59 - Noces (1ère partie)

Nao examina son reflet dans le grand miroir en pied qui se trouvait dans le petit salon attenant à la salle de bal de l'hôtel.

Elle tourna sur elle-même et sa robe blanche suivit le mouvement, balayant le sol d'un mouvement souple.

Son sourire s'agrandit.

Elle était bien consciente qu'elle souriait un peu trop largement depuis quelque temps, mais elle n'arrivait pas à s'en empêcher. Depuis que Kakucho l'avait demandée en mariage, presque un mois plus tôt, elle avait eu l'impression de flotter sur un petit nuage.

– Vous êtes magnifique mademoiselle ! Dit Miki derrière elle.

Nao se retourna. Elle n'arrivait pas à croire à son bonheur. Aujourd'hui, elle allait se marier.

– Je me marie Miki... Dit-elle la gorge serrée. Je me marie et, ce soir, je serai madame Hitto !

– Ce nom vous va très bien, lui assura la secrétaire.

Elle serrait ses mains l'une contre l'autre. La jeune femme était particulièrement émue. Elle avait assisté à tous les préparatifs, depuis le moment où Izana et Kakucho avaient fait irruption dans le bureau de Nao, jusqu'à la pose des derniers bouquets sur les tables un peu plus tôt. Le gang manquait cruellement de présence féminine et Nao avait naturellement partagé ces instants avec la seule femme de son entourage.

Elle revint vers le miroir et contempla à nouveau son reflet, comme si tout cela n'était qu'un rêve.

Est-ce que c'est permis d'être aussi heureuse ?

Aussitôt après sa demande, Kaku l'avait emmenée dans une des bijouteries les plus chères de la capitale.

– Tu es sûr ? Avait-elle demandé en poussant la porte avec hésitation.

Il avait glissé un bras autour de sa taille.

– Rien n'est trop beau pour toi, avait-il répondu.

Chacune de ces phrases qu'il lui susurrait depuis la veille lui faisait battre le cœur à la chamade. Elle avait l'impression qu'à ce rythme, il allait finir par jaillir de sa poitrine.

Tous les deux avaient fait le tour des vitrines et quand Kakucho avait vu que le regard de Nao s'était arrêté sur un anneau en or blanc décoré d'un diamant taillé en forme de cœur, il avait aussitôt demandé à la vendeuse de le leur montrer.

Nao leva sa main et contempla son annulaire.

Depuis ce jour, la bague n'avait pas quitté son doigt et l'anneau lui semblait aussi chaud que s'il était doué de vie.

Kakucho aimait embrasser le bijou quand ils étaient seuls.

– Ça veut dire que tu vas devenir ma femme, répétait-il sans cesse.

Ces mots faisaient à chaque fois tressauter le cœur de Nao.

Sa femme... Mari et femme...

Tous les deux avaient convenu de s'installer ensemble dans une des suites du Ritz Carlton le lendemain de leur mariage. 

L'hôtel, situé entre le quarantième et le quarante-cinquième étage de la Tokyo Midtown Tower, était devenu la propriété du Tenjiku grâce aux efforts conjugués de Kisaki, Koko et Nao. Désormais, le clan disposait de sa propre base opérationnelle, mais aussi de logements sécurisés pour ses cadres.

Le choix de la suite avait posé plus de difficultés.

– Et celle-ci ? Avait demandé Kakucho en montrant à Nao l'appartement voisin de celui de Izana sur le plan que leur avait donné Koko. Il est grand, bien orienté... Il sera très bien non ?

Nao avait hésité.

– Oui... Avait-elle répondu à contrecœur.

Kakucho lui avait embrassé la tempe.

– Si tu as encore peur que Izana nous entende, lui avait-il murmuré taquin, Koko m'a assuré que les logements étaient très bien insonorisés.

Nao n'avait pas relevé la plaisanterie et son front était resté sombre.

Kakucho ne comprenait pas où était le problème.

– En fait, lui avait-elle finalement avoué, ce qui me gêne c'est...

Elle lui avait montré du doigt la suite qui se trouvait de l'autre côté de celle de Izana. Celle qui serait occupée par Mikey.

Kakucho avait compris et tout amusement avait déserté ses traits.

Il aurait dû y penser. Après tout, c'est lui qui lui avait recommandé de suivre son instinct quand il lui disait de rester loin de quelqu'un.

– D'accord, avait-il dit en repliant le plan pour le retourner sans insister. Alors que dis-tu de celle-ci ?

Il lui avait désigné un appartement de l'étage supérieur, presque au-dessus du précédent.

– Tu es sûre ? Avait-elle dit, étonnée. Tu ne seras plus à côté de chez Izana...

Kakucho avait haussé les épaules.

– Ça n'est pas un problème, avait-il dit. Il n'y a qu'un étage. Je peux y être en un instant s'il a besoin de moi. Et si ça peut te rassurer, alors ça me convient.

Nao avait senti son cœur enfler dans sa poitrine. Elle avait pris ses doigts pour les serrer entre les siens.

– Merci Kaku... Avait-elle soufflé.

– Je te l'ai dit, lui avait-il répondu, je ferai tout pour te rendre heureuse.

Un coup résonna à la porte du petit salon et Miki alla ouvrir. Elle recula aussitôt d'un pas en reconnaissant Izana.

