32 - Toi et moi

Izana apparut dans l'entrée de l'appartement quand Nao et Kakucho entrèrent.

– Vous voilà ! Dit-il. Kaku j'ai surveillé le riz comme tu m'as dit !

Nao retira ses chaussures et elle vint lui donner la boîte de macarons qu'elle avait apportée. 

Elle s'inclina rapidement.

– Merci de m'avoir invitée Izana, dit-elle.

Elle hésita, puis elle ajouta :

– Et désolée pour hier.

Izana examina la boîte de macarons avant de relever la tête sans comprendre. Kakucho les rejoignit.

– Nao pensait que tu lui en voulais après la façon dont elle t'a parlé pendant la réunion, expliqua-t-il.

Nao lui attrapa la manche, cramoisie.

– Kakucho ! Souffla-t-elle pour le faire taire.

Izana les regardait tour à tour.

– La façon dont tu m'as parlé ? Répéta-t-il, l'air surpris.

Il n'avait pas l'air de s'en souvenir.

– Oui, tu sais, reprit Kaku, quand elle t'a dit d'arrêter de la prendre pour ta servante, tout ça...

Kakucho ! Dit Nao plus fort cette fois.

– Ah ça ! Dit Izana.

Il éclata de rire.

– C'est rien ! Dit-il. On est tous à cran, moi le premier !

Il repartit vers l'appartement, la boîte de macarons à la main, et Kakucho le suivit.

– Tu vois ? Dit-il à Nao en passant. Je t'avais dit qu'il n'avait pas remarqué.

Après une seconde, elle leur emboîta le pas et elle s'arrêta sur le seuil du salon.

L'appartement était petit, mais les deux garçons y avaient clairement déposé leurs marques. Les haltères et les poids de Kakucho étaient alignés dans un coin, à côté d'un tapis de sport roulé contre le mur. Un aquarium trônait sur une commode et trois poissons y évoluaient lentement, éclairés par une lampe. Près de la fenêtre qui donnait sur un petit balcon, la guitare de Izana était appuyée sur son support et plusieurs cahiers, sans doute des partitions, étaient empilés sur le sol.

Le reste était plutôt sobre, mais propre et bien agencé. On devinait les deux chambres qui se faisaient face de part et d'autre du salon. La troisième porte devait mener à la salle de bain.

Une table était dressée contre le comptoir de la cuisine et un canapé qui avait connu des jours meilleurs occupait le milieu de la pièce devant une table basse à peine séparée de la télévision par un étroit passage.

Kakucho rejoignit la cuisine et Izana s'installa en tailleur sur le canapé. 

Il ouvrit aussitôt la boîte de macarons d'un air gourmand et Kakucho jaillit de derrière le comptoir, un tablier de cuisine à la main.

– Pose ces macarons tout de suite Izana ! S'écria-t-il. C'est pour le dessert !

Izana tourna les yeux vers lui. Puis il piocha dans la boîte et envoya un macaron dans sa bouche avec une expression de défi.

Kakucho saisit une louche, mais avant qu'il ait fait un pas, Izana passa souplement par dessus le dossier du canapé pour se mettre hors de portée et il avala deux nouveaux macarons.

– Izana donne-moi cette boîte !

– Si tu la veux, viens la chercher, lui rétorqua Izana.

Nao les regarda se chamailler. Kakucho essaya de confisquer les sucreries à Izana, sans succès, ce dernier était beaucoup trop rapide et agile pour lui.

En les regardant, elle avait l'impression d'être de retour à l'époque de l'orphelinat, quand tous les trois jouaient ensemble. Il n'y avait plus de chef de gang, plus de magouilles juridiques, plus de meurtres à planifier.

– Nao ?

Avant qu'elle s'en rende compte, les larmes s'étaient mises à couler sur ses joues.

Kakucho abandonna Izana et il revint vers elle, inquiet.

– Nao, ça va ?

Elle hocha la tête et s'essuya maladroitement les yeux avec sa manche.

– Vous m'avez tellement manqué... Dit-elle.




Assise sur le canapé, Nao reprenait ses esprits tandis que Kakucho la surveillait depuis la cuisine.

– Tout ça, dit Izana, c'est à cause des mauvaises idées de Kaku...

Il continuait à engloutir les macarons les uns derrière les autres sans se soucier des regards noirs que Kakucho lui lançait.

– Je le lui avais dit, poursuivit Izana, mais il ne m'a pas écouté.

Il hésita, puis il tendit la boîte en direction de Nao.

– Tu en veux ?

– Izana ! Brailla Kakucho. Arrête ça ! Je ne cuisine pas pour rien moi !

Izana ramena la boîte vers lui.

– De toute façon, dit-il en examinant le fond, il n'y en a plus.

Nao éclata de rire. Elle n'aurait même pas su dire ce qui était le plus drôle entre la mine désabusée de Kakucho et l'air de parfaite innocence de Izana.

– Tu as intérêt à ne pas me laisser la moitié de ton assiette comme la dernière fois, le prévint Kakucho.

– Ça, c'est parce que tu avais fait du natto, répondit Izana, et tu sais que je déteste le natto.

