Chapitre XIII : De sacrés anneaux
Ce soir-là, le temps était doux, et l'ambiance avait été plutôt agréable. Sûrement parce qu'ils savaient tous que c'était son dernier jour parmi eux. Le jeune homme était allongé dans son lit, avec un livre dans les mains, et semblait tout à fait paisible ainsi, plongé dans ses innombrables pages regorgeant de mots à la fois complexes et beaux. Rien n'avait l'air de le perturber plus que ça, pourtant, son départ était bel et bien prévu dans un jour.
- Ed ? lança soudainement Peter, en tournant légèrement la tête pour l'observer, alors qu'il était assis sur sa chaise de bureau, face à une pile de documents. Je peux te poser une question ?
- Ça ne peut pas attendre plus tard ? Je suis en train de lire, répondit le brun d'un air légèrement grognon, en levant les yeux de son roman policier.
L'ancien grand roi s'était complètement tourné et se leva pour s'avancer en direction de son frère.
- Non, j'ai besoin de savoir maintenant, dit-il sur un ton autoritaire en s'asseyant au bout du lit.
Edmund roula des yeux, glissa son marque pages dans son livre et le posa à côté de lui, accordant ainsi toute l'attention que lui avait demandé son aîné.
- Pourquoi est-ce que tu nous as à tous caché le fait que tu allais étudier à Glasgow ?
- Je ne vous ai rien caché, puisque je l'ai dit à nos parents il y a quelques temps.
- C'est exactement ce que je dis. Peu importe le temps que tu as mis à avouer, tu as agi sans en parler à quiconque. Autant, pour moi, Susan, ou notre père, ton départ ne changera pas énormément de choses à notre quotidien puisque nous ne sommes pas très présents au domicile, mais tu as pensé à Maman, Lucy... ou même Serena ?
- Concernant Maman, ne t'en fait pas pour elle, je suis sûr qu'elle s'en remettra, elle a encore Lucy donc je ne me fais pas de soucis là-dessus. Et je connais Serena, je sais qu'elle arrive à s'adapter à n'importe quelle situation, donc je ne m'inquiète pas à son propos.
- Et Lucy ?
- Lucy... ça c'est une autre histoire, souffla le brun en fixant un point inexistant. Mais Serena sera là pour elle, j'en ai la conviction, ajouta-t-il en relevant le regard. Notre petite sœur est sûrement plus courageuse que toi et moi ne voulons l'admettre. Je sais que ce sera difficile pour elle, au début, mais elle finira par se forger le caractère. Et qui sait, peut-être que Serena influencera sa façon de gérer la situation ? Je l'espère.
Peter demeura silencieux, pendant quelques instants, avant de trouver ses mots.
- Si tu le dis. Mais tu sais, personne n'est remplaçable, pas même toi. Et je doute fort que la présence de Serena, qui se fait rare ces temps-ci, puisse l'aider à combattre le chagrin. Si tu savais l'état dans lequel je l'ai trouvée ce matin. Elle était en larmes.
Ce que venait de prononcer le blond fit passer une ombre sur le visage du roi ébène. Ce dernier se pinça les lèvres tout en réalisant qu'il avait provoqué de la tristesse chez sa petite sœur, et il s'en voulait terriblement. C'est sûrement pour cela qu'il s'était enfin décidé à avancer jusqu'au bout de son matelas avec l'intention de se lever.
- J'irai lui parler, si c'est à là que tu voulais en venir.
- Non, je ne veux pas provoquer la moindre culpabilité chez toi, ni te pousser à aller la voir pour lui donner des excuses. La seule chose que je souhaiterai, c'est que tu fasses ton possible pour rester en contact avec nous. Tu sais, c'est normal qu'elle se fasse du souci pour toi, vous avez grandi ensemble et elle n'a jamais été séparée de toi durant une aussi longue période. Je veux dire, même le simple fait que tu passais ton temps avec sa meilleure amie la rendait plutôt mal. Elle ne te l'a peut-être jamais dit, mais à moi si. Alors, une année entière, bon sang, ce n'est pas rien à ses yeux !
- Tu pensais peut-être que je ne donnerai jamais de mes nouvelles à la famille, de temps à autres ? maugréa le jeune homme tout en fusillant du regard son aîné. Évidemment, je n'aurais pas que ça à faire d'écrire des lettres, mais j'essayerai dès que je pourrai. Ne pense pas que ça me fasse plaisir de m'éloigner aussi longtemps de vous tous, mais c'est la seule école qui avait encore de la place pour m'accueillir. Et puis, tu sais, je pense que ce n'est pas une si mauvaise chose, ça me permettra sûrement de devenir plus mature et responsable, c'est ce que j'aimerai en tout cas, pour notre futur à Serena et moi. Surtout, que c'est en partie grâce à elle que j'ai trouvé un but à atteindre.
L'un des sourcils de Peter se leva en un accent circonflexe.
- À oui ? Tu n'avais pas la moindre idée de ce que tu désirais faire avant votre rencontre ?
- Pas la moindre, affirmait le brun. Cette idée m'est venue lors d'une discussion que nous avions eu, concernant notre avenir, tout simplement. Ensuite, j'y ai réfléchi plus sérieusement lorsque j'étais seul, et j'ai décidé de moi-même que j'allais emprunter ce chemin-là.
- Eh bien, je n'aurais jamais imaginé que cette fille allait avoir autant d'influence sur toi, s'exclama le blond. Attention, ce n'est en rien quelque chose de mal, au contraire, depuis sa venue dans notre vie, tu as bien évolué, mais je ne pense pas avoir besoin de te le dire car tu sembles en avoir conscience. N'empêche que, je me rappelle encore, il y a de ça seulement quelques mois, tu étais si solitaire, tu n'avais plus goût à quoi que ce soit, et on aurait pu croire que tu subissais les journées qui passaient comme si c'était un pur calvaire. Honnêtement, te voir ainsi, ça m'inquiétait. Donc je ne peux que respecter et apprécier Serena, c'est une personne admirable qui t'a donné la force que personne d'autre ne serait parvenu à t'offrir.
- Oh que oui, j'en ai conscience, et je lui dois beaucoup. Je sais moi-même à quel point j'étais déprimé. Narnia m'a manqué dès l'instant où je l'ai quitté, et le fait qu'Aslan m'ait spécifié que j'étais à présent trop vieux pour y retourner, m'a déboussolé. J'ai eu énormément de mal à l'accepter, et sans m'en rendre compte je suis tombé dans cette routine dans laquelle je ne trouvais aucune saveur et redevenais sarcastique, ce qui ne devait pas forcément être agréable pour vous, et je m'en excuse. Serena est la lumière qui m'a permis d'échapper des ténèbres dans lesquels je baignais sans relâche. Et ce que j'apprécie le plus, c'est qu'elle s'est également retrouvée en me rencontrant. Finalement, nous nous ressemblons et nous complétons à la fois, et c'est ce qui fait que ça marche entre nous. Même si, ces temps-ci, elle préférait se consacrer à ses hobbies plutôt qu'à notre relation, et ceci ne m'a pas du tout plu, déclara le brun d'un air affligé.
