Chapitre 12 - Altercation
Astrid sauta sur ses pieds, bien décidée à aller visiter les alentours. Depuis qu'elle était arrivée à New-York, elle n'avait pas pris le temps d'aller visiter son quartier, ce qui est quand même dommage quand on habite dans la vile la plus peuplée des États-Unis. Elle rangea sa raquette dans son sac de sport, y glissa également deux balles, une banane, sa gourde et son porte monnaie, et balança le tout sur son épaule. Casque audio visé sur les oreilles, elle lança la musique, enfila ses baskets et sortit de son appartement.
Son véritable but avec cette " visite " était en fait surtout d'aller repérer les courts de tennis publics que Momo avait mentionné la veille, et qui sait, peut-être de trouver des partenaires de jeux. Elle jeta un oeil à sa montre. Il n'était que dix-huit heures et demi mais le soleil commençait déjà à disparaître à l'horizon. De nombreux badauds se pressaient dans les rues, et Astrid soupira doucement en repensant à sa ville natale. Elle avait toujours vécu en région Parisienne, donc l'effervescence des grandes villes ne lui était pas inconnue. Elle ne pouvait nier avoir une certaine nostalgie : sa ville lui manquait, son collège lui manquait, ses parents lui manquaient. Commencer le lycée à l'autre bout du monde n'était pas forcément idéal, mais elle ne regrettait pas pour autant d'avoir réussi à partir, malgré ses appréhensions.
Astrid continua d'avancer tranquillement, sans se presser, observant les New-Yorkais qui marchaient sans grande considération pour les personnes autour. La plupart d'entre eux avaient les yeux vissés sur leur téléphone, évitant de justesse les poteaux et autres obstacles qui pouvaient se dresser sur leur route. Les klaxons de voiture étaient omniprésents et la fumée des travaux non loin lui parvint aux narines, la forçant à tousser. Elle tourna dans une rue un peu moins fréquentée dans une tentative de s'éloigner du bazar ambiant, et poursuivit son chemin. Devant elle se dressait un escalier d'une quarantaine de marches, et elle n'eut aucun mal à reconnaître l'entrée du parc dans lequel Momo lui avait indiqué que se trouvaient les courts. Elle monta les marches trois par trois, pressée qu'elle était de pouvoir frapper quelques balles.
À sa grande surprise, il n'y avait pas énormément de gens dans le parc, et les arbres arrivaient presque à atténuer le bruit des voitures alentours. Elle continua sa balade, cherchant les courts mais profitant tout de même de la vue. Ce ne fut qu'en entendant les bruits de rebonds de balle qu'elle sut être arrivée à destination.
Il y avait beaucoup de joueurs, certains jeunes, certains un peu plus âgés. Quelques filles étaient présentes, mais la majeure partie étaient des hommes, avec une moyenne d'âge d'environ quinze ans. Pas un adulte en vue. Quatre garçons étaient un train de jouer en double sur le terrain principal, tandis que les filles se partageaient l'un des terrains secondaires et que quelques enfants échangeaient des balles sur le dernier court.
Astrid observa de loin et flâna quelques minutes, se baladant à travers la foule pour repérer un éventuel coéquipier. Monroe lui avait bien stipulé que la règle implicite de ces courts publics était que seuls des matchs en double pouvaient y être joués.
Mais étrangement, l'atmosphère semblait tendue. La jeune fille regarda autour d'elle. Un duo semblait mener la danse sur le court principal. Un grand et un petit, l'un blond et l'autre brun, tous les deux diamétralement opposé par leur apparence et leur présence. Le petit brun ne parlait presque pas, mais le grand blond faisait de grands gestes, parlait fort et affichait un visage arrogant et sûr de lui. Astrid se dirigea instinctivement vers eux.
En la voyant arriver, la prunelle grand s'éclaira d'une lueur particulière, mais elle ne pût dire laquelle. Ses yeux vairons la fixaient. Une fois arrivée non loin de lui, elle se rendit compte qu'il était encore plus grand que ce qu'elle avait cru. La jeune fille semblait naine à côté de ce géant qui devait avoisiner le mètre quatre-vingt-dix, voire les deux mètres. Avec cette taille, il aurait du se mettre au basket, pas au tennis ! Même le " petit " n'était pas si petit que ça.
Le match se termina avec une victoire écrasante de ces deux-là, et Astrid profita de l'occasion pour lancer à la ronde.
