentes et les quelques hommes qui travaillaient avec Peat lui adressèrent un sourire presque paternel.

Le jeune homme ne resta pas longtemps. Juste pour distribuer des mercis et des boissons, discuter un peu avec Peat, Prawae et le staff avant de repartir chez lui pour prendre une douche bien méritée et de jeter un œil sur le planning fourni par Monsieur Gray.

En soit, il n'était pas trop chargé, il laissait même assez d'espace au danseur pour y placer ses différents rendez-vous professionnels et des visites à la caserne.

Plus tard, alors qu'il allait s'allonger, il ne put s'empêcher de penser au Caporal. Était-il arrivé ? Allait-il bien ? Est-ce que Peat avait eut des nouvelles de son chéri ? Qui était mort ? Qui vivait encore ? Que se passait-il ? Il eut une soudaine envie de prier. Il mit les mains l'une contre l'autre, ferma les yeux et pria pour la survie de tous, qu'ils soient vite revenus et en bonne santé.

Mais est-ce que quelqu'un l'entendrait ? Probablement pas... Il s'endormit, le cœur lourd et le désir de retrouver l'alpha pour se blottir contre lui et pouvoir enfin sortir la tête de l'eau.

— P'Boss... murmura-t-il, laissant une larme glisser sur son oreiller.

***

*Mot anglais utilisé dans la musique pour parler d'une chanson avec la collaboration d'autres artistes

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