L'Imposture de Tes Mots
[Cette partie de l'histoire se déroule avant le premier chapitre]
La Lune était pleine et ronde dans le ciel et offrait une lueur fantomatique dans la petite pièce obscure. Cette vision réconfortait le jeune homme qui se trouvait allongé là. Malgré tout, il ne parvenait pas à trouver le sommeil, le dos courbaturé par la dureté du sol qui faisait office de couchette.
Nori tourna ses pupilles orangées vers le fond de la chambre dont les murs étaient tout justes distinguables. La pièce était peinte d'un blanc uni tandis que le sol était composé de simples tatamis. Le mobilier était composé d'un minuscule réfrigérateur, d'un évier, d'un petit placard surmonté de plaques chauffantes, d'une penderie dans le mur, d'une table et d'une chaise. Pas le moindre écran de télévision ni aucune décoration car le jeune homme n'avait jamais pu s'accorder la moindre folie : son appartement au centre-ville coûtait cher et sa paye était des plus misérables. N'ayant plus aucun contact avec sa famille, le brun n'était même pas en mesure de demander un soutien financier à quiconque. Il avait des amis mais il se refusait de leur montrer dans quelle misère il vivait et se gardait bien de les inviter chez lui. Bien souvent, il déclinait leurs invitations au restaurant et toute sortie qui aurait pourtant pu être distrayante pour lui.
Se retournant une énième fois dans son sac de couchage, il tenta de retrouver le sommeil, cherchant à oublier les difficultés de son quotidien. Jamais il n'aurait pu imaginer auparavant que sa vingt-deuxième année se serait déroulée dans de telles conditions.
« Ohé ! Nori ! appela une voix dans la rue tandis que le jeune homme quittait son travail de commis.
- Hum ? répondit le brun en se détournant.
- Nori Taika ! répéta un grand blond en approchant. J'ai bien cru que tu étais en cinquième phase de décomposition au fond d'une rue malfamée ! Il est quand même temps d'investir dans un téléphone mobile !
- Ah... Kuro... Ce n'est pas dans mes priorités, je te l'ai pourtant répété. Je n'aime pas ces gens accros au téléphone et...
- Il y a des forfaits très peu coûteux, tu sais... reprit alors le nouvel arrivant avec sérieux. Honnêtement, on s'est fait du souci pour toi...
- Je suis désolé, j'aurais dû venir vous voir... reconnut le Taika avec amertume.
- Laisse-moi t'aider à porter tout ça ! Tu n'habites pas loin, je crois, non ? demanda Kuro Arashi en attrapant l'un des cartons que son ami portait.
- Non, je t'en prie, je vais me débrouiller ! Je passerai vous voir ce week-end !
- Cesse donc de me contredire ! Je sais que tu as mal au dos, ça se voit à ta posture. Je vais donc t'accompagner. Qu'est-ce que tu as à cacher dans cet appartement que tu n'acceptes jamais que l'on y vienne ?
- Je... Euh...
- Excuse-moi, se rattrapa aussitôt le géant en réalisant son erreur.
- Ce n'est pas grave, tu peux me suivre si tu y tiens. Mais je t'assure qu'il n'y a strictement rien à y voir. »
L'Arashi sembla regretter son geste car son teint s'empourpra légèrement face à la résignation de son ami. Haussant les épaules afin de cacher son malaise, le blond consentit alors à le suivre malgré la réticence qu'il avait ressentie dans la voix de Nori. Ce dernier ne logeait pas très loin de son lieu de travail, lui évitant ainsi de devoir payer une voiture ou les transports en commun.
L'immeuble paraissait ancien et à la limite de l'insalubrité. Kuro déglutit bruyamment en réalisant que ce genre d'endroit existait réellement et pire encore, que l'un de ses proches y vivait. Pourquoi tant de cachotteries ? Le brun ne sembla pas remarquer la surprise et l'inquiétude de son ami et déverrouilla tranquillement la porte de son logement en sifflotant.
« Je suis désolé, il n'y a pas de chauffage pour le moment... Je crois qu'il est en panne mais je n'arrive pas à joindre le propriétaire. Tu peux t'asseoir sur la chaise vers la fenêtre mais je te conseille de garder ton écharpe à cause des courants d'air, il fait plutôt frais ici... Euh... Je peux t'offrir quelque chose à boire ? »
La voix de Nori trahissait son embarras tandis qu'il lisait avec facilité le désarroi peignant le visage du géant qui était resté bouche-bée. L'appartement était si minuscule que sa simple présence semblait gêner les faits et gestes du Taika. Le lit n'était qu'un simple sac de couchage usé et visiblement trop petit pour contenir entièrement la corpulence de Nori. Le mobilier était quasiment inexistant et les placards presque vides. C'était donc une telle misère que son camarade vivait ?
« Nori...
- Je t'en prie, ne dis rien, le coupa alors le brun en comprenant ce qu'il s'apprêtait à dire.
- Je suis désolé mais je ne peux pas accepter ça, reprit Kuro avec sévérité. J'avais compris que tu avais des soucis financiers mais je n'aurais jamais cru que tu vivais dans de telles conditions.
- Ne dis pas de sottises, je vis très bien ici. Quand j'aurai suffisamment d'argent de côté, je m'achèterai quelque chose de mieux. Je ne vis pas non plus sous un pont...
- La température de la pièce doit être d'environ dix degrés, la salle de bains à côté est entièrement moisie et tes meubles presque en décomposition. Et tes placards ! Tout est vide ! Tu n'as même pas de quoi te nourrir correctement !
- Le restaurant dans lequel je travaille m'a laissé emporter ces restes, le propriétaire le fait souvent, tu sais ! Il est très...