Un sourire chaleureux avait pris place sur le visage de Peter, tandis qu'il passait une main sur l'épaule de son jeune frère, lui montrant ainsi toute la compassion qu'il éprouvait pour lui. Les paroles de ce dernier avaient finalement convaincu l'ancien grand roi, qui inspira profondément avant de retrouver la parole :
- En tout cas, tu m'as appris que lorsque l'on trouve le bonheur, il faut en prendre soin et profiter de chaque instant. (Il lui offrit un sourire) S'il y a bien une chose sur laquelle toi et moi sommes d'accord, c'est bien le fait que Narnia était notre rempart, l'endroit dans lequel on se sentait joyeux et responsables. Nous savions que nous étions importants, que nos actions étaient faites pour sauver des vies et donner aux narniens la paix dont ils avaient tant besoin. Ici, on se sent inutiles, et je comprends ce qui t'as poussé à te renfermer. Je dirai que j'ai réussi à passer outre ce qui me rendait malheureux par des devoirs d'adultes dont parfois j'aimerais me défaire... Mais je m'y suis habitué. Enfin, soupira-t-il, quoi qu'il en soit, tu as une chose que je n'aurais jamais, une part de Narnia à toi seul, que tu chéri et qui remplit sûrement le vide qui régnait en toi. Garde Serena précieusement à tes côtés, et peu importe la voie que tu choisiras, sa présence t'apporteras toujours la touche qui manquerait à ton existence. Parce que c'est ça le vrai secret d'une vie épanouie.
Edmund ne s'était sûrement pas attendu à ce que son grand frère s'ouvre à lui, car c'était si rare qu'ils échangeaient vraiment ensemble. Néanmoins, cela lui procura une douce sensation au niveau de sa poitrine, qui lui fit décocher un sourire, qu'il ne désirait point montrer au blond, en glissant sa main sur ses lèvres, avant qu'il ne se décide à parler :
- Je le sais bien, Serena est loin d'être banale, et même si elle vient de Narnia, ce n'est pas la seule raison qui me pousse à l'aimer. Elle possède quelque chose que je n'aurais jamais, la capacité de propager une aura positive autour d'elle, même quand ça ne va pas. Elle a beau avoir un passé dramatique et avoir souvent des excès d'égoïste, elle reste quelqu'un qui veut toujours faire de son mieux pour que les choses se passent bien. (Il posa enfin les yeux sur son frère). Un an, face à tout le reste qui nous attend, ce n'est pas grand-chose, argumentait Edmund. Je ne t'en avais pas encore parlé, sûrement parce que je me sentais un peu gêné de le dire à quelqu'un, mais je lui ai demandé sa main. Tout ceci est très sérieux, évidemment.
Le blond écarquilla les yeux, montrant ainsi son étonnement.
- Eh bien, Ed ! Tu ne perds pas de temps ! Et pour quand le mariage sera prévu ?
- Pour le moment, nous n'en n'avons pas encore parlé. Elle et moi jugeons que nous ne sommes pas encore prêts à ça. Nous restons seulement fiancés, et ça nous conviens parfaitement.
- Oh, je vois... Quoi qu'il en soit, je vous souhaite d'être heureux, vous le méritez. (Il se tut quelques secondes) Il est vrai que toi et moi ne parlons pas souvent, mais sache que je suis fière de ce que tu es. Tu deviens un homme que je vais peut-être envier, dans quelques années.
- Voyons, ne dis pas de bêtises ! Tu n'as rien à m'envier, prononça le brun d'un air gêné. Qu'est-ce qui t'arrive, Peter ? Je ne te reconnais plus.
- Rien, rien, souriait l'ancien grand roi en l'observant. N'ai-je pas le droit de t'admirer un peu, Edmund ?
- Arrête, dit-il en sentant ses joues devenir roses. Je trouve que ça sonne étrange lorsque tu me dis des choses pareilles, arrête. Je crois que je préfère lorsque tu me cherche des noises ou que tu te sens supérieur à moi.
Ce que venait de dire Edmund fit rire le blond, et sans qu'ils ne s'en aperçoivent, ils passèrent le reste de la soirée à discuter, comme s'ils se retrouvaient, alors qu'ils vivaient sous le même toit depuis si longtemps.
***
Lorsque le jour tant attendu, ou bien redouté, faisait son entrée, bien plus d'un avait eu du mal à sortir de son lit. Le chagrin avait pris toute once de joie de Lucy, ce matin-là, et lorsque celle-ci avait enfin trouvé la force de se lever pour se rendre dans la salle de bains, avec le visage bouffis et les cheveux en bataille, elle se força à camoufler cela derrière des artifices, comme du maquillage et une belle tenue. Celle-ci savait parfaitement que le départ de son grand frère était important, et elle avait déjà eu plusieurs discussions avec ses aînés sur le sujet. Même elle ne savait pas pourquoi elle se sentait aussi triste. Elle se regarda dans la glace et se disait à elle-même qu'elle devait être heureuse pour Edmund, que ce dernier allait partir pour assurer un avenir pour Serena et lui. Imaginer sa meilleure amie et Edmund grandir, s'installer ensemble, agrandir la famille en ayant des enfants, et accomplir des exploits en sauvant des vies avec leur métier respectif, devenir quelqu'un de plus adulte et responsable. Tous ces points-là étaient les raisons même de son départ, et en réalité, la brune ne se faisait pas de soucis pour l'absence de son frère, car elle savait qu'il saurait se débrouiller. Au fond, elle s'était depuis déjà mal de temps habitué à son absence récurrente, puisqu'il était en couple avec Serena, et leur couple la rendait heureuse pour eux. Elle inspira profondément tout en rangeant ses affaires dans une trousse, qu'elle mit ensuite dans un placard. En son for intérieur, elle connaissait la réponse, elle savait pourquoi elle ne pouvait se défaire de cette émotion dévastatrice. Elle n'était pas réellement triste, elle avait très peur. Et bien sûr, Lucy n'en n'avait parlé à personne, parce qu'elle savait que c'était puéril d'agir ainsi. Alors, elle se contentait de sourire face aux autres afin de cacher son mal-être. Seul Peter avait su déceler le mensonge à travers son regard, qui l'avait trahi à maintes reprises.
Tout en longeant le couloir menant à l'escalier, elle repensait à tout cela. Lucy se disait qu'en réalité, elle craignait de perdre son frère. Le perdre dans un sens qui n'avait point de logique pour certains. Elle ne pensait pas le perdre dû à un décès ou bien un éloignement permanent. Ce qui la terrifiait, c'était d'apprendre qu'en devenant adulte, il laisserait de côté la fantaisie qui le rendait si bon.
