42 - Soirée en amoureux

L'instant d'après, tous les deux sortirent main dans la main pour aller manger dehors.

La nuit était chaude et, même en ville, les cigales commençaient à faire entendre leurs stridulations dans le moindre bosquet d'arbres.

– Dis, reprit Nao, la main de Kakucho serrée dans la sienne. Est-ce que tu penses que je ne me fais pas assez jolie ?

Les pensées qui l'avaient assaillie un peu plus tôt, quand elle était seule dans son bureau, étaient revenues la hanter.

Et si jamais un jour je ne lui plais plus, ou bien que je fais quelque chose qu'il ne faut pas, est-ce qu'il me le dira ?

L'idée que Kakucho ait pu garder ses appréhensions pour lui pendant des mois sans qu'elle s'en aperçoive l'effrayait un peu.

Kaku baissa les yeux vers elle, mais Nao garda le regard sur le trottoir.

Il lâcha sa main pour passer son bras autour de sa taille.

– Tu es parfaite comme tu es, lui dit-il. Tellement parfaite que je me demande constamment ce qu'une fille aussi jolie et intelligente fait avec quelqu'un comme moi...

Surprise par sa tirade, Nao releva les yeux, les joues rouges.

Elle sourit.

– Idiot, dit-elle. Je ne suis pas parfaite, j'ai plein de défauts.

– Hmm, c'est vrai, tu es plus maligne que nous tous réunis ou presque, dit-il. Sans toi le Toman – ou le Tenjiku – ne serait pas ce qu'il est... tu ne sais pas te battre et pourtant tu as réussi à te faire une place au sein d'un gang...

Nao leva la main et regarda son poing.

– C'est vrai que je ne sais pas me battre, remarqua-t-elle.

Kakucho saisit ses doigts, il les amena à ses lèvres et les embrassa.

– Ça, dit-il, c'est mon rôle : prendre soin de toi.

Le cœur de Nao fit une embardée dans sa poitrine et elle sentit son visage chauffer.

– Est-ce que je peux te demander quelque chose ? Reprit-elle un instant plus tard. La prochaine fois que quelque chose t'ennuie, dis-le-moi, d'accord ? Peu importe ce que c'est. Je n'aime pas quand on se fait des secrets comme ça...

Kakucho resserra sa prise sur sa taille.

– Tu as raison, dit-il. C'est vrai que j'aurais dû t'en parler, après tout, c'est naturel.

– Oui, répondit-elle.

Elle était rassurée de l'avoir retrouvé après toutes ces semaines d'inquiétude.




À la fin du repas, tous les deux prirent le chemin de l'appartement de Nao.

Au bout de quelques pas, elle hésita puis lui demanda :

– Tu avais vraiment peur que ça se passe mal ?

Cette idée tournait dans sa tête depuis que Kakucho lui avait avoué la raison de son comportement de ces derniers mois.

– C'est juste... que je n'ai aucune expérience, reconnut-il à mi-voix, et que j'avais peur de me montrer maladroit. Je ne savais pas vers qui me tourner pour avoir des conseils.

Nao leva les yeux vers lui, surprise.

– Ça veut dire que tu en as parlé à quelqu'un...?

Elle sentit aussitôt une bouffée de gêne lui empourprer le visage. Pendant une seconde, l'image de Izana s'imposa à elle et elle ramena les yeux sur le trottoir, essayant d'imaginer la discussion que les deux garçons avaient pu avoir.

– Oui, avec Mucho, lui dit-il.

Nao ne s'attendait pas à cette réponse.

Le visage de Izana s'effaça pour laisser la place à celle de l'homme taciturne qu'elle ne connaissait pas bien et, étrangement, cette idée la rassura. Mucho ne semblait pas être du genre à colporter ce genre de conversations.

– Ah... Dit-elle. Et... il t'a donné de bons conseils ?

Cet échange la gênait et l'intéressait de plus en plus, elle devait l'admettre. Elle aussi elle avait essayé d'imaginer ce que serait leur première fois. Mais chaque fois qu'elle se prêtait au jeu, elle était tiraillée entre deux sentiments.