- Ne te fous pas de moi ! tonna Kuro en se redressant vivement. Cette bouffe n'est pas saine, tout est périmé et certains sont même dans un état douteux ! Tu ne peux pas manger ça, tu vas te rendre malade ! Hors de question que je te laisse comme ça ! »
Kuro était bien le digne surprotecteur envers ses proches. Sa réputation le précédait et personne n'osait s'en prendre à ceux qu'il couvait de crainte de devoir affronter son effroyable carrure et sa force monstrueuse. Nori, qui s'était d'abord résigné, regrettait finalement d'avoir entraîné son ami ici. Il aurait pourtant dû se douter qu'il aurait réagi ainsi... Cependant, le blond avait vu juste, les douleurs incessantes dans son dos l'auraient probablement obligé à abandonner quelques cartons sur le trajet du retour.
Vivement et sans le consentement de Nori qui voulut le stopper, il ouvrit violemment la porte du placard et attrapa un sac de sport dans le bas de la penderie. L'Arashi grimaça en sentant l'odeur de moisi qui se dégageait du rangement malgré les petits sachets de lavande dispersés. Le blond repoussa vivement son ami qui tituba et tomba assis sur le parquet. Chacun de ses gestes semblait inutile car la poigne du géant l'empêchait d'atteindre la poignée du placard et de refermer celui-ci. En un clin d'œil, ses vêtements furent rangés dans le sac et Kuro l'entraîna en dehors de la minuscule pièce. Nori se débattait vivement et jurait pour tenter de se dégager de cette étreinte embarrassante qui attirait le regard de plusieurs passants. Ils traversèrent plusieurs rues jusqu'à atteindre le véhicule de l'Arashi.
« Tout ce que tu vas faire, c'est m'attirer des emmerdes ! gronda Kuro. Tu aurais dû te douter que je ne resterais pas de marbre face à ta condition. J'aimerais que tu aies agi ainsi dans l'espoir que je t'aide à t'en sortir mais je te connais trop bien : tu n'attendais rien de moi. Alors maintenant, tais-toi sinon ces gens risquent bien d'appeler les flics ! »
Nori se figea derrière son ami, tête basse et son bras n'opposant plus la moindre résistance face au géant qui s'était tourné vers lui. Ce dernier tressaillit lorsqu'il vit des larmes ruisseler sur les joues rosées du brun, finalement vaincu par sa peine. Pourquoi gardait-il tant de souffrance en lui sans jamais en parler à quiconque ? Pourquoi être si distant avec ses proches ?
Soupirant légèrement, le blond relâcha la main de Nori puis s'avança vers lui, passa ses bras autour des épaules de son ami et l'attira contre son torse.
« Tu fais partie de ces personnes spéciales à mes yeux, reprit Kuro avec douceur. Alors comprends ma réaction. Je ne peux pas tolérer ça ! Alors puisqu'il le faut, je t'emmènerai avec moi. Il y a toujours de la place pour toi et tu le sais bien. Suis-moi, tu n'es pas très habillé et tu risques d'attraper froid. »
Kuro déverrouilla la porte de son logement et fit entrer son ami qui gardait un air penaud. Il déposa le sac de sport dans le couloir puis referma soigneusement à clé l'appartement. Un long couloir entièrement peint en blanc donnait sur deux chambres à gauche et sur une cuisine à droite. Enfin dans le fond, le corridor donnait sur un vaste salon équipé d'un téléviseur, de deux imposants canapés, d'un buffet. De nombreuses photos étaient accrochées au mur. Nori se reconnut sur la plupart d'entre elles ainsi que quelques autres amis d'enfance.
Un doux fumet semblait se dégager de la cuisine tandis qu'un crépitement annonçait que quelqu'un préparait le repas.
« Kyo ? appela Kuro. J'espère que tu as préparé une quantité suffisante car on a un invité. Ohé ? Kyo ?
- J'arrive ! J'arrive ! »
Un bruit de couverts dans l'évier puis des pas annoncèrent l'arrivée du jeune homme qui se présenta dans l'encadrement de la porte en esquissant un large sourire dès qu'il reconnut le Taika.
« Nori vit avec nous désormais, lâcha l'Arashi sans la moindre émotion. Je m'arrangerai pour toute la paperasse, ne t'en fais pas. Je dois aller me doucher alors je te laisse installer Nori. Je te suggère de déplacer tes affaires dans ma chambre qui est la plus grande pour qu'on lui laisse un peu d'intimité. Nous, on a l'habitude d'être ensemble de toute façon.
- Kuro, ça ne sert à rien de prendre tant de dispositions pour moi, je peux dormir sur le canapé... s'exclama Nori mal à l'aise. Je ne veux pas chasser Kyo de sa chambre !
- Qu'est-ce que je t'ai dit tout à l'heure ? On ne discute pas mes ordres !
- Ne t'en fais pas Nori, ça va aller ! dit alors Kyo avec un grand sourire. Comme l'a dit Kuro, sa présence ne me dérange pas. Quand on part en vacances, on dort dans la même chambre par souci d'économies, dans des lits séparés bien sûr. Pour le moment, on va juste déposer tes affaires, je m'occuperai du reste après le repas, d'accord ? »
Le blond haussa les épaules puis se retira dans la salle de bains accolée à la droite du salon. Kyo attrapa le sac de voyage de Nori puis entra dans la chambre la plus proche du salon tandis que le Taika prenait soin de refermer la porte derrière eux après avoir vérifié que Kuro rejoignait effectivement la salle de bains.