- Excusez-moi, je suis seule. Quelqu'un pour être mon partenaire ?
Avant même que quiconque ait pu faire un geste, le petit brun s'avança vers elle, raquette à la main.
– Ooh ~? Mademoiselle cherche un partenaire ? Je doute que tu sois assez forte pour prétendre pouvoir jouer ici, avant toute chose.
Astrid laissa glisser, mais la surprise pouvait se lire sur son visage. Déjà, elle ne s'attendait pas à ce que cet imbécile lui balance ça. Mais alors en plus elle s'attendait plutôt à ce que ce soit le grand qui lui parle ainsi, considérant qu'il continuait à la fixer comme si elle n'était qu'un bout de chewing-gum collé à sa semelle. Elle baissa la tête, hésitante, et aperçut du coin de l'oeil une jeune fille aux cheveux coupés courts qui la regardait également, un air légèrement perturbé sur le visage.
– De toute façon, les filles n'ont pas leur place sur un court de tennis, cracha le deuxième.
Eurf. S'il y avait bien quelque chose qu'Astrid détestait, c'était les personnes qui pensaient tout savoir et pouvoir tout faire, et qui utilisaient la force pour obtenir ce qu'elles voulaient. Et les sexistes. Elle détestait les sexistes.
Alors elle releva la tête, les fixa de ses yeux gris et leur adressa le sourire le plus mielleux de son répertoire.
– Eh bien, j'espérais pouvoir jouer au moins un jeu... À moins que la peur de m'affronter soit la véritable raison vous poussant à me dénigrer, lâcha la gamine d'une voix douceureuse.
Elle put entendre distinctement quelques exclamations de surprise en provenance de la foule, et sentit immédiatement une masse de regards se fixer sur elle.
Oups.
Était-elle allée trop loin ?
Mais pas question de se dérober maintenant. La jeune fille qu'elle avait entraperçue un peu plus tôt avec la main sur sa bouche, le visage déformé par une grimace de surprise.
Astrid haussa les épaules et lâcha un reniflement dédaigneux.
– Si vous pensez tant que ça qu'une fille n'a pas sa place sur un court de tennis, prouvez-le !
Avant qu'elle n'ait pu faire le moindre geste ou même réaliser ce qu'il venait de se passer, elle bascula en arrière et percuta deux adolescents. Une douleur lancinante la saisit et elle porta la main à sa pommette droite, choquée.
Qu'est-ce que...
Son cerveau mit quelques secondes avant d'enregistrer et de traiter l'information. La raquette levée du plus petit des deux joueurs, le regard effaré des autres adolescents, la jeune fille qui se précitait vers elle.
Ce connard... venait-il vraiment de la frapper avec le bord de sa raquette ?!
Elle se releva en vacillant, soutenue par l'adolescente qui murmurait des mots qu'Astrid ne parvenait pas vraiment à comprendre. Le brun sembla se dégonfler un peu et son visage tourna au cramoisi. Il fit un pas en avant, mais le corps d'Astrid la força à faire un pas en arrière, maintenant la distance envers eux.
" Danger. Danger. " répétait en boucle son cerveau. Elle était bien trop habituée à cette réaction de peur.
L'adolescente grogna et se redressa, sa main toujours posée sur sa pommette, tentant d'atténuer la douleur. Et à la grande surprise d'Astrid, alors que le plus petit des deux semblait prêt à s'excuser, une main se posa sur son épaule et l'arrêta. Le blondinet venait d'intervenir, ses yeux vairons toujours fixés sur Astrid.
– T'excuse pas, t'as eu raison. Les filles n'ont rien à faire sur un court de tennis, répéta-t-il en crachant ces derniers mots.
Astrid vit rouge. Malgré le mal de crâne lancinant qui commençait à se faire sentir, elle parvint à faire un pas en avant et s'apprêtait à lancer une réplique bien cinglante quand une main se posa sur son épaule et la tira en arrière. La gamine trébucha et manqua de se casser de nouveau la figure.
L'adolescent qui venait de la dégager la dépassa sans prendre la peine de s'excuser ou de s'expliquer, et empoigna le grand blond par le col – et ce malgré leur différence de taille – avec un air méchant sur le visage.
– EH ! Ça va pas de balancer les gens sur les autres ? Connard !