Alors qu'elle venait d'arriver au rez-de-chaussée, elle avait pu croiser son grand frère, Peter, qui était passé à côté d'elle. Elle le regarda tout en le saluant, et s'était dit au même moment que même si Peter continuait à croire en Narnia, ce n'était plus comme avant, depuis son départ. Celui-ci avait gardé les meilleurs souvenirs en lui, et il était déterminé à ne plus vouloir y mettre les pieds, pour la simple et unique raison qu'il tenait à ne plus s'infliger davantage de souffrances. Lucy savait bien que penser ainsi avait poussé son grand frère à légèrement laisser de côté l'imagination. Cela était rare que Peter laissait place à la magie, et en parlait comme d'une chose tout bonnement normale. C'était de cela dont elle craignait, car elle avait conscience que la vie d'adulte faisait peu à peu disparaître la magie qui régnait en eux. Elle ne voulait pas qu'Edmund, ou même Serena, ne finissent par laisser de côté cela pour devenir de vulgaires personnes.
La brune laissa de côté ses pensées pour se rendre dans la cuisine.
- Bonjour tout le monde ! lança-t-elle avant de s'approcher d'Edmund qui était assis à sa place initiale pour y manger également. Joyeux anniversaire, souriait-elle en le prenant dans ses bras.
- Merci Lucy, dit-il en lui rendant son sourire.
Lucy ignorait si l'expression qui était sur le visage de son aîné était sincère ou s'il était lui aussi triste, mais elle avait fini par abandonner ses théories pour se consacrer à son petit-déjeuner, qu'elle partageait avec sa famille. Elle était même parvenue à participer à la conversation, qui avait pour sujet, bien évidemment, la petite fête d'anniversaire d'Edmund (et fête de départ également).
Elle était arrivée à se vider la tête en se consacrant aux derniers préparatifs pour la fête, qui allait se passer dans l'après-midi. Et quand l'heure était arrivée, celle-ci n'avait guère eut le temps d'y songer plus, car les invités étaient tous arrivés.
- Bonjour Oncle Harold, Tante Alberta et Eustache ! J'espère que la route ne fut pas trop longue pour vous, avait commencé Susan après leur avoir ouvert en leur affichant l'un de ses sourires dont elle avait le secret, et qui avait apaisé l'air aigri qui occupait le visage des deux parents d'Eustache.
Susan était rapidement prise dans une conversation d'adulte avec son oncle et sa tante, poussant ainsi Eustache à poser son attention sur Lucy et Edmund. Sans grande surprise, depuis que le jeune homme avait eu l'opportunité de se rendre à Narnia à deux reprises, il était devenu un garçon beaucoup plus sympathique et ouvert aux lectures fantastiques dont il ne voulait s'accommoder avant son voyage merveilleux. Aujourd'hui, il ne jurait plus que par la magie et il n'avait que le mot « Narnia » à la bouche lorsqu'il avait le plaisir de revoir ses cousins. Edmund semblait, par ailleurs, supporter de mieux en mieux le blondinet qui fut autrefois chétif, et cela faisait grandement plaisir à Lucy, qui avait horreur de les voir se tirer dans les pattes lorsqu'ils avaient vécu à Cambridge.
Le trio s'était installé à une table, où se trouvait quelques délices salés et boissons, qu'ils avaient pris plaisir à déguster lors de leurs discussions. Le temps semblait, d'ailleurs, défiler à une vitesse folle, jusqu'à ce qu'ils ne soient stoppés par l'arrivée tant attendue de Serena. Ils s'étaient, bien sûr, pressés à l'entrée pour aller l'accueillir. Ce fut Hélène qui ouvrit la porte à la princesse, et dès lors où celle-ci eut pénétré dans la maison, Eustache restait bouche bée. La première chose qu'il avait pu retenir à son sujet, c'est qu'il sentait l'aura narnienne qui émanait d'elle. Il n'aurait pu expliquer le sentiment qui s'emparait de lui, mais ce dont il était sûr c'est que c'était quelque chose de positif.
- Bien le bonjour, Serena ! firent toutes les personnes qui se trouvaient dans l'entrée.
- Bonjour, tout le monde ! Et joyeux anniversaire, Edmund ! souriait la brunette en s'approchant du concerné pour le prendre dans ses bras et lui faire un baiser sur la joue.
Elle en fit autant en s'approchant ensuite de Lucy, et pour terminer, elle accorda enfin son attention au pré adolescent qui ne savait pas vraiment comment se tenir devant elle.
- Toi, tu dois être Eustache ! C'est un plaisir de faire ta connaissance, lança la jeune femme en s'approchant de lui, dans l'intention de lui serrer la main.
- De même, je suis enchanté. En effet, c'est bien moi, je suis Eustache ! Et je présume que tu dois être la fameuse Serena dont Lucy n'a eu de cesse de me parler dans ses lettres ?
- Eh oui, me voici ! En chair et en os ! riait-elle en tournant sur elle-même. Oh ! Mais allons donc dans le salon, il y a tant de gens que je dois encore saluer, et nous n'allons quand même pas rester ici durant toutes les festivités, fit-elle remarquer, avant qu'elle ne s'exécute et que tout le monde ne suive ses pas.
Durant les vingt minutes qui suivirent, Serena avait ainsi fait la rencontre des autres invités, ou avait dû converser avec certains qu'elle connaissait déjà, comme Fred, l'ami d'Edmund qui était arrivé seulement quelques minutes après elle. Quant au roi ébène, il lui fut assez difficile de se terrer dans un coin, car il était l'objet d'attention de la réception familiale, et ceci avait ainsi contraint le jeune couple à ne pas vraiment se parler durant toutes les festivités. Serena avait ainsi profité de cela pour faire plus ample connaissance avec Eustache, et sans grand étonnement, les deux s'étaient rapidement entendus sur plusieurs sujets. Il fallait avouer que Narnia était le genre de chose qui pouvait transformer des gens, et également en rapprocher. Lucy avait, par ailleurs, grandement participé à la conversation des deux nouveaux amis. Ils furent même à quelques reprises rejoints par Peter qui en fit autant en parlant du bon vieux temps, d'un air vraiment heureux.
À vrai dire, le seul moment où le jeune couple était parvenu à se voir était lorsqu'ils s'étaient brièvement croisés dans un couloir et que leurs regards étaient restés liés pendant quelques secondes. Du moins, ce fut le cas jusqu'en début de soirée, où les deux amoureux étaient à nouveau arrivés à se voir seuls. Ils n'eurent besoin de mots, et se suivirent mutuellement, ne pouvant plus supporter d'être séparés. Ces derniers avaient gravi les marches d'escalier à une vitesse folle, avant de se retrouver, tous les deux, dans la chambre du brun. Serena était entrée la première, et le roi ébène referma derrière lui.
- J'ai cru que je n'allais jamais pouvoir souffler, soupira Edmund en ayant son dos collé contre le bois de la porte. C'est tellement épuisant d'être au centre de l'attention, et quand je pense que c'était le cas tout le temps, lorsque j'étais roi... Je ne me souvenais pas à quel point c'était dur.
Ce dernier avait eu comme réponse, de la part de sa petite amie, un baiser qu'elle s'était empressée de lui donner en partageant une étreinte avec lui.
- Dire que c'est le dernier jour, et nous n'avons même pas pu profiter, déclara-t-elle en le serrant un peu plus fort contre elle. Tu vas tellement me manquer, si tu savais.
