Chapitre 23
Le loup blanc se précipita à la rencontre du Guérisseur, prêt à le défendre contre l'inconnu. Malgré sa patte infirme, en quelques bonds, il n'eut aucun mal à le rejoindre. En les apercevant, Topaze se tourna vers eux.
- Vous êtes là, lâcha-t-il soulagé.
Flocon le dévisagea. Il ne semblait pas en danger. Son regard bascula sur le coyote.
- Je vous présente Saphir.
L'intéressé les salua de la tête brièvement.
- Il connaît cette montagne, il pourra nous aider.
Flocon leva les yeux sur leur objectif. Il frémit en voyait le dôme rocheux. Ses parois enneigées ne lui donnaient guère envie d'y aller. Mais ils n'avaient pas le choix.
- Le moyen le plus sûr est de passer par le flan droit, fit le coyote de sa voix fluette.
Le loup blanc dévisagea le nouveau venu. Il n'aimait pas forcément ces animaux mais il ne paraissait pas hostile. Il balaya le paysage du regard. Saphir avait raison. Le chemin qui semblait le plus praticable était une pente douce qui arrivait au bord de grandes parois rocheuses.
- Lorsque vous y arriverez, il faudra que vous emprunterez soit la crête soit le flan qui se trouve derrière la montagne, continua-t-il en passant ses petits yeux sur les loups. Votre fleur se trouve là-haut.
Flocon hocha doucement la tête. Ils y étaient, enfin. Ils allaient bientôt pouvoir rentrer.
- Vous ne venez pas ? s'étonna Mimosa.
Saphir émit un mouvement de recul. Un sentiment de terreur passa rapidement sur son visage.
- Il faut être fou pour y aller, répondit-il en secouant négativement la tête.
Flocon sentit ses poils s'hérisser. Décidément, cette quête s'avérait d'autant plus compliquée. Topaze le remercia tandis qu'il s'en allait aussi vite qu'il était arrivé. Le loup blanc le regarda s'en aller, perplexe.
- Ne perdons pas de temps, lança le Guérisseur en prenant la direction indiquée par le coyote.
Flocon lui emboîta le pas et échangea un regard avec Ouragan.
- Bizarre ce coyote, lui glissa son ami.
Le loup blanc hocha la tête. La venue de cet animal était bien étrange. Il se demandait si ce n'était pas un piège. Bien que cela pouvait paraître ridicule, il n'avait pas oublié qu'une Sorcière cherchait à les nuire.
Le petit groupe traversa le flan de la montagne aussi rapidement qu'ils purent. La neige entassée sur la pente les ralentissait. Même si Flocon se débrouillait pour se déplacer, marcher dans la neige profonde le fatiguait toujours autant.
- On arrive, annonça Topaze devant lui.
Le loup blanc leva les yeux. Les grandes parois humides se dressaient devant eux. Elles étaient imposantes et ne semblaient pas vouloir les aider à monter point trouver cette fleur. Ses yeux cherchèrent la fameuse crête. Il finit par apercevoir un gros rocher qui marquait le début des parois, un peu plus loin.
-Je propose qu'on se divise en deux groupe, déclara alors Topaze. Mimosa et Ouragan ensemble et vous deux avec moi.
Flocon jeta un coup d'œil à Edelweiss. Cette dernière paraissait observer attentivement la montagne.
- Lorsqu'on aura la fleur, on fera quoi ?
La question d'Ouragan rendit les loups perplexes. Ils n'avaient aucun moyen de revenir parmi les meutes. Passer par le glacier leur était impossible.
- Nous verrons, lâcha finalement le Guérisseur. Ça ne sert à rien d'y penser maintenant. Chaque chose en son temps.
Flocon dévisagea Topaze sans un mot. Bien qu'il lui faisait confiance, il avait du mal à saisir ce qu'il leur disait.
- D'accord... soupira Ouragan en marchant doucement vers le flan de la montagne Dans ce cas, allons-y.
Mimosa lui emboîta le pas. Le reste du groupe partit alors de l'autre côté. Flocon suivit Topaze et Edelweiss. Il aurait préféré partir avec ses amis plutôt qu'avec la louve blanche... Sa mâchoire se contracta. Il la connaissait bien, il avait du mal à s'avouer qu'elle avait changé.
Ils traversèrent les quelques longueurs qui les séparaient des rochers. Flocon observa le début de crête. Rien que d'y monter semblait n'être pas facile. Edelweiss prit un peu d'élan et grimpa dessus dans sans difficulté.
- Il n'y a pas de risque de tomber, lança-t-elle en regardant autour d'elle. Topaze à vous.
Le Guérisseur courut un peu également pour pouvoir grimper sur le rocher. Et malgré son vieil âge, il réussir sans mal à rejoindre la louve blanche. Flocon regarda le rocher à son tour. Il n'était pas vraiment confiant à l'idée d'y monter.
- À toi Flocon.
Il prit une profonde inspiration. En tant normal, il l'aurait fait sans problème. Mais avec sa patte en moins, il avait beaucoup moins confiance en sa capacité à sauter un si grand obstacle. Le loup blanc prit un peu d'élan - comme l'avait fait un peu plus tôt Edelweiss - et s'élança sur le rocher.
Tout d'abord il sentit le sol rocheux sous ses pattes mais étant humide, celui-ci le fit déraper. Il battit frénétiquement des pattes. Il voulut se propulser avec ses pattes arrières. Mais n'ayant plus qu'une, il n'arriva pas à remonter. Alors qu'il basculait, il sentit des crocs se refermaient sur la peau de son cou et le tirer vers le haut.