– Woh, le minus, tu veux que je te casse la gueule ?! Tu fais le fier, à défendre cette gamine ?!
– Qui te parle de la gamine ?! J'me fous complet de cette mioche, andouille ! On va te régler ton compte au tennis !
" Mais il passe du coq à l'âne cette andouille ! Ses paroles n'ont aucun lien entre elles ! " se désola Astrid. " Comment ça, ils vont lui régler son compte au tennis ? Appelez plutôt les flics ! Ils m'ont cognée !"
Mais elle ne dit rien de tout cela à voix haute, gardant ces paroles pour elles. Elle avait déjà été trop loin la première fois, pas la peine de rajouter de l'huile sur le feu. Astrid soupira, fit quelques pas en arrière dans le but de s'esquiver, mais avant qu'elle n'ait pu faire un geste - arrêtez de la prendre de court, bon sang ! - on la ramena au milieu du cercle des belligérants.
– Et si vous perdez, on peut la frapper de nouveau ? Lança le blondinet d'un air narquois et sûr de lui.
À côté de lui, son coéquipier ne semblait pas en menait large. Son regard passait d'Astrid au nouveau venu, et la jeune fille pouvait déceler une pointe de regret dans ses yeux marrons. Il lui adressa une grimace, et murmura un mot qu'Astrid n'eut pas besoin d'entendre pour comprendre : "Pardon". La jeune fille hocha la tête.
– Faîtes ce que vous voulez ! Par contre, si vous perdez, vous devrez vous traîner à mes pieds et vous excuser pour l'avoir poussée sur moi !
– Elijah ! S'exclama une voix en provenance de la foule.
Astrid tourna la tête et aperçut un adolescent aux cheveux châtains tellement clairs qu'ils en tiraient presque sur le gris. Ses yeux marrons étaient fixés sur le-dit Elijah, qui relâcha sa prise sur le col du blond.
– Elijah, stop, ordonna-t-il d'une voix légèrement tremblante.
La jeune fille haussa un sourcil. Encore plus de nouveaux venus.
– Tch, grinça Elijah. T'arrive toujours pour casser le fun, Alex.
Alex se dirigea droit vers Astrid et se pencha à sa hauteur pour observer son oeil. Il lui attrapa le visage entre ses mains et tâta ses deux pommettes doucement, du bout des pouces.
– Hm, c'est gonflé, murmura-t-il sans se rendre compte de la teinte cramoisie que le visage d'Astrid venait de prendre.
Trop.
Proche.
Elle fit un bond en arrière et fut surprise de voir la jeune fille aux cheveux courts qu'elle avait perdu de vue arriver à sa rescousse.
– Stop, ordonna-t-elle à son tour tandis que les deux violents s'approchaient. Vous venez de frapper une joueuse, déclama-t-elle d'une voix sûre d'elle, mains sur les hanches. De quelle école vous venez ?
– Comme si on allait te répondre. T'es qui, d'abord ? répliqua le blond.
– Votre équipe participe-t-elle au tournoi de l'arrondissement ? Vous vous rendez compte que vos actions peuvent vous faire disqualifier ?
Les deux se regardèrent, semblant hésiter à répondre. Mais ils ne perdirent pas leur contenance pour autant, et le plus grand des deux cracha au sol rageusement.
– Toi, reprit l'adolescente en se tournant vers Astrid. Tu veux porter plainte ? On peut les faire exclure du tournoi, s'ils y participent.
Astrid fit rapidement le calcul dans sa tête. Elle n'avait ni les noms, ni l'école de ces imbéciles. S'ils décidaient de partir maintenant, elle ne pourrait rien faire contre eux. Sans compter que rien ne prouvait qu'ils faisaient également partie de l'équipe de leur école. Et si c'était le cas...
Elle leva les yeux et leur adressa un large sourire.
– Certainement pas. S'ils participent au tournoi de Manhattan, on s'y retrouvera et on règlera nos comptes sur le court.
Les yeux de la jeune fille s'écarquillèrent presque imperceptiblement mais elle eut la décence de ne pas laisser paraître sa surprise sur son visage.
– Problème réglé. Maintenant, dégagez !
Les deux joueurs échangèrent un regard et s'éloignèrent non sans une grimace dans sa direction. Le plus grand murmura trois mots.
" On se reverra ."
– J'espère bien, grogna tout doucement Astrid en les regardant s'éloigner.
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