Le jeune homme glissa sa main dans les cheveux de sa petite amie pour les caresser, tout en laissant un sourire en coin apparaître sur ses lèvres.
- Je suis de ton avis, mais en même temps, je ne vois presque jamais le reste de ma famille, de plus, étant donné que c'est une fête en mon honneur, tout ceci est normal. Enfin, quoi qu'il en soit, je suis content que l'on soit arrivés à se retrouver seuls. Pourvu que nous ne soyons pas interrompus. Je ne suis plus habitué à ce genre de chose.
- Interrompus ? Je veux bien que l'on soit seulement nous deux, mais c'est ton anniversaire et la fête de ton départ, on ne peut pas se permettre d'être absents trop longtemps, tu sais, ils vont finir par s'en rendre compte, fit remarquer la jeune femme en se laissant tomber sur le matelas du brun.
- Je le sais bien, et voir ma famille me fait très plaisir, mais je ne veux pas non plus te laisser dans un coin durant toute la soirée. Tu es aussi importante à mes yeux, avouait le roi ébène en la rejoignant.
- Et bien, dans ce cas, au lieu de perdre notre temps à débattre sur la situation, profitons de ces quelques minutes de répit pour s'aimer, tout simplement, s'exclama Serena en ne lui laissant pas le temps de répliquer, car elle le prit dans ses bras, avant de finir allongés sur le lit.
Ces derniers se faisaient des taquineries et riaient à gorge déployée en oubliant les raisons qui les avaient réunis ici, aujourd'hui. Ils se contentaient seulement d'être ensemble, et cela leur suffisait amplement. La présence de l'un et l'autre était leur seul rempart pour éloigner d'eux ce qui les poussait à éprouver la moindre émotion négative. Et ils en avaient bien besoin, car ceci faisait maintenant des semaines que l'on ne cessait de leur répéter qu'il leur restait peu de temps avant ce moment fatidique. Ils en avaient assez d'entendre cela, et ils ne désiraient qu'une chose, c'était se percher dans leur monde imaginaire, et ne plus s'en échapper durant un temps indéterminé.
Au bout d'un certain temps, Edmund s'était arrêté de rire, alors qu'il avait mal aux côtes, à force de se marrer. Celui-ci avança sa main en direction du visage de sa petite amie, dans l'intention de dégager les mèches de cheveux qui cachaient les traits de son visage. Elle avait des traits si imparfaits, et pourtant, aux yeux d'Edmund, Serena possédait une beauté incomparable à celle des autres femmes. Pour rien au monde il n'était prêt à laisser cette princesse qui s'était emparée de son être entier.
Une fois son visage révélé, ce fut le tour de Serena d'observer son fiancé, et elle n'avait pu se résoudre à se délecter de son sourire, ses yeux, son petit nez, ou même encore ses taches de rousseur.
Leur petit moment de tendresse et de joie fut malheureusement de courte durée, lorsque Peter était entré dans la pièce, les informant ainsi que le moment de manger le repas était arrivé. Le couple était ainsi redescendu, suivit du blond, et l'ambiance avait à nouveau séparée les deux amoureux jusqu'à ce qu'il ne soit tard, et que les gens ne finissent par retourner chez eux.
- Je devrais rentrer, moi aussi, souffla Serena en avançant en direction de la porte de sortie, à la suite du départ des Scrubb.
- Non, j'aimerais bien que tu restes. Pour moi, c'est primordial que tu sois là, demain matin, pour mon départ, l'informait-il. Tu ne voudrais quand même pas rater ça ?
- Bien sûr que non, affirma cette dernière, en poursuivant toujours sa lancée, néanmoins je pensais te rejoindre tôt dans la matinée. Je n'ai aucune affaire de rechange, ni de quoi faire ma toilette, ici, argumentait-elle ensuite. De plus, je serai très gênée de dormir avec toi en sachant que Peter serait juste à quelques mètres de nous.
Edmund se grata l'arrière du crâne, d'un air embarrassé. Sûrement parce qu'il s'était rendu compte qu'il avait parlé sans réfléchir. C'était sûrement pour cela qu'il avait, à contrecœur, approuvé les dires de sa bien-aimée, et qu'il la laissa ainsi faire ses au revoir à sa famille, avant de quitter elle aussi la maison. Edmund resta sur le bas de sa porte en l'observant disparaître au bout de la rue, tout en essayant de réprimer un sentiment de mélancolie.
Du côté de Serena, celle-ci sentait à la fois un grand soulagement, car elle s'efforçait de ne pas montrer qu'elle était aussi affectée par la situation, et une tristesse dont elle ne voulait se laisser envahir. Tout en pédalant sur le chemin de terre, la menant en direction de la forêt, la brunette inspira profondément avant de lever les yeux au ciel et prier de tout son être pour que le temps s'écoule vite jusqu'à leurs prochaines retrouvailles.
Évidemment, bien que le jeune couple eût convenu d'éviter de parler de ce départ, afin de ne pas être chagriner, ils avaient tout de même décidé d'en discuter, pour mettre au clair certaines choses. La plus évidente avait été, naturellement, de savoir les périodes où le brun reviendrait temporairement à Finchley. Celui-ci proposa ainsi de rentrer pour les fêtes de Noël et nouvel an, la saint Valentin, et l'anniversaire de Serena. C'était peu mais ils étaient pourtant prêts à se contenter de cela. Se disant qu'ils en profiteraient, et que le reste du temps, ils pourraient se consacrer à développer leurs projets afin d'être plus disponibles lorsqu'ils seraient à nouveau réunis définitivement.
Le lendemain, Serena avait eu beaucoup de mal à quitter ses draps afin d'aller se préparer et partir en direction de la gare, sûrement parce qu'elle ne trouvait aucune motivation. Celle-ci avait eu beaucoup de mal à trouver le sommeil, la nuit dernière, et ses yeux étaient par ailleurs soutenus par des cernes qu'elle tenta de camoufler sous du maquillage.
Sans grande surprise, elle n'avait aucun appétit, et était perdue dans ses pensées jusqu'à son départ de la maison. Sur le chemin, lorsqu'elle se rendait en direction de la gare, où l'attendaient les Pevensie, cette dernière avait néanmoins changé d'attitude en se disant que si Edmund la voyait dans un état pareil, il serait peut-être encore capable de ne pas partir. Elle devait tenir bon, et se forcer à cacher ce qu'elle ressentait, pour le bien de son fiancé, pour leur avenir.
