Chapitre 11 - Irritation
– C'était du bon travail, vous deux ! Leur lança la coach en s'approchant d'Astrid et Percy. Je vois que vous avez réussi à mettre vos différents de côté.
Les deux haussèrent les épaules. Ils n'étaient pas vraiment satisfaits de leur match, et la coach sembla s'en rendre compte.
– Oooh ? Murmura-t-elle. Déçus d'avoir perdu ?
– Tch, grinça Percy.
– Ne vous inquiétez pas, vous aurez de nouveau l'occasion de les affronter.
Astrid grogna.
– Ne me dîtes pas que...
– Bien sûr que si ! La coupa Séléna. Vous ne croyiez tout de même pas que j'allais vous laisser vous en tirer comme ça ? Vous allez bien évidemment continuer de vous entraîner en double !
La jeune fille baissa la tête, se retenant très fort de protester, et se tourna vers Percy... avant de remarquer qu'il n'était déjà plus là. Ce petit... Assis sur un banc, une dizaine de mètres plus loin, il était en train de boire un fanta au citron. Quand est-ce que ce sale gamin s'était éclipsé ?
Elle se retourna vers sa coach... mais il n'y avait plus personne.
Pourquoi est-ce que tout le monde disparaissait autour d'elle ?!
Un petit rire la fit se tourner de nouveau, et elle se retrouva face Mona qui lui tentait une cannette de fanta, la jeune fille qui hurlait pendant leur match à ses côtés.
– Joli match. Vous avez gagné trois jeux face à la Golden Pair, c'est du bon boulot !
Astrid accepta la cannette afec un sourire et la vida d'un seul trait. Puis elle lança un regard interrogateur à la nouvelle venue, qui prit cela comme une invitation à se présenter.
– Je m'appelle Maki ! Tu es Astrid, c'est ça ? Tu connais bien Percy ? Qu'est-ce qu'il est mignon ! D'un côté, ils sont tous mignons... Allen parle un peu trop, mais Noah, c'est clairement mon style ! Il est tellement gentil ! Et doux ! Et adorable ! Blablata Maki en entortillant une mêche de cheveux blonds autour de son doigt dans un mouvement hypnotique.
Prise de court, Astrid ne sut que répondre. C'était quoi cette fille ? Elle était vraiment amie avec Mona ? Comment deux personnes aussi différentes pouvaient être amies ? Elle lui lança un regard interrogateur, auquel Moon répondit par un petit sourire contrit.
– Maki et moi sommes amies depuis l'enfance. Elle aide souvent au club de tennis, c'est pour ça qu'elle connaît déjà tous les joueurs...
– En vrai, Moon, toi aussi tu le trouves mignon, Percy, non ?! S'exclama la-dite Maki sans la moindre considération pour son amie. Tu crois que je ne vois pas la façon dont tu le regardes et dont tu soupires à chaque fois qu'il t'ignore ? Et puis...
Astrid se désintéressa de la conversation. Son coeur avait beau lui dire "concentre toi, concentre toiiiiiiiiiii" sa tête était en train de lui dire "aaaaaah trop d'informations d'un coup ON COUPE TOUT". Au bout de ce qui sembla à Astrid des heures mais n'était probablement que quelques minutes, Maki arriva finalement à bout de souffle et la fixa comme si elle attendait une réponse.
" ... Je fais quoi maintenant ?" grogna mentalement Astrid à son cerveau. Elle choisit finalement la voie facile et hocha la tête.
– Oui, tu as raison.
Mona lança à la rouquine un regard effaré, l'air de lui dire " Trahison !" et Astrid ne sut que lui répondre.
– Tu vois Moon, même Astrid est d'accord avec moi ! S'exclama victorieusement Maki. Toi et Percy vous feriez un très joli couple ! Maintenant, y a plus qu'à vous mettre ensemble !
Et elle attrapa Mona par la main, la tirant de force dans la direction de Percy tandis que la jeune fille tentait de la freiner en plantant ses talons dans le sol. Mona lança un regard implorant à Astrid mais cette dernière détourna les yeux.
Désolée Mona, mais c'était en dehors de ses capacités de te sauver la mise sur ce coup-là.