D'un côté, d'après tout ce qu'elle avait pu lire dans des magazines, les premières fois pour les femmes étaient au mieux désagréables, au pire douloureuses. D'un autre côté, les rares fois où elle et Kakucho avaient flirté de manière un peu poussée, tout ce que Nao avait ressenti, c'était de l'impatience et du plaisir.

Elle ne savait plus où elle en était.

– Oui, répondit Kakucho. Je suis vraiment content d'en avoir parlé avec lui. Il m'a expliqué plein de choses et j'y vois plus clair maintenant. C'est vraiment un type bien !

Puis il conclut en se penchant vers elle.

– Si un jour tu as envie qu'on essaie, je suis sûr que ça se passera bien !

Le visage de Nao s'empourpra à un tel point qu'on aurait cru qu'elle allait prendre feu et Kakucho réalisa subitement ce qu'il venait de dire.

Il rougit à son tour et se rattrapa.

– Enfin... je veux dire...

Un instant tous les deux restèrent silencieux, avant d'éclater de rire sans se concerter.

– Tu as raison, c'est embarrassant, finit-elle par dire.

– Oui.

– Bon ce soir, préféra-t-elle changer de sujet, tu préfères qu'on se fasse un film ou qu'on aille se balader ?

Les rues de Tokyo s'étaient remplies avec les beaux jours et les devantures des boutiques s'étalaient jusque sur le trottoir dans les avenues piétonnes.

– Ça te dit une glace en dessert ? Répondit-il en lui montrant le glacier au bout de la rue.

– Bonne idée !




Lorsque tous les deux rejoignirent l'appartement de Nao à une heure avancée de la nuit, la gêne et le malentendu qui avait constitué le début de leur soirée avaient disparu.

– ... et il m'a dit, lui raconta Nao arrivée au pied de la résidence. Mais mademoiselle, à votre âge, comment pouvez-vous savoir ça ? C'est là que je lui ai sorti l'article de loi et tous ses amendements dans l'ordre ! Il devenait un peu plus blanc à chaque seconde !

À côté d'elle, sa main dans la sienne, Kakucho riait avec elle.

– Je ne sais pas comment tu fais pour supporter tous ces vieux prétentieux ! Lui dit-il. À ta place, j'en aurais déjà frappé un !

– Mais ça n'est pas l'envie qui m'en manque !

Elle mima un coup de poing dans le vide et Kakucho lui attrapa le poignet. Il la ramena vers lui.

– Ça serait dommage d'abîmer de si jolies petites mains en fait, dit-il. Appelle-moi plutôt, je me ferais un plaisir de leur apprendre la politesse pour toi.

Nao éclata de rire et elle se hissa sur la pointe des pieds pour poser un baiser sur ses lèvres.

Puis elle sortit la clé de sa poche et elle l'attira derrière elle.

– Viens ! Dit-elle. Tu as bien encore un peu de temps avant de rentrer !

Une fois dans l'appartement, elle se débarrassa de ses chaussures et alla ouvrir la fenêtre pour laisser entrer la brise fraîche de la soirée.

Elle huma le fond de l'air.

– J'adore l'odeur du printemps ! Dit-elle.

Kakucho la rejoignit et il passa ses bras autour de sa taille.

– Tu aimes l'odeur de la pâtisserie en bas de la rue, corrigea-t-il.

Elle leva les yeux par-dessus son épaule et sourit.

– Oui c'est vrai ! Reconnut-elle.

Les lèvres de Kakucho vinrent trouver les siennes et leur baiser devint rapidement plus intense que le précédent.

Ils s'écartèrent une seconde, se regardèrent, puis ils reprirent leur baiser là où ils l'avaient interrompu et leurs langues se cherchèrent pour entamer une valse endiablée.

Dans la poitrine de Nao, son cœur peinait à suivre le mouvement et chaque cellule de son corps semblait pris de fourmillements agréables.

C'est lui que j'aime... C'est cet homme, je ferai n'importe quoi pour lui...

Une pensée lui traversa l'esprit et lorsque Kakucho se redressa à nouveau, les joues rouges et les lèvres parcourues de picotements, Nao lui demanda :

– Et si tu restais ce soir... ?

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