Lorsqu'elle arriva à destination, elle se pressa d'entrer dans le hall de la gare, et avait pu apercevoir, au loin, qu'ils étaient tous réunis dans un calme plat, dans un coin non loin du quai d'embarquement. La venue de Serena avait fait ciller les plus attentifs, et réveillés. Ce fut Lucy qui engagea la conversation la première, car aussi étonnant soit-il, voir sa meilleure amie aussi rayonnante, en si bon matin, lui donnait la force dont elle manquait depuis tout ce temps. Cela fit décocher un sourire à Peter, qui lança un regard à son jeune frère pour lui faire comprendre que la princesse était vraiment la lumière dont ils avaient tous besoin lorsque l'obscurité s'emparait d'eux. La seule présence de la jeune femme les avait ravis et en un rien de temps, leurs visages meurtris et leur mutisme s'étaient estompés pour laisser place à des discussions animés et variés, jusqu'à l'arrivée du tant attendu train, qui fit par ailleurs revenir le silence. Edmund fut le premier à porter son attention sur le grand wagon qui se trouvait derrière lui. Ce dernier n'avait eu le temps de dire un mot de plus, qu'un à un, les membres de sa famille le prenaient dans les bras, même Peter, qui se sentait tout de même gêné de le faire. Susan et Lucy s'étaient mises à pleurer à chaudes larmes, et seuls les parents avaient su se retenir. Quand ce fut le tour des deux amoureux, l'étreinte fut plus longue, et aucun d'entre eux ne souhaitait ouvrir la bouche, car ils savaient qu'ils allaient eux aussi verser des larmes, et ils ne désiraient point se laisser cela comme dernier souvenir d'eux ensemble.
- Prends soin de ma famille, durant mon absence, s'était contenté de souffler le brun.
- Je ferai de mon mieux, lui assura sa fiancée, avant de lui faire un baiser sur la joue. Je t'aime, susurra-t-elle assez bas pour que seul Edmund soit le détenteur de ses mots.
- Je t'aime, prononça-t-il à son tour avant de sceller ses lèvres à celles de sa dulcinée.
Ils s'étaient séparés à contrecœur, et Edmund lança un regard général à tout le monde en leur offrant un sourire bienveillant, avant de se pencher pour attraper la valise qui était à ses pieds. Sa famille et Serena l'observaient sans prononcer le moindre mot, car ils étaient tous émotifs à l'idée de le voir ainsi. Hélène n'était parvenue à retenir son chagrin plus longtemps et tamponnait un mouchoir sous ses paupières en essayant de rendre son sourire à son fils. Et ce fut avec une certaine difficulté que le roi ébène tourna les talons, et grimpait dans le wagon. Celui-ci se montra par l'une des fenêtres et admirait le beau portrait qui était face à lui, et avant que le train ne se mette à souffler sa vapeur, le brun avait déclaré une dernière chose :
- Vous allez tellement me manquer !
- Tu vas aussi nous manquer ! s'exclamait tous les membres de sa famille, en lui faisant des signes de mains, qu'Edmund leur rendait, jusqu'à ce que le train ne disparaisse de leur champ de vision.
Et lorsque le train et la famille furent assez éloignés, chacun versait les larmes qui avaient tant lutté pour ne pas sortir.
***
Narnia, année 2738
L'atmosphère était macabre et la pression faisait rage. Un goût métallique prenait place dans sa bouche, tandis qu'il enchaînait des chorégraphies spécifiques de coups d'épée. Son souffle fut soudain coupé par un coup bien précis asséner par l'ennemi. Ceci fit grogner l'homme sous son heaume parsemé d'écailles bleus, qui s'empressa de donner plus de coups à son adversaire. Il eût un léger moment de répit pour regarder en périphérique ce qui l'entourait. Les images étaient terribles, il y avait des corps inertes partout, des litres de sang dépeignant sur la magnifique nature qu'avait été Narnia il y a longtemps de cela. Puis, il fut à nouveau pris d'assaut par plusieurs ennemis, armés de leur cimeterre, qui n'avaient aucune bonne intention à son égard. À plusieurs reprises, le combattant pensait qu'il allait y laisser la vie, comme ce fut le cas pour ses camarades, mais par chance sa maîtrise des armes et son audace lui sauvèrent la vie, à tel point qu'il soit parvenu à arriver à l'endroit dans lequel il avait souhaité pénétrer. Il s'agissait du château de Cair Paravel. En ces temps-ci, ces lieux étaient peu sûrs, car beaucoup de Calormènes s'étaient approprié le terrain. Non pas parce qu'ils s'étaient dit un beau jour que ça allait être sympathique de s'installer ici, car ils venaient de loin, par de là les montagnes, mais parce qu'ils avaient été conduits à le faire par leur dirigeant, le capitaine Rishda tarkaan. Ces êtres avaient des croyances contraires à celles du reste du peuple de Narnia, et leur dieu à eux était loin d'être aussi bienveillant que ne l'était Aslan. Tash était un être terrifiant et horrible à regarder, et bien plus d'un étaient apeurés, rien qu'en pensant à son nom.
Fort heureusement, peu de choses faisaient trembler le jeune chevalier qui venait de parvenir à pénétrer dans le château. Il avait été mis face à de redoutables épreuves depuis sa tendre jeunesse, sûrement parce que ses parents savaient que son destin était d'accomplir des choses incroyables. C'était nulle autre pour cette raison que le jeune chevalier avait pris tous ces risques, mais surtout parce que tous les royaumes étaient en grand danger. Ce dernier était arrivé à se cacher assez facilement de ses ennemis durant tout son parcours dans les murs de Cair Paravel, tandis qu'il était en quête d'artefacts bien précis. Et quelle ne fût pas sa surprise lorsqu'il mis la main dessus, en étant descendu dans les sous-sols, en ayant trouvé un passage secret qui lui avait été indiqué par un ancien servant du château. Ces derniers étaient entourés par des vitrines, et mis en valeur comme de vulgaires œuvres d'art à admirer, alors que des rayons lumineux traversaient de petits hublots pour les éclairer. Un fier sourire se dessinait sur les lèvres du jeune homme lorsqu'il sortit de son fourreau l'épée du grand roi Peter, pour admirer l'arme qui avait tant disputé de combats, avant d'accorder son attention à la fiole de cordiale de la reine Lucy, puis à l'arc de la reine Susan. Au bout d'un moment, il s'était décidé à ranger ces choses aussi précieuses dans un sac magique, qui n'avait aucun fond, avant de poser ses yeux sur un objet encore plus important, et c'était ce qu'il recherchait par-dessus tout. Cela était même l'objet de sa quête, qui n'avait rien de simple aux vues de la terreur qui régnait à l'extérieur.
- La corne de la reine Susan, soufflait-il en la regardant sous tous ses angles, d'un air émerveillé. Tout le monde dit que si nous soufflons à l'intérieur, une aide nous sera toujours apportée. Eh bien, pourvu qu'une aide digne du grand Aslan vienne à notre secours.
Sans tarder, le chevalier approcha de ses lèvres l'objet magique et souffla de toutes ses forces dedans.
***
Angleterre, 17 septembre 1949
Cela faisait un peu plus de deux semaines qu'Edmund était rentré à Finchley, et sans grand étonnement, toute sa famille fût très heureuse, et en partie Serena, qui avait attendu avec impatience de lui faire découvrir une chose particulière. Ces derniers ne s'étant vu que peu de fois, durant l'année, ils virent ainsi l'évolution de chacun et cela leur plaisait. Edmund prenait du muscle et était bien moins colérique. Serena ressemblait de plus en plus à une femme indépendante, sûre d'elle, qui pensait aux autres, et elle mettait en œuvre des tas de choses qui donnaient le sourire aux gens.