Kyo Fubuki était un très beau jeune homme de dix-sept ans. Ses cheveux turquoise retombaient avec grâce contre sa nuque et ses grands yeux dorés semblaient pétiller de malice et de douceur. Nori ne pouvait rester de marbre face à lui, il en était conscient. Tandis que son ami vidait son sac sur le lit, ses bras vinrent s'enrouler autour de sa taille fine, le faisant rougir par la même occasion.
Le brun le força à lâcher la pile de vêtements qu'il tenait et à se détourner dans sa direction, le teint violemment empourpré. Fougueusement, il s'empara de ses lèvres comme s'il en avait été privé durant des années et le bascula sur le lit, froissant les habits soigneusement déposés là quelques instants plus tôt. Cependant, un bruit de porte le fit tressaillir et les obligea à se relever comme si rien n'avait eu lieu. Quelques secondes plus tard, Kuro passa la tête par la porte les prévint qu'il était temps de manger tout en esquissant un large sourire.
Fort heureusement, le blond ne remarqua pas le désordre causé en si peu de temps et s'éloigna rapidement. Les deux amants reprirent leur souffle et échangèrent un regard inquiet.
« Je ne suis pas pour l'idée de te laisser occuper la chambre de Kuro, lâcha Nori avec frustration. Je ne voudrais pas qu'il en profite. Je sais très bien ce qu'il ressent pour toi...
- Mais il ne vaudrait mieux pas qu'il découvre ce qu'il se passe entre nous sinon il serait furieux, dit Kyo d'un ton calme. Ne t'en fais pas, il n'osera rien sans mon accord et puis d'un côté, c'est mieux ainsi. Je n'aimerais pas non plus te savoir vers lui. Après tout, par le passé, lui et toi êtes sortis ensemble pensant presque deux ans !
- Arrête de ressasser ça, bougonna le brun. Je ne veux pas remettre ça sur le tapis, d'accord ? C'est toi que j'ai choisi, tu ne devrais pas te poser de questions. On s'est séparé lorsqu'on a compris qu'on ne pouvait pas s'entendre. Nous sommes amis seulement. »
La voix de Kuro les appelant les ramena à la réalité. Tous deux s'empressèrent de rejoindre la cuisine dans laquelle le blond s'était déjà installé sur un siège entourant la petite table ronde et noire. Nori esquissa un sourire en contemplant la cuisine, cet endroit qu'il aimait tant dans cet appartement car il rappelait tant de bons souvenirs passés. Le fond était occupé par une fenêtre en PVC. Sur la droite, une cuisine équipée au mobilier ébène moderne avec gazinière, lave-vaisselle et évier. Sur la gauche, un réfrigérateur côté fenêtre puis une porte donnant sur la salle de bains et un petit vaisselier assorti au reste de la pièce. Les murs étaient peints de blanc et anthracite tandis que le sol était d'un carrelage gris clair.
L'odeur du canard épicé ouvrit l'appétit de Nori qui sentit alors son estomac gargouiller bruyamment. Son assiette était déjà pleine tout comme celle de Kyo. Depuis quand n'avait-il pas eu droit à un tel festin ? Durant tout le repas, Kuro veilla sur lui afin de vérifier qu'il se nourrissait correctement et n'hésitait pas à le resservir lorsqu'il voyait l'assiette vide. Kyo s'amusait de voir tout cela et semblait ravi de pouvoir enfin partager le même toit que son amant.
Tous trois prirent le temps de nettoyer correctement la cuisine avant de vaquer à leurs occupations. Kyo annonça qu'il devait sortir un moment pour une course tandis que Kuro proposa son aide à Nori pour s'installer dans sa nouvelle chambre. Ce dernier accepta avec plaisir, peu enclin à débarrasser les affaires de son ami pour lui voler sa place malgré son accord.
Songeur, le Taika prenait soin de plier soigneusement les vêtements bien souvent bleutés de son amant, les manipulant avec affection, reconnaissant parfois des jours importants à ses yeux au travers des tenues. L'une d'elle le marqua vivement : une chemise blanche surmontée d'une veste noire et bleue lui rappela avec plaisir le jour où leurs sentiments avaient finalement fusionné pour ne faire plus qu'un.
Kuro l'observait avec une certaine frustration : il n'était pas dupe et savait pertinemment que Kyo et lui étaient fermement liés. Leurs échanges de regards passionnés en disaient long sur les sentiments qu'ils éprouvaient l'un envers l'autre. Reposant une pile de livres sur le bureau, il s'approcha furtivement du brun et entoura ses hanches de ses imposants bras tout en posant son menton sur l'une de ses épaules.
Nori tressaillit vivement sous ce contact et tenta de se dégager mais de nouveau, la forte poigne du géant l'empêchait d'esquisser le moindre mouvement. La gorge nouée, il se demanda alors ce que le blond comptait bien faire de lui. Ils étaient séparés depuis longtemps déjà et tous deux s'étaient mis d'accord sur le fait que leur relation ne les menait à rien. Cependant, soulevant son menton à l'aide de son index, l'Arashi déposa un baiser empli de tendresse sur ces fines lèvres qu'il connaissait déjà par cœur, probablement plus que Kyo d'ailleurs. Sa poigne se fit plus forte, lui oppressant davantage sa poitrine déjà secouée par l'émotion. Kuro ne semblait pas désireux de mettre fin à cet échange malgré la réticence de Nori. Puis relâchant sa proie, il esquissa un sourire triomphant puis se tourna vers la porte d'un air faussement surpris. Kyo était là et les regardait avec un profond désarroi.
Le cœur de Nori ne fit qu'un bond dans sa poitrine lorsqu'il reconnut son amant qui s'enfuit bien avant que lui-même ne puisse se libérer de la gênante étreinte de l'Arashi qui semblait lui brûler la peau tant elle le révulsait désormais. Finalement, suite à un bon coup de coude bien placé et face à un Kuro victorieux, le brun parvint à se dégager et à partir à la poursuite de son amant.
