Chapitre 29 • Coucher de soleil

Point de vue Gabriel

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Un adjectif pour décrire ma semaine : éreintante. Je n'ai pas eu une heure tranquille. Entre les cours, les entraînements de basket, un restaurant entre amis pour fêter la majorité des jumeaux — sans aucun drame cette fois — et une virée dans le Massachusetts afin de jouer contre les River Hawks, je suis épuisé.

Toutefois on est samedi, la fin de journée arrive et au réveil d'une longue sieste, je me suis enfin décidé à revoir Hailey. J'ai fait roulé Bob quinze minutes et voilà le résultat, je suis devant chez elle, mon cul incrusté dans la banquette et clairement angoissé.

Suite à la crise de Fallon, impossible pour moi de quitter la soirée. Ma bande de potes, c'est ma famille, et ils avaient besoin que je reste. J'aurais pu et dû rattraper le coup vite mais, entre ma panne de réveil lundi et cette semaine plus que fatigante, je n'ai pas eu la moindre occasion. Sans oublier la révélation de ma nuit avec Bethany. Je ne me sentais pas de revenir vers elle avec un texto idiot.

J'ai fait traîner les choses et désormais je regrette un peu. Je suis comme un abruti dans ma voiture, à stresser de retrouver une nana. Une nana que j'ai déjà baisée, en plus ! Heureusement que Tyler ne le sait pas, il se foutrait de ma gueule.

Pour éviter une rencontre gênante au cas où sa mère est présente, je reste assis dans la Rolls et tape un message.

Tu es à la maison ? Je suis garé devant.

Je regarde la façade à travers ma vitre. Aucun mouvement près des fenêtres, les rideaux sont fermés et immobiles. Je me suis pointé comme une fleur, sur une impulsion. J'espère ne pas avoir fait la route inutilement.

Une minute plus tard, le portable vibre entre mes doigts. Sa réponse est arrivée vite. C'est bon signe, non ?

Pourquoi ?

Je fronce les sourcils. Comment ça, « pourquoi » ?

Tu n'as pas envie de me voir ?

Sept jours, c'est long. Peut-être que Hailey m'a trouvé un remplaçant — je suis persuadé d'être le titulaire maintenant — mais je compte bien revenir dans la partie, ne plus déserter le terrain et garder le titre de meilleur joueur.

Tu dates.

D'accord, ça ne sent pas les retrouvailles euphoriques. Elle ne me répond pas vraiment et les deux mots sonnent comme un reproche. Qui est mérité, j'en suis conscient.

Justement. Je ne te manque pas ?

Je tente de l'amadouer.

Tes répliques sont hyper clichés.

Une autre esquive et un autre tacle : mes belles paroles sont vaines. Le contraire m'aurait étonné, tiens !

Je suis plus doué en vrai. Sors.

Ma patiente aux oubliettes, je finis par lui donner un ordre. Essayer de me rattraper oui, mais tourner en rond dix ans non.

Par je ne sais quel miracle, le ton autoritaire fonctionne. Ou presque.

Je ne suis pas chez moi. J'étais dans le quartier français et je rentre à pied, je ne vais pas tarder.

Elle apprécie ce quartier ? Avec ses boutiques de créateurs parisiens, ses cafés par dizaines et ses galeries d'art ? Je pensais que Raph était la seule. Mais ok, puisque je suis ici et que je lui dois bien ça, j'attends la fin de sa balade.

Pas de souci, je serai encore là.

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Je patiente un long moment, voire très long, et me demande si Hailey ne joue pas volontairement les escargots. Je passe le temps en discutant sport avec Bob, en traînant sur les réseaux, en sortant de la voiture pour fumer quelques clopes. Je m'occupe quoi, de façons bonnes ou mauvaises, avant de voir enfin une silhouette familière apparaître. Mon dos appuyé contre la portière, une nouvelle cigarette à la bouche, je reconnais sa tignasse châtain au bout de la rue paisible. Ça me fait plaisir de la retrouver et ce malgré les rides de perplexité qui barrent son front. Je suis habitué à ça, son air grognon permanent et ma capacité innée à la faire râler.

Je détaille sa tenue pendant qu'elle marche. Toujours aussi belle sans rien faire pour. Un pantalon marron large, un pull blanc avec de grosses mailles et un col, un chignon à moitié défait... Mais ça suffit largement, car son visage dégage un truc particulier et que ses looks décontractés lui correspondent. Je la préfère ainsi : simple, naturelle, elle-même.