Astrid s'éloigna à petits pas sans oser regarder dans la direction de Mona, Maki et Percy. Pas question de se retrouver embrigadée dans leurs histoires ! Tant pis pour Mona : elle arriverait à la pardonner de l'avoir abandonnée.
Toujorus à reculons, Astrid s'arrêta net en percutant quelque chose avec son dos... ou plutôt quelqu'un. Il lui fallut quelques minutes avant de reconnaître Noah et de mettre le doigt sur son prénom. Il la fixait d'un regard doux, un sourire énigmatique sur le visage qui s'étira un peu plus quand il aperçut son coup d'oeil au groupe d'adolescents qu'Astrid avait abandonné derrière elle.
– Euh... commença-t-elle en se grattant le front comme pour cacher son embarras d'avoir été prise sur le fait.
– On adore tous Maki mais elle est... hm, comment dire ça..., murmura le jeune garçon. Très exubérante.
Astrid hocha la tête. Puis lâcha un cri de douleur en sentant un truc la percuter sur le côté du crâne. Elle fit un pas de côté et trébucha comme une idiote, tombant lamentablement au sol.
– Ouille ! S'exclama-t-elle.
Noah lui tendit une main secourable dont elle se saisit avec appréciation. Il avait les mains étonnament douces pour un joueur de tennis. Astrid ne s'attarda pas sur cette constatation, tentant de chercher le responsible de l'ovni qui venait de lui tomber dessus. Elle aperçut un peu plus loin un lycéen, une raquette à la main et un air coupable sur le visage, qui la fixait avec beaucoup d'hésitation.
Astrid attrapa la balle qui gisait au sol et se dirigea à grands pas vers le garçon qui l'avait attaquée, prête à l'engueuler et potentiellement le cogner.
Puis elle s'arrêta net à mi-chemin.
Inspire.
Expire.
Inspire.
Expire.
Elle pouvait entendre la voix de sa mère, qui la suppliait, implorante.
" Astrid, calme-toi ! Ce n'est pas si grave que ça ! Tu ne peux pas être en colère contre le monde entier jusqu'à la fin de ta vie..."
Inspire.
Expire.
Consciente des regards surpris qui la fixaient, elle termina sa course et tendit la balle à l'adolescent.
– Pa-pardon, balbutia-t-il.
La jeune fille se força à lui adresser un sourire, mais ses yeux ne suivirent pas le mouvement. Elle abandonna sa tentative de sourire, de peur de passer pour une psychopathe aux yeux des autres lycéens. Il n'y a rien de pire que quelqu'un qui vous fixe en souriant d'une façon froide. Astrid savait - pour se l'être entendre dire à plusieurs reprises - qu'elle ressemblait surtout à un loup qui retroussait ses babines, prête à bouffer son interlocuteur.
– C'est pas grave.
Puis elle fit demi-tour et alla s'enfermer dans les vestiaires des filles, sous le regard abasourdi de ses coéquipiers. Personne ne s'élança à sa poursuite et ça ne la surprit pas. Les seules filles qui pouvaient s'inquiéter pour elle étaient occupées et n'avaient pas assisté à sa perte de sang-froid, et c'était sans doute pour le mieux.
Mais pourtant la porte s'ouvrit dans un grincement doux, et Astrid fut surprise de se retrouver face à sa coach, qui la fixait d'un air hésitant. La vieille femme se décida finalement à rentrer dans la pièce et referma la porte derrière elle, avant de venir s'asseoir aux côtés de la jeune fille.
– Astrid...
– Je sais. Je suis calme.
Le silence dura quelques minutes avant que Séléna ne se décide à le briser. Elle posa une main réconfortante sur l'épaule de l'adolescente.
– Ta mère a refusé de me dire pourquoi tu avais fait le choix de venir étudier ici. Et je ne te forcerai pas à m'en parler. Nous avons cependant discuté de tes problèmes de gestion de colère...
– Je sais.
– Si jamais tu as besoin de quoi que ce soit, tu sais que ma porte t'es ouverte. Je dois bien ça à tes parents.
Astrid hocha la tête et se renferma dans son silence. Elle ne savait pas ce qu'il s'était passé entre ses parents et la coach, mais c'était franchement le cadet de ses soucis. Séléna resta quelques minutes de plus avant de comprendre que la jeune fille ne parlerait pas, et sortit de la pièce non sans un dernier regard vers elle.