Bien plus athlétique que Kyo, Nori le rattrapa sans peine au coin de la rue et l'obligea à lui faire face en l'empoignant par le bras, le faisant brièvement grimacer de douleur.
« Lâche-moi ! Tu me fais mal ! se plaignit Kyo en tentant de se séparer de Nori.
- Non ! s'écria Nori. Je ne te lâcherai que lorsque je t'aurai dit tout ce que j'ai à te dire. Kyo, tu ne dois pas croire ce que tu as vu là-haut ! Il n'y a rien entre Kuro et moi !
- Ce que j'ai vu me prouve le contraire ! s'emporta le Fubuki en s'agitant de plus belle.
- Ecoute-moi, bordel ! Je n'aime pas Kuro ! Ca fait longtemps qu'il n'y a plus rien entre nous ! Tu as toi-même été témoin de tout cela ! Je l'ai quitté parce que je me suis rendu compte que c'était toi que j'aimais ! Kyo ! Ne crois pas ces conneries !
- Vous étiez en train de vous embrasser !
- C'est exactement ce qu'il voulait te faire croire ! Il n'est pas stupide, il a très bien vu qu'il y avait quelque chose entre toi et moi !
- N'importe quoi !
- C'est de toi dont il est amoureux et il essaye d'utiliser ce malentendu pour te voler à moi mais je ne le permettrai pas ! Tu m'entends ? Son baiser me dégoûte ! J'ai bien vu son air victorieux quand il m'a relâché. Il veut qu'on se sépare !
- C'est vrai que maintenant que j'y pense... Il avait l'air étrangement heureux à ce moment-là... Je ne sais pas quoi penser, en vérité.
- Et moi alors ? Lorsque tu m'annonces que tu pars en vacances juste avec lui au bord de la mer et que lorsque vous rentrez, je trouve plein de clichés de toi sur la plage avec lui ! Je ne supporte pas de le voir te coller comme ça, ça me rend malade !
- Ha... gloussa soudain Kyo.
- Quoi ? Qu'est-ce qui te fait rire ? tonna Nori avec fureur.
- C'est idiot ça, on est jaloux l'un et l'autre de façon presque maladive à cause de la même personne. Je suis toujours persuadé que Kuro est amoureux de toi tandis que toi, tu penses qu'il est amoureux de moi. C'est ridicule pourtant et en même temps, c'est fondé : disons cela, il nous aime tous les deux.
- N'importe quoi ! souffla Nori en réprimant un sourire.
- Kuro nous doit des explications. Soyons honnêtes avec lui et disons la vérité une bonne fois pour toutes. Je suis sûr qu'il est vexé par nos cachotteries peu discrètes. »
Les deux garçons reprirent le chemin de l'appartement où Kuro semblait déjà avoir oublié la fâcheuse affaire. Il était assis dans sa chambre et jouait sur son ordinateur, le sourire aux lèvres. Nori déglutit bruyamment en passant la porte suivi de Kyo, trahissant sa colère envers le blond. Ce dernier les regarda d'un air neutre puis se tourna de nouveau vers son écran et poursuivit sa partie. Kyo s'avança d'un air déterminé, lui arracha son casque des oreilles et donna un coup dans son clavier pour le pousser au fond du bureau.
« Pourquoi, Kuro ? demanda-t-il froidement.
- Parce que, répondit simplement le géant en esquissant un sourire faussement bienveillant. Je suis tout à fait conscient de ce qui se passe entre vous, je ne suis pas stupide.
- Si cela te dérange tant, pourquoi m'as-tu fait venir ici ? Ca ne fera qu'aggraver les tensions. Pour dire vrai, je préfèrerais retrouver mon appart miteux plutôt que de continuer...
- Et je ne te laisserai pas faire, trancha Kuro d'un air sombre. Dis-le Kyo, dis-le, je t'en prie...
- Dire quoi ? s'égosilla Nori incrédule.
- Dis-moi que c'est lui que tu aimes. »
Un lourd silence tomba sur la pièce, intenable mais constant. Kyo fixait son colocataire de ses pupilles d'or, tentant de trouver les mots justes. Nori les observait silencieusement, tant l'un, tantôt l'autre. Kuro affichait un air grave et sombre. Cependant, une perpétuelle once de tendresse restait ancrée dans son regard lorsqu'il faisait face au Fubuki.
« Ne m'oblige pas à me répéter. Tu l'as très bien compris, c'est Nori que j'aime alors ne cherche pas à t'interposer entre nous. Je t'aime beaucoup Kuro et je ne veux pas que cette histoire brise notre amitié alors si ça devait poser problème, je quitterais cet appartement.
- Non, Kyo, dit Nori en fixant Kuro. Tu es chez toi ici, c'est moi qui pose problème alors si quelqu'un doit partir, ce sera moi.
- Et te renvoyer vivre dans la misère dans laquelle je t'ai trouvé ? s'égosilla Kuro. C'est hors de question ! Comme je vous l'ai dit, vous êtes les personnes qui comptent le plus pour moi après ma famille et je compte bien vous garder avec moi même si... Ca inclut le fait que je doive accepter votre relation.
- Merci Kuro. » dit Kyo avec reconnaissance.
Les mois suivants se déroulèrent sans trop d'accrochages dans le trio de colocataires. Kuro parvenait tant bien que mal à contenir sa jalousie et Nori faisait son possible pour ne pas s'afficher avec Kyo devant leur ami qui leur en était silencieusement reconnaissant.