Un grand sourire illuminait le visage de Serena, tandis qu'elle enfonçait la clef dans la serrure de la porte d'entrée.
- Surtout, ne retire pas ton bandeau des yeux avant que je ne te l'autorise ! prévenait la jeune femme.
- Oui, oui ! Dépêche-toi ! répondit le brun en ne pouvant s'empêcher de sourire à l'idée qu'il allait avoir une merveilleuse surprise.
La brune lui attrapa la main afin de le guider à l'intérieur de la demeure.
- Vas-y !
Sans se faire prier, le roi ébène retira ce qui lui couvrait les yeux, et il fut bouche bée en voyant ce qui se présentait à lui.
- Ça te plaît ? demanda Serena en s'appuyant contre un meuble.
- Un peu que ça me plaît ! Ça va être notre chez nous ! Je suis si heureux, Serena ! s'exclamait Edmund en la prenant dans ses bras.
- Cette année fut difficile pour nous, il est temps je pense, que l'on se pose pour de bon, tu ne crois pas ?
- Oh que oui ! J'attendais ça avec impatience, tu n'as pas idée. D'ailleurs, il ne manque plus qu'une chose, pour que ce soit parfait.
- Que toi et moi soyons mariés, je présume ?
- Oui, exactement, approuvait le roi ébène, avant de soupirer en n'osant regarder Serena. Cependant, je n'ai pas vraiment pu faire d'économie pour t'acheter une bague, et je m'en excuse sincèrement.
- Voyons, tu sais bien que je ne t'en voudrais jamais ! D'ailleurs, la montre que tu m'avais donnée est largement suffisante, pour moi.
- Peut-être, mais contrairement à la dernière fois, cette demande est bien plus sérieuse, et ça a beaucoup d'importance à mes yeux. Nous allons poursuivre le reste de notre existence dans cette maison, et le mariage est ce qui nous permettra d'accéder aux choses que nous désirons. Ne me reproche pas le fait de vouloir t'offrir une véritable bague pour officialiser tout ça. Sans compter que nous allons aussi organiser une fête pour célébrer notre union.
- Oui, pardonne-moi. Tu as entièrement raison, répondit Serena. Honnêtement, je n'ai jamais imaginé à quoi pourrait ressembler notre mariage. Mais quoi qu'il en soit, je ne veux juste pas porter une robe bouffante !
- Tu porteras la robe qui te plaira, lui assura le brun en retenant un rire. La seule chose que je veux c'est que tu me dises « oui » devant l'autel.
- Pour ça, tu peux compter sur moi !
Le jeune homme attrapa les mains de sa dulcinée et planta ses pupilles sombres dans les orbes océans de Serena. Ils se prirent dans leurs bras et passèrent encore un peu de temps ainsi avant de poursuivre la visite de leur nouvelle maison, tout en décidant de la date où tout changerait pour eux. Et lorsqu'ils furent arrivés dans la chambre, ils ne purent attendre une seconde de plus, en sachant qu'ils aient été restreints sexuellement durant une année entière, se redécouvrant une fois encore au contact de leur chair.
Les jours passèrent à une vitesse folle, sans doute parce que le jeune couple était pris par des tas de choses, notamment l'organisation de leur mariage, car il approchait à grands pas, mais notamment un dîner qui fut organisé chez un ancien ami de la famille Pevensie, un vieux professeur qui avait un nom assez familier pour Serena, puisqu'il s'agissait du professeur Digory Kirke. Lorsque ce dîner avait été annoncé, et que le professeur Kirke fût cité, cela avait immédiatement fait réagir la brune, qui fut très surprise d'apprendre que l'enfant qui avait assisté à la création même du monde dont elle était originaire, était toujours en vie dans ce monde ci. Elle n'avait qu'une hâte, c'était de faire sa connaissance, surtout parce qu'elle avait un tas de questions à lui poser, tout comme ce fut le cas lorsqu'elle avait pu faire la rencontre, l'année d'avant, d'Eustache, et plus tard de Jill, à qui elle avait demandé de raconter leurs aventures avec son défunt père, le roi Rilian. Les deux enfants lui avaient contés avec plaisir tout cela, ce qui avait fait grandir leur amitié, et tous les amis de Narnia se virent plus souvent lors de cette année.
À présent, face à la porte d'entrée, toute la famille Pevensie (Sauf Susan et les parents), Eustache, Jill, et Serena, attendaient que le vieux professeur vienne leur ouvrir afin de les accueillir dans sa maison. Une maison qui avait une taille normale, contrairement au manoir qu'il avait possédé autrefois, mais les temps avaient été durs pour lui, depuis quelques temps, et certains sacrifices s'étaient imposés. Il n'avait plus de gouvernante, ni qui que ce soit d'autre à son service, ce qui avait grandement ravis certains membres de la famille Pevensie, car ils avaient encore certains mauvais souvenirs de Madame Macready qui avait été très sévère avec eux, lorsqu'ils eut été enfants.
Ils furent assez étonnés de voir, lorsque la porte s'ouvrit enfin, que le professeur ne se trouvait pas seul, mais qu'il était accompagné d'une dame aussi âgée que lui, et dont le regard était gai et pétillant de sagesse. Cette vieille dame s'était rapidement présentée comme étant une amie d'enfance de Digory, et qu'elle s'appelait Polly Plummer.
Les salutations et présentations furent plutôt brèves et rapides, car Peter étant resté en contact avec le professeur, il lui avait raconté tout ce qu'il savait sur Serena, Eustache ou Jill, donc ceux-ci étaient loin d'être inconnus aux yeux des deux anciens.
Le groupe fut invité à visiter les lieux, avant qu'ils ne se décident enfin à prendre place dans le salon afin de prendre le thé et parler de ce pourquoi ils étaient venus. Cela avait, par ailleurs, duré plusieurs heures, avant que le dîner ne les fasse seulement changer de pièce mais pas de sujet de discussion. À vrai dire, ils ne s'arrêtèrent de parler que lorsque soudainement Jill s'était mise à crier, en plein milieu du repas. Immédiatement, tous les regards se tournèrent dans la direction qu'elle pointait. Polly avait retenu sa respiration, et Digory fit un mouvement brusque, renversant ainsi son verre de vin sur la table, lorsqu'ils purent observer, dans un coin de la salle à manger, un homme qui devait avoir la vingtaine, vêtu d'une façon qu'ils ne connaissaient que trop bien, mais qui n'était pas totalement matérialisé. Eustache et Jill avaient bondit sur leurs pieds, en veillant tout de même à garder une certaine distance, alors qu'Edmund et Serena se levaient aussi mais pour s'approcher de lui afin de le questionner. Ils furent néanmoins coupés dans leur élan par l'arrivée de Peter, et ce fut lui qui s'adressa à cet être mystérieux.
- Parlez, si vous n'êtes un fantôme ou un songe. Il y a quelque chose de narnien en vous et nous sommes les huit amis de Narnia.
L'être qui se tenait devant le groupe venait de comprendre qu'ils le voyaient, et celui-ci avait tenté par tous les moyens de se faire entendre, mais aucun son ne s'échappa de ses lèvres.