(NDA : natto, graines de soja fermentées)

– C'est très bon pour la santé ! Lui objecta Kakucho.

– Impossible, dit Izana. Un truc avec un goût aussi ignoble, ça ne peut pas être bon pour la santé, pas vrai Nao ?

Il se tourna vers elle pour quêter son approbation, mais elle était toujours occupée à rire. Cela ne gêna pas Izana qui revint vers Kakucho et lâcha avec la plus absolue mauvaise foi :

– Tu vois ? Elle est d'accord avec moi. D'ailleurs tu nous prépares quoi ce soir ?




Tous les trois passèrent à table quelques minutes plus tard et ce furent comme s'ils ne s'étaient jamais quittés. La discussion passait d'un sujet à l'autre sans temps mort et Nao se surprit à rire aux éclats plus d'une fois.

Kakucho avait cuisiné un donburi katsudon pour le plus grand bonheur de Izana qui semblait avoir des goûts bien arrêtés sur ce qu'il acceptait de manger ou non.

(NDA : donburi katsudon, bol de riz garni d'une escalope de porc pané)

– Tu ne peux pas demander à un Roi de manger n'importe quoi, dit-il.

– Dans ce cas, tu devrais apprendre à cuisiner ! Répondit Kakucho.

Il avait beau être le serviteur proclamé de Izana, cela ne voulait apparemment pas dire qu'il se laissait faire.

– Tu ne cuisines pas du tout ? Demanda Nao à Izana.

– Ne parle pas de malheur, répondit Kakucho. La dernière fois qu'il a essayé, il a fait frire des chips à la poêle !

Nao écarquilla des yeux stupéfaits.

– Mais... pourquoi ? Dit-elle.

– Elles s'étaient ramollies au fond du paquet, lui dit Izana comme s'il s'agissait d'une évidence.

– Et ça a fonctionné ? Demanda-t-elle, intriguée.

La cuisine n'avait jamais été son fort non plus.

– Pas du tout ! S'exclama Kakucho. Il a déclenché le détecteur de fumée de l'étage et l'appartement a senti le brûlé pendant deux semaines !

– Moi, je trouve que ça sentait les chips... Dit Izana. J'aimais bien, je devrais peut-être le refaire.

Il semblait y songer sérieusement et Kakucho se décomposa. À son tour il voulut prendre Nao à témoin, mais cette dernière était une fois de plus occupée à rire, au point qu'elle en avait du mal à garder le morceau de viande qu'elle venait de mettre dans la bouche.

Elle réussit à avaler malgré son fou rire et but une gorgée d'eau pour ne pas s'étouffer.

– En tout cas, reprit Izana, tu peux me remercier Nao, Kakucho est un parfait homme de maison maintenant. Il est bon à marier, tu peux y aller ! Tout ça grâce à moi !

Kakucho et Nao s'empourprèrent de concert, mais rien ne semblait pouvoir arrêter Izana.

– Je devrais peut-être lancer le brevet.... Dit-il, pensif. Un truc du style, je transforme n'importe quel gars en fée du logis en moins de six mois !

– Sauf que Kakucho n'est pas n'importe quel gars, lui fit remarquer Nao.

Izana tourna les yeux vers elle.

– Hmm, c'est vrai, reconnut-il.

– Et puis si tu es si doué, lui asséna Kakucho, commence par appliquer tes talents sur toi-même !




Nao alla prendre l'air sur le balcon après le repas. 

En guise de dessert, ils avaient dû se contenter de yaourts puisque Izana avait mangé tous les macarons qu'elle avait apportés. Mais ce dernier avait tout de même réussi l'exploit d'avoir l'air outré de devoir se passer de douceurs.

– Il n'y a vraiment rien d'autre Kaku ? S'était-il indigné.

Le regard que lui avait lancé Kakucho se passait de commentaire.

Ils n'ont pas changé, pouffa Nao, ce sont toujours des gamins.

La porte coulissante s'ouvrit dans son dos et Izana la rejoignit.

– Tu n'as pas froid ? Lui demanda-t-il.

Elle secoua la tête.

– Non, il fait bon et puis c'est bientôt l'été.

Il s'accouda à la rambarde à côté d'elle.

Un instant, tous les deux demeurèrent silencieux, puis Izana reprit dans un souffle.

– Prends soin de lui... Dit-il à mi-voix.

Nao le regarda, surprise, et il ajouta avant qu'elle ait pu répondre :

– Il est... la personne à laquelle je tiens le plus au monde maintenant.

Elle était étonnée. Cela ne ressemblait pas à Izana de faire ce genre de confessions.

Elle se pencha et posa le menton sur ses bras.

– Moi aussi... dit-elle au bout d'un moment. Moi aussi, il est la personne à laquelle je tiens le plus au monde.

C'était la vérité. Il n'y avait personne à qui elle tienne plus en cet instant que Kakucho Hitto.

Finalement elle se redressa.

– Tu sais quoi ? Dit-elle. Prenons soin de lui ensemble, toi et moi...

Izana parut étonné et elle lui tendit la main.

– Tous les deux, faisons en sorte qu'il ne lui arrive rien, d'accord ?

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