Genoux remontées contre sa poitrine, Astrid passa une main énervée dans ses longs cheveux roux, démêlant ses boucles. Elle se massa doucement la tempe gauche à l'endroit où la balle l'avait frappée, et soupira longuement. Il fallait vraiment qu'elle arrive à gérer sa colère.
Elle le savait.
Mais en même temps, cette colère l'avait protégée pendant tellement longtemps que s'en débarasser maintenant... Ne serait-ce pas s'abandonner ?
Astrid ne se sentait pas prête à abandonner une telle partie d'elle.
La jeune fille n'eut pas le temps de réfléchir plus, car une dizaine d'adolescentes débarquèrent soudainement dans la pièce, remplissant le vestiaire de bavardages et de ricanements. L'entraînement devait être terminée. Elle se changea rapidement et rentra chez elle en évitant soigneusement Mona et Maki.
Elle n'était pas d'humeur à parler à qui que ce soit.
Le lendemain quand elle arriva à l'entraînement, personne ne vint l'embêter pour lui demander où elle était passée la veille, comme s'ils avaient tous passé l'accord tacite de la laisser tranquille. Elle ne dit rien mais les remercia intérieurement : s'il y avait bien quelque chose dont elle n'avait pas besoin, c'était qu'on vienne l'embêter et lui parler de choses qu'elle n'avait pas du tout envie d'aborder.
– Les titulaires, rassemblement ! Hurla Séléna à travers le terrain d'entraînement.
Astrid, perdue dans ses pensées, sursauta en sentant un tapotement sur son épaule. Noah la fixait de ses yeux bleus, son sourire mystérieux éternellement plaqué sur son visage.
– La coach nous appelle.
La jeune fille hocha la tête et le suivit vers le lieu de rassemblement.
– Les enfants, ça fait deux semaines que les cours ont commencé. Qui dit ça, dit également... Début des tournois ! Je vais laisser votre capitaine vous en parler plus en détail.
Adrian s'avança, et Astrid se fit la remarque que ce garçon avait la stature d'un adulte. Il dégageait une aura qui poussait tout ceux qui l'entouraient à l'écouter, et elle ne faisait pas exception à la règle.
– Comme ceux qui étaient là l'an dernier le savent, nous avons réussi à aller jusqu'au championnat National. Malheureusement, notre équipe n'était pas suffisamment puissante pour le remporter... Mais j'ai confiance en vous pour cette année. Notre but : devenir la meilleure équipe du pays !
Une vague de hurlements enthousiastes lui répondit, et Astrid ne put s'empêcher de crier également. Il avait certainement le don de galvaniser ses troupes !
– Je vous rappelle les étapes à vaincre pour arriver jusque là : tout d'abord, le tournoi de l'arrondissement !
Nouvelle vague de cris.
– Puis le tournoi New-Yorkai!
Les hurlements s'intensifièrent, et Astrid sentit sa gorge s'assécher. À ce rythme-là, elle serait aphone avant la fin de la journée.
– Ensuite, le tournoi Régional, puis enfin le tournoi National ! Et au bout... le titre de Champions Nationaux !
Ah, ça y est, Astrid ne pouvait plus crier. Elle ferma la bouche mais manifesta son enthousiasme en sautillant sur place.
L'entièreté des joueurs avait érupté en un hurlement unanime, et ils étaient visiblement prêts à en découdre. Même le reste du club, qui n'avait pourtant pas été formellement convié à cette réunion des titulaires, les entourait et criait, de plus en plus fort, tellement fort qu'Astrid était persuadée que tout le lycée devait les entendre. Non, tout le quartier !
– Les titulaires, je compte sur vous pour vous entraîner plus que jamais. Le tournoi de l'arrondissement commencera dans deux semaines.
Il descendit du petit marchepied sur lequel il était monté tandis que les hurlements se calmaient peu à peu et que les élèves retournaient à leurs occupations. Au bout d'une petite dizaine de minutes, il ne restait plus sur le court que les huit titulaires, Silas, Maki, Mona et sa grand-mère.