— Tu marches toujours aussi doucement ? je lui demande quand elle se rapproche. Ou bien tu retardais ce moment ?

Hailey me jette un sale regard en faisant les derniers pas.

— Le retarder, c'est plutôt ta spécialité. Tu vas quand même jusqu'à sécher nos enseignements communs. Tu as peur de moi, Gabriel Prescott ?

Elle reste à un bon mètre de sécurité et je ricane en crachant la fumée. Moi, peur d'elle ? Dans ses rêves !

— Mon réveil a juste omis de sonner lundi. Tu n'es pas si intimidante, Hailey Clark.

Mon air hautain de sortie, je plonge mes yeux dans les siens en affirmant cela. Elle croise les bras et arbore une mine sévère.

— Alors explique-moi pour Bethany sans jamais détourner le regard.

À l'entente de ce prénom, mes yeux dévient automatiquement sur le côté. Et merde...

Lorsque je reviens sur elle, je remarque un haussement de sourcil fier, du genre « Ah, tu vois ! », et il m'agace plus que de raison. Parce que oui, je suis impressionné par cette fille minuscule.

— D'emblée le sujet qui fâche ? Aucun « je suis contente de te revoir » ou « j'ai grave envie de toi » ? Même pas de « cette semaine est passée trop lentement » ?

Hailey observe derrière elle avec sa main comme visière, puis se retourne en mimant l'incompréhension.

— Pardon, c'est à moi que tu parles ? (De l'index, elle montre sa propre personne.) Depuis quand je sors de telles conneries ?

Je rigole avant de prendre une énième taffe.

— Environ jamais. Mais je sais que tu les penses, c'est le plus important.

À ma grande surprise, elle ne me contredit pas. Elle hésite, me jauge en penchant la tête, et finit par hausser les épaules.

— Peut-être bien.

Dans ma cage thoracique, mon cœur bat soudain plus rapidement. C'est un aveu implicite. En tout cas, pour elle, ça y ressemble beaucoup, et il me donne le sourire. Quel cauchemar ! On dirait un ado tout juste pubère.

— Tu m'as manqué aussi, bébé.

Je fais genre de prendre ça à la rigolade, affiche un rictus moqueur et joue le mec flatté en plus du séducteur complètement naze. Hailey simule une envie de vomir.

— Beurk. Je peux faire un effort, tenter d'être « mignonne » ou au moins sympathique, mais je refuse toute utilisation des surnoms.

Elle mime les guillemets, ce mot la rebutant. J'aime son caractère. Son côté farouche, désobéissant, inapprivoisable. Cette meuf est tellement différente. Elle change des gens auxquels je suis habitué : polis, qui cirent les pompes, fades et insignifiants, qui adulent mon père, respectueux mais ennuyants. En résumé, sans aucune personnalité et soumis. Je dois être maso ou jaloux car elle respire deux notions qui me paraissent lointaines voire inatteignables : d'abord une liberté éternelle, puis un courage à toute épreuve. Parce que, en réalité, je suis exactement comme toutes les personnes que je viens de critiquer : victime d'un monde basé sur le paraître.

— On va en parler ailleurs ? Des surnoms qu'on peut se donner ? Et bien sûr de mes conquêtes, vu que mon palmarès semble hanter tes nuits ?

Cette proposition quitte mes lèvres toute seule. Je veux prolonger cette discussion, passer ma soirée à la taquiner, continuer à être fasciné par son indépendance. Et je veux faire ceci dans un lieu précis, où je trouve refuge lorsque j'ai besoin de me sentir plus comme Hailey et moins comme un jeune homme insipide.

Elle ne relève pas ma vanne et plisse les yeux, soupçonneuse.

— Où donc ?

— Un endroit génial pour admirer le coucher du soleil.

Elle hausse les sourcils jusqu'à la racine de ses cheveux. Apparemment, le choc est violent.

— Tu m'emmènes voir le coucher du soleil ? Toi ? Il va me déplaire à ce point-là, ce passif avec Bethany ?

Ça lui paraît inconcevable et je me remets en question. Suis-je un tel connard ? On couche ensemble mais on peut aussi... Je sais pas, faire d'autres trucs ? Ok, les anciennes, je me contentais de les sauter, mais Hailey est trop intéressante pour avoir un comportement similaire.

Je me baisse pour éteindre la clope, frottant son extrémité rouge contre le goudron. Pendant ce temps, je réfléchis à quoi dire.