Nori continuait son travail pénible et se gardait bien de s'en plaindre devant ses amis et affichait toujours un éternel sourire blessé. Bien entendu, ses camarades étaient conscients de sa situation difficile d'autant plus que son patron était réputé pour être un bourreau avec ses employés et n'hésitait pas à employer la manière forte pour les faire obéir. Le brun s'appliquait tant bien que mal à la tâche mais bien souvent, ses efforts étaient vains et il se voyait rentrer avec des blessures.
« Tu devrais porter plainte, suggéra Kyo avec inquiétude tandis qu'il apposait de la glace sur la lèvre boursoufflée de son ami. Ce n'est pas normal de maltraiter ainsi ses employés !
- Laisse-moi m'en charger, s'exclama le géant blond qui rangeait de la vaisselle derrière eux. J'en ferai une seule bouchée et plus jamais il ne t'embêtera !
- Je ne peux pas faire ça, j'ai besoin de ce travail. Si je me fais renvoyer, je ne pourrai jamais trouver un nouvel emploi et puis je sais que financièrement, ça ne marchera plus pour nous. Vous verrez, s'esclaffa-t-il soudain, un jour, je deviendrai célèbre et je serai mon propre patron qui maltraitera ses employés à son tour !
- Si c'était aussi simple, beaucoup d'autres seraient des stars aujourd'hui...
- Mais ce n'est pas impossible, fit remarquer Nori. Laisse-moi rêver un peu... »
Cependant, les efforts du jeune homme finirent par payer et il obtint une promotion : il allait devenir serviteur en salle et obtenait ainsi une augmentation non négligeable, ce qui lui permettrait de vivre un peu plus confortablement auprès de ses amis.
Le premier soir, il se mira d'une mine défaite dans le miroir des vestiaires : il devait porter une tenue impeccable aucun défaut ne devait apparaître sur son portrait charmeur. Bien entendu, son physique avantageux avait contribué à l'obtention de cette place. Son supérieur avait vite compris que les jeunes femmes n'étaient pas insensibles à son charme surtout avec ces yeux de couleur ambrée si rare. Cet individu – célibataire qui plus est – était son nouvel atout et en ferait succomber plus d'une en salle, les incitant ainsi à revenir les autres fois.
Nori grimaça en constatant sa lèvre éclatée suite à une altercation avec son chef. Il appliqua une épaisse couche de fond de teint afin de la camoufler et s'entraina à charmer son public en esquissant un sourire des plus séducteurs dans la glace.
Une femme – apparemment une actrice en vogue et de dix ans son aînée – avait été la première à succomber et demandait son service exclusif à chaque fois. Ses visites se faisaient de plus en plus fréquentes malgré les repas onéreux qu'elle se permettait et les kilos qu'elle risquait de prendre sur sa jolie taille de guêpe. Dans le pire des cas, une petite opération de chirurgie esthétique permettrait de réparer les dégâts et tout redeviendrait comme avant. Mais tant qu'elle n'aurait pas attiré ce beau jeune homme dans sa toile, elle ne le lâcherait pas d'une semelle.
L'anniversaire de Kyo approchait peu à peu et Nori rêvait d'offrir un sublime cadeau à celui qu'il chérissait. Cependant, son salaire restait minime et ne lui permettait pas une telle dépense. Le Fubuki n'avait jamais vu la mer et rêvait de s'y rendre un jour. Mais le Taika avait tout vu en grand et espérait offrir un voyage dans les îles à son aimé.
Sachant que cette star l'adulait à chacune de ses venues, il avait pris le risque d'en profiter afin de lui soudoyer de l'argent. Il savait que le pari était risqué mais pourquoi pas ? Ses entrevues avec l'actrice se limitaient à du flirt, rien de plus.
Le jeune offre offrait ainsi de nombreux cadeaux à Kyo qui était surpris de savoir d'où provenait ces sommes parfois assez colossales. Lorsque l'argent n'était plus suffisant, il séduisait d'autres femmes jusqu'au jour où l'inévitable arriva : sa plus grande fan lui proposa une somme très importante en échange d'une nuit avec elle. Nori songea alors que cette somme pourrait dormir tranquillement sur un compte en banque afin d'offrir la maison des rêves à celui qu'il espérait un jour épouser. L'argent lui brûlait désormais les doigts, il aurait pu lui offrir une île s'il en avait eu les moyens mais un jour, pourquoi pas ?
Son ambition démesurée grandissait peu à peu avec le temps et devint vite pesante pour Kuro car ses amis ne se cachaient même plus devant lui. Ses cadeaux de plus en plus nombreux mettaient le blond mal à l'aise et rapidement, les conflits éclatèrent. Même Kyo prenait parfois le parti de l'Arashi, si bien que Nori commença à s'absenter sur de longues périodes et calmant sa frustration en passant du temps chez sa maîtresse.
« Tu sais Nori, dit un jour sa partenaire en caressant son torse. Tu as beaucoup de charisme, je suis sûr que tu ferais un bon comédien. Ca ne te dirait pas d'essayer ? Le producteur du film dans lequel je tourne est un de mes vieux amis. Tu pourrais commencer en tant que figurant et ensuite, tu pourrais progresser peu à peu, qu'en penses-tu ?
- Qu'est-ce que tu attends de moi ? lâcha Nori avec méfiance.
- Que tu lâches ton sale boulot et que tu viennes vivre avec moi, s'exclama son amante avec détermination. Si tu m'épouses, plus jamais tu n'auras à vivre dans le besoin, je t'offrirai tout ce dont tu as besoin.
- Je...
- Ne me dis pas que tu as quelqu'un dans ta vie ?