Les cadres du clan lui faisaient toujours un peu peur.

Elle le salua rapidement et s'éclipsa dans le couloir pour les laisser seuls.

Izana vint vers Nao. Il lui prit les mains et recula d'un pas pour l'admirer.

– Tu es très belle, lui dit-il, je suis jaloux, Kakucho a de la chance.

– Tu es très élégant toi aussi, dit-elle en riant.

Pour l'occasion, Izana avait revêtu un costume et une cravate. Ça ne lui arrivait pas souvent. Comme son frère, il préférait généralement les vêtements amples dans lesquels il se sentait à l'aise.

– Tout le monde est prêt, lui dit-il. Tu te sens comment ?

Elle inspira.

– Nerveuse, reconnut-elle. Mais heureuse.

Il lui retourna son sourire.

– C'est le principal.

Il la regarda, puis il lui demanda, taquin :

– Tu es sûre de toi ? Dit-il. Tu peux encore changer d'avis, je suis le premier à t'avoir demandé ta main après tout !

Elle rit.

– Absolument certaine ! Répondit-elle.

Elle regarda à nouveau cette fille, dans le miroir, qui affichait un sourire béat et dans laquelle Nao peinait à se reconnaître.

– Tu sais, dit-elle, je crois que je n'ai jamais été aussi heureuse. Je veux dire... depuis que mes parents sont morts, je me dis quelque part... que je n'ai pas le droit au bonheur. Mais aujourd'hui...

Nao se sentit sur le point de pleurer. Elle n'avait plus évoqué la mort de son père et de sa mère depuis longtemps et leur souvenir lui serra le cœur.

Maman, j'aimerais que tu sois là pour me voir...

Debout derrière son épaule, Izana sourit.

– Je sais, dit-il. Je comprends mieux que tu le penses.

Il avait raison. Tous les deux – tous les trois même avec Kakucho – partageaient cette douleur, celle d'être seul au monde.

Izana fit un pas en arrière et il lui tendit son bras.

– Allons-y, dit-il. Ton fiancé t'attend !

Nao se recomposa une expression et elle le rejoignit.

– Oui ! Allons-y ! Dit-elle en glissant son bras sous le sien.

Tandis qu'ils atteignaient la porte, Izana murmura :

– Prends soin de lui, d'accord ? N'oublie pas notre marché.

– Je ne l'oublierai pas, répondit-elle sur le même ton. Comme je n'oublierai jamais à quel point tu es important pour lui...

Izana lui jeta un regard surpris et Nao ajouta :

– Alors toi aussi, veille sur lui quand je ne suis pas là, ok ?

Il y avait une note d'inquiétude dans sa voix.

Nao n'avait pas oublié dans quel monde ils vivaient.

– Pff ! Rétorqua Izana. Pour qui tu me prends ? Évidemment que je prends soin de mes serviteurs ! Tu crois que ça se trouve si facilement un domestique comme Kakucho ?

Ils sortirent dans le couloir et Miki se redressa en les voyant.

Izana poursuivit.

– Sans compter le temps qu'il m'a fallu pour le dresser correctement ! Dit-il. Non, vraiment, je ne l'échange pour rien au monde, alors considère que c'est juste un prêt !

Nao ne put se retenir de rire plus longtemps.

– Je le lui répéterai, tu le sais ? Dit-elle.

– Il est déjà au courant, rétorqua-t-il. Qu'est-ce que tu crois !




Parvenue devant la double porte qui menait à la salle de bal que le clan avait réservé pour l'occasion, Nao rajusta rapidement sa robe.

– Comment je suis ? Demanda-t-elle, anxieuse.

Elle avait la gorge serrée. Elle n'imaginait pas que ce serait aussi impressionnant.

Izana n'avait pas lâché son bras.

– Parfaite, dit-il, ne t'en fais pas.

Les premières notes de musique retentirent et Miki vint leur ouvrir les portes.

De l'autre côté, Kakucho était debout devant l'autel – une table du restaurant recouverte d'une nappe blanche sur laquelle la secrétaire avait fait déposer un imposant bouquet de fleurs. 

Derrière lui, un pasteur, un homme en costume noir, tenait une bible à la main.

Ni Nao ni Kakucho n'étaient chrétiens, mais le pasteur leur semblait aller de pair avec la cérémonie et la décoration de la salle.

Comme bien souvent au Japon, on choisissait l'office en fonction de ses goûts et non de ses croyances.

Nao raffermit sa prise sur le bras de Izana, le cœur battant.

Ils avaient décidé que ce serait lui qui la mènerait à l'autel. Il était ce qui se rapprochait le plus d'un grand frère pour eux.

– Izana, souffla-t-elle nerveuse, ne me lâche pas ou bien je vais tomber.

Il posa sa main sur son bras.

– Ne t'inquiète pas, lui dit-il. Je serai toujours là pour vous deux.

Nao leva les yeux vers lui, surprise par sa remarque, mais Izana gardait les yeux fixés au loin.

Elle n'avait pas souvenir de l'avoir déjà entendu dire ce genre de choses.

Il n'y a pas que moi qui suis émue, comprit-elle.

Elle sourit.

– Et moi aussi je serai toujours là pour vous deux.

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