Fête des mères

Pour cette occasion très spéciale, même si un seul jour ne suffit pas à rendre hommage aux mamans, nous avons proposé aux membres de la CdL de rédiger, en moins de 500 mots, la surprise la plus surprenante qu'ils ont offerte à leur mère / celle que leurs enfants leur ont offert OU d'inventer leur journée de fête des mères idéale.

Pour remercier ceux d'entre eux qui ont pris le temps de fournir quelque chose, et parce que les textes sont tous magnifiques, nous les avons tous inscrit ici.

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Ma journée de fête des mères idéale... Je réfléchis, mais ne trouve pas. En ai-je vraiment une en tête ?

Je pense bien à une journée tranquille, seule – vraiment seule –, en terrasse face à l'océan, un verre de citronnade sur la table, un livre dans les mains. Et... le silence, seulement perturbé par le chant des goélands et le bruit mélodieux des vagues qui meurent sur la plage. Aucun "maman !", prononcé 50 fois dans la journée. Aucun "regarde !" ou "viens !", ordonné par l'enfant ou l'homme, me coupant sans cesse dans mes activités. Juste moi, en tête-à-tête avec mes pensées. L'air iodé me requinque, je quitte le bar et me promène pieds nus au bord de l'eau sur le sable mouillé, la mer me les chatouillant à chaque fois que son écume s'échoue sur la plage. Je peux laisser mon esprit divaguer tranquillement, sans crainte d'être dérangée.

Seulement... Est-ce vraiment une fête des mères ? Être seule en ce jour particulier ?

Alors... Je vois ma fille me préparer le petit-déjeuner et me l'apporter au lit, sans trop renverser, même si j'ai horreur de manger dans ma chambre alors que je suis encore dans mes draps. Elle aurait déposé une fleur pour décorer le plateau sur lequel trônerait son cadeau fait maison, une carte ou une décoration que je regarderais fièrement en lui faisant un câlin. Elle serait douce et calme le reste de la journée, aux petits soins de sa maman. Elle écouterait ce que je lui dis et j'aurais le droit à encore plus d'amour qu'à l'accoutumée.

Mieux encore, une journée avec ma fille et ma mère, les trois générations réunies ensemble pour une journée à la mer – toujours. Nous pourrions prendre le ferry pour nous rendre sur cette île isolée du reste du monde que nous aimons tant. Les deux adultes que nous sommes siroterions un cocktail les pieds dans le sable, regardant la plus jeune faire un joli château qui serait recouvert par le flot. Puis, il nous faudrait rentrer après cette belle escapade, avec ce beau souvenir dans la tête.

Non.

L'idéal ? C'est une journée comme les autres, car c'est tous les jours la fête des mères. C'est vrai, quoi ? Pourquoi nous offrir une seule journée ? Pourquoi devrions-nous penser à ces choses-là – la Saint-Valentin et les autres fêtes en tout genre – une unique fois dans l'année ?

Même si je râle à chaque appel intempestif de ma poupée, même si je souffle à chaque fois que je veux être tranquille alors qu'elle m'appelle une nouvelle fois, même si, parfois – souvent –, j'ai envie de l'étriper, car elle me fatigue par son énergie débordante, elle reste ma plus belle réussite, le cadeau que m'a fait la vie. Alors ma fête à moi, c'est tous les jours avec elle, quand je vois son grand sourire éclairer son doux visage, sa joie de vivre exulter à chaque instant, sa façon de montrer qu'elle est heureuse, tout simplement.

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AnyComeback

Pour la fête des Mères, fête commerciale parmi tant d'autres, je dois écrire un petit texte. Réfléchissons. Humour ? Texte décalé ? Fiction farfelue ? Souvenir ? Les idées tournent et virevoltent alors que dans un coin de mon cerveau une lueur tremblote. Je vais y céder. Ici nous sommes entre nous sur le divan psychanalytique de la CdL.