- N... Je... Laisse-moi un peu de temps pour y réfléchir, d'accord ? Faut que je rentre chez moi, je commence tôt demain et si je m'endors, le patron sera furieux. »
Il était une heure du matin lorsque Nori déverrouilla la porte de l'appartement. Sa surprise fut alors à son comble lorsqu'il vit que Kyo l'attendait dans le couloir en le fixant d'un air sombre.
« T'es pas encore au lit, toi ? lança le brun avec ennui. Tu ferais bien de dormir sinon tu vas être fatigué demain.
- Où est-ce que tu étais ce soir ? J'ai voulu venir passer te prendre au restaurant ce soir mais tu n'y étais pas.
- Je suis sorti avec des amis. T'as bientôt fini de m'interroger avec cet air-là ?
- Je veux la vérité Nori, je sais que tu mens.
- Bien, parfait. Tu veux que je te dise la vérité ? C'est terminé entre nous. J'en ai ras-le-bol d'être surveillé, surtout par Kuro. Ras-le-bol de me prendre la tête avec vous deux. D'ailleurs, si vous vous entendez aussi bien, pourquoi est-ce que vous ne sortiriez pas ensemble ?
- C'est le cas, Nori et c'est pour cette raison que je t'ai attendu ce soir. Nous te laissons un mois pour faire tes bagages et quitter cet appartement. Bonne nuit. »
Nori était stupéfait. Jamais Kyo n'avait été capable d'une telle froideur avec lui, même lors de leurs disputes quasi quotidiennes. Il l'avait trompé ? Avec cette enflure d'Arashi qui plus est ? Le brun était désormais partagé entre deux sentiments : la fureur et cette douleur brutale qui lui poignardait le cœur. Kyo ne l'aimait plus ?
Lentement, il s'effondra assis contre le seul et échappa un rire nerveux tandis que des larmes lui brûlaient les yeux. Il n'avait que ce qu'il méritait après tout mais cela n'atténuait en aucun cas cette souffrance qui le déchirait de l'intérieur. Pourquoi avait-il été aussi con ?
Quelques jours plus tard, Nori vint récupérer ses quelques affaires chez Kyo et Kuro dans un silence pesant. Les deux amoureux le regardaient avec un air à glacer le sang tandis qu'il emballait ses vêtements dans le même sac qu'à son arrivée. Jamais il n'avait pris la peine de se vêtir davantage et semblait être resté dans la même misère qu'au départ. Lorsqu'il les quitta, il leur jeta un dernier regard trahissant sa souffrance et sans mot dire, s'éclipsa sans même se retourner.
Nori avait immédiatement emménagé avec sa maîtresse et les choses s'étaient accélérées. Même pas un mois plus tard, il épousait cette femme dont il n'aimait que l'odeur de son argent et son statut. Comme elle le lui avait suggéré, il avait quitté son travail et avait suivi son épouse dans le monde du show-business.
Le Taika écoulait des jours plutôt heureux jusqu'à ce fameux jour. Alors qu'il attendait à un arrêt de bus, il se trouva face à face avec Kyo. A cet instant précis, son cœur ne fit qu'un bond dans sa poitrine et ses entrailles commencèrent à le faire souffrir. Son regard doré n'avait pas perdu de son éclat, bien au contraire : il semblait plus heureux que ce qu'il l'avait été autrefois à ses côtés. Cette simple pensée suffit alors à le rendre furieux et jaloux de Kuro.
« Kyo... Ne t'en vas pas... S'il te plait... »
Le jeune homme aux cheveux turquoise se détourna et baissa les yeux avant de lui indiquer de le suivre. Tous deux s'arrêtèrent dans un quartier plutôt calme en apparence et le Fubuki accepta de faire face à son ex petit-ami.
« J'ai lu la presse, dit Kyo avec tristesse. Je suis heureux de voir que tu as pu réaliser ton rêve en devenant acteur. Finalement, tu avais raison, la célébrité était bel et bien à ta portée...
- Kyo, ce n'est pas ce que tu crois...
- Tu es marié désormais alors plus de mensonges, nous ne sommes plus ensemble maintenant. Nori, je... »
Lui coupant la parole, Nori se jeta avidement sur ces lèvres qui lui avaient tant manqué. A cet instant précis, il se fichait éperdument de la presse, des paparazzis, seul Kyo comptait. Il fut surpris de voir que son ancien amant lui rendait son baiser avec la même tendresse qu'autrefois comme si lui aussi lui avait manqué.
« Comme c'est mignon ! s'exclama un individu dans leur dos. Ta réputation te précède, Nori Taika ! Mais de là à fricoter avec un lycéen... »
Les deux amants se détournèrent et firent face à un groupe de six individus à l'allure plutôt menaçante. Leur style n'avait rien d'extraordinaire si ce n'était leur t-shirts sans manches dévoilant de nombreux tatouages sur leurs bras et leur corpulence avait de quoi inquiéter d'autant plus que chacun d'eux tenait en mains une barre métallique ou une batte de baseball qu'ils faisaient tournoyer dans leurs mains en approchant.
Le plus grand s'approcha de Nori et lui expédia un violent coup dans l'estomac qui le fit tomber à genoux en grimaçant de douleur. Tout en grinçant des dents, il parvint à demander à Kyo de fuir. Cependant, le jeune homme ne le vit pas de cet œil et se mit en posture de combat, bien déterminé à sauver son ex.
« Kyo ! Va-t-en ! Cette histoire ne te concerne pas ! lâcha Nori en se cramponnant l'estomac.
- Hors de question que je te laisse, ils vont te tuer !
- Fous-le-camp, putain ! C'est pas tes oignons ! hurla le Taika avec désespoir.