- Merci, souffla-t-il une fois sur le rocher.
Edelweiss le dévisagea un instant avant de se détourner. Le loup blanc se releva tant bien que mal. Topaze lui lança un regard interrogateur que Flocon répondit par un bref hochement de tête. Il allait bien.
Le Guérisseur prit alors la tête du trio et ils commencèrent l'ascension. Flocon sentit son cœur s'accélérer tandis qu'ils progressaient sur la crête. Ils touchaient presque au but. Ils suffisaient qu'ils trouvent cette fleur blanche pour sauver Anémone. Un large sourire apparut sur son visage. Il avait hâte de la retrouver.
- Nous allons passer par ces rochers, annonça Topaze en bifurquant brusquement.
Flocon n'omit aucune objection. Il grimpa à la suite d'Edelweiss. Le sol devenait de plus en plus glissant, sinueux. Il avançait doucement pour ne pas tomber. Le loup blanc baissa les yeux en contre bas. A présent ils se trouvaient au-dessus des rochers verticaux, aperçus un peu plus bas. Toute chute serait mortelle. Il posa son regard devant lui en sentant sa tête lui tourner. Décidément son vertige n'allait jamais se soigner.
Un cri aigüe retentit tout à coup au-dessus d'eux. Flocon leva les yeux, intrigué. Son cœur se figea dans sa poitrine. Un gigantesque volatile tournoyait autour d'eux. Ses puissantes ailes battaient dans l'air froid de la montagne. Le loup blanc rencontra ses yeux rouges. Ombre.
Et c'est alors que la Sorcière fondit sur eux. Les serres en avant, Flocon resta paralysé en la voyant arriver. Une massa grise le bouscula, évitant de se prendre ces griffes mortelles. Le loup blanc se retourna brusquement.
Topaze se tenait sur le sol. Un liquide poisseux recouvrait peu à peu son visage. La neige se teignait en rouge. Flocon se précipita vers le Guérisseur.
- Flocon, attention !!
Edelweiss le prévint a temps. Il s'aplatît au sol, évitant à nouveau les serres de la Sorcière.
- Topaze ? s'enquit-il la voix tremblante.
Du coin de l'œil, Flocon vit l'aigle effectuer une rotation dans les airs. A son grand soulagement, Topaze remua doucement et se redressa sur ses pattes, chancelant.
- Vous allez bien ?
Le Guérisseur tourna doucement sa tête vers lui. Une vision d'horreur lui apparut alors. Ses yeux étaient vitreux, remplis de sang. Mais surtout l'œil gauche ne semblait plus tenir dans son orbite. De la bile remonta dans sa gorge. Il dut se faire violence pour ne pas vomir.
- Je...
Une ombre passa sur lui. L'aigle passa sur eux et fondit à nouveau sur Topaze. Une masse blanche l'attrapa à la gorge et la plaque contre le sol. La vitesse d'Edelweiss était surprenante. Elle maintenait la Sorcière fermement dans sa gueule. Ombre battit furieusement des ailes et donna un grand coup de bec sur le museau de la louve blanche. Cette dernière hurla de douleur et la lâcha, qui s'éloigna dans le ciel.
- Je vais bien, lâcha sa camarade alors qu'il se précipitait vers elle.
- Elle est partie ? fit en même temps Topaze.
Le cœur du loup blanc se serra en comprenant que le Guérisseur était devenu aveugle. Ses yeux s'humidifièrent, il s'était sacrifié pour le sauver. Topaze le regardait hagard, luttant contre la douleur qui devait lui brûlait le visage. Ombre venait de lui ôter la vue par ses serres tranchantes. Le vieux loup laissa échapper un gémissement de douleur.
Flocon sentit une colère incontrôlable monter en lui. Le désespoir l'envahît. Plus ils semblaient s'approcher du but, plus ce dernier semblait s'éloigner. Une larme roula sur son visage. Il ne voulait pas encore voir l'un de ces amis mourir. Il retint un sanglot. Topaze ne devait pas mourir, sous aucun prétexte.
-Ça va aller Flocon, murmura alors le Guérisseur.
Le loup blanc le regarda. Malgré la douleur, il le rassurait sur son état. Il sentit les larmes remonter à cette pensée. Il était épuisé par cette quête.
- Elle va revenir, elle est là pour toi Topaze, ajouta Edelweiss, sans l'ombre d'une émotion, en léchant le sang sur son museau.
Flocon posa son regard sur son amie. Elle ne montrait aucun signe de tristesse. Ses yeux rencontrèrent momentanément les siens. Leur couleur bleu avait perdu leur étincelle. Il prit une profonde inspiration et ravala ses larmes. Ils allaient réussir. Ils n'avaient pas le choix.
Encore tremblant suite à l'attaque qu'ils venaient de subir, il plissa les yeux et regarda le volatile qui planait dans le ciel.
- Je l'ai bien amochée, nous avons un peu de répit.
Edelweiss se tourna vers lui.
- On doit se dépêcher pour trouver le remède et s'en aller alors, répondit-il, en essayant de masquer sa voix tremblotante.
Les yeux bleus de la louve blanche plongèrent un instant dans les siens
- Et protéger Topaze.
Il acquiesça, le cœur serré. Sans lui, ils ne pourront pas réaliser le remède. Il devait rester en vie à tout prix.
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