- Ombre, esprit ou quoi que vous soyez, poursuivit Peter en fixant son regard sur l'homme qui était face à lui, si vous êtes de Narnia, je vous adjure au nom d'Aslan, parlez-moi. Je suis Peter, le roi suprême.
Le silence persistait dans la pièce, et aucun d'entre eux n'osait prononcer le moindre mot, tant ce qui se produisait était étrange. Soudain, l'être mystérieux commençait à disparaître sous leurs yeux.
- Regardez ! Il s'efface, fit Jill.
- Il se dissout, ajouta Eustache.
- Il est en train de disparaître, acheva Lucy.
Ce soir-là ne fut point de tout repos pour les huit amis, qui après ce qui s'était passé, avaient longuement débattu sur cela. Ils avaient ainsi conclu qu'il s'agissait très clairement d'un appel au secours de la part d'un habitant de Narnia, et que deux d'entre eux devaient aller à leur rencontre.
- Te souviens-tu de ces anneaux, Polly ? avait subitement lancé le professeur, en la regardant.
- Bien sûr que je m'en souviens. D'ailleurs, je me demande où est-ce qu'ils se trouvent aujourd'hui.
- Et bien je vais te le dire. Lorsque nous étions encore enfants, et que j'ai planté ce pommier dans le jardin de la maison de ma tante, j'ai également enterré les bagues que mon oncle Andrew avait créé. À mes yeux, elles étaient autant magiques que maléfiques. (Son regard se baissa sur ses mains ridées) Après tout, c'est ma faute si cette sorcière blanche est arrivée à Narnia et qu'elle a commis de terribles choses.
- Voyons, Professeur, fit Lucy en lui posant une main sur la sienne d'un air compatissant. Vous n'étiez qu'un enfant, et si elle n'y était pas allée, nous n'aurions peut-être jamais vécu tout ce qui s'est passé, ma famille et moi.
- Lucy a tout à fait raison, et tout le monde peut commettre des erreurs, avait continué Serena en ayant croisé les yeux d'Edmund.
Le concerné s'était contenté de soutenir le regard de Serena en guise de réponse.
- Quoi qu'il en soit, où voulez-vous en venir ? demandait Peter.
- Eh bien, reprit le vieil homme en lorgnant chacun d'entre eux, j'ai pensé que si quelqu'un devait retourner à Narnia, il lui faudrait le moyen pour y aller. Vous le savez mieux que moi, on ne se rend pas là-bas par notre simple volonté. Seule la magie le peut.
- En espérant, bien sûr, qu'elles y soient toujours, avait fait remarquer Eustache d'un air peu convaincu.
- C'est vrai, ajouta Jill. Eustache a raison. Entre-temps, il y a sûrement des nouveaux locataires, et ils ont très bien pu creuser à l'endroit où se situent les bagues ? Qui sait ce qu'ils en auraient fait si c'était le cas ?
- Peut-être, mais c'est la seule idée que nous avons sous la main. Donc au lieu d'imaginer des scénarios, nous devrions nous concentrer sur la manière dont nous pourrions les récupérer sans être repérés. (Il se tut une seconde en posant ses yeux sur deux personnes particulières) Pour ce qui est des deux voyageurs qui iront accomplir cette tâche, il ne fait aucun doute que ce sera vous deux, Jill et Eustache, puisque vous êtes les plus jeunes.
- En effet, vous seuls pouvez faire cela. Nous sommes tous trop vieux pour pouvoir nous rendre là-bas. Aslan ne nous laisserait jamais passer de cette façon, affirma Edmund. D'ailleurs Peter, je te propose que nous allions déterrer ces fameux anneaux magiques ensemble, dès que possible, annonça-t-il ensuite. Je viens d'avoir une idée à ce propos.
Le blond fit mine de réfléchir durant quelques instants, avant d'acquiescer d'un signe de tête. À la suite de la réponse de son aîné, le roi ébène s'était lancé dans ses explications, et tout le monde avait approuvé son idée.
Lorsque la soirée touchait à sa fin, et que Serena et Edmund se retrouvèrent seuls sur le chemin de retour, la princesse s'était décidée à parler à cœur ouvert de ce qu'elle pensait de la situation.
- Dis-moi, Edmund, commença-t-elle en posant les yeux sur son fiancé, que penses-tu de toute cette histoire ?
- Tu veux parler de Narnia ? questionna celui-ci afin de s'assurer qu'il ne comprenait pas mal les choses.
- Oui. Je ne sais pas... Pour moi, lorsque j'ai accepté mon destin et de vivre ici pour le restant de ma vie, avec toi, je n'avais pas imaginé que ce genre de chose nous arriverait. Pas que cela me dérange, en soit je suis heureuse ici, mais c'est juste que... Cela fait remonter de terribles souffrances en moi. C'est très désagréable. Pourtant, parler de Narnia n'a jamais été problématique, et j'en ai toujours parlé normalement, mais cet événement était bien différent.
- Oh, je comprends, soufflait le brun. Vois-tu, ce n'est pas la première fois que je suis confronté à ce genre d'étrangeté. Tous mes voyages pour me rendre à Narnia furent farfelus, mais je m'y suis fait, et à vrai dire, j'attends toujours d'y retourner, même si Aslan m'a spécifié que je suis trop vieux.
Un soupir s'échappa des narines de Serena, tandis qu'elle ouvrait la porte d'entrée de chez Lisbeth. Cette dernière était absente pour tout le week-end.
- C'est aussi pour cette raison que je n'aime pas trop la tournure de la situation, poursuivit-elle. En réalité, tu n'as jamais voulu rester ici avec moi. Si l'occasion venait à se présenter pour toi, tu serais prêt à tout quitter, sur le champs, et ça m'énerve, nan, en fait, ça me fait peur ! pesta-t-elle.
Le regard d'Edmund devint plus grave, avant qu'il ne lorgne sombrement cette dernière.
- Oui ! Et alors !? Est-ce un crime de vouloir y retourner ? s'emportait Edmund. Tu ne comprends pas ce que je ressens au plus profond de moi. J'ai eu beau me trouver un but dans cette vie actuelle, vouloir t'épouser, fonder une famille avec toi, et devenir pompier... Ça ne remplira jamais assez ce que mon cœur désire réellement.
- Non, en effet, je ne comprends pas cette vision que tu as là, pourtant, je suis dans la même situation que toi, j'ai eu à faire de gros sacrifices. Mais au vu de l'avenir qui nous attendait ici, je pensais que tu étais prêt à y renoncer. Dois-je te rappeler que j'ai dû dire adieu à la vie que j'avais là-bas, à mon royaume, à mes amis, tout ? J'étais aussi heureuse dans cette vie-là, mais contrairement à toi qui ne semble pas vouloir autre chose, moi j'ai fini par accepter ma condition, mais surtout apprécier ce que j'ai maintenant ici, et tu devrais en faire autant, s'exclama sèchement Serena avant de gravir l'escalier, tournant ainsi le dos au roi ébène, qui avait décidé de ne pas poursuivre cette discussion.