— Même pas. C'était il y a longtemps, bien avant toi, tes potentiels futurs reproches sont donc infondés, mais ça pourrait être agréable. Impossible de se montrer en public et personne ne traîne là-bas à cette époque.

Elle se fait doucement à l'idée, ne réplique pas tout de suite et me fixe avec une pensée dans le regard : partir en vadrouille avec moi, en plus dans un lieu secret, ressemble à une bêtise pure. Sauf que des bêtises, je lui donne envie d'en faire plein.

— D'accord. Mais avant je récupère un truc chez moi, puis on fait un détour sur la route. Ok ?

Elle amorce déjà un pas vers la maison et je me retiens de lever un poing victorieux. Elle a dit oui et je suis heureux comme l'idiot du village. Comme lui refuser quelque chose ?

— Ok mais grouille-toi. Tu impressionnes peut-être un Prescott, par contre le soleil non et il ne t'attendra pas...

~~~

Quasi une demi-heure plus tard, on est assis sur un plaid immense en train de manger la nourriture bien grasse achetée chez In-N-Out. Après sa longue promenade, Hailey mourrait de faim et a imploré Bob de trouver un fast-food en chemin. Résultat, elle dévore actuellement un burger plus gros que sa tête. Je n'exagère même pas, il a genre deux steaks et trop de cheddar, sans compter le bacon qui dépasse.

On se trouve dans mon endroit préféré, sur une plage derrière les falaises accessible seulement via un escalier incrusté dans la pierre. Isolés de Wealthshire, abrités du vent et réchauffés par un mini feu de camp fait avec mon briquet et quelques morceaux de bois, on se régale tous les deux face au soleil couchant. Entre l'océan à perte de vue et les goélands qui chantent en volant au loin, je me sens plus détendu que tout à l'heure.

Pendant le trajet, on a détaillé nos semaines respectives et mon emploi du temps chargé a justifié son pardon. Dieu merci, aucun remplaçant mentionné de son côté. Elle commence maintenant un récap des TD que j'ai séchés lundi et je l'écoute parler sans avouer que Tyler m'en a déjà fait un.

Je kiffe son enthousiasme, le fait qu'elle parle vite et soit à fond dans ce qu'elle raconte. Ses cours à Bayford lui plaisent et je me demande si elle a toujours été bonne élève. Sinon, les profs de son ancienne fac étaient tout bonnement inintéressants parce que ses études ont l'air de beaucoup compter. Ça me plaît, cette intelligence et son dévouement. Les gens de notre espèce, venant des populations aisées et ayant des familles blindées qui payent leur école, ne sont habituellement pas aussi impliqués dans leur cursus et se moquent des notes obtenues. Tant que leurs parents continuent à raquer, le diplôme est garanti, et ils le savent tous pertinemment. Je ne vais pas faire le mytho, dans certaines matières au fond barbant ou aux enseignants désagréables, je suis le premier à m'en rappeler.

Son monologue terminé, Hailey me lorgne en faisant une tête bizarre. Je mange cinq frites simultanément avant de parler.

— Quoi ? J'ai du ketchup sur le menton ?

J'attrape une serviette mais elle fait « non » de la tête.

— Les frites après le burger ? Qui commet un tel sacrilège ? Ils se mangent ensemble !

Je ne suis pas d'accord. Pas du tout.

— Non, ça modifie le goût en bouche, les deux éléments se perturbent et chaque burger mérite son propre instant de gloire.

Quand elle a proposé un fast-food, j'étais plus que ravi. Avec le basket, notamment en pleine saison universitaire, je surveille de près mon alimentation et je n'avais pas fait un tel écart depuis longtemps.

Pour toute réponse, elle m'adresse un regard peu convaincu et me pique une frite. Je claque sa main trop tard, elle l'a déjà chopée et mâche avec un sourire espiègle.

Cette voleuse m'en prend une deuxième, puis une troisième et une quatrième, et je ne dis rien. Ouais, je laisse faire. Elle me rend presque gentil...

— Cette plage est vraiment déserte. (Elle observe tout autour de notre campement improvisé.) Cet été, je venais nager et bronzer pas loin, pourtant je n'avais pas remarqué les escaliers quand je prenais le sentier en haut des falaises et non la grande route.

— Il faut être de Wealthshire pour connaître. Comme sur toutes les plages, il y a du monde pendant les vacances et calme plat dès la rentrée, excepté de bon matin avec les surfeurs.