- Allez petit, fais ce qu'il dit, c'est lui qui a baisé ma meuf, pas toi. Je ne te le dirai pas deux fois, conseilla le chef du gang.
- N'y compte même pas ! s'écria Kyo avec colère.
- Laissez-le ! Il n'a rien à voir avec tout ça ! »
Tandis que Nori les suppliait presque de laisser son protégé fuir, il reçut un nouveau coup, au visage cette fois. Sa vue se brouilla un instant et se fit rouge pas l'hémoglobine qui s'échappait d'une plaie au crâne. Il vit Kyo foncer sur eux et recevoir des coups. Tandis qu'il s'acharnait contre deux gars affairés sur lui, il vit son aimé se faire massacrer sous ses yeux, faisant bouillir la fureur qu'il ne parvenait plus à contrôler en lui.
Cependant, ses efforts ne suffirent pas et très vite, tandis que son visage semblait se noyer dans son propre sang, une lame luisante fendit l'air et trancha son ventre dans un hurlement de douleur.
Kyo était parvenu à assommer trois individus et s'était lui aussi armé d'une barre en métal qu'il maniait habilement. Voyant son ami à terre, il redoubla ses coups contre les trois restants qui se concentraient désormais sur lui.
« NORI ! FUIS ! »
Le cri de Kyo résonna dans le crâne de Nori qui semblait tournoyer. Brièvement, il vit une lame dans l'air. Une lame tâchée de sang. Celle qui l'avait presque éventré. Cette vision suffit alors à le réanimer suffisamment pour se redresser sur ses pieds.
Deux individus maintenaient le Fubuki tandis que le troisième le rouait de coups sans réfléchir à l'endroit qu'il frappait. Nori réalisa alors qu'il n'avait plus beaucoup de temps et que leur seule chance était de fuir comme Kyo lui suppliait de faire. Une poussée d'adrénaline l'aide à se sauver en courant maladroitement tout en maintenant son ventre ensanglanté.
Avant que l'un d'eux ne se rende compte de sa fuite et ne le rattrapa, il avait rejoint une avenue très fréquentée dans laquelle personne n'osa le poursuivre.
Nori se traina tandis que du sang coulait de sa bouche et il atteignit le bord du trottoir avant qu'il ne s'effondre. Plusieurs voitures s'arrêtèrent dont une de police. Ses derniers mots furent alors pour Kyo, suppliant d'aller le sauver avant qu'il ne meure.
Nori s'éveilla tout doucement tout en ayant le sentiment d'être revenu de loin. Pourquoi s'était-il endormi et depuis quand s'était-il assoupi ? Il sentit alors une vive douleur au ventre qui fut le déclencheur de ses souvenirs : où était passé Kyo ?
Lorsqu'il ouvrit les yeux, il reconnut alors un ami qu'il n'avait pas revu depuis longtemps : Nozomi Arashi, le frère jumeau de Kuro et l'un des rares Arashi avec qui il s'entendait bien.
« Où est Kyo ? Nozomi ! Comment va-t-il ?
- Calme-toi, tes blessures sont récentes et tu risques de les ouvrir, répondit le jeune homme au teint très pâle en souriant. Kyo va mieux, il a été transféré dans un autre hôpital afin de recevoir des soins.
- Et les gars qui nous ont agressés ?
- Tous derrière les barreaux, les six. Ils ne sont pas prêts de sortir à mon avis... Je vais chercher le médecin pour lui dire que tu es réveillé. Ca faisait quatre jours qu'on attendait ce moment, à vrai dire... »
Nori regarda son ami quitter la chambre d'un air surpris. Quatre jours ? Il n'avait pas le sentiment d'avoir dormi aussi longtemps. Comment pouvait-on s'assoupir de la sorte alors que la vie de l'amour de sa vie ne tenait qu'à un fil ? Le principal pour l'instant était qu'il soit en vie et dans un état stable. Dès qu'il serait en état de marcher, il irait le voir afin de lui présenter ses excuses en espérant ne pas tomber sur Kuro.
Le médecin revint peu de temps plus tard et lui fit passer plusieurs examens. Lorsque tout fut terminé, Nozomi revint le voir. En général, lorsqu'il insistait pour le voir, c'était qu'il avait quelque chose à lui demander...
« Ne tourne pas autour du pot, Nozomi. Pourquoi es-tu là ?
- Je suis venu veiller sur toi. Je n'aurais pas voulu qu'on t'agresse de nouveau !
- Il n'y a pas que ça, j'en suis persuadé.
- T'es malin quand tu veux. Ta femme m'a engagé comme garde du corps pour te protéger. Elle a aussi engagé un de mes cousins, Kazuo.
- N'importe quoi...
- Elle se fait du souci pour toi, c'est tout.
- C'est censé m'attendrir ?
- A toi de voir...
- Je vois que je n'ai pas le choix alors !
- Tu es une étoile montante et à l'avenir, de tels incidents peuvent se reproduire pour d'autres motifs, bien sûr. J'ai veillé à ce que ta femme ne sache rien au sujet de Kyo et toi alors ne t'inquiètes pas pour ça, d'accord ?
- D'accord... »
Il fallut attendre encore deux semaines avant que Nori puisse quitter l'hôpital. Ce dernier se précipita aussitôt dans la clinique qui s'occupait de Kyo. A peine arrivé il fut intercepté par Kuro qui le fusilla du regard.
« Il est hors de question que tu approches, c'est compris ? Quand je pense que tu as eu le culot de revenir après ce que tu lui as fait, tu me dégoûtes. Alors laisses-moi te mettre au parfum : je te vois rôder autour de Kyo, je t'achève, pigé ? Alors demi-tour et retourne fricoter avec toutes ces trainées que tu as fréquentées. Kyo mérite mieux que toi !
