L'ange gardien


Depuis des années, j'ai l'impression qu'il flotte sur moi comme une chance, pas cette sorte de chance qui vous donne des millions au tirage, plutôt une chance "étalée". Cela ce manifeste toujours par "au bon endroit, au bon moment", des petits moments où quelques secondes plus tard serait trop tard, que le jour d'avant ou d'après serait impossible, ou sinon qu'à un autre endroit, un autre moment, aurait d'autres répercutions plus négatives sur votre experience de ce moment. Cela fait suite à des moments de ma vie que je préfère oublier, et que même paradoxalement, cette chance a continué à me suivre, m'aidant comme elle a pu à me faire traverser ce moment sans que je perde trop la raison, ou que je bascule dans des moments obscures. Peut-être est-ce un juste retour des choses, un rééquilibrage de la vie, mais je crois plutôt, mon instinct penche à croire plutôt, que cela est dû à un ange gardien, et pas n'importe quel ange gardien : mon grand-père.
Cela fait 17 ans que son coeur a cessé de battre, j'avais 12 ans à l'époque. Je n'ai pas beaucoup connu cet homme, et pourtant, il était le cliché du grand-père, coincé dans son temps, qui avait fait la guerre et qui pensait que Hitler n'était pas mort et que c'était les Russes qui avait gagné la guerre. Mais c'était une crème, qui avait fait de merveilleux enfants, dont sa porte était toujours grandes ouvertes, qui avait un chien de chasse et les anecdotes qui allait avec. Il est mort depuis, et je n'arrête pas de penser qu'il est là, autour de moi, sous une autre forme, une forme plus invisible. Je ne crois pas au fantôme, mais je suis prêt à croire à ce fantôme, quel ironie...
Quoi qu'il en soit, je ne sais pas ce que serait ma vie sans ce "juste à temps", ce "au bon endroit, au bon moment", ce "dernier qui reste", ce "une seconde de plus et paf" ou ce "pile le bon jour". Et même quand cette chance ne peut empêcher une fatalité, elle arrive à adoucir les conséquences. J'ai de la chance d'avoir cette chance, ou d'avoir cet ange gardien. J'essaye d'en profiter le maximum qu'il puisse rester, peut-être qu'il s'en ira quand j'aurai réussi ma vie, quand j'aurai retrouvé la vie que j'aurai dû ou pu avoir. Ce jour là, j'aurai un manque dans mon coeur...

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