En tailleur face à moi, Hailey fourre tous nos emballages dans le sac marron, ne gardant que son Coca à peine entamé.

— Tu viens souvent ?

— À chaque fois que Jack me gonfle tellement que je suis incapable de rester au palace, dans le même immeuble que cet enfoiré. Donc souvent, oui.

Elle hoche la tête et paraît cogiter.

— Tu le détestes sincèrement.

Je lâche un rire amer. Besoin de réfléchir pour conclure une telle évidence ? Sérieux ?

— Ce n'est pas flagrant ? Ma prison a beau être dorée, haïr la personne à cause de qui je suis enfermé reste normal.

— Tyler a utilisé la prison comme métaphore, lui aussi. (Je ne suis pas étonné, il connaît bien la situation.) Mais avant toute l'histoire de faux couple, tu le haïssais déjà, non ?

Elle replie les jambes contre son buste avant de tendre ses paumes vers le feu. On est protégés de la brise marine grâce aux falaises et les flammes dégagent une chaleur bienvenue, c'est parfait.

— Évidemment. Il y a tant de raisons pour.

Elle pince ses lèvres, réprime un « Lesquelles ? » et tente une seconde approche. Elle aurait dû continuer sur la première, je me sens prêt à lui répondre.

— Et ton frère, pourquoi tu le détestes ?

À force, je ne corrige plus les gens. C'est devenu fatiguant.

— Je ne déteste pas Edward. Je déteste le fait qu'il soit né et le fait même qu'il ait été conçu mais je déteste surtout les conséquences.

Vu son expression, mon honnêteté est une surprise. Impossible d'être plus franc. Edward incarne toutes les choses que je mentionne, il est le défouloir idéal et mon punching-ball vivant, une preuve matérielle de ses crimes que Jack a laissée, mais je ne le hais pas. Pas lui, pas l'être humain, malgré ses nombreux tatouages, ses vêtements bas de gamme, son look de bad boy et sa méconnaissance totale des codes imposés par la haute société. Et je pourrais allonger cette liste !

— C'est quoi, les conséquences ?

Cette fois elle ose. Une part de moi est satisfaite, je ressens l'envie de me confier à Hailey parce que... Et bien parce que je lui fais confiance.

— Le suicide de ma mère.

Voilà, c'est sorti.

Je préfère fixer mes chaussures au lieu de son visage. Je fuis la pitié, elle me rappelle les journalistes hypocrites à cette période et les parents de mes amis, qui me regardaient avec peine. Moi le gamin qui a perdu sa maman, cinq ans et déjà à moitié orphelin, trop jeune pour que les frasques d'un homme mégalomane gâchent sa vie. Comment ont-ils pu espérer un scénario différent ? Avec un mari pareil, la fin tragique était inévitable.

— Je suis désolée. Elle s'appelait comment ?

Je crains de voir une émotion aussi irritante remplir ses yeux mais, à l'entente de sa voix ferme, je finis par me redresser. Aucune pitié, pas de tristesse, uniquement de la colère. J'affiche un léger rictus. Bien sûr, quel autre sentiment venant d'elle ?

— Meghan. (Je prononce tellement peu son prénom...) Edward ne t'en a jamais parlé ?

— Non, on évoque rarement nos passés. Un midi, il m'a juste confié que votre père était infidèle. Il couchait avec sa mère pendant son mariage avec la tienne, n'est-ce pas ?

Je baisse la tête et ne réponds que ça :

— Ouais.

Ça me fait bizarre, elle ignore tout alors que Wealthshire est une petite ville, la plupart des habitants connaît Meghan Prescott et son destin tragique. La jolie fille d'Albuquerque morte par choix à seulement vingt-quatre ans, laissant un petit garçon derrière elle. C'est de notoriété publique, du coup les années passent et je n'ai pas la moindre question.

— Raconte-moi son histoire.

Son intonation est sincèrement intriguée, encourageante. Je ne sais pas où commencer, où finir, mais j'ouvre la bouche et tout sort avec une facilité déconcertante.

— C'était une sorte de Victoria, bienveillante, douce et trop gentille pour ce monde. Pour servir les affaires familiales et surtout mon grand-père qui les dirigeait, un constructeur en bâtiment du Nouveau-Mexique, elle a rencontré Jack un mercredi et le samedi, la cérémonie était déjà organisée. Le mariage était arrangé, pas d'amour, même pas un instant seuls tous les deux avant, juste un intérêt commercial. Elle fêtait à peine ses dix-huit ans, c'était une ado magnifique, blonde et innocente, que ses parents ont littéralement vendue au diable.