Le jeune couple était ainsi resté en froid durant le reste de la soirée, et même pendant quatre jours entiers. Cela les avait poussés à réfléchir davantage, et chacun avait ainsi réalisé une chose : aucun n'avait tort.
Ce ne fut d'ailleurs, que lorsque le rassemblement entre les huit amis de Narnia avait été à nouveau fait, et que Jill et Eustache avaient enfilés les bagues pour se rendre à Narnia, que le couple s'était enfin décidé à enterrer la hache de guerre.
- Je te propose de régler nos comptes au combat, avait proposé Serena en lui offrant un clin d'œil.
- Tu ne me le diras pas deux fois, avait souri Edmund en enfournant sa bicyclette.
- Est-ce que je peux venir avec vous ? avait lancé Lucy, j'aimerais beaucoup assister à ça !
- Avec plaisir, affirma la brune, comme ça, nous aurons une arbitre !
- Tu t'intéresses aux combats, maintenant ? s'étonnait Edmund en arquant un sourcil.
Un rire fut lâché par Serena, tandis qu'elle mettait un poing contre sa hanche, et un bras sur l'épaule de Lucy.
- Si tu savais à quel point j'ai transformé ta petite sœur en seulement une année ! ricanait-elle.
Edmund sembla éberlué, et ce n'était que pour cela qu'il avait interrogé, d'un air très intéressé, durant tout le trajet, sa petite sœur sur les grands changements qui la composaient à présent. Et parmi eux, Lucy avait acquis certaines compétences au karaté qui avait grandement fasciné Edmund. Ils se rendirent dans la demeure de Lisbeth, car celle-ci possédait un plus grand jardin que celui des Pevensie, et la surface était plus praticable pour ce genre de chose.
Ils déposèrent leurs vélos devant l'entrée de la maison et entrèrent dans le couloir principal.
- Attendez-moi dans le salon, je vais mettre une tenue plus appropriée au combat. Vous pouvez vous servir ce que vous voulez dans le frigo, je reviens, leur avait indiqué la brune avant de s'aventurer dans l'escalier, dans le but de se rendre dans sa chambre.
Lorsqu'elle était arrivée dans la pièce, une étrange idée lui traversait l'esprit. Serena ne savait pas vraiment pourquoi cela lui venait soudainement, mais la jeune femme avait directement portée son attention sur la malle qui se trouvait au pied de son lit, et l'ouvrit pour en sortir l'épée de son père, sa dague, et la lampe torche d'Edmund.
- Je vais leur montrer, souffla-t-elle.
En les ayant examinés sous tous les angles, celle-ci réalisa que ça faisait longtemps qu'elle ne les avait pas sorties, ne serait-ce que pour les épousseter. Elle avait, par ailleurs, eu un sourire en coin en ayant examiné la lampe torche, avant de la reposer à côté de ses affaires, pour se concentrer sur le contenu de son armoire. Elle y dénicha sa tenue de Narnia, ainsi que ses bottes, et les enfila. À nouveau, un sourire embellissait son visage, lorsqu'elle put voir, à travers la glace, que ses vêtements lui allaient toujours aussi bien. Et sans plus tarder, elle attrapa à la volée les affaires qu'elle avait sortie, dans l'intention de les montrer à ses amis, et s'était enfin décidée à rejoindre sa meilleure amie et son fiancé au rez-de-chaussée.
- Me voilà ! Je m'excuse pour l'attente, s'exclama-t-elle en apparaissant dans le salon.
À peine eut-elle pénétré dans la pièce, que les yeux d'Edmund et Lucy l'admiraient avec une certaine attention. Sûrement parce qu'elle avait tout bonnement l'apparence d'une véritable guerrière narnienne, mais aussi parce que c'était bien la toute première fois qu'elle les portait en leur présence, et que ça lui allait à la perfection. Elle avait posé les objets face à ses amis, et, sans surprise, Edmund avait saisi sa lampe torche, et l'observait de toute part en étant étonné de son état, avant de se concentrer à nouveau sur sa fiancée. Lucy, quant à elle, avait pris la dague et la regardait avec un sourire en coin, car elle lui faisait beaucoup penser à la sienne, avant d'imiter son frère. Serena s'était penchée sur son sac dans l'intention d'en sortir quelque chose, mais la voix de ses amis la coupa dans son élan, et elle s'était ainsi contentée de le mettre sur son épaule.
- Ouah ! C'est vraiment... commença Lucy.
- Toi, continua Edmund.
Serena leur répondit par un simple sourire, avant qu'ils ne se décident enfin à se rendre dans le jardin afin de démarrer le tant attendu combat, mais aussi étrange soit-il, le trio n'avait eu le temps de passer la porte de sortie, qu'ils sentirent soudainement une force les emporter. Serena voyait trouble, tandis qu'Edmund et Lucy remarquaient que les murs et le paysage se mettaient à vibrer, comme s'ils étaient en mouvement constant.
- Qu'est-ce qui se passe ?!
- Je crois que... avait débuté Edmund.
- Nous sommes en train d'y aller ! s'exclama Lucy, avant qu'ils ne soient subitement téléportés quelque part.
Le trio se trouva au sol, sur les genoux, car ils furent poussés si violemment par cette force étrange, qu'ils en perdirent l'équilibre. Serena se passa la main sur le visage, alors que Lucy se frottait les yeux, et Edmund fut bien le seul et premier à essayer de se lever pour découvrir l'endroit dans lequel ils venaient de débarquer. Il faisait jour, une petite brise vagabondait dans l'air, des arbres les entouraient et l'herbe était plutôt agréable. Ils se trouvaient dans une forêt qui ne semblait pas étrangère aux deux Pevensie.
- Serions-nous à Narnia ? avait demandé Serena, qui se sentait toute étourdit par ce qui venait de lui arriver.
- On dirait bien, affirmaient Lucy et Edmund en même temps.
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Et voilà mes cher(e)s ami(e)s ! Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ?
Pour ceux/celles qui ont lu les romans, je pense que vous avez facilement pu déceler le croisement entre le scénario de ma fiction et celui de la véritable histoire de C.S Lewis 😁 Pour ceux/celles, qui en revanche, n'ont pas lu les romans, j'espère que vous avez malgré tout réussi à suivre l'histoire sans trop de difficulté, car il y a des éléments qui vous sont sûrement inconnus. Néanmoins, j'ai essayé au mieux d'adapter la chose pour que ce soit cohérent et compréhensible pour ceux qui n'auraient pas lu les livres.
Eh oui ! Il y a bel et bien un grand retour à Narnia ! Vous ne pensiez quand même pas que Serena et Edmund allaient vraiment vivre à Finchley toute leur vie ? Nan ! Trop barbant voyons ! Ils ont besoin d'aventures ! C'est ce qui les fait vibrer, voyons ! 😆
N'hésitez pas à me donner vos avis en commentaire, voter et vous abonner si ce n'est pas encore fait !
Vos commentaires me font énormément plaisir ! N'hésitez surtout pas à continuer, ça m'aidera pour l'écriture de la suite 😊
Sur ce, je vous souhaite de la patience, avant la suite 🤗
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