Maman, ce mot ne franchit plus guère mes lèvres depuis quelques années, depuis que tu nous as quitté. Certes je parle de toi, je pense à toi. Mais le mot reste bloqué. Comme restent coincées tant de choses en moi. Et plus encore en toi je le sais.

Nous étions, toi et moi, les reines.

Les reines de la non communication. Jamais une fille et sa mère n'ont autant peu parlé. Tu n'avais pas appris, je le sais, n'ayant pas eu de mère toi-même. Mais... sans avoir appris, je tente de ne pas reproduire le schéma maléfique et je parle, je parle avec mes filles, comme la roue à aubes d'un moulin plongée dans un torrent furieux.

Donc tu m'auras appris cela. Indirectement.

Les mots sont importants, ils doivent être dit sous peine d'alourdir votre vie douloureusement.

Aujourd'hui, il me reste une chose à faire. Une chose que je n'ai jamais faite même pendant les dernières heures à ton chevet.

Les mots m'ont brûlé les lèvres, mais ne les ont pas franchies. Il n'est jamais trop tard pour se soulager et laisser son cœur s'exprimer et où que tu sois, au Ciel, dans ta magnifique tombe ou plus vraisemblablement dans nos cœurs, tu es là et tu m'entends.

Maman, je t'aime.

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_hypnose

Derrière les cris enjoués des jeunes enfants amusés, l'adrénaline frémit. Elle se gonfle de l'euphorie grandissante, exacerbée par la file d'attente qui se réduit petit à petit. Les vrombissements des auto-tamponneuses se perdent dans le vacarme de ceux qui beuglent à tout bout de champ les prix exorbitants des barbe à papa, le nuage qui se fond sous les langues candides. Sous l'odeur fétide des beignets qui se baignent, quelques sourires perpétuent les aventures fantastiques des mômes à l'imagination qui déborde. Et quand l'estomac réclame les plaisirs sucrés, l'encéphale cède devant ce stand qui scintille à côté du carrousel enchanté. Quelques pièces glissent des mains, se logent dans d'autres, puis les doigts attrapent le sachet coloré, rempli de churros brûlants et arrosés de poudre blanche.

Notre première fête des mères, mon premier souvenir ; et tout ceux d'après. L'atmosphère en liesse contaminait mon myocarde sensible. Il n'y avait jamais rien de toi ici, il n'était question que de plaisirs d'enfants. L'insouciance des mômes en liesse, sous les ondes des néons ondulants sur les barreaux de fer. Les prunelles clignotent et papillonnent derrière les stands où l'on tire sur des cibles innocentes en espérant partir peluche sous le bras. C'est ce que je faisais à chaque fois, parce qu'il n'y avait rien d'autre à t'offrir. Il fallait dire que j'étais douée, que tu les as toujours accepté et qu'ils sont, aujourd'hui encore, disposés au fond du vieux placard de l'entrée. Je faisais de mon mieux, avec l'impression que ce n'était jamais assez. Enfin, rien ne sera jamais assez. Terrible besoin de se sentir vivre quand les organes malmenés s'invitent à la lisière des lippes desquelles s'échappent en osmose la stupeur des hoquets. La mémoire alors oublie, dans ces instants détachés du réel, et se remplit de rêves aussi immenses que la pointe saillante des buildings qui pourfend la mésosphère.

Je voulais t'offrir la lune, un peu plus à chaque fois. Et à chaque fête des mères, on allait partait quérir le vent en famille, en pleine fête foraine. Et à chaque nouveau tir, chaque nouvelle victoire, s'additionnait les cadeaux d'une enfant, le temps d'une danse sur une musique entrainante. Puis les papillons s'envolaient, méprisant les bouts de fourrures désuets, les boites de chocolat qui finissent beaucoup trop vite et les fleurs rapidement dépourvues de leurs enveloppes enivrantes.