Je ravale la boule qui obstrue ma tachée et garde les pupilles rivées au sable. Tout ce que j'explique me dégoûte profondément.

— Jack avait trente balais. Il niquait à droite à gauche, faisait la une des journaux, avait une réputation lamentable et sortait toutes les nuits. Son père en avait ras-le-bol et lui a fait du chantage : soit il était marié dans l'année, soit il quittait le continent et allait suffisamment loin pour continuer à jouer les débauchés sans ternir l'image des Prescott. Bien sûr, cet ultimatum a fonctionné et les mois suivants, il a cherché le meilleur parti des États-Unis. Il voulait se rattraper et avec les noces débuter par la même occasion une coopération intéressante. Quoi de mieux pour une boîte spécialisée en immobilier que de signer un partenariat avec le nouveau constructeur en vogue ? C'était prometteur et la beauté de ma mère ne gâchait rien.

Je serre le plaid entre mes doigts. J'ai les paumes moites et besoin de contracter le poing. Ce n'est malheureusement pas la gorge de Jack mais je tords le bout de fourrure à la place.

— Il a fait profil bas quelques mois, a joué l'époux modèle pour redorer son blason. Les paparazzis étaient fans du couple, le coureur de jupons s'était rangé et il avait désormais une femme hyper photogénique, une bénédiction pour les médias. Ils sont tombés dans le panneau, eux comme absolument tout le monde. Et à cause de sa jeunesse, ma mère était suffisamment naïve pour y croire aussi.

Je relève le nez en sentant du mouvement. Hailey bouge et vient se poser à côté de moi, comme pour me soutenir. Je fixe de nouveau le sol en continuant mon récit.

— Évidemment, ça n'a pas duré, Jack est retombé dans ses travers. Sa vie festive lui manquait, les soirées, les alcools forts, la baise sans attache... Il aimait trop ça et sa nouvelle femme a vite déchanté. Il passait ses nuits dehors, elle se faisait zieuter avec compassion dans la rue et des rumeurs sur les nombreuses tromperies avérées circulaient. Son quotidien est devenu compliqué, entre un mari infidèle et toute une ville au courant, plus une grossesse arrivée très rapidement, elle se retrouvait coincée dans un véritable enfer. Elle a préféré rester digne et garder la tête haute mais un jour, enceinte de moi jusqu'au cou et déjà bien trop salie, elle a reçu le coup de grâce. Il est rentré bourré et a jeté une bombe sans imaginer les conséquences : il attendait un autre enfant avec une autre femme.

La pauvre, voici mon unique pensée. Tous ces détails, je les connais grâce aux journalistes et à une interview bien précise. Quelques jours avant de choisir la paix éternelle, elle a ouvertement balancé mon père et je la remercie chaque matin pour son audace. Certes, personne ne semble lui en tenir rigueur, il est toujours aussi influent, riche et admiré, mais je sais la vérité, je détiens la bonne version, c'est très important pour moi.

— C'était trop. À partir de là, elle ne savait plus gérer et a fait une violente dépression. Je suis né, puis Edward dans la foulée, sans que mon père le cache ou essaye de nier. Il l'a reconnu, lui a donné son nom, a versé une généreuse pension, a gardé sa mère comme employée, car oui elle travaillait dans sa boîte. Bref, il faisait tout correctement avec la mauvaise personne. Manque de respect sur manque de respect, humiliation sur humiliation, jusqu'à ce fameux soir, cinq ans plus tard, où elle a dit stop et a vidé une boîte entière de médicaments.

Hailey pose la tête sur mon épaule, je prends alors une grande inspiration.

— Le lendemain, Edward et sa mère partaient direction la Californie pour fuir un scandale retentissant. Quant à Jack, il a toujours eu une réputation merdique, son entreprise a donc fini par vaincre la crise et ça n'a pas bouleversé sa vie. Le méchant a gagné. Fin de l'histoire.

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La famille Prescott n'a désormais plus aucun secret pour vous !

J'aime voir Hailey et Gabriel comme ça, mims l'un avec l'autre, d'humeur à se faire des confidences, en plein date aussi même si volontairement ils n'utilisent pas le mot...

Leur relation évolue doucement et je les trouve adorables ces deux handicapés de l'amour là 🤧

Charleen,
🖤

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