- Comme toi, je présume ?
- Tout à fait. Si tu ne veux pas comprendre, je vais t'aider à garder ce que je viens de te dire en mémoire.
- C'est une menace ?
- Vois-le comme tu le souhaites mais je ne t'épargnerai pas.
- Tu ne m'impressionnes pas. Tu n'es qu'un grand con qui n'a rien dans la tête. Tu crois que ça suffira à le rendre heureux ? Tu te trompes ! Kyo n'a toujours aimé que moi-même quand il sortait avec toi ! »
Pour toute réponse, le géant lui décocha un violent coup à la mâchoire qui le projeta dans les airs. Retombant lourdement, le Taika grimaça de douleur tandis qu'il sentait que les blessures de son dernier combat le faisaient toujours souffrir. Rapidement, des hommes vinrent intercepter les deux adversaires. Nori baissa la tête et leur indiqua qu'il allait partir, qu'ils ne devaient pas chasser Kuro et que tout était de sa faute. Surpris mais plutôt satisfait de cette soumission peu ordinaire de la part du brun, Kuro se détourna et rejoignit les couloirs menant à la chambre de Kyo.
La sécurité avait laissé Nori qui s'apprêtait à partir tandis qu'un médecin interpella Kuro.
« Monsieur Arashi, je suis désolé de vous relancer mais il est important que ce versement soit effectué afin qu'on puisse effectuer l'opération de votre ami. Vous n'avez pas un ami, un proche qui pourrait vous avancer l'argent ? A ce rythme, nous ne serons plus en mesure de garder Monsieur Fubuki dans notre établissement...
- Vous ne pouvez pas faire cela ! Laissez-moi une semaine ! Je vais travailler dur et je vous payerai la semaine suivante ! Je vous en supplie !
- Nous ne pouvons plus attendre Monsieur Arashi, je vous laisse deux jours.
- Mais c'est impossible... »
Nori s'était caché afin de mieux espionner cette conversation. Lorsque le géant s'éloigna, il prit un air affligé indiquant son échec à convaincre le médecin. Si Kyo ne recevait pas les soins nécessaires, qu'allait-il devenir ?
La tête emplie de questions, le Taika quitta la clinique le cœur lourd. Il n'avait pas pu revoir son bien-aimé et avait été menacé par son ancien ami. Par-dessus le marché, la santé de Kyo semblait toujours préoccupante et il n'avait pas les moyens d'en savoir plus. Il ne restait plus qu'une chose à faire et peu lui en importait les conséquences de son geste...
Une fois de retour dans sa vaste demeure vide, il s'empressa de rejoindre le bureau de son épouse et y décrocha un tableau au dessus d'une commode en chêne massif. Sa femme était absente, apparemment appelée pour un tournage à l'étranger, ce qui n'était pas pour le déranger d'autant plus qu'il aurait des choses à préparer avant son retour.
Le tableau s'ouvrit sur un coffre-fort qu'il déverrouilla sans la moindre difficulté, connaissant le code par cœur – ce petit surplus en cas de besoin. Une fois ouvert, une quantité impressionnante de billets de présenta à lui ainsi qu'un chéquier et une carte de crédit. Empochant ce dont il avait besoin, il quitta rapidement les lieux. Cette femme ne comptait même pas son argent tant elle en avait, c'était tout juste si elle se rappelait qu'une porte se fermait à clé alors jamais elle ne se rendrait compte de ce coup-là. Même si un jour elle le démasquait, ça en valait la peine.
« Monsieur Fubuki, je suis ravi de pouvoir avec une bonne nouvelle ! Nous avons enfin reçu le paiement tant attendu ainsi que tout le nécessaire pour tous vos soins. L'opération est donc planifiée pour demain à neuf heures.
- Mais je n'ai rien payé ! s'exclama Kuro ébahi.
- Ah bon ? s'exclama le médecin faussement étonné. Alors vous avez là un bienfaiteur mystère car j'étais persuadé qu'il s'agissait du vôtre ! »
Tandis que Kuro pestait car ayant compris qui était à l'origine de ce versement si généreux, Kyo esquissa un léger sourire. Nori viendrait-il bientôt le voir ?
« Tu n'auras aucun regret ? Tu es sûr ? demanda Nozomi à Nori en faisant face vers leur nouvelle demeure.
- Je n'ai jamais aimé cette femme et puis, ça fera parler d'elle dans les journaux, tu ne crois pas ? Elle adore qu'on parle d'elle ! Allez ! Nozomi ! Kazuo ! Voici notre nouvelle maison ! »
Kazuo aida les domestiques à apporter les bagages dans la vaste demeure haute de trois étages et rien que pour eux. Nozomi, quant à lui, guida Nori vers ses nouveaux appartements et lui présenta brièvement les lieux. Nori riait en voyant son ami jouer un rôle de maître d'hôtel et se sentait le cœur plus léger depuis qu'il s'était séparé de son épouse. Désormais, il serait libre d'aller et venir comme bon lui semblerait, le cœur et l'esprit libres.
Nozomi sourit en remarquant cette once de bonheur sur le visage de l'acteur. Il avait peut-être perdu un amour mais il avait désormais atteint des sommets dans sa carrière et semblait mieux dans sa peau qu'auparavant. Peut-être vivait-il mieux sa rupture qu'au commencement ?
Ayant suffisamment patienté, il s'approcha du brun et lui attrapa les poignets avant de le plaquer contre un mur de la chambre. Délicatement puis fougueusement, il s'empara de ses lèvres qu'il avait désirées depuis si longtemps. Enfin, il était à lui et rien qu'à lui.
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