Cette fois, il n'y aura pas de fête foraine pour nous. Tradition familiale qui jamais ne s'éteint, mais qui fait une pause, pour me forcer à t'offrir ne serait-ce qu'une fois ce qu'on dit éternel. Pas de peluche, ni de chocolat, ni de bouquet ; juste une seule rose.

Et un poème de Shakespeare :

« Si un jour je meurs,

Si on m'ouvre le cœur,

On pourra lire en lettre d'or,

Je t'aime encore. »

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Mayarahnee

— Maman, tu t'es trompée !

— Pourquoi ? Elle doit bien être blanche, cette licorne ? Regarde le modèle sur la boîte.

— Mais non, on ne peut pas faire comme le modèle ! C'est im-pos-si-bleuh !

— Et pourquoi pas ?!

— Parce que ma licorne sera comme toutes les autres, si on fait ça... Je veux qu'elle se sente unique, sinon elle va être triste.

Décidément, cette môme déglingue les scores, question sensiblerie.

— D'accord. Quelle couleur, alors ?

— Arc-en-ciel ! Avec des paillettes dans la crinière !

Réfrénant l'envie furieuse de lever les yeux au ciel, j'affiche un enthousiasme surjoué et sors les autres pots de pâte. Arc-en-ciel, sans déconner. On en a pour des plombes, à customiser cette bestiole.

Quand je pense que je suis en train de fabriquer mon propre cadeau de fête des mères... Parce que l'homme n'est pas foutu de gérer son planning et a dû partir en urgence au boulot un dimanche matin. Il me paiera ça. Au bas mot, l'affront vaut deux soirées d'écriture. Trois, si la petite fait une connerie.

Blasée, je me tourne vers la mini catcheuse, assise sur le tapis de jeu. Ses pieds frottant l'un contre l'autre, ma cadette s'emploie toujours à dévorer la collection de Petit Ours Brun. Littéralement.

Assez perturbée à l'idée d'avoir foiré un truc dans l'éducation du bulldozer en costume estampillé « Reine des Neiges », je cille quand l'aînée me rappelle à l'ordre :

— C'est moi qui mettrai les paillettes !

Misère... Au moins, elle apprécie l'activité : tartiner de pâte durcissante la structure licorniesque préalablement assemblée par mes soins. Sur la boîte, le rendu déchire. En vrai... C'est pas si mal, si on excepte le magma rose, jaune et turquoise qui dégouline sur le dessus. Comme si l'une de ses congénères lui avait démoulé un étron multicolore sur la trogne.

— Waaah, elle est magnifique, hein, Maman ?! Je vais la mettre sur ma table de chevet et comme ça, le soir, on pourra discuter, toutes les deux !

Rooh, ma petite rêveuse...

— Dis donc, c'est mon cadeau, non ? On devrait plutôt la mettre dans ma chambre.

Sur la table de chevet de Papa, tiens.

Proprement horrifiée par la suggestion, l'enfant premier ouvrent des billes gigantesques, fronce le museau, pince les lèvres. Bon sang, quelle tragédienne...

— Je plaisante, bien sûr que tu peux la garder avec toi, ta licorne. D'ailleurs, comment tu vas l'appeler ?

— Poussière d'étoiles !

J'acquiesce avec amusement, puis réalise que j'ai zappé la tornade. Merde, je crains le pire... À la fois honteuse et alarmée, j'ose un coup d'œil derrière moi.

Les chaussettes retirées, le casque de chantier sur la tête, l'énergumène déclame les dernières tribulations de Petit Ours à une Barbie dénudée et ligotée contre un pied de chaise.

Bon sang.

Elles sont fêlées.

Toutes les deux.

— J'aime trop les cadeaux de la fête des mères, moi ! piaille ma Précieuse en caracolant autour de moi, sa licorne à la main.

Je soupire. Puis souris, attendrie.

— Moi aussi, Chérie.

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