– Il y a cinq arrondissements, c'est ça ? Il y a combien de lycées à Manhattan ? Murmura Astrid à Mona.
– Environ cent-cinquante, je dirai. Il y a quasiment six-cent lycées dans tout New-York, par contre. Le tournoi des Arrondissements est celui qui regroupe le plus d'équipes. Pour cette raison, ils sont obligés de faire les matchs à pleins d'endoits différents, ils ne peuvent de toute manière pas nous regrouper tous au même endroit.
– Ah mais oui ! S'exclama Allen en saississant Astrid par le bras et en la secouant dans tous les sens. Il faut expliquer le fonctionnement à Astrid et Percy ! Alors tu vois, ils sélectionnent soixante-quatre équipes dans chaque arrondissement et...
– Allen, lâche-la, ordonna Isaac.
Immédiatement le rouquin relâcha sa prise sur le bras de l'adolescente, qui se massa exagérement la peau. Il reprit immédiatement son explication avec un débit de parole... Déroutant.
– Donc ils sélectionnent soixante-quatre équipes dans chaque arrondissement. Pour ça c'est simple : chaque équipe affronte deux autres équipes, avec cinq matchs. Il y a deux doubles, et trois matchs en simple ! Il faut gagner trois de ces cinq matchs pour vaincre l'équipe adverse. Les équipes qui ont battu les deux équipes qui leur font face sont automatiquement sélectionnées. Puis ensuite, ils départagent le reste des équipes en fonction du nombres de matchs gagnés et du score à chaque match. C'est la raison pour laquelle, même si on gagne les trois premiers matchs, il faut également jouer les deux matchs restants. Une fois que ces soixante-quatre équipes sont sélectionnées, ont fait un tournoi classique. Si victoire, on avance au rang suivant. On réduit ainsi le nombre d'équipes de soixante-quatre à trente-deux, puis de trente-deux à seize, puis de seize à huit, puis de huit à quatre, puis les demi-finales et ensuite les finales ! Les quatres équipes en demi-finales sont qualifiées pour le tournoi New-Yorkais. Vous avez compris ?
Percy et Astrid échangèrent un regard. La jeune fille ouvrit la bouche, mais la referma aussitôt. Avouer qu'elle n'avait saisit que la moitié de ce qu'avait expliqué son aîné c'était sans aucun doute s'exposer au risque qu'il recommence son explication abracadabrante depuis le début.
Heureusement pour eux, Noah sembla comprendre leur détresse et réexpliqua de sa voix douce.
– On va jouer contre deux équipes. Si on gagne contre ces deux équipes, on fait partie de soixante-quatre équipes sélectionnés. Ces soixante-quatre équipes s'affrontent ensuite comme dans n'importe quel tournoi : le gagnant avance au round suivant, le perdant est éliminé.
Astrid lui adressa un sourire reconnaissant, et le garçon laissa échapper un petit rire cristallin tandis qu'Allen croisait les bras, faisant mine de bouder.
– Noah ! Tu me voles toujours la vedette !
La rouquine se sentit un peu mal pour Allen, qui était toujours si heureux d'aider et d'expliquer les choses.
– Ne t'inquiète pas Allen, tu restes mon préféré ! Lança-t-elle à moitié ironiquement.
Mais le sarcasme sembla passer complètement au-dessus de la tête d'Allen, qui essuya une larme imaginèrent et la serra fort dans ses bras.
– C'est vrai ?! Merci ! Na !
Il tira la langue à Noah, qui ne se départit pas pour autant de son éternel sourire. Il en fallait plus que ça pour le perturber.
– Allen... Lâche-moi...
– Oups, pardon !
C'était pas possible ! Ce garçon allait la tuer avant la fin de l'année à ce rythme-là !
Une voix tonitruante les sortit de leur discussion.
– Dis donc, vous avez pas entendu votre capitaine ? Hurla Séléna. DIX TOURS DE TERRAIN ! AU BOULOT !
– Chef, oui Chef ! Crièrent d'une même voix les titulaires en se mettant à courir comme si leur vie en dépendait.
Ce qui était probablement le cas, au vu du large sourire de Silas qui leur faisait coucou, un verre de liquide rouge et fumant à la main.
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